Saisie-attribution : décision du 23 mars 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 22/02047

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Saisie-attribution : décision du 23 mars 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 22/02047

23 mars 2023
Cour d’appel de Poitiers
RG n°
22/02047

Ordonnance n 10

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23 Mars 2023

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N° RG 22/02047 –

N° Portalis DBV5-V-B7G-GTPR

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[M] [U]

C/

[K] [X],

S.C.I. LES 5 SAUTS

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Ordonnance notifiée aux parties le :

R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

ORDONNANCE DU PREMIER PRESIDENT

Contestation d’honoraires d’avocat

Rendue le vingt trois mars deux mille vingt trois

Dans l’affaire qui a été examinée en audience publique le vingt six janvier deux mille vingt trois par Monsieur Didier DE SEQUEIRA, président de chambre, agissant sur délégation de la première présidente de la cour d’appel de POITIERS, conformément à son ordonnance en date du 1er décembre 2022, assisté de Madame Inès BELLIN, greffier, lors des débats.

ENTRE :

Maître [M] [U]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant en personne

DEMANDEUR en contestation d’honoraires,

D’UNE PART,

ET :

Monsieur [K] [X]

[Adresse 2]

[Localité 4]

S.C.I. LES 5 SAUTS

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentés par Me Anne-laure BLOUIN de la SCP FORT-BLOUIN-BOSSANT, avocat au barreau des DEUX-SEVRES

DEFENDEURS en contestation d’honoraires,

D’AUTRE PART,

ORDONNANCE :

– Contradictoire

– Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

– Signée par Monsieur Didier DE SEQUEIRA, président de chambre, et par Madame Inès BELLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

Par lettre enregistrée le 31 mars 2022, Monsieur [K] [X] a saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Poitiers en son nom personnel et en sa qualité de gérant de la SCI LES 5 SAUTS, d’une contestation des honoraires facturés par Maître [M] [U].

Par décision en date du 18 juillet 2022, le bâtonnier a retenu que la SCI LES 5 SAUTS n’était pas valablement présente à la procédure, Monsieur [K] [X] ne justifiant pas de sa qualité à la représenter et a fixé les honoraires dus par Monsieur [K] [X] à la somme de 2 000 euros hors taxes, soit 2 400 euros toutes taxes comprises et ceux dus par la SCI LES 5 SAUTS à la somme de 3 786 euros hors taxes, soit 4 543,20 euros toutes taxes comprises.

La décision du bâtonnier a été notifiée à Maître [M] [U] le 20 juillet 2022, lequel a formé un recours entre les mains de la première présidente de la cour d’appel de Poitiers le 29 juillet 2022.

L’affaire, appelée une première fois à l’audience du 20 octobre 2022, a été renvoyée à l’audience du 26 janvier 2023.

Maître [M] [U] expose avoir été mandaté par Monsieur [K] [X] et la SCI LES 5 SAUTS dans le cadre de six procédures.

Dossier [G] (deux procédures) :

Maître [M] [U] expose avoir été mandaté par la SCI LES 5 SAUTS dans le cadre d’un litige de construction, succédant à un précédent confrère.

Il indique qu’une convention d’honoraires a été signée prévoyant un honoraire au temps passé selon un taux horaire de 150 euros hors taxes de l’heure, soit 180 euros toutes taxes comprises, outre un honoraire de résultat de 10% hors taxes. Ladite convention prévoyait que les honoraires pouvaient se situer entre 1 200 euros toutes taxes comprises et 3 000 euros toutes taxes comprises.

Maître [M] [U] déclare être intervenu après le dépôt du rapport d’expertise judiciaire et avoir suivi la procédure en première instance et en appel.

Il indique que les diligences accomplies ont été facturées 3 000 euros toutes taxes comprises, outre un honoraire de résultat de 1 500 euros hors taxes, réduit à 1 268 euros hors taxes.

Maître [M] [U] sollicitait devant le bâtonnier, à titre reconventionnel, la fixation de ses honoraires à la somme de 3 000 euros toutes taxes comprises, outre un honoraire de résultat de 1 286 euros hors taxes, soit 1 543 euros toutes taxes comprises sur la base de la convention d’honoraires signée par la gérante de la SCI, Madame [X].

