Saisie-attribution : décision du 3 avril 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 22/00132

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Saisie-attribution : décision du 3 avril 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 22/00132

3 avril 2023
Cour d’appel de Douai
RG n°
22/00132

République Française

Au nom du Peuple Français

C O U R D ‘ A P P E L D E D O U A I

RÉFÉRÉ DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 3 AVRIL 2023

N° de Minute : 40/23

N° RG 22/00132 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UTTK

DEMANDEUR :

S.A.S. MAGNISFY FRANCE

dont le siège social est situé au [Adresse 4]

[Localité 1]

ayant pour avocats Me Charles DELEMME, avocat au barreau de Lille et Me Laurent BENOUAICH, avocat au barreau de Paris substitué à l’audience par Me Hélène BESANCON avocate

DÉFENDEURS :

S.A.S. SYXPERIANE

dont le siège social est situé au [Adresse 2]

[Localité 8]

S.A.S. SYXPERIANE GROUP

dont le siège social est situé au [Adresse 3]

[Localité 7]

ayant pour avocats Me Eric LAFORCE, avocat au barreau de Douai et Me Pierre LANGLAIS, avocat au barreau de Nantes

S.A.S. OSLO

dont le siège social est situé au [Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 6]

ayant pour avocats Me Marie- Hélène LAURENT, avocat au barreau de Douai et Me Jean LECLERQ, avocat au barreau de Lille

PRÉSIDENTE : Hélène CHATEAU, première présidente de chambre désignée par ordonnance du 21 décembre 2022 du premier président de la cour d’appel de Douai

GREFFIER : Christian BERQUET

DÉBATS : à l’audience publique du 6 mars 2023

Les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’ordonnance serait prononcée par sa mise à disposition au greffe

ORDONNANCE : contradictoire, prononcée publiquement par mise à disposition au greffe le trois avril deux mille vingt-trois, date indiquée à l’issue des débats, par Hélène CHATEAU, Présidente, ayant signé la minute avec Christian BERQUET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

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Exposé de la cause :

Le 23 décembre 2021, la société OSLO, qui exerce une activité d’édition de logiciel et de prestation de services informatiques, a cédé une partie de sa clientèle à la société SYXPERIANE GROUP dans le domaine de la «’fourniture de services et d’applications informatiques en matière d’intégration, d’hébergement et IT’».

Le 24 décembre 2021, la société OSLO a cédé à la société MAGNISFY FRANCE, qui exerce une activité d’édition de logiciels et de prestation de services informatiques, la propriété des logiciels NAVIBAT et NAVIONE, ainsi que les contrats clients s’y rattachant.

Par courriel en date du 8 février 2022, la société MAGNISFY FRANCE demandait à la société SYXPERIANE GROUP une intervention sur l’environnement de l’un de ses clients – Dalkia- . La société SYXPERIANE GROUP n’était pas informée qu’elle hébergeait des environnements utilisés par la société MAGNISFY FRANCE car le transfert d’hébergement n’était pas spécifiquement mentionné dans l’acte de cession, mais après vérification de ce que l’environnement de ce client était hébergé sur ses serveurs, a accepté d’intervenir auprès de ce client.

A partir du 1er avril 2022, un conflit est apparu entre ces trois sociétés concernant la question de l’hébergement des environnements informatiques et de leur facturation.

Le 22 avril 2022, la société SYXPERIANE GROUP a édité les factures d’hébergement à la société MAGNISFY FRANCE qui a refusé de les payer.

Le 9 mai 2022, alors que les factures n’avaient toujours pas été honorées, la société SYXPERIANE GROUP a décidé de couper des environnements de développement de la société MAGNISFY.

Le 10 mai 2022, la société OSLO a proposé de prendre en charge les factures d’hébergement et de les refacturer à la société MAGNISFY FRANCE afin de mettre un terme au litige. La société MAGNISFY a refusé cette solution.

La société MAGNISFY a alors assigné en référé d’heure à heure la société SYXPERIANE GROUP devant le tribunal de commerce de Paris afin que soit rétabli l’accès informatique sur les environnements des logiciels NAVIONE et NAVIBAT.

