Saisie-attribution : décision du 20 décembre 2023 Tribunal judiciaire de Paris RG n° 23/81881

·

·

Saisie-attribution : décision du 20 décembre 2023 Tribunal judiciaire de Paris RG n° 23/81881

20 décembre 2023
Tribunal judiciaire de Paris
RG n°
23/81881

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS


REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
N° RG 23/81881 – N° Portalis 352J-W-B7H-C3H5J

N° MINUTE :

CE à Me JOURNO
CCC aux parties en LRAR
Le :
PÔLE DE L’EXÉCUTION
JUGEMENT rendu le 20 décembre 2023

DEMANDERESSE

La société ORBITAL
RCS DE PARIS 410 667 034
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Me Nathalie JOURNO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #D2108, Me Richard NAHMANY, avocat au barreau de VERSAILLES,

DÉFENDERESSE

La société AMYCONTRACT
domiciliée : chez SAS ID FACTO
[Adresse 2]
[Localité 4]

non comparante

JUGE : Monsieur Cyril ROTH, 1er Vice-Président adjoint, juge de l’Exécution par délégation du Président du Tribunal judiciaire de PARIS.

GREFFIER : Madame Camille RICHY lors des plaidoiries
Madame [L] [R] lors de la mise à disposition

DÉBATS : à l’audience du 29 Novembre 2023 tenue publiquement,

JUGEMENT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, réputé contradictoire, susceptible d’appel

EXPOSE DU LITIGE

Par un jugement du 23 juin 2022, le tribunal de commerce de Paris a condamné la société Orbital à verser diverses sommes à la société italienne Amycontract.

Sur le fondement de cette décision, la société Amycontract a, le 6 octobre 2023, fait pratiquer deux saisies-attribution sur les comptes de la société Orbital dans les livres de la banque BNP Paribas et respectivement de la Caisse d’épargne Ile-de-France. Ces saisies ont été dénoncées le 10 octobre suivant à la débitrice.

Le 7 novembre 2023, la société Orbital a assigné la société Amycontract devant le juge de l’exécution.

Elle sollicite la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée entre les mains de la Caisse d’épargne, l’allocation de 30.000 € de dommages intérêts, le séquestre des sommes appréhendées entre les mains de la BNP Paribas, enfin une indemnité de procédure de 5.000 €.
En défense, la société Amycontract, assignée au domicile élu de l’huissier instrumentaire des saisies-attribution contestées, n’a pas comparu.

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions de la demanderesse, il est fait référence au contenu de l’assignation introductive d’instance.

MOTIFS

Sur la recevabilité de la contestation

Les contestations ont été introduites dans le mois de la dénonciation des saisies-attribution à la partie débitrice.

L’assignation introductive d’instance a été dénoncée à l’huissier les ayant instrumentées par lettre recommandée avec accusé de réception, avant l’expiration du premier jour ouvrable suivant sa délivrance.

La contestation des deux saisies est donc recevable au regard des dispositions de l’article R. 211-11 du code des procédures civiles d’exécution.

Sur la demande de mainlevée

Selon l’article L. 121-2 du code des procédures civiles d’exécution, le juge de l’exécution peut ordonner la mainlevée de toute mesure inutile.

En l’espèce, chacune des saisies contestées a été opérée pour paiement d’une somme globale de 251.371,53 €.

La saisie opérée entre les mains de la banque BNP Paribas a permis d’appréhender la totalité de cette somme, le compte étant créditeur de plus de 900.000 € ; il s’ensuit que le maintien de la saisie opérée entre les mains de la Caisse d’épargne, elle aussi fructueuse en totalité, est inutile ; la mainlevée ne peut qu’en être ordonnée.

Sur la demande de dommages intérêts

Selon l’article L. 213-6 du code de l’organisation judiciaire, le juge de l’exécution connaît des demandes en réparation fondées sur l’exécution dommageable des mesures d’exécution forcée.

