Saisie-attribution : décision du 17 janvier 2024 Cour d’appel de Lyon RG n° 21/01338

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Saisie-attribution : décision du 17 janvier 2024 Cour d’appel de Lyon RG n° 21/01338

17 janvier 2024
Cour d’appel de Lyon
RG n°
21/01338

N° RG 21/01338 – N° Portalis DBVX-V-B7F-NNME

Décision du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Lyon

au fond du 14 janvier 2021

RG : 17/05763

S.A.S. MEDIPROM

C/

Société SCCV MILLION

S.A.R.L. SCRUB ARCHITECTES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

8ème chambre

ARRÊT DU 17 Janvier 2024

APPELANTE :

La SAS MEDIPROM, au capital de 10 000 €, immatriculée au RCS de LYON sous le n° 752 159 723 dont le siège social est [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

Représentée par Me Eric CESAR de la SELARL LEGI AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 664

INTIMÉES :

La société SCRUB ARCHITECTES, Société à responsabilité limitée au capital de 2 500 €, immatriculée au RCS de GRENOBLE sous le numéro 791 206 394, dont le siège social est situé [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

Représentée par Me Yves TETREAU de la SELARL VERNE BORDET ORSI TETREAU, avocat au barreau de LYON, toque : 680

La SCCV MILLION, au capital de 1.000 €, immatriculée au RCS de LYON sous le n°793 670 399, dont le siège social est [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

Intimée sur appel provoqué

Représentée par Me Eric CESAR de la SELARL LEGI AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 664

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 23 Novembre 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 08 Novembre 2023

Date de mise à disposition : 17 Janvier 2024

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

– Bénédicte BOISSELET, président

– Véronique MASSON-BESSOU, conseiller

– Véronique DRAHI, conseiller

assistés pendant les débats de William BOUKADIA, greffier

A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Bénédicte BOISSELET, président, et par William BOUKADIA, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant acte d’engagement signé le 18 avril 2013, la SAS Mediprom, promoteur immobilier, a confié à la SARL Scrub Architectes une mission de maîtrise d”uvre de conception pour la construction d’un programme de 75 logements en résidence service pour personnes âgées sur un terrain situé [Adresse 3] à [Localité 4] moyennant une rémunération de 196’144 € TTC correspondant à 3,8% du coût prévisionnel des travaux.

Prétendant que ses factures n°6 et 7, datées des 3 mars 2015 et 21 janvier 2016, pour la somme totale de 72’000 € n’avaient pas été réglées, la SARL Scrub Architectes a adressé des relances à la SCCV Million par lettre des 18 mai et 4 juillet 2016 et par lettre recommandée de son conseil en date du 8 septembre 2016.

En l’absence de paiement, la SARL Scrub Architectes a attrait la SAS Mediprom en référé provision devant le Président du Tribunal de commerce de Lyon. Par ordonnance de référé rendue le 22 décembre 2016, le juge consulaire a, d’une part, déclaré irrecevables les demandes dirigées à l’encontre de la SCCV Million qui n’est pas intervenue volontairement à l’instance, et d’autre part, dit que les demandes dirigées contre la SAS Mediprom (présentées à titre principal en sa qualité de débiteur principal, et à titre subsidiaire en sa qualité d’actionnaire de la SCCV Million) se heurtait à une contestation sérieuse, la SARL Scrub Architectes étant en conséquence condamnée à payer à la SAS Mediprom la somme de 1’000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Par exploit du 24 avril 2017, la SARL Scrub Architectes a attrait la SAS Mediprom et la SCCV Million devant le Tribunal de Grande Instance de Lyon en paiement de ses factures et, par jugement rendu le 14 janvier 2021, la juridiction consulaire a statué ainsi’:

DECLARE la société Scrub Architectes recevable en son action en paiement dirigée à l’encontre de la société Mediprom’;

CONDAMNE la société Mediprom à payer à la société Scrub Architectes la somme de 72’000 € en règlement de sa créance constituée des factures n°06/15 et 07/16 datées des 3 mars 2015 et 21 janvier 2016, outre intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2016 ;

DIT que la capitalisation des intérêts s’accomplira, conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil, à l’issue d’une année entière, puis à chaque échéance ultérieure ;

CONDAMNE la société Mediprom aux dépens ;

ADMET les avocats qui en ont fait la demande et qui peuvent y prétendre au bénéfice des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Mediprom à payer a la société Scrub Architectes la somme de 2 500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

ORDONNE l’exécution provisoire du présent jugement ;

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes.

Les motifs de cette décision sont essentiellement les suivants’:

Tant bien même les factures ont été libellées au nom de la SCCV Million, il n’est pas justifié d’une demande écrite de la société Mediprom, associée de la SCCV Million, tendant à faire agréer un nouveau débiteur par le créancier, la société Scrub Architecte. Dès lors, seule la société Mediprom est engagée par le contrat de maîtrise d”uvre à payer les factures.

La circonstance que le société Mediprom ait constitué, une fois son projet défini, une SCCV dans le but de porter ce projet, est indifférente à la qualité de débitrice de la société Scrub Architectes qui ne peut pas se voir opposer les accords intervenus entre son co-contractant et une entreprise tierce.

