Saisie-attribution : décision du 30 mars 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/06706

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Saisie-attribution : décision du 30 mars 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/06706

30 mars 2023
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
22/06706

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-9

ARRÊT AU FOND

DU 30 MARS 2023

N° 2023/287

Rôle N° RG 22/06706 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJLST

[Z] [T]

C/

S.A.S.U. LE NEPTUNE EN CAMARGUE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me JUAN

Me MAGNAN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge de l’exécution de tarascon en date du 22 Avril 2022 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 21/00104.

APPELANTE

Madame [Z] [T]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Jean pascal JUAN, avocat au barreau de TARASCON

INTIMEE

S.A.S.U. LE NEPTUNE EN CAMARGUE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Gilles GIGUET, avocat au barreau de TARASCON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 16 Février 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Dominique TATOUEIX, Magistrat honoraire, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Agnès DENJOY, Président

Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller

Monsieur Dominique TATOUEIX, Magistrat honoraire

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Ingrid LAVALLEE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Mars 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Mars 2023,

Signé par Madame Agnès DENJOY, Président et Madame Ingrid LAVALLEE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant procès-verbal délivré le 14 septembre 2021 entre les mains du Crédit Lyonnais, la SASU LE NEPTUNE EN CAMARGUE a fait pratiquer une saisie attribution à l’encontre de Mme [Z] [T] pour paiement d’une somme de 106 707,78 € en vertu d’un jugement du tribunal de commerce de Tarascon en date du 6 septembre 2021 qui a notamment condamné celle ci à lui payer les somme de 90 000 € en réparation de son préjudice né de la violation de la clause contractuelle contenue dans l’acte de cession du fonds de commerce d’hôtel et 15 000€ au titre des frais irrépétibles.

Par exploit en date du 30 septembre 2021, Mme [Z] [T] a fait assigner la SASU LE NEPTUNE EN CAMARGUE aux fins de nullité et de mainlevée sous astreinte de la saisie attribution.

Par jugement du 22 avril 2022 dont appel du 6 mai 2022, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Tarascon a retenu sa compétence pour connaître de la procédure, a débouté Mme [Z] [T] de toutes ses demandes et l’a condamnée aux dépens.

Le juge de l’exécution énonce en ses motifs :

– la contestation du caractère exécutoire du titre fondant la mesure ne constitue qu’un moyen au soutien de la demande de nullité et de mainlevée de la saisie attribution, de sorte que le juge de l’exécution est parfaitement compétent pour connaître de ce litige,

– le jugement, objet d’un appel en cours et sans qu’il soit justifié de la saisine du premier président en vue d’arrêter le cours de l’exécution provisoire ou de trancher une difficulté sur ce point, qui indique que l’exécution provisoire est de droit constitue un titre exécutoire pouvant fonder une voie d’exécution forcée et il n’appartient pas au juge de l’exécution de corriger les erreurs de droit ou matérielles affectant le jugement dont l’exécution forcée est contestée,

– le séquestre n’est pas destiné à annihiler l’effet attributif immédiat attaché à la saisie attribution pratiquée par la société LE NEPTUNE qui est devenu juridiquement propriétaire des fonds saisis dès l’acte de saisie attribution.

Vu les dernières conclusions déposées le 17 juin 2022 par Mme [Z] [T], appelante, aux fins de voir :

– Réformer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a débouté la société LE NEPTUNE EN CAMARGUE de sa demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau sur les dispositions réformées tout en confirmant celle non contestée,

A titre principal :

– Se déclarer compétent

– Prononcer la nullité de la saisie attribution effectuée le 14 septembre 2021 et ordonner sa mainlevée et la restitution de l’ensemble des sommes saisies sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir.

A titre subsidiaire :

– Ordonner en application de l’article 82 du Code de Procédure Civile, la transmission du dossier au greffe de la cour d’appel d’Aix-en-Provence statuant sur l’appel interjeté à l’encontre du jugement du tribunal de commere de Tarascon ou du Premier président de la cour d’appel d’Aix-en-Provence afin qu’il soit statué.

