Saisie-attribution : décision du 15 décembre 2023 Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion RG n° 15/02123

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Saisie-attribution : décision du 15 décembre 2023 Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion RG n° 15/02123

15 décembre 2023
Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion
RG n°
15/02123

ARRÊT N°23/

PC

R.G : N° RG 15/02123 – N° Portalis DBWB-V-B67-EUQO

[L]

[F]

C/

Société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

G.I.E. NEUILLY CONTENTIEUX

RG 1èRE INSTANCE : 15/2193

COUR D’APPEL DE SAINT- DENIS

ARRÊT DU 15 DECEMBRE 2023

Chambre civile TGI

Appel d’une décision rendue par le JUGE DE L’EXECUTION DE SAINT-DENIS DE LA REUNION en date du 12 NOVEMBRE 2015 RG n°: 15/2193 suivant déclaration d’appel en date du 26 NOVEMBRE 2015

APPELANTS :

Monsieur [H] [L]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentant : Me Isabelle SIMON LEBON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Madame [C] [Y] [F] épouse [L]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentant : Me Isabelle SIMON LEBON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMEES :

Société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Pierre HOARAU, Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

G.I.E. NEUILLY CONTENTIEUX

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentant : Me Philippe BARRE de la SELARL PHILIPPE BARRE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

CLÔTURE LE : 23/02/2023

DÉBATS : En application des dispositions de l’article 804 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 13 octobre 2023 devant la Cour composée de :

Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre

Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère

Conseiller : Monsieur Eric FOURNIE, Conseiller

Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.

A l’issue des débats, le président a indiqué que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 15 décembre 2023.

Greffiere lors des débats et de la mise à disposition : Madame Nathalie BEBEAU, Greffière.

ARRÊT : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 15 décembre 2023.

* * *

LA COUR

EXPOSE DU LITIGE

Par offre de prêt acceptée le 25 juin 2008, Monsieur [H] [L] et son épouse [C] [Y] [L] ont souscrit, auprès de la société BNP Paribas Personal Finance, un prêt Helvet Immo d’un montant de 1.511.151,83 francs suisses remboursable en euros, afin de financer plusieurs contrats de marché de travaux ayant pour objet la construction de 7 villas de type F4 et F5, à usage locatif, ainsi que le remboursement anticipé d’un prêt contracté auprès de la Banque de la Réunion pour financer le terrain nécessaire à l’opération immobilière.

La signature du contrat de prêt a été réitérée par acte authentique en date des 28 et 29 juillet 2008, devant Maître [B], notaire à [Localité 7].

Par acte du 6 mai 2015, le GIE Neuilly Contentieux agissant pour le compte de la BNP Paribas Personal Finance a fait pratiquer une saisie attribution sur les comptes ouverts au nom des époux [L] auprès de la SA Banque postale en exécution d’un titre en date du 3 décembre 2007 pour le recouvrement d’une somme de 594.450,83€.

Suivant acte d’huissier du 9 juin 2015, M. et Mme [L] ont assigné la société BNP Paribas Personal Finance et le GIE Neuilly Contentieux devant le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Saint-Denis de la Réunion, afin de voir prononcer la nullité de la saisie-attribution et la prescription de l’action en faveur de la banque.

Suivant jugement du 12 novembre 2015, le juge de l’exécution a :

– constaté que l’action n’est pas prescrite ;

– rejeté la demande de mainlevée de la saisie-attribution ;

– condamné [H] [L] et [C] [F] épouse [L] à payer à la BNP Paribas Personal Finance la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

– rappelé que l’exécution provisoire est de droit ;

– condamné [H] [L] et [C] [F] épouse [L] aux dépens.

Par déclaration du 26 novembre 2015, M. et Mme [L] ont interjeté appel du jugement précité.

L’affaire a été renvoyée à la mise en état selon ordonnance du 1er décembre 2015.

M. et Mme [L] ont déposé leurs premières conclusions d’appelant au fond le 26 février 2016.

La société BNP Paribas Personal Finance a déposé ses premières conclusions d’intimée au fond le 26 avril 2016 et le GIE NEUILLY CONTENTIEUX le 26 avril 2016.

*****

Par arrêt avant-dire droit du 11 octobre 2019, la cour d’appel de Saint-Denis a statué en ces termes :

– ORDONNE la réouverture des débats ;

– INVITE les parties à présenter leurs observations sur le caractère exigible de la créance saisie le 6 mai 2015 ;

– INVITE les parties à indiquer les suites de l’assignation portée devant le tribunal de grande instance de Paris par les époux [L] à l’encontre de la SA BNP Paribas Personal Finance le 8 septembre 2014 et à produire les décisions de justice intervenues;

– INVITE les parties à présenter leurs observations sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de pouvoir du juge de l’exécution à se prononcer sur la demande reconventionnelle de la SA BNP Paribas Personal Finance tendant à « condamner les consorts [L] au paiement de la somme de 615.575 euros à parfaire majorée du taux d’intérêt conventionnel de 1,35% à compter du 10 mai 2015 au titre des impayés intervenus dans le cadre de l’exécution du prêt Helvet Immo n° 65 047 762 » ;

– DIT que les parties devront déposer leurs observations et pièces avant le 29 novembre 2019 ;

– RENVOIE l’affaire et les parties à l’audience de mise en état du 12 décembre 2019 à 14h30 pour clôture;

– RESERVE les dépens/

Par ordonnance sur incident du 6 juillet 2021, le conseiller de la mise en état a statué en ces termes :

– ORDONNONS le sursis à statuer dans l’attente des décisions à intervenir de la CJUE dans le cadre des affaires C-609/19 et C-776/19 à C-782/19;

– REJETONS la demande de fixation du délai du sursis à statuer propos par la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ;

– RENVOYONS l’affaire à l’audience de mise en état du 16 décembre 2021 ;

– DISONS que les dépens de l’incident suivront ceux de l’instance au fond;

– DISONS n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du code de procédure civile;

L’ordonnance de clôture est intervenue le 23 février 2023.

A l’audience de plaidoiries du 13 octobre 2023, les avocats des appelants et de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ont sollicité la possibilité de pouvoir déposer de nouvelles pièces et des dernières conclusions. La cour a statué par décision séparée.