La société Mediprom se prévaut en vain du libellé des factures dès lors qu’elle n’a pas contesté sa qualité de débitrice à réception des mises en demeure.

Par déclaration en date du 22 février 2021, la SAS Mediprom a formé appel de cette décision en tous ses chefs.

Par ordonnance rendue le 17 mai 2021, le Premier Président de la Cour d’appel de Lyon a rejeté la demande d’arrêt de l’exécution provisoire et rejeté la demande de constitution de garantie, condamnant en outre la SAS Mediprom à payer à la SARL Scrub Architectes la somme de 800 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

A l’issue d’une saisie-attribution pratiquée, la SAS Mediprom s’est acquittée des condamnations mises à sa charge.

Par assignation aux fins d’appel provoqué délivré le 10 août 2021, la SARL Scrub Architectes a attrait à l’instance d’appel la SCCV Million.

***

Aux termes de leurs écritures remises au greffe par voie électronique le 9 septembre 2022 (conclusions n°3), la SAS Mediprom et la SCCV Million, intimée sur appel provoqué, demandent à la cour’:

Vu l’article 122 du Code de procédure civile,

Vu les articles 1857 et 1858 du Code civil,

Vu l’article 1343-5 du Code civil,

Vu la jurisprudence,

Vu les pièces versées aux débats,

INFIRMER le jugement entrepris, en date du 14 janvier 2021, en toutes ses dispositions et notamment en ce qu’il a (il est renvoyé aux termes de l’appel repris dans le dispositif de ses écritures),

Et statuant de nouveau :

JUGER que le litige a évolué entre la date de clôture du jugement et la date des premières conclusions d’appelant de la société Mediprom,

JUGER que les demandes présentées par les sociétés Million et Mediprom tendent à opérer une compensation avec les factures réclamées par la société Scrub Architectes,

JUGER que les demandes présentées sont des demandes reconventionnelles recevables à hauteur d’appel,

DECLARER les demandes formulées par les sociétés Million et Mediprom, au titre du rejet de la demande en paiement, recevables ainsi que la condamnation de la société Scrub Architectes en paiement de dommages et intérêts au titre de la mauvaise exécution du contrat,

1/ A titre principal,

CONSTATER que les prestations dont il est réclamé paiement ont été réalisées au bénéfice de la SCCV Million et non pas de la société Mediprom,

CONSTATER que les factures réclamées ont été émises à l’ordre de la SCCV Million,

CONSTATER qu’il n’est pas justifié de l’obtention préalable d’un titre exécutoire à l’encontre de la SCCV Million,

En conséquence,

JUGER que la société Mediprom n’est ni débitrice à titre principal, ni garante ou caution de la SCCV MILLON au titre des dépenses engagées par cette dernière,

JUGER que la réclamation présentée à l’encontre de la société Mediprom est irrecevable,

DEBOUTER la société Scrub Architectes de l’intégralité de ses demandes infondées et injustifiées,

ORDONNER la restitution des sommes saisies par la société Scrub Architectes, du fait de l’exécution provisoire, et ce avec intérêts à compter de la date de saisie,

2/ A titre subsidiaire,

JUGER que la société Scrub Architectes a facturé des prestations dont il n’a jamais été justifié qu’elles auraient été correctement réalisées,

JUGER que la société Scrub Architectes a facturé des prestations correspondant au permis de construire déposé en mairie mais qu’elle n’a pas transmis ce dernier aux entreprises de la maîtrise d”uvre, sans explication aucune,

JUGER qu’il est démontré que les plans remis par la société Scrub Architectes ne permettent pas au nouveau maître d”uvre de poursuivre la réalisation de la mission,

JUGER que la société Scrub Architectes a déposé un permis modificatif sans prendre en compte les modifications apportées au titre des plans PRO DCE,

JUGER que la société Mediprom est en droit de faire valoir des exceptions d’inexécution,

JUGER que la société Mediprom est contrainte de faire intervenir un nouveau maître d”uvre reprenant les mêmes prestations que celles facturées au précédent maître d”uvre, du fait de l’incurie de la société Scrub Architectes,

JUGER que la société Scrub Architectes a manqué à son obligation de conseil à l’égard des sociétés Mediprom et Million,

JUGER que la société Scrub Architectes a exécuté le contrat de mauvaise foi,

JUGER que la société Scrub Architectes engage sa responsabilité contractuelle au vu des manquements commis par elle dans l’exécution de la prestation,

En conséquence,

DECLARER que les demandes en paiement de la société Scrub Architectes irrecevables,

REJETER toutes demandes, fins et prétentions de la société Scrub Architectes,

EVALUER le préjudice de la société Mediprom à la somme de 356’400 € au titre de la perte des honoraires issues du programme,

EVALUER le préjudice de la société Million à la somme de 891’000 € au titre de la perte de marge constatée sur ce programme immobilier,