A titre infiniment subsidiaire :

– Ordonner le placement sous séquestre de la somme de 106 707.78 € saisie sur le compte bancaire de Madame [T] dans l’attente de l’arrêt à intervenir de la cour d’appel d’Aix-en-Provence statuant sur l’appel interjeté à l’encontre du jugement du tribunal de commerce de Tarascon en date du 6 septembre 2021 et désigner M. le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Tarascon en qualité de séquestre.

En tout état de cause :

– Débouter la Société LE NEPTUNE EN CAMARGUE de toute demande plus ample ou contraire

– Condamner la Société LE NEPTUNE EN CAMARGUE au paiement de la somme de 5 000€ sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Mme [Z] [T] fait valoir :

– que l’article 514 du code de procédure civile issue de l’article 3 du décret du 11 décembre 2019 qui dispose que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue en dispose autrement, n’étant applicable qu’aux instances en cours au 1er janvier 2020 ou introduites à compter de cette date, le tribunal de commerce ne pouvait constater, dans son jugement du 6 septembre 2020, que l’exécution de sa décision était de droit dès lors que l’action a été introduite par acte d’huissier du 27 décembre 2019, de sorte que l’exécution provisoire n’ayant pas été ordonnée conformément à l’ancien article 514 du code de procédure civile qui trouvait à s’appliquer, la saisie attribution pratiquée en vertu de ce jugement est nulle,

– que le juge de l’exécution est compétent par application de l’article L 213-6 du code de l’organisation judiciaire qui dispose qu’il connaît des difficultés relatives au titre exécutoire, pour statuer sur le fait que le jugement du 6 septembre 2020, frappé d’appel, est dépourvu de l’exécution provisoire de droit,

– à titre subsidiaire, que le juge de l’exécution ne devait pas se déclarer incompétent au profit du Premier président qui n’est pas compétent, en effet, pour arrêter une exécution provisoire qui a été constatée à tort ainsi que pour arrêter une exécution provisoire de droit qui n’est pas attachée à la nature de la décision rendue et à titre subsidiaire, il appartient la cour d’appel de désigner comme juridiction compétente le conseiller de la mise en état désigné dans le cadre de la procédure d’appel en cours à l’encontre du jugement du 6 septembre 2020,

– à titre infiniment subsidiaire, que le juge de l’exécution ne pouvait rejeter la demande de séquestre qui a en effet été formulée communément par les parties sur le fondement de l’article 1961 du Code civil.

Vu les dernières conclusions déposées le 15 juillet 2022 par la SASU LE NEPTUNE EN CAMARGUE, intimée, aux fins de voir :

– Réformer le jugement dont appel en ce qu’il a dit que le juge de l’exécution est compétent pour connaître de la présente procédure et en ce qu’il a débouté les parties du surplus de leurs demandes,

Et statuant à nouveau,

In limine litis,

– Se déclarer incompétent pour connaître du présent litige,

A titre subsidiaire,

– Se déclarer incompétent au profit du Premier Président de la cour d’appel d’Aix-en-Provence déjà saisie de l’instance,

A titre très subsidiaire, sur le fond,

– Déclarer valable la saisie attribution et confirmer en conséquence le jugement du 22 avril 2022 en ce qu’il a débouté Mme [Z] [T] de toutes ses demandes et l’a condamnée aux dépens et en ce qu’il a débouté les parties de leurs demandes formulées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

A titre infiniment subsidiaire,

– Ordonner le placement sous séquestre de la somme de 106 707,78 € saisie en vertu du jugement du 6 septembre 2021,

En tout état de cause,

– Débouter Mme [T] de toute demande plus ample ou contraire et la condamner au paiement d’une somme de 5000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

La société LE NEPTUNE EN CAMARGUE fait valoir :

– que seul le juge d’appel est compétent pour connaître d’une demande relative à la contestation de l’exécution provisoire,

– à titre subsidiaire, que Mme [T] ayant interjeté appel du jugement du 6 septembre 2021, seul le Premier président peut se prononcer sur l’exécution provisoire de cette décision,

– à titre très subsidiaire, sur le fond, que le jugement du 6 septembre 2021 a bien un caractère exécutoire dans la mesure où l’exécution provisoire est prévue dans son dispositif et quand bien même sa compétence serait retenue, il n’appartient pas au juge de l’exécution de modifier le dispositif de la décision conformément à l’article R 121-1 du code des procédures civiles d’exécution,

– à titre infiniment subsidiaire, si la présente juridiction s’estime compétente et si la mainlevée de la saisie devait être ordonnée, il y a lieu de séquestrer la somme de 106 707,78 € saisie afin d’éviter que Mme [T] n’organise son insolvabilité si la somme lui est restituée.