Il sollicite aujourd’hui la somme complémentaire de 279 euros toutes taxes comprises correspondant à la réduction consentie sur l’honoraire de résultat.

Dossier HSBC :

Maître [M] [U] indique avoir été mandaté par Monsieur [K] [X] à la suite de la délivrance d’un commandement de payer.

Il déclare avoir réalisé des démarches précontentieuses, lesquelles ont été facturées 400 euros hors taxes, soit 480 euros toutes taxes comprises.

Maître [M] [U] indique avoir saisi le juge de l’exécution en urgence aux fins de solliciter des délais de paiement, ces diligences ayant été facturées 700 euros hors taxes soit 840 euros toutes taxes comprises.

Dossiers EAUX DE LA VIENNE, [N] et [P] [F]

Maître [M] [U] indique avoir été mandaté par Monsieur [K] [X] dans trois autres dossiers pour lesquels les diligences accomplies ont été facturées 1 725 euros hors taxes, soit 2 070 euros toutes taxes comprises.

Il expose avoir sollicité la taxation de ses honoraires à la somme de 1 725 euros hors taxes pour ces trois dossiers, mais que sa demande n’aurait pas été comprise par le bâtonnier, lequel a taxé ses honoraires à la somme de 900 euros hors taxes.

Maître [M] [U] sollicite la réformation de la décision du bâtonnier sur ce point et la fixation de ses honoraires à la somme de 1 725 euros toutes taxes comprises pour les diligences accomplies dans les trois dossiers ainsi que la condamnation in solidum de la SCI LES 5 SAUTS et de Monsieur [K] [X] à lui payer la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [K] [X] et la SCI DES 5 SAUTS, représentés à l’audience par leur conseil, Maître Anne-Laure BLOUIN, font valoir que la facturation de Maître [M] [U] manque de clarté et s’en rapportent aux observations présentées dans le cadre de la procédure devant le bâtonnier.

Devant le bâtonnier, Monsieur [K] [X] exposait avoir confié la défense de ses intérêts et ceux de la SCI LES 5 SAUTS à Maître [M] [U].

Monsieur [K] [X] contestait le travail accompli par son avocat dans le dossier [G], l’estimant trop succinct.

Concernant le dossier HSBC, Monsieur [K] [X] contestait la qualité de travail de son avocat, faisant valoir que l’assignation rédigée par Maître [M] [U] devant le tribunal judiciaire de Poitiers n’était pas suffisamment étayée.

Il indiquait avoir réglé à son avocat la somme de 480 euros toutes taxes comprises en rémunération de ses diligences dans ce dossier.

Concernant le dossier EAUX DE LA VIENNE, Monsieur [K] [X] faisait valoir que les diligences de Maître [M] [U] dans ce dossier s’étaient limitées à adresser une lettre recommandée aux services des finances publiques.

Il déclarait avoir réglé à son avocat la somme de 720 euros toutes taxes comprises en rémunération de son travail.

Concernant le dossier [N], Monsieur [K] [X] faisait valoir que Maître [M] [U] ne justifiait d’aucune diligence dans ce dossier.

Concernant le dossier [P] [F], Monsieur [K] [X] contestait de nouveau la qualité de travail de son avocat, faisant valoir que Maître [M] [U] n’aurait pas tenu compte de ses observations dans la rédaction de ses conclusions et qu’il n’aurait pas communiqué les pièces utiles dans le cadre de la procédure.

Il estimait que les manquements de son avocat dans ce dossier auraient abouti à une décision défavorable.

MOTIFS

Sur la recevabilité :

Selon l’article 176 du décret du 27 novembre 1991, la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d’appel qui est saisi par l’avocat ou la partie par lettre recommandée avec accusé de réception. Le délai de recours est d’un mois à compter de la notification de la décision.

En l’espèce, la décision du bâtonnier a été notifiée à Maître [M] [U] le 20 juillet 2022, lequel a formé un recours entre les mains de la première présidente de la cour d’appel de Poitiers le 29 juillet 2022.

Le recours de Maître [M] [U] est donc recevable et régulier en la forme.

Sur le fond :

Les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires des avocats sont réglées en recourant à la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991.

