Saisie-attribution : décision du 30 mars 2023 Cour d’appel d’Orléans RG n° 18/01364

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Saisie-attribution : décision du 30 mars 2023 Cour d’appel d’Orléans RG n° 18/01364

30 mars 2023
Cour d’appel d’Orléans
RG n°
18/01364

C O U R D ‘ A P P E L D ‘ O R L É A N S

CHAMBRE SOCIALE – A –

Section 1

PRUD’HOMMES

Exp +GROSSES le 30 MARS 2023 à

la SELARL WALTER & GARANCE AVOCATS

AD

ARRÊT du : 30 MARS 2023

MINUTE N° : – 23

N° RG 18/01364 – N° Portalis DBVN-V-B7C-FWCC

DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE TOURS en date du 19 Mars 2018 – Section : INDUSTRIE

APPELANTE :

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA ILE DE FRANCE EST Association déclarée représentée par son Directeur, Monsieur [X] [S], domicilié au CGEA AGS D’ILE DE FRANCE EST

[Adresse 1]

[Localité 6]

représentée par Me Alexis LEPAGE de la SELARL WALTER & GARANCE AVOCATS, avocat au barreau de TOURS

ET

INTIMÉS :

Monsieur [Z] [O]

né le 16 Août 1969 à ALGERIE

[Adresse 3]

[Localité 5]

représenté par M. [E] [P] (Délégué syndical ouvrier)

Maître [R] [G] Mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SARL ER, société ayant eu son siège social à [Adresse 2]

[Adresse 4]

[Localité 7]

non comparant

Ordonnance de clôture : 7 DECEMBRE 2022

Audience publique du 05 Janvier 2023 tenue par M. Alexandre DAVID, Président de chambre, et ce, en l’absence d’opposition des parties, assisté lors des débats de Mme Fanny ANDREJEWSKI-PICARD, Greffier.

Après délibéré au cours duquel M. Alexandre DAVID, Président de chambre a rendu compte des débats à la Cour composée de :

Monsieur Alexandre DAVID, président de chambre, président de la collégialité,

Madame Laurence DUVALLET, présidente de chambre,

Madame Florence CHOUVIN-GALLIARD, conseiller

Puis le 30 Mars 2023, Monsieur Alexandre DAVID, président de Chambre, assisté de Mme Fanny ANDREJEWSKI-PICARD, Greffier a rendu l’arrêt par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

La SARL E.R., qui employait moins de 11 salariés, et dont le siège social était à [Localité 8], en Seine-Saint-Denis, a recruté M. [Z] [O], de nationalité algérienne, selon contrat à durée indéterminée du 1er avril 2014, en qualité d’étancheur, au niveau 1 position 1 et à l’indice hiérarchique 150 de la convention collective du bâtiment ouvriers, pour un salaire mensuel de 2300 € et un horaire mensuel de 151,67 heures.

Le 13 mai 2015, le salarié a saisi le conseil de prud’hommes de Tours aux fins d’obtenir le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail et la condamnation de la société à lui payer diverses sommes.

Il soutenait n’avoir jamais reçu de règlement sur son compte bancaire mais seulement, au total, 4000 € en espèces, durant la relation de travail, alors qu’il avait ‘uvré à temps plein jusqu’au samedi 7 février 2015, jour où l’employeur lui avait prescrit de rester chez lui, dans l’attente d’instructions, car il n’avait plus de chantier à lui confier.

Il soulignait avoir dû effectuer de très nombreuses heures supplémentaires, qui n’ont jamais été mentionnées sur ses bulletins de paie, et qu’il avait dû réclamer oralement, en vain, le paiement de ses salaires, avant d’adresser à son employeur une lettre recommandée avec avis de réception le 21 avril 2015 pour solliciter les instructions de travail promises et le paiement des arriérés de salaires.

Par ordonnance du 16 juin 2015, le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes de Tours a condamné la SARL E.R. à payer au salarié la somme provisionnelle de 13’800 €, en l’absence de l’employeur, à qui a été notifiée cette décision, sans qu’il l’exécute.

Par ordonnance de référé du 11 septembre 2015, le conseil de prud’hommes de Tours a condamné la société à payer au salarié une provision de 10’000 € au titre de salaires impayés.

Par jugement du 29 février 2016, le conseil de prud’hommes de Tours a :

– Prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [Z] [O] aux torts exclusifs de la SARL ER et à la date du jugement, soit le 29 février 2016 ;

– Constaté que le salaire de base retenu est de 3 961,55 euros ;

– Condamné la SARL ER à verser à M. [Z] [O] les sommes suivantes en deniers ou quittances eu égard aux condamnations précédentes prononcées par les formations de référé et conciliation :

– Rappel de salaire de avril 2014 à février 2016 (soit 2 300 x 22,5 mois = 51 750,00 euros moins 4 000,00 versements espèces) 23 mois (bruts) . . . . . . . . . . 48.900,00 €

– Congés payés afférents (bruts) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . 5.290,00 €