Le 24 mai 2022, la société SYXPERIANE GROUP a mis en demeure les sociétés OSLO et MAGNISFY FRANCE de payer ses factures des mois de décembre 2021 et de janvier à avril 2022, et de lui communiquer qui devait être le destinataire de ces factures. Parallèlement, elle a rétabli l’intégralité des services informatiques.

Dans son ordonnance du 25 mai 2022, le tribunal de commerce de Paris a ordonné aux sociétés OSLO et SYXPERIANE GROUP de rétablir et maintenir les accès de la société MAGNISFY aux applications et données de l’ensemble des licences NAVIONE et NAVIBAT afin que la société MAGNISFY FRANCE puisse intervenir auprès des clients hébergés par le société SYXPERIANE GROUP.

Le 8 juin 2022, la société SYXPERIANE a interjeté appel de l’ordonnance et demandé sa réformation.

Par courriel en date du 12 juin 2022, la société MAGNISFY FRANCE a mis en demeure la société OSLO de lui autoriser l’accès à l’un des serveurs.

Par courriel en date du 22 juin 2022, la société SYXPERIANE GROUP a demandé aux sociétés OSLO et MAGNISFY FRANCE le paiement des prestations effectuées, soit la somme de 128 587,67 euros TTC.

Par courriel en date du 24 juin 2022, la société MAGNISFY FRANCE a informé la société SYXPERIANE GROUP qu’elle refusait de s’acquitter du paiement des factures et lui a demandé, en retour, de restituer les environnements relatifs à ses clients, et ce sous huitaine.

Par exploit d’huissier en date des 12 et 13 juillet 2022, les sociétés SYXPERIANE et SYXPERIANE GROUP ont fait assigner à bref délai la société OSLO et la société MAGNISFY FRANCE devant le tribunal de commerce de Lille Métropole.

Par jugement contradictoire rendu le 18 octobre 2022, le tribunal de commerce de Lille Métropole a

– débouté la société OSLO de sa demande de nullité de l’assignation ;

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– dit que la société SYXPERIANE est étrangère à l’affaire ;

– dit que la société SYXPERIANE GROUP a qualité à agir ;

– débouté la société MAGNISFY FRANCE de sa demande de rejet des pièces transmises en délibéré;

– débouté la société MAGNISFY FRANCE de sa demande de sursis à statuer en attente de la décision d’appel de l’ordonnance de référé du 8 juin 2022 ;

– débouté la société MAGNISFY FRANCE de sa demande de sursis à statuer en attente du jugement du tribunal correctionnel ;

– condamné la société OSLO au paiement, à la société SYXPERIANE GROUP de la somme de 128 587,67 euros à parfaire à la date du jugement assortie d’une astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du quinzième jour suivant la notification du présent jugement et pendant une durée de 6 mois;

– dit que la société SYXPERIANE GROUP est bien fondée à facturer, la société OSLO, la somme mensuelle de 20 521,22 euros TTC jusqu’à migration des données dans un autre environnement ;

– condamné la société MAGNISFY FRANCE au paiement, à la société OSLO, de la somme de 96 232,83 euros pour l’hébergement des données clients, montant à parfaire à la date du jugement ;

– dit que la société OSLO est bien fondée à facturer, à la société MAGNISFY FRANCE, la somme mensuelle de 15 438,42 euros TTC jusqu’à migration des données dans un autre environnement ;

– dit que les frais de l’éventuelle migration des données clients et de l’environnement de production des logiciels NAVIONE et NAVIBAT seront à la charge de la société OSLO ;

– condamné la société MAGNISFY FRANCE au paiement, à la société OSLO, de la somme de 100 000 euros, avec intérêts au taux EONIA majoré d’un point à compter de l’exigibilité de chacune des mensualités ;

– condamné la société MAGNISFY FRANCE au paiement, à la société OSLO, de la somme de 17 347,80 euros ;

– condamné solidairement les sociétés OSLO et MAGNISFY FRANCE aux entiers frais et dépens de l’instance, taxés et liquidés à la somme de 100,32 euros en ce qui concerne les frais de greffe ;

– condamné la société OSLO au paiement de la somme de 10 000 euros à la société SYXPERIANE GROUP au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la société MAGNISFY FRANCE au paiement de la somme de 5 000 euros à la société OSLO au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– débouté les parties de leurs autres demandes ;

– ordonné l’exécution provisoire du présent jugement.