PRETENTIONS ET MOYENS

Aux termes de leurs dernières conclusions d’appelants récapitulatives N° 11, déposées le 15 septembre 2023, M. et Mme [L] demandent à la cour de :

– INFIRMER en toutes ses dispositions le jugement rendu le 12 novembre 2015 par le Juge de l’exécution du Tribunal de grande instance de Saint-Denis de la Réunion ;

Et, statuant à nouveau, à titre principal :

– DONNER ACTE aux époux [L] du renoncement de BNP PPF à l’ensemble de ses fins de non-recevoir ;

– JUGER que le moyen de défense soulevé par les époux [L] sur le fondement des clauses abusives est recevable ;

– JUGER que les clauses n° 1 à 5 du contrat HELVET IMMO forment ensemble le mécanisme implicite d’indexation du contrat sur le cours de change euro contre franc suisse ;

– JUGER que les clauses n° 1 à 5 (clause implicite d’indexation) du prêt HELVET IMMO sont abusives ;

– JUGER que les clauses n° 6 à 8 (clauses de variation du taux d’intérêt) sont abusives ;

– JUGER que la clause n° 9 (clause de reconnaissance d’information) est abusive ;

– JUGER que les clauses n° 1 à 9 sont réputées non écrites ;

– JUGER que le contrat HELVET IMMO ne peut subsister sans ces clauses abusives ;

En conséquence, ANÉANTIR RÉTROACTIVEMENT le contrat HELVET IMMO souscrit par les époux [L] ;

– JUGER que les conditions de mise en ‘uvre de la procédure de saisie-attribution initiée par BNP PPF ne sont pas remplies ;

– ORDONNER la mainlevée de la saisie-attribution initiée par BNP PPF, à ses frais ;

À titre subsidiaire :

– JUGER qu’au jour de l’acte de saisie-attribution du 6 mai 2015, la créance invoquée par BNP PPF n’était pas exigible, la date d’exigibilité anticipée du solde du compte du prêt étant le 10 mai 2015 ;

– En conséquence, JUGER que les conditions de mise en ‘uvre de la procédure de saisie-attribution initiée par BNP PPF ne sont pas remplies ;

– ORDONNER la mainlevée de la saisie-attribution initiée par BNP PPF, à ses frais ;

– À défaut, JUGER l’action en paiement de la BNP PPF et de la société NEUILLY CONTENTIEUX à l’encontre des époux [L] irrecevable en ce qu’elle est prescrite ;

– En conséquence, JUGER que les conditions de mise en ‘uvre de la procédure de saisie-attribution initiée par BNP PPF ne sont pas remplies ;

– ORDONNER la mainlevée de la saisie-attribution initiée par BNP PPF, à ses frais ;

À titre infiniment subsidiaire :

– JUGER que les créances correspondant aux mensualités impayées par les époux

[L] au titre du prêt pour les mois de février, mars et avril 2013 sont prescrites ;

– En conséquence, RÉDUIRE le montant de la créance invoquée par la BNP PPF d’un montant de 9.000,00 euros ;

En tout état de cause :

– JUGER irrecevable la demande reconventionnelle de BNP PPF tendant à « condamner les consorts [L] au paiement de la somme de 615.575 euros à parfaire majorée du taux d’intérêt conventionnel de 1,35% à compter du 10 mai 2015 au titre des impayés intervenus dans le cadre de l’exécution du prêt Helvet Immo n° 65 047 762 », actualisée dans ses dernières conclusions de la façon suivante : « Dire et juger que le montant de la créance de BNP Paribas Personal Finance en principal, intérêts et frais s’élève à la somme globale de quatre cent soixante-sept mille quatre cent quatre-vingt-dix euros et quatorze centimes (467.490,14 €) selon décompte arrêté au 28 janvier 2021 avec intérêts au taux contractuel de 1,35 %, à parfaire jusqu’à la date effective de paiement outre les dépens sur la présente saisie » en ce qu’elle constitue une demande nouvelle en cause d’appel et en ce qu’elle excède les pouvoirs de la Cour statuant sur l’appel formé à l’encontre d’un jugement rendu par un Juge de l’exécution ;

– DÉBOUTER BNP PPF de l’ensemble de ses demandes, moyens, fins, prétentions et exceptions ;

– CONDAMNER BNP PPF à payer aux époux [L] la somme de 20.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

*****

Aux termes de ses dernières conclusions d’intimée et aux fins de révocation de l’ordonnance de clôture déposées le 8 septembre 2023, la société BNP Paris Personal Finance demande à la cour de :

– PRONONCER la révocation de l’ordonnance de clôture du 23 février 2023;

– PRONONCER la réouverture des débats pour permettre à Monsieur et Madame [L] de prendre connaissance des conclusions récapitulatives régularisées par BNP Paribas Personal Finance et d’y répondre le cas échéant, respectant ainsi le principe du contradictoire ;

– CONFIRMER le Jugement rendu par le Juge de l’exécution près le Tribunal de grande instance de Saint-Denis de la Réunion le 12 novembre 2015 (RG 15/02193) en ce qu’il a jugé que la prescription biennale concernant l’action en paiement de BNP Paribas Personal Finance contre [H] et [C] [Y] [L] n’était pas acquise au 12 mai 2015, date de la saisie-attribution diligentée sur le compte de ces derniers, ouvert à la Banque Postale ;

– CONFIRMER le Jugement rendu par le Juge de l’exécution près le Tribunal de grande instance de Saint-Denis de la Réunion le 12 novembre 2015 (RG 15/02193) en ce qu’il a débouté [H] et [C] [Y] [L] de leur demande de nullité de la saisie-attribution diligentée sur le compte de ces derniers ouvert dans les livres de la Banque Postale ;

Et statuant à nouveau,

Sur les demandes de Monsieur et [L] sur le fondement des clauses abusives:

A titre principal,

– JUGER irrecevables les demandes formées par Monsieur et Madame [L] tendant à la constatation du caractère abusif et à la suppression de la clause relative à la variation du taux de change, de la clause relative à la variation du taux d’intérêt et de la clause de reconnaissance d’information du bordereau d’acceptation ;

A titre subsidiaire,

– JUGER que les clauses relatives au risque de change et les clauses relatives à la variation du taux d’intérêt relèvent de l’objet principal et qu’elles sont rédigées de manière claire et compréhensible ;

– En conséquence, JUGER que les clauses relatives au risque de change et les clauses relatives à la variation du taux d’intérêt ne relèvent pas du contrôle des clauses abusives et débouter Monsieur et Madame [L] de leurs demandes tendant à voir réputées non écrites les clauses litigieuses;

– JUGER que la « clause de reconnaissance d’acceptation du bordereau d’acceptation » n’est pas abusive ;

– En conséquence, DEBOUTER Monsieur et Madame [L] de leurs demandes sur le fondement des clauses abusives et par conséquent, de leur demande de nullité de la saisie attribution diligentée le 6 mai 2015 ;

A titre plus subsidiaire,

– JUGER que les clauses relatives à la variation du taux de change, les clauses relatives à la variation du taux d’intérêt et la clause de reconnaissance d’information ne créent pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties ;