– Rappel de salaire pour heures supplémentaires (bruts) . . .. . . . . . . . . . 17.132,10 €

– Congés payé afférents (bruts) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . …. . . . . . . . . 1.713,21 €

– Rappel de salaire pour heures supplémentaires du 9 Février 2015 au 29 Février 2016 (bruts) …………………………………………………………. . . . . . . . . . . . . . . . . 21.601,45 €

Congés payés afférents (bruts) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.160,15 €

– Dommages et intérêts pour perte de repos compensateurs . . . . . . . . . . . 8 340,47 €

– Dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de résultat (absence de visite médicale d’embauche) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . . . . 600,00 €

– Dommages et intérêts pour absence de fourniture de travail .. . . . . . . . . 1 000,00 €

– Dommages et intérêts pour violation des règles sur le temps de travail . . . 200,00 €

– Dommages et intérêts pour non-respect du minimum conventionnel . . . 2 000,00 €

– Dommages et intérêts pour harcèlement moral . . . . . . . . . . .. . . . . .. . . 10 000,00 €

– Indemnité de licenciement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 386,58 €

– Indemnité de préavis égale à un mois de salaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 961,65 €

– Congés payés afférents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 396,17 €

– Dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat à durée indéterminée : 25000,00 €

– Dommages et intérêts pour travail dissimulé . . . . . . . . . . . . . . . . . 23.769,90 €

– Remboursement des frais d’exécution forcée .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48,00 €

Ordonné à la SARL ER le paiement des intérêts moratoires à taux légal dus à compter du 13 mai 2015 et capitalisés pour plus d’une année entière dans les termes de l’article 1154 du Code Civil ;

Rappelé que l’exécution provisoire est de droit pour les créances salariales assorties des intérêts légaux à compter de la saisine du Conseil soit le 13 mai 2015 et fixé à la somme brute de 3.961,65 euros la base moyenne mensuelle des trois derniers mois de salaire prévue à l’article R.1454-28 du Code du Travail ;

Dit qu’il sera également fait droit à l’application de l’article 515 du Code de procédure civile qui prévoit que l’exécution provisoire peut être ordonnée à la demande des parties ou d’office, chaque fois que le juge l’estime nécessaire et compatible avec la nature de l’affaire.

Ordonné en conséquence l’exécution de droit sur l’intégralité des condamnations prononcées par la présente.

Débouté M. [Z] [O] de ses autres demandes.

Condamné la SARL ER à remettre à M. [Z] [O] un certificat de travail, un bulletin de paie outre une attestation Pôle Emploi conformes au présent jugement, ce, sous astreinte de 100 € par document et par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de 15 jours de la notification du présent jugement ; Le Conseil s’est réservé le droit de liquider ladite astreinte en application de l’article L. 131-3 du Code des procédures civiles d’exécution.

Condamné la SARL ER à verser à M. [Z] [O] la somme de 1 200,00 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Condamné la SARL ER aux entiers dépens de l’instance.

Les tentatives d’exécution forcée ayant échoué, M. [O] a saisi le tribunal de Commerce de Bobigny.

Par jugement du 1er décembre 2016, le tribunal de commerce de Bobigny a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’égard de la SARL ER, Maître [R] [G] étant désignée en qualité de liquidateur judiciaire.

M. [O] a fait signifier le jugement du conseil de prud’hommes à l’AGS le 25 juillet 2017.

Le 1er septembre 2017, le CGEA île de France AGS/IDF Est a formé une tierce opposition auprès du conseil de prud’homme de Tours à l’encontre du jugement rendu le 29 février 2016.

Il a conclu :

-à statuer ce que de droit sur l’existence du contrat de travail dont se prévaut le salarié,

-au constat, en toute hypothèse ,que les relations contractuelles ont cessé le 7 février 2015 et en conséquence à la liquidation des droits du salarié à cette date,

-à la réduction, en conséquence, des sommes allouées au titre du rappel des salaires,

-au débouté de toutes demandes concernant les heures supplémentaires,

-et, en toute hypothèse, au constat qu’il ne peut y avoir d’heures supplémentaires postérieurement au 7 février 2015,

-au débouté du surplus de toutes les demandes du salarié,

– à statuer ce que de droit sur la demande de résiliation judiciaire qui devra être fixée au 7 février 2015,

-à défaut, au constat que l’AGS n’aurait pas à garantir les éventuelles indemnités de rupture,

-et à la réduction, en toute hypothèse, à de plus justes proportions de l’éventuelle indemnité qui pourrait lui être allouée de ce chef,

-au rejet de la condamnation de l’AGS à une indemnité de procédure.

M. [O] a conclu au débouté de la tierce opposition du CGEA Île-de-France Est et à la condamnation de cet organisme à lui payer 2000 € pour les frais de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Maître [R] [G], ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SARL ER n’était ni présente ni représentée, bien que régulièrement convoquée devant le conseil de prud’hommes de Tours.