Procédure’:

Par déclaration en date du 16 novembre 2022, la société MAGNISFY FRANCE a interjeté appel de cette décision.

Par acte en date du 25 novembre 2022, la société MAGNISFY FRANCE a fait assigner en référé devant le premier président de la cour d’appel de Douai les sociétés SYXPERIANE, SYXPERIANE GROUP et OSLO afin, au visa de l’article 514-3 du code de procédure civile, d’obtenir l’arrêt de l’exécution provisoire attachée au jugement rendu le 18 octobre 2022 par le tribunal de commerce de Lille.

L’affaire appelée à l’audience du 12 décembre 2022 a été renvoyée à la demande des avocats.

Appelée à nouveau à l’audience du 16 janvier 2023, elle a de nouveau été renvoyée à la demande des avocats.

Prétentions et moyens des parties à l’audience du 6 mars 2023 :

La société MAGNISFY FRANCE demande de :

– arrêter l’exécution provisoire du jugement rendu le 18 octobre 2022 par le tribunal de commerce de Lille Métropole en ce qu’il :

1. l’a condamnée au paiement à la société OSLO de la somme de 96’232,83 € TTC pour l’hébergement des donnés clients montant à parfaire à la date du jugement,

2. a dit que la société OSLO est bien fondée à lui facturer la somme mensuelle de 15’438,42 € TTC jusqu’à la migration des données dans un autre environnement,

3. l’a condamnée à payer à la société OSLO la somme de 100’000 € avec intérêts au taux Eonia majoré d’un à compter de l’exigibilité de chacune des mensualités,

4. l’a condamnée à payer à la société OSLO la somme de 17’347,80 €,

5. l’a condamnée solidairement avec la société OSLO au mortier frais et dépens de l’instance, taxé liquidait à la somme de 100,32 € en ce qui concerne les frais de greffe,

6. l’a condamnée à payer à la société OSLO la somme de 5000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

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– condamner la société OSLO au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance ;

– rappeler que l’exécution provisoire est de droit.

Au soutien de ses prétentions, la société MAGNISFY FRANCE fait valoir l’existence de moyens sérieux d’annulation ou de réformation de la décision rendue en première instance en ce que :

– Sur les moyens relatifs à la mise hors de cause de la société SYXPERIANE au profit de la société SYXPERIANE GROUP :

– l’interlocuteur de la société MAGNISFY FRANCE, M. [H], signait ses courriels en tant que directeur général de la société SYXPERIANE et non en tant que directeur général de la société SYXPERIANE GROUP ;

– la société SYXPERIANE figurait dans le pavé de signature de courriels de M. [H] ;

– selon ses propres indications inscrites sur sa page Linkedin, M. [H] exerce bien son activité

professionnelle au sein de l’entreprise SYXPERIANE et non SYXPERIANE GROUP ;

– tous les courriels, ainsi que tous les documents contractuels, factures, etc. ont été signés au nom de la société SYXPERIANE ;

– la documentation contractuelle transmise à la société MAGNISFY FRANCE émanait bien de la société SYXPERIANE et non de SYXPERIANE GROUP ;

– la société SYXPERIANE intervient à toutes les étapes de l’affaire ;

– M. [H] indiquait lui-même, dans un de ses courriels, que l’activité d’hébergement était

exploitée par la société SYXPERIANE ;

– dans le courrier envoyé par la société OSLO pour présenter le nouvel hébergeur, cette dernière mentionne la société SYXPERIANE et non la société SYXPERIANE GROUP.