CONDAMNER la société Scrub Architectes à la somme de 891’000 € au profit de la SCCV Million, outre intérêts à compter des conclusions n°2 d’appel,

CONDAMNER la société Scrub Architectes à la somme de 356’400 € au profit de la société Mediprom, outre intérêts à compter des conclusions n°2 d’appel,

CONDAMNER la société Scrub Architectes à la somme de 196’144 € au titre des prestations indûment facturées, outre intérêts à compter des conclusions n°1 d’appel,

ORDONNER éventuellement la compensation des créances existantes entre les sociétés Mediprom et Million d’une part et la société Scrub Architectes d’autre part,

ORDONNER la restitution du surplus des sommes saisies par la société Scrub Architectes, du fait de l’exécution provisoire, et ce avec intérêts à compter de la date de saisie,

3/ A titre infiniment subsidiaire,

JUGER qu’il est démontré que la société Scrub Architectes a adressé ses factures d’honoraires, et ce dès la première, à la SCCV Million,

JUGER que les factures réclamées sont des factures émises, y compris par la demanderesse, à l’ordre de la SCCV Million et non pas de la société Mediprom,

JUGER que la société Mediprom a été valablement substituée à la SCCV Million, conformément aux dispositions contractuelles de la proposition de contrat cadre qui a été signée,

JUGER que les prestations, dont il est réclamé paiement ont été, pour celles qui semblent à ce stade être effectives, réalisées au bénéfice de la SCCV Million, et non pas de la société Mediprom,

JUGER que la société Mediprom n’est ni débitrice à titre principal, ni garante ou caution de la société Million au titre des dépenses engagées par cette dernière,

JUGER que la réclamation présentée à l’encontre de la société Mediprom est irrecevable,

CONSTATER que la SCCV Million n’est pas en mesure de régler la dette en une seule fois,

JUGER que la SCCV Million est débitrice de bonne foi,

LUI OCTROYER les plus larges délais de paiement pour payer les sommes réclamées.

4/ En tout état de cause,

CONDAMNER la société Scrub Architectes à payer à la société Mediprom la somme de 7’000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

CONDAMNER la société Scrub Architectes aux entiers dépens de l’instance et de ses suites, dont distraction au profit de Maître Eric Cesar sur son affirmation de droit.

En fait, elles indiquent notamment que le projet de construction du programme immobilier en est resté au stade de la conception, les travaux n’ayant jamais été réalisés malgré la délivrance du permis de construire.

En droit, elles se défendent de l’irrecevabilité de leurs demandes reconventionnelles puisque l’article 564 du Code de procédure civile autorise les demandes tendant à opposer une compensation et celles nées de la survenance d’un fait nouveau et que l’article 567 autorise les demandes reconventionnelles. Elles exposent à cet égard que les circonstances ont changé entre la date de mise en délibéré du jugement et la date à laquelle la société Medriprom a fait appel car, avec un nouvel investisseur, elles ont repris le programme immobilier et qu’elles n’ont pas pu faire modifier le permis de construire en raison du nouveau PLU entré en vigueur en 2019. Elles considèrent dans ces conditions avoir découvert leurs préjudices postérieurement au jugement de première instance, tant bien elles ne forment ces demandes qu’à titre subsidiaire dès lors qu’elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.

A titre principal, elles opposent au maître d”uvre l’irrecevabilité de ses demandes dirigées contre Mediprom qui n’est qu’un simple associé de la SCCV Million. Elles exposent que, comme il est d’usage, dans le secteur de la promotion immobilière, la société Mediprom a constitué avec d’autres investisseurs, une fois le projet défini et à une date proche du démarrage des travaux, une SCCV en charge de réaliser l’opération, à charge pour cette SCCV de reprendre les coûts et les charges supportés et de gérer l’opération. Elles ajoutent que la société Scrub Architectes en a été informée et a d’ailleurs libellé toutes ses factures au nom de la SCCV Million. Elles ajoutent que ce libellé des factures démontre l’acceptation pleine et entière de la substitution opérée, en conformité avec la réalisation des prestations de l’architecte au bénéfice de la SCCV Million. Elles contestent que le maître d”uvre puisse engager une action en paiement à l’encontre de l’un des associés de la SCCV en application de l’article 1858 du Code civil puisqu’il ne dispose pas d’un titre exécutoire à l’encontre de la SCCV, ni ne démontre de vaines poursuites contre cette société.