– En conséquence, DEBOUTER Monsieur et Madame [L] de leurs demandes sur le fondement des clauses abusives et par conséquent, de leur demande de nullité de la saisie attribution diligentée le 6 mai 2015 ;

A titre encore plus subsidiaire, sur le périmètre du réputé non écrit,

– JUGER que seules les stipulations relatives à l’augmentation sans plafond du montant des échéances sont réputées non écrites et juger que les autres stipulations peuvent être maintenues, le contrat de prêt pouvant subsister en l’état ;

– A défaut, JUGER que seules les stipulations relatives à la variation du taux de change et à la variation du taux d’intérêt sont réputées non écrites et juger que les autres stipulations peuvent être maintenues, le contrat de prêt pouvant subsister en l’état ;

A titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la Cour prononçait l’anéantissement rétroactif du contrat de prêt :

– JUGER que Monsieur et Madame [L] ne formulent pas de demande de restitutions ;

– INVITER Monsieur et Madame [L] à mieux se pourvoir ;

Sur la recevabilité de l’action de BNP Paribas Personal Finance :

– DIRE ET JUGER l’action de BNP Paribas Personal Finance recevable ;

Sur le caractère liquide et exigible de la créance de BNP Paribas Personal Finance :

– DIRE ET JUGER que BNP Paribas Personal Finance est bien titulaire d’une créance liquide et exigible qui agit en vertu d’un titre exécutoire comme il est dit aux articles L.111-3 du Code des procédures civiles d’exécution ;

– DIRE ET JUGER que le montant de la créance de BNP Paribas Personal Finance en principal, accessoires, intérêts et frais s’élève à la somme globale de six cent quarante-quatre mille deux cent trente-huit euros et soixante-treize centimes (648.247,43 €) selon décompte arrêté au 23 février 2023 avec intérêts au taux contractuel de 1,35%, à parfaire jusqu’à la date effective de paiement outre les dépens sur la présente saisie ;

– DIRE ET JUGER que le quantum de la créance revendiquée par BNP Paribas Personal Finance est bien fondé et justifié ;

– JUGER que le procès-verbal de saisie-attribution du 6 mai 2015 et l’acte de dénonciation subséquent respectent les dispositions du Code des procédures civiles d’exécution ;

– DEBOUTER Monsieur et Madame [L] de leur demande tendant à la nullité de la saisie attribution diligentée le 6 mai 2015 et à sa mainlevée ;

En tout état de cause,

– DEBOUTER Monsieur et Madame [L] de l’intégralité de leurs demandes ;

– DEBOUTER Monsieur et Madame [L] de leur demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et donner acte à BNP Paribas Personal Finance qu’elle renonce à toute demande sur ce fondement ;

– Les CONDAMNER aux entiers dépens.

*****

Le GIE NEUILLY CONTENTIEUX a conclu au fond une fois le 26 avril 2016. Il demande à la cour de :

– confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté les demandes des époux [L] et les a condamnés au titre des frais irrépétibles et des dépens;

– constater qu’aucune demande n’est formée à son encontre à l’exception de celle au titre de l’article 700 du code de procédure civile de sorte que l’appel en tant que dirigé contre elle est manifestement mal fondé;

– le mettre hors de cause;

– débouter les époux [L] de toute demande à son encontre;

– les condamner in solidum à lui payer la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

– les condamner in solidum aux dépens avec distraction au profit de Me Barre.

Il expose avoir été mandaté par la banque pour recouvrer la créance des époux [L] mais ne disposer d’aucun lien contractuel avec ces derniers. Il souligne en outre que l’auteur de la saisie contestée est la société BNP Paribas Personal Finance et qu’il est tiers à cette saisie.

*****

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées, figurant au dossier de la procédure, auxquelles il est expressément référé en application de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

A titre liminaire, la cour rappelle qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n’examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.

Elle n’est pas tenue de statuer sur les demandes de « constatations » ou de « dire et juger » qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu’elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.

La cour observe que le Conseil de Monsieur et Madame [L] a déposé au greffe de la cour un « dossier de plaidoirie » contenant des conclusions pour l’audience du 13 octobre 2023, avec un nombre de pages largement supérieur à celui transmis par RPVA le 15 septembre 2023, intitulée « conclusions récapitulatives N° 11 »

En effet, les conclusions régulièrement déposées par RPVA sont constituées de 33 pages selon le sommaire et de 122 paragraphes numérotés avant le dispositif.

Le dossier de plaidoirie comprend quant à lui 91 pages avant le dispositif et 282 paragraphes numérotés.

Eu égard aux dispositions des articles 16 et 930-1 du code de procédure civile, ce sont les conclusions déposées par RPVA le 15 septembre qui doivent être retenues par la cour d’appel.

Sur la recevabilité du moyen relatif au caractère abusif de certaines clauses du contrat de prêt :

La BNP PPF demande à la cour de déclarer irrecevables les demandes formées par Monsieur et Madame [L] tendant à la constatation du caractère abusif et à la suppression de la clause relative à la variation du taux de change, de la clause relative à la variation du taux d’intérêt et de la clause de reconnaissance d’information du bordereau d’acceptation.

Selon la BNP PPF, les époux [L] ont demandé la réparation de leur préjudice financier devant le juge pénal. Le jugement pénal du 26 février 2020 leur a alloué la somme de

156.991,73 euros. Cette somme a été calculée selon une formule permettant de neutraliser tout effet de la variation du taux de change et de placer les emprunteurs dans la situation dans laquelle ils auraient été s’ils avaient souscrit un prêt en euros. Force est ainsi de constater que l’indemnisation du préjudice financier alloué par le tribunal correctionnel correspond à la restitution par la Banque à l’Emprunteur de l’effet de la variation du taux de change supporté par ce dernier. En conséquence, juger abusives et supprimer l’effet des clauses relatives à la variation du taux de change serait contraire au principe essentiel du droit français ‘ rappelé par le jugement pénal ‘ selon lequel, si la réparation d’un préjudice doit être intégrale, elle ne peut procurer un enrichissement au demandeur. En effet, la suppression de l’effet des clauses relatives à la variation du taux de change aboutirait à ce que la Banque restitue une seconde fois à aux Epoux [L] le montant de l’effet de la variation du taux change, dès lors que celui-ci lui a déjà été restitué au titre du préjudice financier alloué à ce dernier par le juge pénal. En outre, supprimer les clauses relatives à la variation du taux de change serait également contraire à un principe essentiel du droit des clauses abusives. L’article L. 212-1 du Code de la consommation dispose que « sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Or, la somme allouée aux Epoux [L] par le Jugement pénal du 26 février 2020 a précisément eu pour effet de supprimer l’effet de la variation du taux de change, qui constitue selon eux le déséquilibre significatif.