– Sur les moyens sérieux de réformation du jugement relatifs à la condamnation de la société MAGNISFY au paiement de sommes à la société OSLO au titre de l’hébergement des données clients:

– sur le principe de la prétendue responsabilité de la société MAGNISFY à l’égard de la société OSLO au titre de l’hébergement :

– au visa des articles 1188 et 1191 du code civil, l’obligation résultant de la lettre d’intention du 26 novembre 2021 suivant laquelle la société OSLO s’engageait à assurer l’hébergement des actifs cédés à la société MAGNISFY pour une durée indéterminée doit s’interpréter comme un engagement personnel de la société OSLO au profit de la société MAGNISFY et non comme la mise en place d’une relation de sous-traitance entre les deux entreprises ;

– cette prestation d’hébergement est aujourd’hui réalisée par la société SYXPERIANE en violation de l’engagement pris par la société OSLO.

– la société MAGNISFY ne pouvait donc être condamnée au paiement de sommes au profit de la société OSLO au titre de l’hébergement des actifs.

– sur le montant des condamnations au titre de cette prétendue responsabilité :

– le montant facturé ne correspond pas aux bases tarifaires «’utilisées par la société OSLO lorsqu’elle assurait la même prestation avant la cession de son fonds de commerce’» et cette dernière n’a jamais assuré cette prestation puisqu’elle a cédé l’activité d’hébergement à la société SYXPERIANE ;

– la société OSLO n’a jamais chiffré cette prestation à la société MAGNISFY par le passé

– la somme mensuelle visée et utilisée par la société SYXPERIANE GROUP reprend la facturation visée en annexe n° 10 de l’acte de cession entre la société MAGNISFY et la société OSLO. Or, cette somme a été fixée entre les deux sociétés dans l’urgence, à des montants très élevés et déconnectés du marché ;

– suite à la signature de l’acte de cession entre les sociétés OSLO et MAGNISFY dans l’urgence, les sommes devaient être justifiées et ajustées mais cela n’a jamais été fait car la documentation technique n’a jamais été fournie par la société OSLO et cette dernière a cherché à se dégager sa responsabilité de l’activité d’hébergement ;

– le montant fixé par le tribunal a été pris en considération des clients qui étaient alors hébergés. Or, ce nombre a diminué et les clients qui représentaient les parts plus importantes se sont tournés vers d’autres solutions ;

– le montant est d’autant plus injustifié que les prestations fournies par la société SYXPERIANE n’ont pas été correctement réalisées et ne le sont toujours pas, à ce jour;

– les dispositions de l’article 1199 du code civil ont été violées en ce que la société SYXPERIANE GROUP a utilisé l’annexe n° 10 du contrat de cession conclu entre les sociétés MAGNISFY et OSLO, alors qu’elle est un tiers au contrat ;

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Sur les moyens sérieux de réformation du jugement relatifs à la condamnation de la société MAGNISFY au paiement de sommes à la société OSLO au titre des factures d’accompagnement :

– la réalisation de mesures d’accompagnement n’a jamais été démontrée en première instance en violation de l’article 9 du code civil ;

– en réalité, les mesures d’accompagnement étaient des interventions rendues nécessaires par les manquements réalisés par la société OSLO ;

– du fait de ces manquements, la société MAGNISFY n’a jamais pu totalement entrer en jouissance des actifs cédés ;

– la société OSLO a donc perçu un prix de cession alors qu’elle n’a pas respecté ses engagements contractuels ;

– en tout état de cause, si les diligences réalisées par la société OSLO devaient être considérées comme des mesures d’accompagnement, la somme dont est redevable la société MAGNISFY à la société OSLO viendrait en compensation des sommes dues par la société OSLO à la société MAGNISFY au titre de ses manquements ;

– Sur les moyens sérieux de réformation du jugement relatifs à sa condamnation au paiement de sommes à la société OSLO au titre du crédit vendeur :

-au regard des nombreux manquements imputés à la société OSLO, elle est en droit de lui opposer une exception d’inexécution au demande en paiement des sommes demandées au titre du crédit-vendeur ;

-au regard des nombreuses réticences dolosives de la société OSLO dans le cadre du contrat de cession, elle est bien fondée à demander la nullité de l’acte de cession ;

-si le crédit-vendeur devait être considéré comme dû, la somme que lui doit la société OSLO viendrait en compensation des sommes qu’elle lui doit au titre de ses manquements ;

Sur les moyens sérieux de réformation du jugement relatifs au rejet des autres demandes notamment celles de la société MAGNISFY au titre des prestations de réversibilité (migration des données vers un autre hébergeur) :

-en l’absence d’astreinte attachée à l’obligation de la société OSLO d’assumer les frais relatifs à la migration, cela la met dans une position d’otage face à la société OSLO. De plus, la société SYXPERIANE refusera de réaliser les prestations qui sont les siennes.