Par jugement du 19 mars 2018 auquel il est renvoyé pour un plus ample exposé du litige, le conseil de prud’hommes de Tours a :

Déclaré recevable la tierce opposition formulée par le CGEA ILE DE FRANCE AGS IDF EST ;

Confirmé le précédent jugement du conseil de prud’hommes de Tours en date 29 février 2016 ;

Confirmé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [Z] [O] aux torts exclusifs de la SARL ER et à la date du 29 février 2016 ;

Fixé les créances de M. [Z] [O] à l’encontre de la liquidation judiciaire de la SARL ER aux sommes suivantes :

– Rappel de salaire de avril 2014 à février 2016 (bruts) : 48.900,00 €

– Congés payés afférents (bruts) : 5.290,00 €

– Rappel de salaire pour heures supplémentaires (bruts): 17.132,10 €

– Congés payé afférents (bruts) : 1.713,21 €

– Rappel de salaire pour heures supplémentaires du 9 février 2015 au 29 février 2016 (bruts) : 21.601,45 €

– Congés payés afférents (bruts) : 2.160,15 €

– Dommages et intérêts pour perte de repos compensateurs : 8 340,47 €

– Dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de résultat (absence de visite médicale d’embauche) : 600,00 €

– Dommages et intérêts pour absence de fourniture de travail : 1 000,00 €

– Dommages et intérêts pour violation des règles sur le temps de travail : 200,00 €

– Dommages et intérêts pour non-respect du minimum conventionnel : 2 000,00 €

– Dommages et intérêts pour harcèlement moral : 10 000,00 €

– Indemnité de licenciement : 1 386,58 €

– Indemnité de préavis égale à un mois de salaire : 3 961,65 €

– Congés payés afférents : 396,17 €

– Dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat à durée indéterminée : 25000,00€

– Dommages et intérêts pour travail dissimulé : 23.769,90 €

– Remboursement des frais d’exécution forcée : 48,00 €

Ordonné à Maître [G], ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SARL ER d’inscrire lesdites créances au passif de la liquidation judiciaire ;

Rappelé que l’exécution provisoire est de droit pour les créances salariales et fixé à la somme brute de 3.961,65 euros la base moyenne mensuelle des trois derniers mois de salaire prévue à I’article R.1454-28 du Code du Travail ;

Déclaré opposable au CGEA ILE DE FRANCE AGS IDF EST en qualité de gestionnaire de l’AGS la présente décision dans les limites prévues aux articles L3253-17, D.3253-5 du code du travail ;

Dit et jugé que l’AGS devra garantir les indemnités de rupture ;

Débouté M. [Z] [O] de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 Code de procédure civile.

Passé les dépens éventuels en frais privilégiés de la liquidation judiciaire de la SARL ER.

Le 20 avril 2018, l’Unedic Délégation AGS CGEA Île de France Est a relevé appel de cette décision.

Par jugement du 30 novembre 2018, le président du tribunal de commerce de Bobigny a prononcé la clôture pour insuffisance d’actif de la liquidation judiciaire de la SARL ER.

Par ordonnance du 23 janvier 2019, le conseiller de la mise en état a débouté M. [Z] [O] de sa demande tendant à voir prononcer la radiation du rôle de la cour de l’affaire enregistrée au répertoire général sous le n° 18/01364. Il a débouté M. [Z] [O] de sa demande tendant à voir ordonner à l’UNEDIC de verser au liquidateur judiciaire, à titre provisoire, les sommes dues au titre de la garantie de l’AGS en exécution du jugement du 19 mars 2018. Il a débouté les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile au titre du présent incident. Il a condamné M. [Z] [O] aux dépens de l’incident et dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de M. [E] [P], défenseur syndical.

Par ordonnance du 24 décembre 2021, le délégué du président du tribunal de commerce de Bobigny a désigné Maître [G], ès qualités de mandataire ad hoc de la SARL ER.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les conclusions remises au greffe le 30 août 2018 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du Code de procédure civile et aux termes desquelles l’Unedic Délégation AGS CGEA Île de France Est demande à la cour de :

Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré bien fondée l’AGS en sa tierce opposition au jugement prononcé par le Conseil de prud’hommes de Tours en date du 29 février 2016.

Mais, statuant à nouveau,

Prononcer la résiliation judiciaire des relations contractuelles à la date du 7 février 2015

Et en conséquence, liquider les droits du salarié à la date dont s’agit.

En conséquence, dire et juger que M. [O] ne saurait venir prétendre au paiement d’un quelconque salaire postérieurement au 7 février 2015 et encore moins à des heures supplémentaires postérieures à cette date.

S’entendre M. [O] débouter de sa demande en paiement d’heures supplémentaires pour la période antérieure au 7 février 2015.

Dire n’y avoir lieu à indemnité pour perte du repos compensateur.

S’entendre M. [O] débouter de l’ensemble de ses demandes en dommages et intérêts telles qu’ils ont été alloués à l’intéressé qui ne justifie d’aucun préjudice que ce soit pour une absence de visite médicale d’embauche, pour une absence de fourniture de travail, pour une violation des règles sur le temps de travail ou pour le non-respect du minimum conventionnel.