Monsieur et Madame [L] affirment que leur moyen de défense sur le fondement des clauses abusives est recevable.

Ceci étant exposé,

Aux termes de l’article L. 213-6 du code de l’organisation judiciaire, le juge de l’exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu’elles n’échappent à la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire.

Aux termes de l’article L. 211-1 du code des procédures civiles d’exécution, tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d’argent, sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations prévue par le code du travail.

La cour d’appel, statuant comme juge de l’exécution, est saisie d’une demande de mainlevée d’une saisie-attribution pratiquée le 6 mai 2015 par le GIE Neuilly Contentieux, agissant pour le compte de la BNP Paribas Personal Finance, sur les comptes ouverts au nom de Monsieur et Madame [L] auprès de la SA Banque postale en exécution du titre exécutoire litigieux en date du 3 décembre 2007 pour le recouvrement d’une somme de 594.450,83 euros.

Monsieur et Madame [L] contestent cette saisie-attribution en invoquant en appel le caractère abusif de certaines clauses du contrat authentique de prêt « HELVET IMMO » sans réclamer le moindre paiement de la banque devant le juge de l’exécution.

En outre, le juge national a le devoir de relever d’office les clauses abusives en vertu de la jurisprudence fixée par la Cour de justice de l’Union Européenne (CJUE), cette obligation étant désormais codifiée au second alinéa de l’article R. 632-1, du code de la consommation.

Enfin, le moyen tiré du caractère abusif de clauses du contrat fondant la voie d’exécution, ne constitue pas une prétention nouvelle au sens de l’article 564 du code de procédure civile puisqu’elle vise à faire écarter les prétentions de la BNP PPF résultant de la saisie-attribution contestée.

Surabondamment, les effets du jugement pénal n’emportent aucune conséquence sur la contestation de la voie d’exécution diligentée par le GIE NEUILLY CONTENTIEUX, alors que la BNP PPF précise dans ses écritures avoir interjeté appel de ce jugement qu’elle ne communique pas, sauf dans l’hypothèse où une condamnation de la banque pour pratiques commerciales trompeuses dans le cadre de la commercialisation des contrats de prêts litigieux serait de nature à influer sur l’appréciation par le juge civil de l’existence de clauses abusives dans ces mêmes contrats, ce qu’aucune partie ne soulève dans la présente cause.

Ainsi, la fin de non-recevoir soulevée par l’intimée doit être écartée.

Sur la recevabilité de la demande reconventionnelle de la BNP PPF :

Monsieur et Madame [L] demandent à la cour de juger irrecevable la demande reconventionnelle de BNP PPF tendant à les condamner au paiement de la somme de 615.575 euros à parfaire majorée du taux d’intérêt conventionnel de 1,35% à compter du 10 mai 2015 au titre des impayés intervenus dans le cadre de l’exécution du prêt Helvet Immo n° 65 047 762, actualisée dans ses dernières conclusions.

Les appelants soutiennent que la demande reconventionnelle de BNP PPF est nouvelle en cause d’appel, qu’elle se heurte donc aux prescriptions de l’article 564 du code de procédure civile.

En outre, elle excède les pouvoirs du juge de l’exécution

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions, la BNP PPF demande à la cour :

« – DIRE ET JUGER l’action de BNP Paribas Personal Finance recevable ;

Sur le caractère liquide et exigible de la créance de BNP Paribas Personal Finance :

– DIRE ET JUGER que BNP Paribas Personal Finance est bien titulaire d’une créance liquide et exigible qui agit en vertu d’un titre exécutoire comme il est dit aux articles L.111-3 du Code des procédures civiles d’exécution ;

– DIRE ET JUGER que le montant de la créance de BNP Paribas Personal Finance en principal, accessoires, intérêts et frais s’élève à la somme globale de six cent quarante-quatre mille deux cent trente-huit euros et soixante-treize centimes (648.247,43 €) selon décompte arrêté au 23 février 2023 avec intérêts au taux contractuel de 1,35%, à parfaire jusqu’à la date effective de paiement outre les dépens sur la présente saisie ;

– DIRE ET JUGER que le quantum de la créance revendiquée par BNP Paribas Personal Finance est bien fondé et justifié ;

– JUGER que le procès-verbal de saisie-attribution du 6 mai 2015 et l’acte de dénonciation subséquent respectent les dispositions du Code des procédures civiles d’exécution ;

– DEBOUTER Monsieur et Madame [L] de leur demande tendant à la nullité de la saisie attribution diligentée le 6 mai 2015 et à sa mainlevée ; (..) »

Ces prétentions ne visent pas à condamner les appelants mais à faire valoir l’existence d’une créance certaine, liquide et exigible pour soutenir la validité de la saisie-attribution contestée par Monsieur et Madame [L].

Il n’y a dès lors pas lieu d’écarter une demande reconventionnelle inexistante en se référant à la présentation erronée des appelants.

Sur l’examen des clauses prétendues abusives :

Les appelants soutiennent que sont abusives les clauses suivantes du contrat HELVET IMMO proposé par la société BNP PPF, stipulées sur les 6 premières pages du contrat, rédigées en petits caractères et en paragraphe très denses. :

– Les clauses n° 1 à n° 5 formant ensemble le mécanisme implicite d’indexation du contrat sur le cours de change euro contre franc suisse ;

– Les clauses n° 6 à n° 8 constituant des clauses de variation du taux d’intérêt ;

– La clause n° 9 constituant une clause de reconnaissance d’information des emprunteurs.

Ils soutiennent que la clause implicite d’indexation stipulée au contrat de prêt, relève de son objet principal. L’offre de prêt fait ainsi supporter au consommateur un risque de change illimité tandis qu’elle ne comporte pas l’expression « risque de change », ni aucune clause spécifique d’avertissement ou de mise en garde de l’emprunteur à ce sujet.

La société BNP PPF plaide en réplique que :

– Les clauses relatives au risque de change et les clauses relatives à la variation du taux d’intérêt relèvent de l’objet principal et qu’elles sont rédigées de manière claire et compréhensible ; qu’elles ne relèvent pas du contrôle des clauses abusives ;

– La clause de reconnaissance d’acceptation du bordereau d’acceptation n’est pas abusive.

Plus subsidiairement, la banque soutient que ces clauses ne créent pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.

La société BNP PPF fait valoir que les clauses relatives à la variation du taux de change ne peuvent être soumises au contrôle de leur caractère abusif dès lors qu’elles relèvent de l’objet principal du contrat et sont rédigées de manière claire et compréhensible.