A titre subsidiaire, elles opposent au maître d”uvre l’exécution d’inexécution à raison d’abord des mauvaises exécutions de ses prestations, en l’absence de précision des factures émises et compte tenu de la reprise du projet par un nouvel investisseur ayant révélé que les plans élaborés par la société Scrub Architectes ne correspondent pas au PC déposé. Elles affirment que les plans erronés ont conduit à ce que l’ensemble du DCE soit lui-même erroné et dès lors inexploitable par le repreneur, tandis que le nouveau PLU-H de la commune de [Localité 4] interdisant toute modification, les plans sont inutilisables et obsolètes. Elles en concluent que la facture portant sur la constitution du DCE ne peut pas être acquittée. Elles listent ensuite les différences entre le permis déposé en mairie et les plans PRO/DCE facturés et elles se défendent que les différences (déplacement de la chaufferie, modification des étages et gardes corps, …) résultent d’une évolution du projet sollicitée par la SCCV Million comme l’affirme, sans en justifier, la société Scrub Architectes. Elles ajoutent que cette situation les contraignent à payer deux fois les prestations d’architecte et de bureau d’étude et elles dénoncent la faute de l’architecte qui a transmis aux intervenants des dossiers de PC différents de celui préalablement déposé et obtenu en mairie. Elles dénoncent au demeurant les pressions exercées en cours de procédure d’appel par la société Scrub Architectes qui s’est rapprochée de la mairie de [Localité 4] pour faire annuler le permis de construire en l’absence de travaux substantiels réalisés, ces démarches ayant abouti à un arrêté d’abrogation du PC pris le 25 octobre 2021. Elles estiment que le maître d”uvre, qui viole ainsi son obligation de bonne foi contractuelle, a manqué à ses obligations de devoir et de conseil à défaut de les avoir alertées sur la nécessité de déposer un PC modificatif.

Elles précisent que la société intimée n’a déposé de PC modificatif que pour la hauteur du bâtiment.

Elles ajoutent que les factures litigieuses sont irrégulières au regard de l’article L.441-9 du Code de commerce puisqu’elles ne mentionnent pas le taux des pénalités et le montant de l’indemnité forfaitaire.

Elles invoquent le préjudice qu’elles ont subi dès lors que la SCCV Million, maître de l’ouvrage, est contrainte d’abandonner son projet, non sans avoir exposé des frais auprès de nouveaux maîtres d”uvre. Elles réclament l’indemnisation de la perte de marge pour la SCCV Million et la perte de prestation de commercialisation pour la société Mediprom. Elles demandent également le remboursement des 196’144 € acquittés auprès du maître d”uvre, en pure perte.

A titre infiniment subsidiaire, elles sollicitent, au profit de la SCCV Million, des délais de paiement en sa qualité de débiteur de bonne foi qui a fait montre de transparence mais qui n’est plus en mesure, compte tenu de l’arrêté d’abrogation du PC, de poursuivre ses négociation avec Swiss Life.

***

Aux termes de ses écritures remises au greffe par voie électronique le 15 novembre 2023 (conclusions récapitulatives n°3), la SARL Scrub Architectes demande à la cour’:

Vu l’article 1348 du Code civil,

Vu les articles 564 et suivants du Code de procédure civile,

Vu l’article 1147 ancien du Code civil, dans sa rédaction applicable au présent litige,

CONFIRMER en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de LYON le 14 janvier 2021, en ce qu’il déclaré la société Scrub Architectes recevable en son action en paiement dirigée à l’encontre de la société Mediprom et l’a condamné à lui régler la somme de 72’000 € au titre de ses factures n°06/15 et 07/16, outre intérêts légaux à compter du 8 septembre 2016,

Et, en tant que de besoin :

A titre principal

DIRE ET JUGER que la société Mediprom a la qualité de débitrice des factures émises par la société Scrub Architectes,

DIRE ET JUGER recevable l’action en paiement dirigée par la société Scrub Architectes à l’encontre de la société Mediprom,

DIRE ET JUGER que la société Scrub Architectes n’a commis aucune faute dans l’exercice de ses missions,

DIRE ET JUGER bien fondée la demande en paiement de la société Scrub Architectes au regard des prestations qu’elle a réalisées conformément à ses obligations contractuelles,

CONDAMNER la société Mediprom à régler à la société Scrub Architectes la somme de 72’000 € au titre de ses factures n°06/15 et 07/16, outre intérêts légaux à compter du 8 septembre 2016,

Subsidiairement’: CONDAMNER la SCCV Million à régler à la société Scrub Architectes la somme de 72’000 € au titre de ses factures n°06/15 et 07/16, outre intérêts légaux à compter du 8 septembre 2016,

Sur les demandes reconventionnelles :

DECLARER irrecevables comme nouvelles en cause d’appel les demandes formées par les sociétés SCCV Million et Mediprom tendant à obtenir le rejet de la demande en paiement formée par la société Scrub Architectes ainsi que la condamnation de cette dernière au paiement de dommages et intérêts,

En tout état de cause’:

DEBOUTER les sociétés SCCV Million et Mediprom de leurs demandes tendant à opposer une exception d’inexécution en l’absence de toute faute commise par la société Scrub Architectes,

DEBOUTER les sociétés SCCV Million et Mediprom de leurs demandes de dommages et intérêts en l’absence de démonstration d’une quelconque faute de la société Scrub Architectes et d’un préjudice et d’un lien de causalité entre les deux,

DEBOUTER les sociétés SCCV Million et Mediprom de leur demande de compensation judiciaire en l’absence de caractère certain de la créance qu’elle revendique,

DEBOUTER la SCCV Million de sa demande de délais de paiement,

CONDAMNER la société Mediprom ou subsidiairement la SCCV Million à régler à la société Scrub Architectes la somme de 5’000 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNER la société Mediprom ou subsidiairement la SCCV Million au paiement des entiers dépens de première instance et d’appel.