Sur les moyens sérieux de réformation du jugement relatifs à sa condamnation au paiement des sommes à la société OSLO au titre des frais irrépétibles :

– elle a été trompée par la société OSLO et a fait l’objet de pression de la part de la société SYXPERIANE. L’action introduite n’est donc pas de son fait.

De plus, elle considère que l’exécution de la décision rendue en première instance entraînerait des conséquences manifestement excessives en ce que :

– elle ne dispose actuellement pas des ressources financières pour honorer les condamnations prononcées par le tribunal de commerce de Lille ;

– la société OSLO a commis de nombreux manquements avant et après la cession des actifs si bien qu’elle-même est contrainte de corriger ces erreurs plutôt que de se consacrer au développement de son activité ;

– les sommes générées par les distributeurs et les clients ne sont pas celles qu’elles auraient dû être puisqu’elle a dû faire face à la perte de nombreux clients.

Les sociétés Syxperiane et Syxperiane group demandent au premier président, sur le fondement des articles 514-3, 695 et 700 du code de procédure civile, de’:

– à titre principal, débouter la société MAGNISFY de sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire du jugement du 18 octobre 2022′;

– à titre subsidiaire, ordonner l’arrêt partiel de l’exécution provisoire du jugement du 18 octobre 2022 en ce qui concerne les seules condamnations prononcées à l’encontre de la société MAGNISFY’;

– en tout état de cause, débouter la société MAGNISFY de ses demandes au titre des articles 700 et 695 du code de procédure civile’;

– la condamner à lui verser la somme de 3 110,40 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;

– condamner la société MAGNISFY aux entiers dépens de l’instance.

Elles exposent qu’il n’existe pas de risque de conséquences manifestement excessives résultant de l’exécution provisoire car’:

– la société MAGNISFY ne produit aucun document comptable prouvant que ses ressources financières seraient insuffisantes’;

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– la situation financière d’une société ne se résume pas à ses seuls comptes bancaires’;

– la société MAGNISFY ne démontre pas l’impossibilité de procéder à une avance en compte courant, à des nantissements ou à la souscription d’un emprunt pour exécuter les condamnations’;

– la société MAGNISFY dispose de ressources suffisantes pour constituer la provision nécessaire à l’exécution des condamnations puisque, depuis le 24 décembre 2021, elle encaisse auprès de ses clients finaux le montant de la prestation d’hébergement litigieuse’;

– les condamnations prononcées contre elle, relatives à la prestation d’hébergement, correspondent strictement au paiement du montant qu’elle s’était elle-même engagée à payer’;

– en première instance, la société MAGNISFY n’a pas souligné un quelconque risque lié à l’exécution provisoire’;

Elles ajoutent qu’il n’existe pas de moyen sérieux de réformation ou d’annulation du jugement au sens de l’article 514-3 du code de procédure civile car la société MAGNISFY se contente d’invoquer des moyens de fond sur lesquels se prononcera la juridiction saisie du fond de l’affaire et non une violation grave et évidente de règles assurant les droits de la défense et du procès équitable ou encore d’une règle de droit.

La société OSLO demande à la présente juridiction au visa des dispositions de l’article 514 -3 du code de procédure civile de débouter la société MAGNISFY FRANCE de ses prétentions fins et conclusions, de débouter les SAS SYXPERIANE et SYXPERIANE GROUP de leurs prétentions à titre subsidiaire, de condamner la SAS MAGNISFY FRANCE au paiement de la somme de 4000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de la condamner au paiement des entiers frais et dépens de l’instance.