Elle affirme enfin que, comme tous les prêts à taux variable, la variation des taux du prêt Helvet Immo pouvait évoluer en faveur des emprunteurs ou en leur défaveur. La variation du taux de change a évolué en défaveur des emprunteurs alors que pendant plus de 20 ans, le taux de change a varié dans un tunnel compris entre 1,45 et 1,65 franc suisse pour un euro, celui-ci s’est établi autour de 1,20 en raison de la crise de la dette grecque et de ses répercussions pour la zone euro à compter de mai 2010 puis autour d’un franc suisse pour un euro depuis le 15 janvier 2015. En revanche, la variation du taux d’intérêt a évolué en faveur des emprunteurs en 2008-2009. Dans le cas des Consorts [L], au prononcé de la déchéance du terme le 10 mai 2015, le taux de change alors en vigueur était de 1,03 francs suisses pour 1 euros et le taux d’intérêt était de 1,35 % car ceux-ci avaient fait le choix de maintenir la monnaie de compte de leur prêt en francs suisses lors de la première révision quinquennale prévue dans le Contrat de prêt. Les études menées par la banque établissent que le prêt Helvet Immo n’a pas placé les Emprunteurs dans une situation ruineuse, contrairement à ce qu’ils soutiennent. La répercussion de la variation des taux n’affecte pas ‘ à la hausse ou à la baisse ‘ le montant de la mensualité mais seulement la durée initiale d’amortissement du prêt. En l’espèce, le montant de la mensualité des Epoux [L], après un différé total de règlement pendant les 15 premiers mois, a été chaque mois de 5.306,00 euros jusqu’au prononcé de la déchéance le 10 mai 2015.

Selon la BNP PPF, Contrairement à ce qu’ils soutiennent, les Emprunteurs ne sont absolument pas « prisonniers » du prêt Helvet immo. Au contraire, le choix de maintenir le prêt en francs suisses est entièrement à la main des emprunteurs. Ils disposent à tout moment de la possibilité de procéder au remboursement anticipé du prêt Helvet Immo, comme pour tout crédit. D’autre part, le prêt prévoit qu’à intervalles réguliers, tous les 5 ans s’agissant du Contrat de prêt souscrit par les Epoux [L], les emprunteurs peuvent exercer l’option de convertir le prêt en euros à taux d’intérêt fixe ou à taux d’intérêt variable. En d’autres termes, le risque financier du prêt était sous le contrôle des Emprunteurs et non « hors de leur contrôle » comme ils l’affirment.

Sur ce,

L’interprétation des critères généraux de la Directive 93/13 du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, au regard des clauses de monnaie de compte stipulées dans les contrats de prêt libellés en devise étrangère, telles que celles stipulées au contrat HELVET IMMO litigieux, a été précisée par un arrêt du 10 juin 2021

(C-776/19 à C-782/19) de la Cour de justice de l’Union européenne. La Cour a dit pour droit que :

– l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que, dans le cadre d’un contrat de prêt libellé en devise étrangère, l’exigence de transparence des clauses de ce contrat qui prévoient que la devise étrangère est la monnaie de compte et que l’euro est la monnaie de paiement et qui ont pour effet de faire porter le risque de change sur l’emprunteur, est satisfaite lorsque le professionnel a fourni au consommateur des informations suffisantes et exactes permettant à un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, de comprendre le fonctionnement concret du mécanisme financier en cause et d’évaluer ainsi le risque des conséquences économiques négatives, potentiellement significatives, de telles clauses sur ses obligations financières pendant toute la durée de ce même contrat ;

– l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que les clauses d’un contrat de prêt qui prévoient que la devise étrangère est la monnaie de compte et que l’euro est la monnaie de paiement et qui ont pour effet de faire porter le risque de change, sans qu’il soit plafonné, sur l’emprunteur, sont susceptibles de créer un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties découlant dudit contrat au détriment du consommateur, dès lors que le professionnel ne pouvait raisonnablement s’attendre, en respectant l’exigence de transparence à l’égard du consommateur, à ce que ce dernier accepte, à la suite d’une négociation individuelle, un risque disproportionné de change qui résulte de telles clauses.

Il en résulte que, sous peine d’être abusive, la clause de monnaie de compte d’un contrat de prêt libellé en devise étrangère doit être rédigée de telle manière qu’elle permette à l’emprunteur d’appréhender concrètement les différentes perspectives d’évolution de ses obligations financières pendant toute la durée du contrat.

Le moyen selon lequel l’emprunteur bénéficiait aussi d’une chance de réduction de son endettement par l’effet favorable de la clause d’indexation sur le cours de l’euro par rapport au franc suisse est inopérant dans la mesure où l’information claire sur l’aléa encouru par l’emprunteur n’est pas assez explicite.

S’agissant de la clause implicite d’indexation et des clauses de variation du taux d’intérêt ;

Sans être numérotées, plusieurs clauses figurent dans l’offre de prêt (Pièce N° 1 es appelants) :

1/ DESCRIPTION de votre crédit : Selon laquelle le contrat a pour objet la mise à disposition d’une somme de 151.151,83 FRANCS SUISSES (FS) pour le financement en EUROS du projet et des frais de change relatifs à l’opération de change du montant du crédit en EUROS qui seront prélevés lors du déblocage des fonds au notaire.

L’objet est le suivant : « Construction de sept maisons locatives et remboursement d’un prêt (BANQUE DE LA REUNION) à hauteur de 174.174,63 euros. »

2/ VOTRE SITUATION PERSONNELLE ET VOTRE PROJET : (‘)

3/ La clause « FINANCEMENT de votre crédit » prévoit que le crédit en francs suisses est financé par un emprunt souscrit par le prêteur sur les marchés monétaires. Cet emprunt en Francs suisses permet de bénéficier du taux d’intérêt défini aux présentes (Voir « charges et conditions »)

4/ La clause « ouverture d’un compte interne en euros et compte interne en francs suisses pour gérer votre crédit » précise que la monnaie de compte est le franc suisse, pour connaître à tout moment l’état de remboursement du crédit, et la monnaie de paiement est l’euro, pour permettre le paiement, des échéances.

Cette clause prévoit l’ouverture d’un compte interne en euros pour y inscrire au crédit les règlements mensuels en euros et au débit les charges annexes (primes d’assurance, frais de tenue de compte, frais de change) Elle prévoit aussi des options pour « un changement de monnaie de compte. » Il y est stipulé, in fine, que les emprunteurs recevront, avant le 15 février de chaque année, une situation de compte donnant le solde débiteur du compte interne en Francs suisses et le montant des intérêts payés en Francs suisses et en euros au titre de l’année civile écolée.

Le compte interne en francs suisses doit contenir au crédit les sommes correspondant au solde des règlements mensuels en euros après opération de change en francs suisses selon des modalités prévues au paragraphe « Opérations de change », valeur au jour de la réception des règlements en euros. » Au débit figureront les versements effectués par le Prêteur, via le compte interne en euros, au titre du déblocage du crédit, valeur à la date d’émission de chèques.