S’entendre encore M. [O] débouter de sa demande en dommages et intérêts pour harcèlement moral.

Dire et juger que l’éventuelle indemnité de préavis à laquelle peut prétendre M. [O] doit être calculée sur la base des dispositions contractuelles.

Réduire l’éventuelle indemnité allouée au titre de la rupture des relations contractuelles en considération du préjudice réellement subi par l’intéressé.

Sur la recevabilité de la tierce-opposition, l’Unedic Délégation AGS CGEA Île de France Est rappelle les termes de l’article 583 du code de procédure civile qui s’applique à la cause. Elle soutient qu’elle a un intérêt à agir et n’a pas été partie à la décision attaquée. Elle constate également que le salarié n’a contesté ni en première instance ni en appel cette tierce-opposition.

Sur le fond, et sur le paiement des salaires, elle considère que celui-ci doit s’arrêter au 7 février 2015, jour où la résiliation judiciaire doit être prononcée, puisque le salarié a cessé toute activité à ce moment-là, en n’étant plus à la disposition de son employeur.

Sur les heures supplémentaires, le salarié ne justifie en rien celles qu’il aurait effectuées antérieurement au 7 février 2015 et ne peut solliciter le règlement d’heures supplémentaires postérieures puisqu’il n’a accompli aucun travail pour la société.

Sur le surplus des sommes allouées, elle s’oppose

-aux dommages-intérêts pour non-respect du minimum conventionnel sur la seule motivation que le salarié n’avait pas été réglé,

-à ceux pour défaut de visite médicale d’embauche en l’absence de préjudice caractérisé,

-à ceux pour harcèlement moral qui, subsidiairement, devront être sensiblement réduits, alors que ce préjudice spécifique se confond avec celui d’une absence de fourniture de travail,

-à ceux pour travail dissimulé qui doivent être calculés sur la base de la rémunération effective et non sur celle d’un salaire artificiellement reconstitué.

Le salarié a travaillé moins d’un an et ne peut donc revendiquer une indemnité de licenciement.

Enfin sur les dommages-intérêts alloués pour rupture abusive du contrat, il s’agit d’un montant prohibitif, au regard des dispositions de l’article L. 1235-5 du code du travail.

Si la date du 7 février 2015 n’était pas retenue, la résiliation judiciaire prendra effet à la date de l’arrêt et, dans ce cas, l’AGS n’aurait pas à garantir les indemnités de rupture allouées puisque l’arrêt serait rendu plus de 15 jours après l’ouverture de la procédure collective prononcée le 1er décembre 2016, selon l’application des dispositions de l’article L. 3253-8 du code du travail.

Vu les dernières conclusions remises au greffe 24 janvier 2019 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du Code de procédure civile et aux termes desquelles M. [Z] [O] demande à la cour de :

Confirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a débouté M. [O] de sa demande d’indemnité formée sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

Réformant le jugement attaqué de ce seul chef et y ajoutant,

Condamner le CGEA Ile de France Est à payer à M. [Z] [O] la somme de 3000 € par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

Condamner le CGEA Ile de France Est aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Sur l’existence d’un contrat de travail, M. [Z] [O] se prévaut du contrat du 1er avril 2014 et des bulletins de paie, en sorte que rien ne peut combattre la présomption du salariat qui doit lui bénéficier.

Sur le rappel du salaire de base, tant son contrat de travail que ses bulletins de paie prévoient un salaire de 2300 € brut par mois qui n’ont jamais été virés sur son compte bancaire comme il le démontre, en dehors des 4000 € remis en espèces, entre le 2 mai et le 16 octobre 2014.

Il prétend ainsi à une somme de 46’000 € due jusqu’au 30 novembre 2015, puisqu’il s’est tenu à disposition de son employeur jusqu’à cette date, montant intégrant les provisions allouées par le bureau de conciliation et la formation de référé, qui n’ont jamais été réglées.

Sur le rappel des heures supplémentaires, il produit des décomptes précis des heures de travail réalisées, jour par jour, tandis qu’aucune pièce adverse ne vient s’y opposer. Il a, ainsi, accompli jusqu’au 7 février 2015 :

– 350 heures supplémentaires à 125 %, ouvrant droit à un rappel de salaire de 6 634,47 €;

– 461 heures supplémentaires à 150 %, ouvrant droit à un rappel de salaire de 10’497,63 €,

soit un total de 17’132,10 €.

Celles-ci doivent être prises en compte pour le calcul des mensualités et comptabilisées également après le 7 février 2015, soit pour 16’616,50 €.