Il résulte de l’article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971, modifié par la loi du 10 juillet 1991 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, que sauf en cas d’urgence ou de force majeure ou lorsqu’il intervient au titre de l’aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, l’avocat conclut par écrit avec son client une convention d’honoraires, qui précise notamment le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.

A défaut de convention, les honoraires sont fixés au regard de la situation de fortune du client, de la difficulté de l’affaire, des frais exposés par l’avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci, conformément au quatrième alinéa de l’article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971.

Il sera rappelé qu’il n’entre pas dans les pouvoirs du juge de l’honoraire de se prononcer sur l’éventuelle responsabilité civile de l’avocat à l’égard de son client lié au manquement à son devoir de conseil et d’information, ou à une exécution défectueuse de sa prestation. De tels griefs relèvent de la responsabilité professionnelle de l’avocat et non de l’évaluation des honoraires et ils ne peuvent pas non plus justifier une réduction de sa rémunération.

Dossier [G] :

En l’espèce, il résulte des pièces produites et des explications données par les parties que la SCI LES 5 SAUTS a confié la défense de ses intérêts à Maître [M] [U] dans le cadre d’un litige en droit de la construction.

Une convention d’honoraires a été signée, laquelle prévoit une rémunération au temps passé au taux horaire de 150 euros hors taxes, outre un honoraire de résultat de 10%. Ladite convention prévoit des honoraires situés entre 1 200 euros toutes taxes comprises et 3 000 euros toutes taxes comprises.

Sur l’honoraire de diligences :

Au vu des pièces produites et des explications des parties, il est établi que Maître [M] [U] a accompli les diligences suivantes :

l’étude du dossier,

la rédaction d’une assignation au fond ;

le suivi de la procédure de première instance ;

la rédaction d’une déclaration d’appel ;

la rédaction de conclusions d’appelant ;

le suivi de la procédure d’appel ;

la représentation de la SCI LES 5 SAUTS aux audiences de plaidoirie ;

la rédaction d’une requête aux fins de rectification d’erreur matérielle.

Les honoraires facturés par Maître [M] [U] s’établissent à la somme de 3 000 euros toutes taxes comprises, correspondant à 16 heures et 40 minutes de travail sur la base d’un taux horaire de 180 euros toutes taxes comprises.

Il apparaît que la facturation appliquée est parfaitement justifiée au regard des diligences accomplies et conforme à la convention d’honoraires signée par les parties.

Dès lors, c’est à juste titre que le bâtonnier a taxé les honoraires de Maître [M] [U] à la somme de 3 000 euros toutes taxes comprises au regard des diligences accomplies dans le dossier.

Sur l’honoraire de résultat :

En complément de l’honoraire de diligence, la convention d’honoraires signée par la SCI LES 5 SAUTS prévoit un honoraire de résultat de 10% hors taxes des sommes obtenues au profit des la SCI dans le cadre d’une décision judiciaire ou d’une transaction.

Cet honoraire de résultat a été librement accepté par la SCI LES 5 SAUTS.

Maître [M] [U] sollicitait, en application de cet honoraire de résultat, la somme de 1 268 euros hors taxes, soit 1 521 euros toutes taxes comprises, après avoir accepté de réduire le montant de son honoraire de 232 euros hors taxes, soit 279 euros toutes taxes comprises.

Il sollicite aujourd’hui la somme complémentaire de 279 euros toutes taxes comprises au titre de cet honoraire de résultat correspondant à la réduction consentie à son client et verse aux débats une troisième facture d’honoraire de résultat datée du 12 avril 2022 pour fonder sa demande.

Cette facture doit être écartée en ce qu’elle a été émise après l’ouverture de la procédure d’arbitrage.

En conséquence, il y a lieu de fixer l’honoraire de résultat dû à Maître [M] [U] à la somme de 1 268 euros hors taxes, soit 1 521 euros toutes taxes comprises.

Dossier HSBC :

En l’espèce, il résulte des pièces produites et des explications données par les parties que Monsieur [K] [X] a confié la défense de ses intérêts à Maître [M] [U] à la suite de la délivrance d’un commandement de payer.

Aucune convention d’honoraires n’a été signée par les parties.