En fait, elle rappelle que les sociétés appelante et intimée provoquée n’avaient jamais contesté l’exigibilité des factures en 2016, ayant même proposé de les régler sur le prix de vente à payer par le promoteur tiers reprenant le projet. Elle observe que les sociétés intéressées discutent, pour la première fois en cause d’appel, ces factures. Elle demande la confirmation du jugement attaqué en ce qu’il a condamné la SAS Mediprom, signataire de l’engagement du 18 avril 2013 et à titre subsidiaire, la condamnation de la SCCV Million qui continue de se reconnaître débitrice.

En droit, elle fait valoir le bien fondé de sa demande en paiement reposant sur des factures émises en rémunération des études réalisées. Elle relève que pour la première fois en cause d’appel, la régularité formelle de ses factures est contestée au motif qu’elles ne mentionneraient pas le taux de pénalité mais elle relève que les sociétés appelée et intimée provoquée n’en tirent aucune conséquence.

A titre principal, elle dirige sa demande en paiement à l’encontre de la société Mediprom, signataire du contrat de maîtrise d”uvre, sans qu’un avenant n’ait été régularisé et sans que le contrat ne prévoit de faculté de substitution. Elle en conclut que le seul libellé de la facture ne suffit pas à une telle substitution et elle estime que la société Mediprom ne tente que de gagner du temps et de faire supporter la SCCV Million, simple support juridique dédié à la commercialisation d’un programme immobilier et peut-être même insolvable, la charge de ses propres engagements.

Subsidiairement, elle dirige sa demande en paiement à l’encontre de la SCCV Million qui ne conteste pas être débitrice des factures litigieuses. Elle s’oppose à la demande de délai de paiement qui ne repose sur aucun justificatif des difficultés financières alléguées.

Elle conteste l’exception d’inexécution qui lui est opposée pour la première fois en cause d’appel consistant à lui reprocher d’avoir établi des plans d’exécution ne correspondant pas au permis de construire, un dossier de consultation des entreprises inexploitables, sans possibilité de le reprendre pour le faire correspondre au permis de construire obtenu car le PLU adopté par la commune de [Localité 4] interdit toute modification. Elle souligne le caractère évolutif des demandes reconventionnelles des sociétés appelante et intimée provoquée puisque celles-ci réclamaient 129’000 € TTC dans les conclusions n°2 et elles réclament désormais 1,5 million. Elle en conclut que les sociétés appelante et intimée provoquée tente de lui faire supporter l’intégralité des conséquences financières de l’échec de leur projet.

Elle soulève l’irrecevabilité de ces demandes reconventionnelles puisque les sociétés appelante et intimée provoquée ne soulevaient en première instance que l’irrecevabilité de la demande en paiement. Elle conteste que ces demandes reconventionnelles ne tendent qu’à une compensation puisque la créance de dommages et intérêts alléguée n’est pas certaine, condition exigée par la jurisprudence, que la créance de dommages et intérêts alléguée n’est étayée par aucun justificatif et qu’elles ne peuvent être considérée comme des demandes reconventionnelles puisque présentées à titre subsidiaire.

Elle conteste également que la modification du PLU-H constitue une circonstance nouvelle puisque la révision a été lancée en 2012, adopté en 2019 et entré en vigueur le 10 septembre 2020, soit avant la date de l’audience de plaidoirie devant la juridiction consulaire.

Sur le fond, elle se défend de toute faute dans l’exécution de ses obligations, exposant d’abord que le DCE comporte des évolutions par rapport au PC déposé, ce qui est habituel tant il est rare que les projets soient figés dès le dépôt de la première demande de PC. Elle ajoute que les PC modificatifs sont le résultat des nouveaux besoins exprimés par le maître de l’ouvrage ou répondent à des impératifs juridiques. Elle assure que tel a été le cas, dès lors qu’elle n’a évidemment pas décidé unilatéralement de modifier l’emplacement de la chaufferie, l’aspect du garde du corps ou les places de stationnement. Elle estime qu’elle rapporte la preuve des demandes de modifications émanant du maître de l’ouvrage en produisant les compte-rendus de chantier. Elle ajoute que les modifications étant anciennes, la consultation des entreprises a été lancée sur le base de projets modifiés de sorte qu’il n’en résulte aucune inadéquation, outre que les modifications mineures litigieuses sont régularisables par le dépôt d’un PC modificatif. Elle estime que les sociétés appelante et intimée provoquée ne rapportent pas la preuve contraire, dès lors qu’elles ne précisent pas quels articles du PLU-H s’y opposeraient, ni ne justifient d’un refus de la mairie.

Elle se défend de toute faute dans l’exécution de ses obligations, exposant ensuite que l’arrêté d’abrogation du PC n’est que l’application de l’article R.424-17 du Code de l’urbanisme prévoyant que le PC est périmé si les travaux ne sont pas entrepris dans les 3 ans. Elle considère que les sociétés appelante et intimée provoquée sont seules responsables de l’absence de travaux 6 ans après l’obtention du PC modificatif.