5/ La clause « opération de change » prévoit que :

« ‘ le prêt est un prêt de francs suisses. Les versements de ce prêt ne peuvent être effectués qu’en euros pour un remboursement de francs suisses.

‘ Il est expressément convenu et accepté que les frais de change occasionné par les opérations décrites ci-dessous font partie intégrante des règlements en euros et des opérations de changement de monnaie de compte, frais sans lesquels le prêt n’aurait pas été octroyé en francs suisses.

‘ En acceptant la présente offre de crédit, vous acceptez les opérations de change de francs suisses en euros et d’euros en francs suisses nécessaires au fonctionnement et au remboursement de votre crédit.

Nous attirons particulièrement votre attention sur le fait que, si au cours de la vie de votre crédit, vous résidez dans un pays dont la monnaie nationale n’est pas l’euro et que, de ce fait, vous ne disposez pas des euros nécessaires à la réalisation de vos versements dans cette devise, il vous appartient de vos pour vous procurer ces euros par tous moyens à votre convenance sans intervention du prêteur.

‘ Dans le cas où vous réalisez à cette occasion une ou des opérations de change, les frais et risques y afférent seront entièrement à votre charge.

Le montant de votre prêt, qui comprend les frais de change relatif à l’opération de change du montant de votre crédit de francs suisses en euros est fixée selon le taux de change de 1 euro contre 1,61 franc suisse. Ce taux est invariable jusqu’au déblocage complet de votre crédit de sorte que le montant du financement en euros est arrêté définitivement. Le tableau d’amortissement joint à la présente offre de prêt a été établi sur la base de ce même taux de change.

‘ Il est précisé que le taux de change applicable à la fixation du financement en euros de la présente opération n’est valable que 40 jours à dater de la réception de la présente offre.

‘ Par ailleurs les opérations de change suivante seront réalisées par le prêteur au cours de la vie de votre crédit :

La conversion en francs suisses du solde de vos règlements mensuels en euros après paiement des charges annexes de votre crédit. Cette opération de change sera effectuée au taux de change euros contre francs suisses applicables deux jours ouvrés avant l’arrêté de compte.

La conversion en euros du solde débiteur du compte interne en francs suisses en cas d’exercice d’une des deux options définies à l’article option pour un changement de monnaie de compte. Cette opération de change sera effectuée au taux de change euros contre francs suisses applicables deux jours ouvrés avant la date du changement de monnaie de compte.

La conversion en francs suisses de votre remboursement en euros en cas de remboursement anticipé total ou partiel de votre crédit, à une période où la monnaie de compte de votre crédit est toujours le franc suisse, selon les modalités définies au paragraphe remboursement anticipé ». Cette opération de change sera effectuée au taux de change euros contre francs suisses applicables deux jours ouvrés avant la date de réception du remboursement anticipé.

En cas de défaillance de l’emprunteur à une période où la monnaie de compte du crédit est toujours le franc suisse, cette monnaie de compte pourra à tout moment et unilatéralement être changé par le prêteur est remplacé par l’euro. Ainsi le crédit sera transformé d’office en prêt à taux révisable en euros suivant les conditions décrites au paragraphe « option pour un changement de monnaie de compte ». Cette opération de change sera effectuée au taux de change euros contre francs suisses applicables deux jours ouvrés avant la date du changement de monnaie de compte.

‘ Le taux de change applicable à toutes les opérations de change intervenant au cours de la vie de votre crédit sera le taux de change de référence, publié sur le site Internet de la banque centrale européenne, arrondi à la seconde décimale supérieure après la virgule.

‘ Les frais de change appliqué à chaque opération de change sont égaux à 1,50 % toutes taxent éventuelles comprises du montant à convertir. »

La cour retient le fait non contesté que cette clause d’indexation implicite relève de l’objet principal du contrat de prêt au terme d’une jurisprudence constante de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) selon laquelle les clauses relatives aux conditions de remboursement du prêt matérialisent le risque de change découlant des variations de la parité entre la monnaie de compte et la monnaie de paiement ainsi que le taux d’intérêt qui y est rattaché, lequel caractérise le prêt.

Cependant, cette clause d’indexation implicite n’est pas claire ni intelligible pour l’emprunteur normalement raisonnable, en raison de son mécanisme reposant sur la combinaison de plusieurs clauses, sans que figurent dans le contrat de prêt des informations et explications claires, transparentes, explicites et synthétiques, destinées à en exposer le fonctionnement concret.

En effet, l’emprunteur est contraint de se reporter à plusieurs paragraphes pour comprendre les risques inhérents à la variation des taux de change sans que le contrat énonce clairement les conséquences néfastes encourues en cas de baisse du cours de l’euro par rapport au franc suisse pendant l’exécution du contrat de prêt.

Il est d’ailleurs remarquable qu’aucun avertissement ne soit formulé par le rédacteur de l’acte de prêt alors que la BNP PPF a su insérer un avertissement spécifique sur l’obligation absolue de rembourser le prêt en euros, même dans l’hypothèse où l’emprunteur ne se trouverait plus dans un pays où la monnaie européenne serait inaccessible.

Ainsi, la convention litigieuse ne mentionne aucune information formelle et aisément compréhensible portant sur le risque de change, les possibles variations du cours de change, le risque de dépréciation importante de la monnaie de paiement en euro et celui d’une hausse du taux d’intérêt du franc suisse.

Le contrat évoque encore moins les conséquences pouvant en résulter pour l’emprunteur, à savoir des difficultés pour rembourser le capital du prêt, compte tenu de l’évolution possible du taux d’intérêt en francs suisses et des variations du change entre les deux monnaies.

A cet égard, le « plan d’amortissement prévisionnel du crédit en francs suisses » (Page 23 de l’offre de prêt) mentionne que « ce tableau est établi en supposant que :

(..)

‘le taux d’intérêt et le taux de change soit ceux prévus initialement aux articles charge de votre crédit est montant de vos règlements mensuels.

‘Le franc suisse étend la monnaie de compte de votre prêt, le plan prévisionnel a été établi dans cette devise.

‘Nous vous rappelons cependant que l’euro étend la monnaie de paiement, vous règlements mensuels seront effectués en euros pour un montant initial priment d’assurance incluse. C’est le solde de ce règlement en euros déduction faite de cette prime d’assurance des frais de change qui, convertie en francs suisses un pacte le tableau ci-dessous.

‘Ainsi ce dernier ne comprend pas les frais de change, les frais de tenue de compte, la commission d’ouverture, les primes d’assurance.