Il estime que les conditions d’emploi qui ont été les siennes méritent indemnisation en raison :

– de l’absence de visite médicale d’embauche,

– de l’absence de fourniture de travail depuis février 2015, en dépit de réclamations verbales et d’une lettre recommandée avec accusé de réception restée sans réponse. Cette sommation de fournir de travail a été réitérée par la convocation devant la formation de référé,

– du dépassement des durées maximales du travail qui intervenait presque systématiquement, tant au titre de la durée maximale de travail journalier qu’hebdomadaire (10 heures et 48 heures respectivement),

– du harcèlement moral dont il a été victime, l’employeur l’ayant privé de travail depuis février 2015, l’ayant rémunéré par un salaire ridiculement bas et n’ayant pas hésité à lui fournir, en mars 2015,un faux avis de virement, tout en le soumettant à un rythme de travail très élevé.

Il s’ensuit que la résiliation judiciaire du contrat aux torts de la société s’impose, eu égard à l’ensemble de ces éléments, avec toutes ses conséquences de droit, ayant trait au salaire mensuel de référence, à l’indemnité légale de licenciement, à l’indemnité de préavis et à l’indemnité de perte des repos compensateurs.

Il insiste sur le travail dissimulé et l’emploi irrégulier d’un étranger sans titre de travail, dès lors que l’employeur n’a pas procédé aux déclarations de salaires, l’intention de dissimuler l’emploi ne pouvant faire de doute.

Subsidiairement, son permis de séjour, délivré par les autorités espagnoles ne l’autorise pas à travailler en France, en violation des dispositions de l’article L. 8151-1 du code du travail, ce qui lui donne le droit de revendiquer une indemnité forfaitaire supplémentaire équivalente à trois mois de salaires soit 11’884,95 € ,conformément aux dispositions de l’article L. 8252-2 du code du travail.

Maître [G], ès qualités de mandataire ad hoc de la SARL ER, à laquelle les conclusions des parties ont été signifiées le 30 septembre 2022 pour l’AGS CGEA IDF Est et le 27 octobre 2022 pour M. [O], n’a pas constitué avocat.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 décembre 2022, renvoyant la cause et les parties à l’audience des plaidoiries du 5 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Les actes d’huissier de justice des 30 septembre 2022 et du 27 octobre 2022, par lesquels les conclusions des parties ont été signifiées à Maître [G], mandataire ad hoc, ont été remis à domicile. En application de l’article 474 du code de procédure civile, il y a lieu de statuer par arrêt rendu par défaut.

La notification du jugement est intervenue le 21 mars 2018, en sorte que l’appel principal du CGEA Île-de-France, régularisé le 20 avril 2018, dans le délai légal d’un mois, est recevable.

Sur la recevabilité de la tierce opposition de l’AGS

L’article 583 du code de procédure civile prévoit deux conditions cumulatives de recevabilité de la tierce opposition : un intérêt à agir et ne pas avoir été partie ou représenté à la décision attaquée.

En l’espèce, l’AGS dispose d’un intérêt à agir dans la mesure où les créances fixées par la juridiction lui sont opposables, sur le fondement de l’article L. 3253-8 du code du travail.

Par ailleurs, elle n’a été ni partie ni représentée à l’occasion de l’action engagée par M. [O], le jugement, rendu de manière réputée contradictoire le 21 février 2016 par le conseil de prud’hommes de Tours, l’ayant été hors de sa présence et de celle de la société.

L’AGS ne pouvait être représentée, dès lors que la liquidation judiciaire de la société n’est intervenue que le 1er décembre 2016, prononcée par le tribunal de commerce de Bobigny, et que la garantie de l’AGS ne pouvait donc jouer avant cette date.

La tierce opposition, formée dans le délai de deux mois de l’article 586 du code de procédure civile, est donc recevable.

Sur la demande de rappel de salaire de base

M. [O] verse aux débats un exemplaire d’un contrat de travail à durée indéterminée conclu le 1er avril 2014 avec la SARL ER, ainsi que des bulletins de paie afférents à la période du 1er avril au 30 septembre 2014.

Il peut ainsi se prévaloir d’un contrat de travail apparent. La preuve du caractère fictif de ce contrat n’étant pas rapportée, il y a lieu de considérer que M. [Z] [O] était lié à la SARL ER par un contrat de travail à effet du 1er avril 2014.

Le contrat de travail prévoit un salaire de base de 2300 € brut par mois pour 151,67 heures de travail.

M. [Z] [O] indique avoir perçu en espèces, entre le 2 mai 2014 et le 16 octobre 2014, un montant cumulé de 4 000 euros, selon des règlements successifs de 700 euros ou de 600 euros.

Le salarié fait valoir que l’employeur a cessé de lui fournir du travail à compter du 7 février 2015.

Il verse aux débats une lettre recommandée avec avis de réception adressée le 21 avril 2015 à son employeur énonçant : « A l’issue de sa journée de travail du samedi 7 février 2015 vous m’avez indiqué que je devais rester chez moi et attendre de nouvelles instructions pour travailler [‘] je vous mets donc en demeure de me fournir du travail conformément à vos obligations’ » (pièce 5).

Le 17 août 2015, il a attrait la SARL ER devant la formation de référé du conseil de prud’hommes de Tours afin notamment qu’il soit ordonné à la société, sous astreinte, de lui fournir du travail (pièce 14).