Elle se défend de toute faute dans l’exécution de ses obligations, exposant enfin que l’absence de prise en compte de toutes les modifications du programme dans le PC modificatif est habituel puisque les programmes évoluent en cours de chantier, nécessitant en fin de travaux un «’PC balai’» permettant de ratifier les dernières modifications intervenues. Elle relève que la demande de PC modificatif a été clairement validée par le maître de l’ouvrage de sorte que les sociétés appelante et intimées provoquée ne peuvent pas sérieusement prétendre que cette demande serait incomplète. Elle souligne leur mauvaise foi dès lors qu’il est manifeste qu’elles ont rencontré des difficultés dans la commercialisation de leur projet et qu’elles cherchent à lui faire supporter les conséquences financières de ces difficultés.

Elle conclut pour finir au rejet des demandes indemnitaires qui lui sont opposées en l’absence de preuve d’un lien de causalité entre ses prétendues fautes et les pertes financières alléguées. Elle relève que c’est un non-sens de solliciter un nouveau maître d”uvre pour mettre en conformité les DCE avec le PC alors que le DCE tient compte de l’évolution du projet. Elle relève encore que le calcul des pertes financières repose sur des données abstraites, sans être étayé d’aucun justificatif. Elle souligne que la perte par la société Mediprom des bénéfices à opérer sur la commercialisation ne peut être indemnisée que sur la base d’une perte de chance, en l’espèce non-démontrée.

***

Il est renvoyé aux écritures des parties pour plus ample exposé des moyens venant à l’appui de leurs prétentions.

Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l’instruction par ordonnance du 23 novembre 2022 et l’affaire a été fixée à l’audience du 8 novembre 2023 à laquelle elle a été mise en délibéré à ce jour.

MOTIFS,

A titre liminaire, il n’y a pas lieu de statuer sur les demandes respectives des parties tendant à voir la cour «’juger’», «’constater’», «’évaluer’» ou «’dire et juger’» lorsqu’elles ne constituent pas des prétentions au sens des articles 4, 5, 31 et 954 du Code de procédure civile mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions.

Sur la recevabilité des «’demandes nouvelles’» des sociétés Médiprom et Million’:

Aux termes de l’article 564 du Code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

En application de l’article 565 qui précise que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent, il est jugé que la partie qui n’a conclut qu’à l’irrecevabilité des demandes présentées adverses, est recevable en appel à conclure au fond, la fin de non-recevoir et la défense au fond visant chacune à faire écarter les prétentions adverses.

Enfin, l’article 567 précise que les demandes reconventionnelles sont également recevables en appel.

En l’espèce, les sociétés Mediprom et Million opposent d’abord à la demande en paiement de la société Scrub Architectes l’exception d’inexécution, cette argumentation nouvelle étant recevable en appel puisqu’elle ne vise qu’à faire écarter les prétentions adverses.

Les sociétés Mediprom et Million réclament ensuite, uniquement à titre subsidiaire et au bénéficie de la compensation avec les sommes qui seraient mises à leur charge, des dommages et intérêts en réparation des manquements contractuels de la société Scrub Architectes. Ces demandes indemnitaires sont recevables, tant au titre de l’article 567 qui autorise expressément les demandes reconventionnelles, d’autant qu’il n’est pas contesté que lesdites demandes se rattachent aux prétentions initiales par un lien suffisant, qu’au titre des exceptions énumérées à l’article 564 qui incluent les demandes pour opposer compensation.

Il est dès lors inutile de départager les parties sur le point de savoir si la modification du PLU-H constituerait la survenance d’un fait nouveau au sens de l’article 564 puisqu’il résulte de ce qui précède que les sociétés Mediprom et Million sont recevables à opposer, fût-ce pour la première fois en cause d’appel, l’exception d’inexécution et la compensation, de même qu’elles sont recevables en leurs demandes reconventionnelles.

La fin de non-recevoir, soulevée par la SARL Scrub Architectes, tirée de l’irrecevabilité des «’demandes nouvelles’» présentées par les sociétés Mediprom et Million en cause d’appel, sera rejetée.

Sur la demande principale en paiement’:

Sur la recevabilité de la demande en paiement dirigée contre la société Mediprom’:

Aux termes de l’article 122 du Code de procédure civile «’Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.’».

En l’espèce, la société Mediprom ne conteste pas avoir signé, en qualité de maître de l’ouvrage, l’acte d’engagement du 18 avril 2013 confiant à la SARL Scrub Architectes le marché de maîtrise d”uvre concernant le programme de construction désigné Million. Néanmoins, la société appelante considère ne pas être tenue du paiement de la rémunération du maître d”uvre concepteur dans la mesure où la SCCV Million, dont elle est l’un des associés, lui aurait été substituée en qualité de maître de l’ouvrage.

La cour relève que la désignation du maître de l’ouvrage au contrat du 18 avril 2013 comporte la mention «’ou toute société qui s’y substituera’» mais que les sociétés les sociétés Medriprom et Million ne justifient pas d’un avenant pour la mise en ‘uvre de cette substitution.