En l’espèce, il est établi que, nonobstant une réclamation formée le 19 octobre 2023 auprès du commissaire de justice instrumentaire, la saisissante s’est abstenue de donner spontanément mainlevée de la saisie opérée entre les mains de la Caisse d’épargne.

Cette faute a emporté pour la débitrice un déficit de trésorerie, cette saisie ayant immobilisé quelque 250.000 € entre le 6 octobre 2023 et ce jour, soit durant deux mois et demi.

Ce préjudice sera justement indemnisé par l’allocation à titre de dommages intérêts d’une somme forfaitaire de 5.000 €.

Sur la demande de séquestre

La demande est fondée sur les dispositions de l’article R. 211-2 du code des procédures civiles d’exécution selon lequel, en matière de saisie-attribution, dans le délai prévu à l’article R. 211-11, tout intéressé peut demander que les sommes saisies soient versées entre les mains d’un séquestre désigné, à défaut d’accord amiable, par le juge de l’exécution saisi sur requête, la remise des fonds au séquestre arrêtant le cours des intérêts dus par le tiers saisi.

La Cour de cassation ne s’est jamais prononcée sur l’interprétation de ce texte, qui institue un mécanisme un peu différent de celui, purement prétorien, qu’elle avait dégagée en matière de saisie-arrêt (voir la jurisprudence citée par le professeur [G] au Jcl Voies d’exécution, fasc. 660 : Saisie-attribution – procédure : paiement, §§ 66 et suivants).

On peut admettre que la demande de séquestre soit présentée par voie d’assignation, ou par voie de conclusions présentées au cours d’une instance engagée devant le juge de l’exécution, plutôt que de requête (CA Paris, 29 novembre 2018, n°17-21882), pourvu qu’elle soit formée dans le délai d’un mois prévu à l’article R. 211-11 du code des procédures civiles d’exécution.

Mais seul le tiers saisi peut avoir intérêt à se décharger des intérêts éventuellement dus sur les sommes appréhendées par la saisie en sollicitant la nomination d’un séquestre.

La doctrine a imaginé encore que la faculté de solliciter un séquestre soit utilisée par le créancier saisissant, afin de se prémunir contre la survenance de l’insolvabilité du tiers saisi durant le temps nécessaire pour régler une contestation soulevée par le débiteur ([S] & [H], Procédures civiles d’exécution, §406).

En tout cas, la contestation ouverte au débiteur par les dispositions de l’article L. 211-4 du code des procédures civiles d’exécution a déjà pour effet, selon l’article L. 211-5, de différer le paiement, et il n’entre pas dans les pouvoirs du juge de l’exécution de porter atteinte à l’effet attributif immédiat de la saisie-attribution en ordonnant le séquestre des sommes appréhendées par la saisie dans le jugement statuant sur une telle contestation (CA Paris, 19 novembre 2020, n°19/14750 ; 18 juin 2020, n°19/03459 ; 12 mars 2020, n°20/00799).
En l’espèce, la demanderesse ayant la qualité de débitrice des sommes allouées à la défenderesse par le jugement du 23 juin 2022 dont l’exécution est poursuivie, sa demande de séquestre des sommes appréhendées par la saisie-attribution entièrement fructueuse opérée entre les mains de la banque BNP Paribas est irrecevable.

Au reste, au soutien de cette prétention, elle fait surtout valoir que le jugement l’a condamnée à tort et qu’elle en a interjeté appel, argumentation qui, à l’évidence, échappe au pouvoir d’appréciation du juge de l’exécution.

Sur les demandes accessoires

L’équité commande d’allouer à la demanderesse l’indemnité de procédure fixée au dispositif.

PAR CES MOTIFS,

le juge de l’exécution

Donne mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 6 octobre 2023 entre les mains de la Caisse d’épargne Ile-de-France ;

Condamne la société Amycontract à verser à la société Orbital la somme de 5.000 € à titre de dommages intérêts ;

Rejette la demande de séquestre ;

Condamne la société Amycontract à verser à la société Orbital la somme de 1.500  € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Amycontract aux dépens.

Le greffierLe juge de l’exécution

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x