Elle indique que la société MAGNISFY ne justifie pas de conséquences manifestement excessives dès lors qu’elle a reçu les actifs, a bénéficié d’un hébergement de qualité, a refacturé ses clients et encaissé de ses clients le prix de l’hébergement sans régler de son côté les factures émises ; elle organise manifestement son insolvabilité, une simple attestation du solde de ses comptes bancaires

date donnée ne préjuge en rien de sa solvabilité, alors que la saisie attribution pratiquée le 30 janvier 2023 a révélé un disponible saisi de 52’618,74 €, précision étant faite qu’aucune contestation de cette saisie attribution n’a été formée.

Elle fait valoir par ailleurs qu’il n’y a pas davantage de moyens sérieux de réformation de la décision de première instance, ces moyens ne pouvant porter que sur les chefs de jugement emportant condamnations contrairement aux chefs du dispositif commençant par la mention «’dit que’» ;

elle précise que :

– elle n’a jamais eu l’obligation d’assurer personnellement l’hébergement des clients des environnements techniques et qu’elle pouvait en conséquence parfaitement le faire assurait par un tiers en l’espèce la société SYSPERIANE ;

– n’a été facturé que l’hébergement des clients tels que prévu dans l’acte de cession et l’annexe 10 expressément acceptés par la société MAGNISFY ;

– il ne peut lui être reproché la perte de plusieurs clients sur les cinq cédés dès lors que l’acte de cession ne prévoit aucune garantie d’irresponsabilité sur la pérennité de la clientèle ;

– la société MAGNISFY conteste pour la première fois le 25 novembre 2022 les factures d’accompagnement, et donc postérieurement au jugement,

– la société MAGNISFY a tous les éléments techniques, opérationnels et fonctionnels dont le fonds documentaire lié aux actifs cédés permettant leur exploitation,

la société MAGNISFY n’a pas présenté devant la juridiction de première instance à titre reconventionnel une demande en résolution de la cession, de sorte que le crédit vendeur est bien exigible,

– elle-même a exécuté les condamnations prononcées à son encontre au profit de la société SYSPERIANE en réglant un montant global de 212 066,88 euros.

MOTIFS DE LA DECISION

Il ressort des dispositions de l’article 514-3 alinéa 1er du code de procédure civile, applicable aux instances introduites après le 1er janvier 2020, ce qui est le cas de l’espèce, qu’en cas d’appel, le premier président peut arrêter l’exécution provisoire de la décision lorsque celle-ci risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives et lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation de la décision de première instance.

L’alinéa 2 du même article dispose que la demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d’observations sur l’exécution provisoire n’est recevable que si, outre l’existence d’un moyen sérieux d’annulation ou de réformation, l’exécution provisoire risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

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Il sera de suite précisé que dans le cadre du dispositif de ses conclusions présentées devant la juridiction de première instance, la société MAGNISFY avait expressément demandé que soit écartée l’exécution provisoire du jugement à intervenir, faisant alors état du risque de dilapidation des sommes auxquelles elle aurait été extraordinairement condamnée à payer à la société SYXPERIANE.

La présente juridiction note que le jugement du tribunal de commerce de Lille Métropole en date du 18 octobre 2022 n’a finalement prononcé aucune condamnation de la société MAGNISFY au profit de la société SYSPERIANE, mais a condamné la société OSLO à payer à la société SYSPERIANE GROUP les sommes dues au titre des factures émises sur la période du 24 décembre 2021 au 30 juin 2022 pour l’hébergement des environnements des clients finaux de la société MAGNISFY sur l’utilisation des logiciels Navione et Navibat et a ensuite condamné la société MAGNISFY au paiement d’un certain nombre de sommes au profit de la société OSLO au titre de l’hébergement des données clients, des mensualités dues au titre du crédit vendeur et des factures d’accompagnement.

Au sens de l’article 514-3 du code de procédure civile, doit donc être considéré comme ‘moyen sérieux d’annulation ou de réformation’, le moyen qui, en violation manifeste d’un principe fondamental de procédure, ou d’une règle de droit, serait retenu par la cour d’appel comme moyen d’infirmation de la décision de première instance sans contestation sérieuse sur le fond.