Pour tenir compte de la date réelle d’ouverture de compte et du versement du crédit en une ou plusieurs fois, nous vous adresserons à chaque nouvelle utilisation et jusqu’au versement total du crédit, un avis vous donnant le montant exact du règlement attendu. »

Ainsi, ce tableau prévisionnel d’amortissement ne reposant que sur une hypothèse, manifestement fausse de stabilité des cours de change en présentant un amortissement calculé en Francs suisses sans référence à la monnaie de paiement qu’est l’Euro.

La seule mention relative à la conversion en euros des sommes restant dues en francs suisses figure en caractères ordinaires à la fin du tableau page 29 ainsi rédigée : « pour obtenir les valeurs ci-dessus en euros, il y a lieu d’appliquer le taux de change, indiqué au paragraphe « remboursement de votre crédit’montant de vos règlements mensuels’règlements mensuels ». Il est précisé que les valeurs ci-dessus sont prévisionnelles compte tenues des variations du taux de change de l’euro en francs suisses.

Par ailleurs le présent tableau ayant pour but de vous informer sur l’amortissement de votre prêt en francs suisses au travers de vos versements mensuels, seules y figurent les sommes versées converties en francs suisses assurant le paiement des intérêts et du capital, à l’exclusion des primes d’assurance mensuelle et des frais de change. »

Contrairement à ce que soutient la BNP PPF, ces clauses ne sont ni claires ni compréhensibles en elles-mêmes, l’emprunteur non professionnel devant procéder à une analyse fine et complète de l’offre de prêt pour appréhender le risque lié à la variation défavorable du taux de change susceptible de modifier drastiquement l’économie du contrat par l’augmentation du taux d’intérêt suisse et l’imputation de plus en plus faible des paiements en euros sur le capital restant dû en francs suisses.

Pour s’exonérer de ce manque de transparence, l’intimée soutient aussi que le contrat offre deux possibilités aux emprunteurs s’agissant du taux d’intérêt : opter pour l’application d’un taux d’intérêt fixe (clause « Option pour un taux fixe en euro ») ou d’un taux d’intérêt variable (clause « Option pour un taux révisable en euro »). Selon la BNP PPF, la simple lecture de ces clauses permet de comprendre le fonctionnement concret du mode de calcul des clauses fixant un taux d’intérêt variable.

Néanmoins, on ne peut que remarquer que l’offre de prêt ne propose aucune simulation ni aucun tableau prévisionnel d’amortissement en euros, soit pour préciser le tableau d’amortissement en francs suisses soit pour mieux éclairer l’emprunteur sur l’option alternative que la banque évoque pour affirmer à tort que l’emprunteur est suffisamment éclairé sur les risques inhérents à l’exécution du contrat de prêt alors que la clause d’indexation implicite, résultant de la combinaison de quatre des cinq clauses contractuelles distinctes précitées, fait supporter à Monsieur et Madame [L] un risque de change illimité et disproportionné, créant de ce fait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au seul détriment des emprunteurs, tenus de supporter l’évolution des taux de change sur le long terme, durant la vie du contrat de prêt, contenant le risque réel de devoir rembourser un capital restant dû en euros d’un montant nettement supérieur au montant initial du prêt, selon les variations du taux de change du franc suisse.

L’avantage susceptible de favoriser l’emprunteur est totalement disproportionné par rapport au risque encouru de voir augmenter sans limite le montant du capital restant dû à la suite du risque de change puisque le montant du capital et celui des intérêts resterait dû en francs suisses, permettant ainsi au prêteur de recevoir au moins l’exécution normale du contrat de prêt.

En conséquence, la clause implicite d’indexation stipulée au contrat de prêt « HELVET IMMO » doit être déclarée abusive, en l’absence de preuve que les emprunteurs ont reçu une information claire et suffisante les alertant sur les risques encourus par l’effet d’une variation défavorable du taux de change entre l’euro et le francs suisse.

Sur la clause de reconnaissance par les emprunteurs d’avoir reçu l’information :

Vu les articles 6 et 9 du code de procédure civile ;

Dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, sont présumées abusives, les clauses ayant pour objet ou pour effet d’imposer au consommateur la charge de la preuve, qui, en application du droit applicable, devrait incomber normalement à l’autre partie au contrat.

Selon les appelants, la clause de reconnaissance d’information stipulée au sein du bordereau d’acceptation du prêt HELVET IMMO est abusive en ce qu’elle a pour conséquence de permettre à la banque de s’affranchir de son obligation d’information. Selon eux, la Commission des clauses abusives a rendu un avis n° 13-01 le 6 juin 2003 aux termes duquel une clause qu’ils présentent comme similaire à celle contenue dans le document « Accusé de réception et acceptation de l’offre de crédit », serait abusive pour être rédigée en des termes généraux et abstraits.

La BNP PPF réplique que cette clause n’est pas abusive. Selon elle, le document « Accusé de réception et acceptation de l’offre de crédit » n’est en rien comparable à la clause objet de l’avis de la commission dès lors qu’il comporte une stipulation utilisant des termes précis par laquelle les Emprunteurs reconnaissent notamment « avoir été informé que le [présent] crédit comporte des opérations de change pouvant avoir un impact sur le plan de remboursement. » (Pièce n° 23 de l’intimée).

Cependant, selon les écritures des appelants (N° 244), [la clause de reconnaissance d’information contenue par le bordereau d’acceptation du contrat de prêt stipule que « les emprunteurs déclarent avoir été informés que le présent contrat de crédit comporte des opérations de change pouvant avoir un impact sur son plan de remboursement » (cf paragraphe opérations de change et remboursement de votre crédit’ clauses n° 9)].

Or, une telle clause ne figure pas à l’offre de prêt ou en tout cas n’est pas distinguée comme une clause d’information ayant vocation à inverser la charge de la preuve qui serait de nature abusive.

Par ailleurs, selon le bordereau de communication de pièces et les conclusions de la BNP PPF, l’acceptation de l’offre de prêt contient la reconnaissance alléguée par les appelants (Pièce n° 2 de la BNP PPF) sans qu’elle discute d’une clause insérée à l’offre de prêt.

Ainsi, en l’absence de présentation de cette clause alléguée, il n’y a pas lieu de la déclarer abusive et alors que la société BNPPPF n’oppose pas aux emprunteurs une telle information, considérant, à tort, que les clauses du prêt litigieux sont suffisamment claires et explicites.

Le jugement querellé sera infirmé en toutes ses dispositions.

Sur la demande de nullité du contrat de prêt :

Monsieur et Madame [L] soutiennent que le titre exécutoire, contenant le contrat de prêt litigieux, servant de fondement à la saisie immobilière, ne peut subsister sans les clauses dont il est sollicité qu’elles soient déclarées abusives. Selon les appelants, la déclaration du caractère abusif des clauses d’indexation, de variation du taux d’intérêt et de reconnaissance d’information, contenues dans le contrat « HELVET IMMO » devrait entraîner « l’anéantissement rétroactif du contrat.