L’employeur est tenu de payer sa rémunération et de fournir un travail au salarié qui se tient à sa disposition (Soc., 23 octobre 2013, pourvoi n° 12-14.237, Bull. 2013, V, n° 248).

Par jugement du 29 février 2016, le conseil de prud’hommes de Tours a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [Z] [O] aux torts exclusifs de la SARL ER à la date du 29 février 2016.

Aucune des pièces versées aux débats n’est de nature à démontrer que le salarié ait refusé d’exécuter son travail ou ne se soit pas tenu à la disposition de l’employeur entre le 1er avril 2014 et le 29 février 2016.

Le salarié a donc droit, sur cette période, au salaire convenu.

Il y a donc lieu, par voie de confirmation du jugement, de fixer la créance de rappel de salaire de M. [Z] [O] au passif de la procédure collective de la SARL ER à la somme de 48 900 euros brut.

Par voie d’infirmation du jugement, la créance d’indemnité de congés payés afférents est fixée à 4 890 euros brut.

Sur la demande au titre des heures supplémentaires

Il résulte des dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant (Soc., 18 mars 2020, pourvoi n° 18-10.919, FP, P + B + R + I et Soc., 27 janvier 2021, pourvoi n°17-31.046, P+R+I).

M. [O] produit aux débats un décompte des heures de travail qu’il prétend avoir réalisées chaque jour entre le 1er avril 2014 et le 8 février 2015 (pièce 8).

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l’employeur d’y répondre en produisant ses propres éléments.

L’AGS ne produit aucun élément objectif permettant de déterminer les heures de travail effectivement accomplies par le salarié.

Au vu des éléments produits par l’une et l’autre partie, il y a lieu de considérer que M. [Z] [O] a effectué des heures supplémentaires qui n’ont pas donné lieu à rémunération mais en nombre moindre que ce qu’il revendique.

Dans ces conditions, il y a lieu, par voie d’infirmation du jugement, de fixer à 8 500 euros brut la créance de M. [Z] [O] à titre de rappel d’heures supplémentaires pour la période comprise entre le 1er avril 2014 et le 8 février 2015, outre 850 euros brut au titre des congés payés afférents.

Il ne ressort d’aucun élément du dossier que l’employeur ait garanti au salarié l’accomplissement d’heures supplémentaires. M. [Z] [O] n’a accompli aucune prestation de travail au service de la SARL ER entre le 9 février 2015 et le 29 février 2016. Par conséquent, par voie d’infirmation du jugement, il y a lieu de débouter M. [Z] [O] de sa demande de rappel d’heures supplémentaires pour la période comprise entre le 9 février 2015 et le 29 février 2016.

Sur les demandes au titre des conditions de travail

Sur l’absence de visite médicale d’embauche

Il n’est pas établi que M. [Z] [O] ait bénéficié d’un examen médical avant l’embauche ou au plus tard avant l’expiration de la période d’essai par le médecin du travail, comme le prévoyaient les dispositions de l’article R. 4624-10 du code du travail.

De manière générale, il n’a bénéficié d’aucun suivi individuel de son état de santé au cours de la relation de travail.

Il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a fixé le préjudice subi à ce titre par le salarié à la somme de 600 euros.

Sur le versement des salaires inférieurs aux minima

Le salaire convenu, tel que fixé au contrat de travail, n’était inférieur ni au SMIC ni aux minima conventionnels.

En conséquence, par voie d’infirmation du jugement, il y a lieu de débouter M. [Z] [O] de sa demande à ce titre.

Sur le dépassement des durées maximales de travail

L’employeur ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, d’avoir respecté les dispositions d’ordre public du code du travail relatives aux durées minimales quotidienne et hebdomadaire de repos.

Il ressort du tableau produit le salarié plusieurs violations de ces règles (pièce 8). A titre d’exemple, le droit au repos quotidien de 11 heures n’a pas été respecté entre le 23 août et le 24 août 2017 et entre le 26 août et le 27 août 2017 (pièce n°15).

Il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a alloué à M. [Z] [O] la somme de 200 euros à titre de dommages-intérêts pour ce chef de préjudice.

Sur la demande au titre du harcèlement moral

Aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L’article L. 1152-3 du code du travail prévoit que toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L.1152-1 et L.1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul.

Selon l’article L. 1154-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2018-1088 du 8 août 2016, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer ou laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L. 1152-1 du code du travail. Dans l’affirmative, il revient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

M. [Z] [O] invoque les éléments de faits suivants (conclusions, p. 9 et 10) :

– l’absence de fourniture de travail depuis le 7 février 2015 ;

– l’absence de versement du salaire pendant plusieurs mois ;

– la fourniture en mars 2015 d’un faux avis d’opération de virement (pièce n°4) ;

– l’absence de réponse aux réclamations écrites du salarié et l’absence de comparution aux audiences devant le conseil de prud’hommes ;

– la charge de travail imposée au salarié, les durées maximales de travail ayant été fréquemment dépassées.

Ces éléments permettent de présumer l’existence d’un harcèlement.