Par ailleurs, ne sont susceptibles d’arrêt de l’exécution provisoire que les condamnations pécuniaires prononcées à l’encontre de la société MAGNISFY FRANCE au profit de la société OSLO par le jugement du tribunal de commerce de Lille Métropole du 18 octobre 2022, de sorte qu’il ne sera pas répondu aux moyens développés par cette société relativement aux dispositions du jugement commençant par «’dit que’».

1. Sur la condamnation au paiement d’une somme de 96 232,83 euros

Le tribunal a considéré que la société OSLO était contractuellement chargée d’assurer l’hébergement des données de clients des solutions Navione et Navibat pour la société MAGNISFY FRANCE, sur la période du 24 décembre 2021 au 30 juin 2022 et ce moyennant une rémunération de 15 438,42 euros tel que précisé dans l’annexe 10 de l’acte de cession du 24 décembre 2021 et a donc condamné la société MAGNIFY FRANCE à payer à la société OSLO une somme de 96 232,83 euros.

La société MAGNISFY FRANCE fait valoir que tant dans la lettre d’intention du 26 novembre 2021 signée avec la société OSLO qu’à l’article 6.1 de l’acte de cession, la société OSLO s’était engagée à poursuivre l’hébergement des applications et données de l’ensemble des licences Navione et Navibat, afin de ne pas déstabiliser les clients, or elle s’est déchargée de cet hébergement auprès de la société SYSPERIANE, de sorte qu’OSLO n’est pas fondée à réclamer une quelconque rémunération pour un hébergement qu’elle n’a pas réalisé, ces prestations étant réalisées par un tiers en violation des engagements pris par OSLO.

La société OSLO considère quant à elle qu’elle ne s’est pas engagée personnellement à assurer la prestation d’hébergement et qu’elle pouvait transférer cette prestation à la société SYSPERIANE.

La question soulevée relève, comme le reconnaît d’ailleurs la société MAGNISFY elle-même dans ses conclusions d’une question d’interprétation du contrat, qui ressort de la compétence de la chambre commerciale de la cour d’appel de Douai, saisie de l’appel, de sorte que le moyen soulevé ne peut correspondre à une violation manifeste d’un principe fondamental de procédure, ou d’une règle de droit.

Par ailleurs, la présente juridiction constate que la facturation de la prestation correspond à celle prévue à l’annexe 10 du contrat de cession signé par la société MAGNISFY.

2. Sur la condamnation au paiement d’une somme de 100 000 euros

La société MAGNISFY FRANCE a été condamnée à payer à la société OSLO une somme de 100 000 euros avec intérêts au taux EONIA majoré d’un point à compter de l’exigibilité de chaque mensualité au titre de cinq mensualités de 20 000 euros de crédit vendeur tel que prévu à l’article 5 de l’acte de cession du 24 décembre 2021.

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Le jugement indiquait que la société MAGNISFY FRANCE était totalement silencieuse sur cette demande, ce qui est exact à la lecture des conclusions qu’elle avait présentées devant la juridiction. La

société MAGNISFY indique qu’elle avait formé des observations orales, mais n’en rapporte nullement la preuve.

Devant la présente juridiction, elle indique qu’elle a sollicité la nullité de l’acte de cession suivant assignation en date du 23 février 2023.

Ne peut toutefois être considéré comme un moyen sérieux au sens de l’article 514-3 du code de procédure civile tel que défini ci-dessus, le fait qu’une demande en nullité du contrat de cession a été formée en cause de procédure d’appel du jugement, après saisine de la présente juridiction, et ce quand bien même la société MAGNISFY aurait évoqué une telle action dans un courrier officiel d’avocat de mars 2022, le contrat de cession étant encore à ce jour valable et devant s’exécuter.

3. Sur la condamnation au paiement d’une somme de 17 347,80 euros

La société MAGNISFY FRANCE a été condamnée à payer à la société OSLO une somme de 17 347,80 euros au titre de trois factures d’accompagnement.

Là encore, le jugement indiquait que la société MAGNISFY FRANCE était totalement silencieuse sur cette demande, ce qui est exact à la lecture des conclusions qu’elle avait présentées devant la juridiction. La société MAGNISFY indique qu’elle avait formé des observations orales, mais n’en rapporte nullement la preuve.