Au vu des pièces produites et des explications des parties, il est établi que Maître [M] [U] a accompli les diligences suivantes :

une consultation au stade du commandement de payer,

des échanges avec le client ;

la rédaction d’une assignation devant le juge de l’exécution à la suite d’une saisie-attribution.

Les honoraires facturés par Maître [M] [U] s’établissent à la somme de 1 100 euros hors taxes, soit 1 320 euros toutes taxes comprises, se décomposant comme suit :

400 euros hors taxes au titre de la consultation,

700 euros hors taxes au titre de la procédure devant le juge de l’exécution, laquelle n’a pas été menée à son terme.

Il apparaît que la facturation appliquée est parfaitement justifiée au regard des diligences accomplies et n’excède pas les tarifs habituellement pratiqués.

Dès lors, c’est à juste titre que le bâtonnier a taxé les honoraires de Maître [M] [U] à la somme de 1 100 euros hors taxes.

Dossiers EAUX DE LA VIENNE, [N] et [P] [F]

En l’espèce, il résulte des pièces produites et des explications données par les parties que Monsieur [K] [X] a confié la défense de ses intérêts à Maître [M] [U] dans trois autres dossiers.

Aucune convention d’honoraires n’a été signée par les parties dans ces trois dossiers.

Les honoraires facturés par Maître [M] [U] dans ce dossier s’établissent à la somme de 1 725 euros hors taxes, soit 2 070 euros toutes taxes comprises.

Le bâtonnier a taxé les honoraires de Maître [M] [U] à la somme de 900 euros hors taxes au titre des diligences accomplies dans ces trois dossiers.

Maître [M] [U] sollicite l’infirmation de l’ordonnance de taxe du bâtonnier sur ce point estimant que sa demande aurait été mal comprise par le bâtonnier.

Il indique que les diligences accomplies dans le dossier EAUX DE LA VIENNE se sont limitées à 1 heure et 30 minutes.

Il justifie de la rédaction d’un courrier de mise en demeure à l’attention du trésor public, impliquant une prise de connaissance du dossier et des échanges avec le client.

Concernant le dossier [N], il résulte des éléments versés aux débats que les diligences de Maître [M] [U] se sont limitées à une prise de connaissance du dossier et une correspondance adressée à l’huissier de justice. Il estime le temps consacré à ce dossier à une heure de travail.

S’agissant du dossier [P] [F], il résulte des pièces produites et des explications données par les parties que Maître [M] [U] a accompli les diligences suivantes :

une opposition à injonction de payer devant le tribunal de commerce,

la rédaction de conclusions en défense devant le tribunal judiciaire de Poitiers, statuant en référé.

Ainsi, il y a lieu de considérer que le travail de Maître [M] [U] dans le dossier [P] [F] n’a pas excédé 3 heures et 30 minutes.

Dès lors, au regard des diligences accomplies et du taux horaire pratiqué, c’est à juste titre que le bâtonnier a taxé les honoraires de Maître [M] [U] à la somme de 900 euros hors taxes, se décomposant comme suit :

225 euros hors taxes, soit 270 euros toutes taxes comprises au titre des diligences accomplies dans le dossier EAUX DE LA VIENNE,

150 euros hors taxes, soit 180 euros toutes taxes comprises au titre des diligences accomplies dans le dossier [N] ;

525 euros hors taxes, soit 630 euros toutes taxes comprises au titre des diligences accomplies dans le dossier [P] [F].

La décision du bâtonnier sera donc confirmée.

Sur l’article 700 du code de procédure civile :

Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens en tenant compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.

En l’espèce, l’équité justifie qu’il ne soit pas faire droit à la demande de Maître [M] [U] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur les dépens :

L’article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

Au regard de la situation, il n’apparaît pas inéquitable de laisser à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

PAR CES MOTIFS :

Nous, Didier DE SEQUEIRA, statuant par délégation de la première présidente, par mise à disposition au greffe et par ordonnance contradictoire,

Déclarons le recours de Maître [M] [U] recevable et régulier en la forme ;

Confirmons l’ordonnance du bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Poitiers en date du 18 juillet 2022 ;

Déboutons Maître [M] [U] de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;

Disons que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

Le greffier, Le président de chambre,

 


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