L’AGS ne rapporte pas la preuve de ce que les agissements de l’employeur ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que les décisions de celui-ci, qui s’est abstenu de verser les salaires en temps et en heure, a intimé l’ordre au salarié de rester chez lui à compter du 8 février 2015, a cessé de le rémunérer à compter de cette date et n’a donné aucune suite aux réclamations qui lui étaient adressées, sinon en lui faisant parvenir un faux ordre de virement, sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il y a lieu, par voie d’infirmation du jugement, d’allouer à M. [Z] [O] la somme de 1000 euros à titre de dommages-intérêts pour ce chef de préjudice.

Sur l’absence de fourniture de travail

Le gérant de la société a demandé à son salarié de rester chez lui à compter du 7 février 2015 et il n’a pas cru devoir réagir à la lettre recommandée avec avis de réception du 21 avril 2015, qui l’a mis en demeure de fournir du travail conformément à ses obligations, ni à la convocation devant la formation de référé du conseil de prud’hommes de Tours, le 18 août 2015, ayant tendu aux mêmes fins.

Ce faisant, il a manqué à ses obligations.

Cependant, M. [Z] [O], qui soutient que ses faits sont constitutifs de harcèlement moral, ne justifie d’aucun préjudice distinct, le préjudice subi de ce fait ayant été réparé par l’allocation d’une somme au titre du harcèlement moral.

Par voie d’infirmation du jugement, il y a lieu de le débouter de ce chef de demande.

Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail

Il a été retenu que l’employeur avait manqué à ses obligations, en ne fournissant pas le travail convenu, en ne payant pas le salaire et en commettant des faits de harcèlement moral.

Ces manquements sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur.

La résiliation judiciaire étant fondée sur des faits de harcèlement moral, la rupture produit les effets d’un licenciement nul, conformément aux dispositions de l’article L. 1152-3 du code du travail (Soc., 20 février 2013, pourvoi n° 11-26.560, Bull. 2013, V, n° 47).

M. [Z] [O] étant resté au service de l’employeur jusqu’au 29 février 2016 et le contrat n’ayant pas été rompu avant cette date, il y a lieu de fixer au 29 février 2016 la date d’effet de la résiliation judiciaire.

La résiliation judiciaire produisant les effets d’un licenciement nul, le salarié a droit d’une part aux indemnités de rupture et d’autre part à une indemnité réparant l’intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins égale à celle prévue par l’article L. 1235-3 du code du travail, quelles que soient son ancienneté et la taille de l’entreprise (Soc., 30 novembre 2010, pourvoi n° 09-66.210, Bull. 2010, V, n° 272).

Sur la demande d’indemnité pour licenciement nul

La résiliation judiciaire ayant été prononcée avec effet au 29 février 2016, les heures supplémentaires accomplies avant le 8 février 2015 ne sauraient être prises en compte pour fixer le montant de l’indemnité pour licenciement nul.

Compte tenu notamment des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié, de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à retrouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, telles qu’elles résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu d’allouer à M. [Z] [O] la somme de 15 000 euros net à titre d’indemnité pour licenciement nul. Le jugement est infirmé de ce chef.

Sur l’indemnité légale de licenciement

En application des articles L. 1234-9 et R. 1234-2 du code du travail, il ya lieu de fixer l’indemnité de licenciement à 806,15 euros net. Le jugement est infirmé de ce chef.

Sur l’indemnité compensatrice de préavis

En application des dispositions de l’article L. 1234-1 du code du travail, la durée du préavis est de un mois.

M. [Z] [O] peut prétendre au paiement d’une indemnité compensatrice de préavis qu’il y a lieu de fixer en considération de la rémunération qu’il aurait perçue s’il avait travaillé durant le préavis, soit à 2300 euros brut, outre 230 euros brut au titre des congés payés afférents. Le jugement est infirmé de ce chef.

Sur l’indemnité de repos compensateur

Le contingent annuel des heures supplémentaires est fixé à 180 heures par an pour les ouvriers du bâtiment travaillant dans les entreprises ne pratiquant pas l’annualisation du temps de travail.

La contrepartie obligatoire en repos due pour toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent annuel est fixée à 50 % pour les entreprises de vingt salariés au plus et à 100 % pour les entreprises de plus de vingt salariés.

La SARL ER employait moins de vingt salariés.

Au vu des éléments produits par l’une et l’autre des parties, il y a lieu de retenir que le contingent conventionnel d’heures supplémentaires a été dépassé en 2014.

Le salarié n’ayant pas été mis en mesure du fait de son employeur de formuler une demande de repos, il y a lieu, par voie d’infirmation du jugement entrepris, d’allouer à M. [Z] [O] la somme de 2’085,12 euros au titre de l’indemnité de repos.

Sur la demande d’indemnité pour travail dissimulé

L’article L.8221-1 du code du travail prohibe le travail totalement ou partiellement dissimulé défini par l’article L.8221-3 du même code relatif à la dissimulation d’activité ou exercé dans les conditions de l’article L.8221-5 du même code relatif à la dissimulation d’emploi salarié.