Pour soutenir que cette substitution serait néanmoins intervenue, elles invoquent d’abord les usages de la profession, mais sans justifier du contenu précis de ces usages. Elles ne justifient en particulier pas qu’il serait d’usage d’opérer une telle substitution sans formalisme particulier, là où le droit commun des contrats exige, non seulement l’acceptation par le créancier, mais également, sous peine de nullité, une formalisation écrite de la substitution.

Pour soutenir que cette substitution serait néanmoins intervenue, les sociétés Mediprom et Million invoquent ensuite l’acceptation pleine et entière de cette substitution par le créancier puisque ce dernier a émis toutes ses factures, dès le commencement de sa mission de concepteur, au nom de la SCCV Million. Dans la mesure où la substitution alléguée emporterait acceptation par le créancier de décharger son débiteur initial, cette acceptation s’analyse en une renonciation, laquelle suppose d’être non-équivoque. Or, l’émission des factures au nom de la SCCV Million n’emporte pas une telle renonciation non-équivoque en l’absence de toute mention particulière figurant sur ces factures, en l’absence de circonstances particulières entourant leur émission et en l’absence d’actes écrits émanant du maître d”uvre dont il pourrait se déduire une acceptation de décharger la société Mediprom de son obligation de paiement.

La cour constate qu’une telle acceptation, au moment de l’exécution du contrat, n’est pas démontrée, mais qu’elle a au contraire été démentie par la suite puisque la SARL Scrub Architectes a initialement choisi d’assigner en référé-provision la seule société Mediprom. La cour relève que, dans l’instance au fond engagée postérieurement, la SARL Scrub Architectes a continué de diriger ses demandes présentées à titre principal contre la société Mediprom et que c’est encore le cas dans le cadre de l’instance d’appel.

Dès lors, en l’absence de preuve que le maître d”uvre ait accepté de décharger son débiteur initial, signataire de l’acte d’engagement du 18 avril 2013, les sociétés Mediprom et Million échouent à établir la substitution de maître de l’ouvrage qu’elles allèguent.

La cour relève que dans la mesure où la SARL Scrub Architectes agit contre Mediprom, non pas en sa qualité d’associé de la SCCV Million, mais en qualité de maître de l’ouvrage, il n’y a pas lieu d’examiner les conditions d’application de l’article 1858 du Code civil. L’argumentation des sociétés Mediprom et Million présentée sur ce fondement sera écartée.

Il résulte de ce qui précède que la fin de non-recevoir, soulevée par les sociétés Mediprom et Million, tirée de l’absence de qualité à agir contre la société Mediprom doit être rejetée. La décision attaquée, en ce qu’elle a déclaré la société Scrub Architectes recevable en sa demande en paiement dirigée contre la société Mediprom, sera en conséquence confirmée.

La demande de restitution des sommes saisies en exécution du jugement de première instance sera en conséquence rejetée.

Sur le bien fondé de cette demande’:

Selon l’article 1103 du Code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

Aux termes de l’article 1353 du Code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver et réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

L’article 1219 énonce’: «’Une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.’».

En l’espèce, la SARL Scrub Architectes verse régulièrement aux débats l’acte d’engagement signé le 13 avril 2013, l’ensemble des factures émises en exécution de ce contrat et, en réponse à l’argumentation adverse discutant la réalisation de ses prestations, les 5 comptes-rendus de chantiers de février 2013 à avril 2014 en phases APS et APD, ainsi que l’envoi par courriel en novembre 2014 de plans modifiés suite à une réunion avec la mairie de [Localité 4].

Il résulte de l’analyse de ces documents que la mission de conception confiée à la SARL Scrub Architectes se limitait aux phases «’esquisse’», «’APS’», «’dépôt de PC’», «’APD’» et «’études de projet’» et que l’ensemble de ces phases a été facturé. Par ailleurs, la cour relève que les factures correspondantes aux phases esquisses, dépôt de PC, APS et ADP ont été réglées et que les deux factures impayées correspondent à la phase «’étude de projet’». En l’état de ces premiers éléments et des comptes-rendus de chantiers et envoi par mail de plans, la SARL Scrub Architectes rapporte régulièrement la preuve du principe et du montant de sa créance au titre de deux factures impayées.

Pour s’opposer à la demande en paiement, la société Mediprom fait notamment valoir que les factures litigieuses seraient irrégulières au regard de l’article L.441-9 du Code de commerce puisqu’elles ne mentionnent pas le taux des pénalités et le montant de l’indemnité forfaitaire. Dans la mesure où le maître d”uvre ne réclame aucune pénalité ou indemnité forfaitaire, cette argumentation inopérante ne peut qu’être écartée.

Pour s’opposer à la demande en paiement, la société Mediprom affirme également que les factures litigieuses ne reprennent pas le détail des prestations exécutées en ce qu’elles indiqueraient uniquement «’demande d’acompte’». Cette assertion est démentie par l’analyse faite ci-avant des factures, lesquelles ont au contraire été émises au fur et à meure de l’exécution de la mission de conception en indiquant, chaque fois, même sans la détailler, quelle était la «’phase’» de la mission facturée.