Vu l’ordonnance de clôture du 17 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Introduite par assignation en date du 27 décembre 2019, l’instance opposant Mme [T] à la société LE NEPTUNE EN CAMARGUE relevait du régime de l’exécution provisoire prévue par l’article 514 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable avant le décret du 11 décembre 2019 entré en vigueur le 1er janvier 2020 dont le paragraphe second de l’article 55 prévoit en effet que par dérogation au paragraphe premier qui dispose que le décret est applicable aux instances en cours à cette date, les dispositions de l’article 3 s’appliquent aux instances introduites devant les juridictions du premier degré à compter du 1er janvier 2020, ce dont il résulte que ledit article 3 ne s’applique pas aux instances introduites devant les juridictions du premier degré avant le 1er janvier 2020.

Le jugement du tribunal de commerce de Tarascon du 6 septembre 2021, qui a notamment condamné Mme [T] à payer diverses sommes à la société LE NEPTUNE EN CAMARGUE, a toutefois constaté l’exécution provisoire de droit, de sorte que Mme [T] soutient que cette décision, dont elle a interjeté appel, ne bénéficie pas de l’exécution provisoire.

La société LE NEPTUNE EN CAMARGUE soulève en réplique l’incompétence du juge de l’exécution.

Toutefois, conformément à l’article L 213-6 du code de l’organisation judiciaire qui dispose que ” Le juge de l’exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée “, la connaissance du moyen tiré de que le jugement du 6 septembre 2020 n’a aucun caractère exécutoire relève des pouvoirs juridictionnels du juge de l’exécution dès lors que l’exécution provisoire de droit constatée audit jugement constitue une difficulté relative au titre exécutoire et il est par ailleurs justifié avec la saisie attribution litigieuse de la mise en ‘uvre d’une mesure d’exécution forcée, le juge de l’exécution ne pouvant en effet être saisi de difficultés relatives à un titre exécutoire qu’à l’occasion d’une mesure d’exécution forcée.

Mais la mention erronée, qui n’a fait l’objet d’aucune requête en rectification devant la cour d’appel saisie du fond devant laquelle le jugement du 6 septembre 2021 a été déféré, figure au dispositif dudit jugement, or conformément à l’article R 121-1 du code des procédures civiles d’exécution, le juge de l’exécution ne peut modifier le dispositif de la décision qui sert de fondement aux poursuites, de sorte que c’est à bon droit que le premier juge a débouté Mme [T] de ce chef.

Par ailleurs, Mme [T], dont la demande infiniment subsidiaire de séquestre au seul motif de l’appel en cours ne peut prospérer en ce qu’elle se heurte à l’effet d’attribution immédiate prévu à l’article L 211-2 du code des procédures civiles d’exécution, soutient que le juge de l’exécution ne pouvait s’opposer à cette demande dans la mesure où elle avait été formée communément par les parties.

Mais cette demande n’a été formulée par la société LE NEPTUNE EN CAMARGUE qu’à titre infiniment subsidiaire, dans l’hypothèse où la mainlevée de la saisie serait ordonnée, ce qui n’est pas le cas, de sorte que la demande de séquestre de Mme [T] ne peut davantage prospérer.

Le jugement dont appel doit être en conséquence confirmé en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Vu l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [Z] [T] à payer à la société LE NEPTUNE EN CAMARGUE la somme de 2000 € (deux mille euros) ;

Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples ;

Condamne Mme [Z] [T] aux dépens qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRÉSIDENTE

 


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