Toutefois, la dissimulation d’emploi salarié prévue par ces textes n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a agi de manière intentionnelle.

M. [Z] [O] a effectué un grand nombre d’heures supplémentaires qui ne figurent pas sur ses bulletins de paie et qui n’ont pas été rémunérées. Ces heures ayant été accomplies sur les chantiers, l’employeur en avait nécessairement connaissance.

Il s’en évince que la SARL ER s’est, en toute connaissance de cause, abstenue de rémunérer des heures de travail dont elle savait qu’elles avaient été accomplies.

Il n’est pas établi que l’employeur ait procédé aux déclarations de salaire, les sommes versées en espèces à M. [Z] [O] ne correspondant pas à celles mentionnées sur les bulletins de paie.

L’élément intentionnel du travail dissimulé est caractérisé.

L’indemnité pour travail dissimulé doit être fixée sur la base des salaires des mois qui précèdent la résiliation judiciaire.

Par voie d’infirmation du jugement, il y a lieu d’allouer à M. [Z] [O] la somme de 13’800 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé.

Sur la garantie de l’AGS

Il y a lieu de dire que l’Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des Salariés intervenant par l’UNEDIC – CGEA Ile de France Est est tenue de garantir les sommes allouées à M. [Z] [O], en ce compris les indemnités de rupture et l’indemnité pour travail dissimulé, dans les limites et plafonds définis aux articles L. 3253-8 à L. 3253-17, D. 3253-2 et D. 3253-5 du code du travail.

Sur les dépens et les frais

Il y a lieu de fixer les dépens de première instance et d’appel au passif de la procédure collective de la SARL ER.

L’équité ne recommande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

M. [Z] [O] ne saurait obtenir de la juridiction prud’homale qu’elle ordonne le remboursement des frais d’huissier de justice d’un montant de 48 € qu’il a exposés pour une tentative de saisie-attribution du 18 août 2015 à laquelle il a été procédé en exécution de la décision du bureau de conciliation du conseil de prud’hommes de Tours du 16 juin 2015. Par voie d’infirmation du jugement, il y a lieu de le débouter de ce chef de demande.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt par défaut, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe :

Infirme le jugement rendu le 19 mars 2018, entre les parties, par le conseil de prud’hommes de Tours mais seulement en ce qu’il a fixé les créances de M. [Z] [O] à l’encontre de la liquidation judiciaire de la SARL ER aux sommes de 5 290 euros au titre des congés payés afférents à un rappel de salaire de avril 2014 à février 2016, 17 132,10 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, 1 713,21 euros au titre des congés payé afférents, 21 601,45 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires du 9 février 2015 au 29 février 2016, de 2 160,15 euros au titre des congés payés afférents, 8 340,47 euros à titre de dommages et intérêts pour perte de repos compensateurs, 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de fourniture de travail, 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect du minimum conventionnel, 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral, 1 386,58 euros à titre d’indemnité de licenciement, 3 961,65 euros à titre d’indemnité de préavis, 396,17 euros au titre des congés payés afférents, 25000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat à durée indéterminée, 23.769,90 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé, 48 euros au titre du remboursement des frais d’exécution forcée ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

Fixe la créance de M. [Z] [O] au passif de la procédure collective de la SARL ER aux sommes suivantes :

– 4 890 euros brut à titre d’indemnité de congés payés afférents au rappel de salaire d’avril 2014 à février 2016 ;

– 8 500 euros brut à titre de rappel d’heures supplémentaires pour la période comprise entre le 1er avril 2014 et le 8 février 2015 ;

– 850 euros brut au titre des congés payés afférents ;

– 1000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;

– 15 000 euros net à titre d’indemnité pour licenciement nul ;

– 806,15 euros net à titre d’indemnité de licenciement

– 2300 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

– 230 euros brut au titre des congés payés afférents ;

– 2’085,12 euros au titre de l’indemnité de repos ;

– 13’800 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé ;

Déboute M. [Z] [O] de sa demande de rappel d’heures supplémentaires pour la période comprise entre le 9 février 2015 et le 29 février 2016 ;

Déboute M. [Z] [O] de sa demande de dommages-intérêts pour non-respect du minimum conventionnel et pour absence de fourniture de travail ;

Déboute M. [Z] [O] de sa demande de remboursement des frais d’exécution forcée;

Dit que l’Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des Salariés intervenant par l’UNEDIC – CGEA Ile de France Est est tenue de garantir les sommes allouées à M. [Z] [O], en ce compris les indemnités de rupture et l’indemnité pour travail dissimulé, dans les limites et plafonds définis aux articles L. 3253-8 à L. 3253-17, D. 3253-2 et D. 3253-5 du code du travail ;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Fixe les dépens de première instance et d’appel au passif de la procédure collective de la SARL ER.

Et le présent arrêt a été signé par le président de chambre et par le greffier

Fanny ANDREJEWSKI-PICARD Alexandre DAVID

 


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