Pour s’opposer à la demande en paiement, la société Mediprom expose ensuite qu’elle a découvert, à l’occasion de discussions menées en 2020/2021 avec un nouvel investisseur, que les plans élaborés par la société Scrub Architectes ne correspondent pas au PC déposé. En réalité, les différences listées par la société AP[HI] Architecture correspondent en tout point aux modifications sollicitées par le maître de l’ouvrage lui-même, tel que cela résulte des comptes-rendus de chantier versés aux débats par la société Scrub Architectes, ainsi qu’au courriel du 4 mars 2014 versé aux débats par la société Mediprom. Cette dernière société ne peut pas sérieusement prétendre ne pas en avoir été informée dès lors qu’elle est mentionnée sur chacun des comptes-rendus de chantier comme y ayant assistée en qualité de maître de l’ouvrage.

La nécessité d’un PC modificatif n’est pas contestée par la SARL Scrub Architectes qui explique que cela ne constitue une inexécution de sa part dans la mesure où il serait habituel de déposer plusieurs PC modificatifs au fur et à mesure de l’avancement du projet. La cour constate que cette explication n’est pas formellement démentie par la société AP[HI] Architecture aux termes de son courrier du 11 juin 2021 adressé à son confrère Scrub Architectes, le maître d”uvre potentiellement repreneur du dossier en phase DCE ou DET ne paraissant pas surpris, ni inquiet quant à la possibilité d’obtenir un PC modificatif. Il s’ensuit qu’en l’état de ces éléments, l’inexécution alléguée n’est pas suffisamment établie.

Enfin, la société Mediprom n’oppose pas valablement à la société Scrub Architectes un défaut d’information quant à la durée de validité du PC dès lors que le maître d”uvre n’est pas responsable de l’interruption du projet de construction pendant 6 ans et que le société appelante invoque une impossibilité de déposer un PC modificatif en raison de la modification du PLU, mais sans en justifier. Dans ces conditions, il apparaît qu’elle est seule responsable de son choix de ne finalement pas avoir missionné la société AP[HI] Architecture pour le dépôt d’un PC modificatif, avant que ne soit prononcé l’abrogation du PC obtenu.

Les allégations de manquement à l’obligation de bonne foi contractuelle, en ce que la société Scrub Architectes serait à l’origine de l’abrogation du PC, ne reposent que sur des supputations, en l’absence de preuve d’une intervention du maître d”uvre auprès de la mairie de [Localité 4].

Au final, il n’est pas suffisamment établi que la société Scrub Architectes aurait commis des manquements contractuels justifiant que la société Mediprom se soustrait au paiement du solde de ses prestations, tandis qu’à l’inverse, le créancier justifie régulièrement de l’exécution de ces missions et d’une facturation conforme aux prévisions contractuelles.

Le jugement attaqué, en ce qu’il a condamné la société Mediprom à payer à la société Scrub Architectes le solde de sa rémunération, assortie des intérêts et avec capitalisation, sera confirmé.

Sur les demandes reconventionnelles’:

Selon l’article 1231-1 du Code civil, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.

En l’espèce, il a été vu ci-avant que les manquements contractuels que la société Mediprom imputent à la société Scrub Architectes ne sont pas suffisamment établis. Dans ces conditions, les préjudices économiques dont les sociétés Mediprom et Million demandent l’indemnisation ne peuvent pas être rattachés à une faute de l’architecte concepteur.

La cour rejette en conséquence leurs demandes reconventionnelles en dommages et intérêts au titre de l’indemnisation de la perte de marge pour la SCCV Million et de la perte des prestations de commercialisation pour la société Mediprom. La cour rejette également la demande en remboursement des factures acquittées à la société Scrub Architectes.

Sur les autres demandes’:

La cour confirme le jugement attaqué en ce qu’il a condamné la société Mediprom aux dépens de première instance et à payer à la société Scrub Architectes la somme de 2’500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

La cour condamne en outre la société Mediprom, partie perdante à l’instance, aux dépens de l’instance de l’appel.

La société Mediprom est condamnée à payer à la société Scrub Architectes la somme de 2’500 € supplémentaire en indemnisation des frais irrépétibles que la société intimée a été contrainte d’engager à hauteur d’appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Rejette la fin de non-recevoir, soulevée par la SARL Scrub Architectes, tirée de l’irrecevabilité des «’demandes nouvelles’» présentées par les sociétés Mediprom et Million en cause d’appel,

Confirme le jugement rendu le 14 janvier 2021 par le Tribunal Judiciaire de Lyon en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

Rejette toutes les demandes des SAS Mediprom et SCCV Million en restitution des sommes saisies en exécution du jugement de première instance, en remboursement des factures acquittées, en dommages et intérêts et en paiement d’une indemnité au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la SAS Mediprom aux dépens de l’instance de l’appel.

Condamne la SAS Mediprom à payer à la société Scrub Architectes la somme de 2’500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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