Devant la présente juridiction, elle indique que ces diligences facturées n’ont pas pu être démontrées et s’il y en a eues, il s’agissait d’interventions rendues nécessaires du fait du propre manquement par la société OSLO à ses obligations, ce qu’en effet son avocat avait déjà écrit dans le courriel adressé le 2 mars 2022 au conseil de la société OSLO.

La présente juridiction note que la convention signée entre les sociétés MAGNISFY FRANCE et OSLO le 24 décembre 2021, laquelle n’a pas été annulée à ce jour, prévoyait bien une facturation de l’accompagnement que la société OSLO pourrait réaliser dans les trois mois suivant la cession, que les trois factures des 20 janvier 2022, 25 janvier 2022et 11 mars 2022, d’un montant total de 17 347,80 euros détaillent les prestations d’accompagnement et que les contestations formées par la société MAGNISFY ne peuvent être considérées comme un moyen sérieux au sens de l’article 514-3 du code de procédure civile tel que défini ci-dessus.

4. Sur la condamnation au paiement d’une indemnité d’article 700 du code de procédure civile et aux dépens en première instance

Dans la mesure où la société MAGNISFY FRANCE apparaît bien comme la partie perdante en première instance, il est en conséquence légitime qu’elle ait été condamnée aux dépens, alors même que les moyens relatifs aux condamnations pécuniaires principales viennent d’être jugés comme des moyens non sérieux au sens de l’article 514-3 du code de procédure civile ; la condamnation au paiement d’une indemnité d’article 700 du code de procédure civile, fut-elle conséquente, apparaît tout aussi fondée.

5. Sur le débouté de la demande d’arrêt d’exécution provisoire

La présente juridiction n’ayant retenu aucun moyen sérieux au sens de l’article 514-3 du code de procédure civile, la société MAGNISFY sera déboutée de sa demande d’arrêt d’exécution provisoire de la décision du tribunal de commerce de Lille Métropole du 18 octobre 2022, sans même qu’il soit nécessaire de rechercher s’il existe des conséquences manifestement excessives au maintien de l’exécution provisoire, les conditions de moyens sérieux et de conséquences manifestement excessives étant cumulatives.

6. Sur les mesures accessoires

La société MAGNISFY FRANCE partie perdante sera condamnée aux dépens de la présente instance en application de l’article 696 du code de procédure civile et au paiement d’une indemnité d’article 700 du code de procédure civile à la société SYXPERIANE GROUP de deux mille euros et à la société OSLO de deux mille euros.

132/22 – 9ème page

PAR CES MOTIFS

Déboute la société MAGNISFY FRANCE de sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire du jugement du tribunal de commerce de Lille Métropole en ce que :

1. il l’a condamnée au paiement à la société OSLO de la somme de 96’232,83 € TTC pour l’hébergement des donnés clients montant à parfaire à la date du jugement,

2. il a dit que la société OSLO est bien fondée à lui facturer la somme mensuelle de 15’438,42€ TTC jusqu’à la migration des données dans un autre environnement,

3. l’a condamnée à payer à la société OSLO la somme de 100’000 € avec intérêts au taux Eonia majoré d’un à compter de l’exigibilité de chacune des mensualités,

4. l’a condamnée à payer à la société OSLO la somme de 17’347,80 €,

5. l’a condamnée solidairement avec la société OSLO au mortier frais et dépens de l’instance, taxé liquidait à la somme de 100,32 € en ce qui concerne les frais de greffe,

6. l’a condamnée à payer à la société OSLO la somme de 5000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Déboute la société MAGNISFY FRANCE de sa demande de condamnation de la société OSLO au paiement d’une indemnité d’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société MAGNISFY FRANCE aux dépens de la présente instance,

Condamne la société MAGNISFY FRANCE à payer à la société OSLO la somme de 2000 euros d’indemnité d’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société MAGNISFY FRANCE à payer à la société SYXPERIANE GROUP la somme de 2000 euros d’indemnité d’article 700 du code de procédure civile.

Le greffier La présidente

C. BERQUET H. CHÂTEAU

 


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