La société BNP PPF plaide, très subsidiairement dans l’hypothèse où certaines clauses seraient déclarées abusives, que seules les stipulations concernées seraient réputées non écrites tandis que les autres stipulations peuvent être maintenues, le contrat de prêt pouvant subsister en l’état.

Sur ce,

S’agissant de la sanction des clauses abusives présentes dans des contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou des consommateurs, le contrat de prêt litigieux est soumis aux dispositions de l’article L 132-1 du code de la consommation dans sa version en vigueur du 25 août 2001 au 01 janvier 2009.

Ce texte prévoit que, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Des décrets en Conseil d’Etat, pris après avis de la commission instituée à l’article L. 132-2, peuvent déterminer des types de clauses qui doivent être regardées comme abusives au sens du premier alinéa.

Une annexe au présent code comprend une liste indicative et non exhaustive de clauses qui peuvent être regardées comme abusives si elles satisfont aux conditions posées au premier alinéa. En cas de litige concernant un contrat comportant une telle clause, le demandeur n’est pas dispensé d’apporter la preuve du caractère abusif de cette clause.

Ces dispositions sont applicables quels que soient la forme ou le support du contrat. Il en est ainsi notamment des bons de commande, factures, bons de garantie, bordereaux ou bons de livraison, billets ou tickets, contenant des stipulations négociées librement ou non ou des références à des conditions générales préétablies.

Sans préjudice des règles d’interprétation prévues aux articles 1156 à 1161, 1163 et 1164 du code civil, le caractère abusif d’une clause s’apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat. Il s’apprécie également au regard de celles contenues dans un autre contrat lorsque la conclusion ou l’exécution de ces deux contrats dépendent juridiquement l’une de l’autre.

Les clauses abusives sont réputées non écrites.

L’appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible.

Le contrat restera applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s’il peut subsister sans lesdites clauses.

Les dispositions du présent article sont d’ordre public.

Il se déduit de ces dispositions que le contrat de prêt litigieux conserve sa force obligatoire, sauf s’il ne peut subsister sans la ou les clauses déclarées abusives.

En tout état de cause, la nullité du contrat ne peut être prononcée en raison de l’existence de clauses abusives qui y seraient incluses.

Or, contrairement à ce que soutiennent les appelants, l’annulation rétroactive du contrat litigieux ne priverait pas la société BNP PPF de son droit de recouvrer le solde des sommes restant dues, sous réserve des conséquences du caractère abusif des clauses d’intérêts stipulées au contrat HELVET IMMO.

A cet égard, il résulte en outre des écritures des parties que « les Epoux [L] ont fait délivrer une assignation au fond devant le Tribunal de grande instance à l’encontre de BNP Paribas Personal Finance le 8 septembre 2014. » (N° 113 des conclusions de l’intimée).

La pièce N° 6 de la société BNP PPF établit en effet qu’une instance au fond a été introduite par Monsieur et Madame [L] plusieurs mois avant la saisie-attribution dont la cour d’appel est saisie.

Pourtant, les appelants n’évoquent pas le sort de cette instance en annulation de clauses et en requalification du contrat, ouverte depuis plus de neuf années au jour où la cour statue sur la validité de la saisie-attribution litigieuse.

Enfin, elles n’ont pas répondu à la demande de la cour qui, dans l’arrêt avant dire droit du 11 octobre 2019, avait invité « les parties à indiquer les suites de l’assignation portée devant le tribunal de grande instance de Paris par les époux [L] à l’encontre de la SA BNP Paribas Personal Finance le 8 septembre 2014 et à produire les décisions de justice intervenues. »

La demande d’annulation rétroactive du contrat de prêt « HELVET IMMO » doit donc être déclarée irrecevable car portée devant le juge de l’exécution pendant une instance au fond en cours.

Sur les conséquences du caractère abusif de certaines clauses du contrat de prêt :

Selon l’article L. 213-6 du code de l’organisation judiciaire, le juge de l’exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu’elles n’échappent à la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire.

Cependant, d’une part, le juge de l’exécution peut connaître de l’action en nullité, pour les causes de droit commun des contrats, du titre notarié (2ème Civ. 18 juin 2009, n° 08-10.843, Bull., II, n° 165). Il peut prononcer la déchéance du droit aux intérêts, sanction attachée aux irrégularités de l’offre de prêt par le code de la consommation (1ère Civ. 1er mars 2017, n° 16-10.142). Il est compétent pour modérer ou augmenter la clause pénale (2ème Civ. 5 juin 2014, n° 13-16.053), s’agissant d’une contestation sur le montant de la créance dont dépend l’exécution forcée.

D’autre part, les clauses déclarées abusives sont réputées n’avoir jamais existé, et n’avoir donc produit aucun effet dès le début du contrat et être privée de tout effet pour l’avenir.

En l’occurrence, la clause implicite d’indexation et les clauses de révision du taux d’intérêt qui forment un ensemble indivisible, participent de l’objet principal du contrat de prêt, et en assurent le fonctionnement, le prêt d’une somme d’argent impliquant corrélativement une rémunération pour la mise à disposition de ce capital.

Ces clauses abusives étant réputées non écrites, et l’exécution du contrat de prêt ne pouvant plus subsister selon son mécanisme initial, il doit en être déduit que la banque n’a pas produit de décompte actualisé et juste permettant de vérifier le solde du prêt résultant du titre exécutoire ayant servi de fondement à la saisie-attribution litigieuse.

Sur l’exigibilité de la créance alléguée par la BNP PPF :

Monsieur et Madame [L] demandent subsidiairement à la cour de juger qu’au jour de l’acte de saisie-attribution du 6 mai 2015, la créance invoquée par BNP PPF n’était pas exigible, la date d’exigibilité anticipée du solde du compte du prêt étant le 10 mai 2015.

La BNP PPF réplique qu’elle justifie d’un titre exécutoire valide constitué par le contrat de prêt rédigé par acte authentique.

Elle affirme être recevable dans la saisie attribution diligentée le 6 mai 2015. A la date du premier incident de paiement non régularisé, la créance de la Banque devient exigible dans son intégralité. En conséquence, la saisie attribution diligentée le 6 mai 2015 et dénoncée le 12 mai 2015 est régulière.

Pour mémoire, le procès-verbal de saisie-attribution dressé le 6 mai 2015 mentionne le décompte suivant (Pièce N° 36 des appelants) :

. Principal de la créance : ””””””””590.508,87 euros

. Intérêts acquis au taux annuel de 1,40 % : ””””’.. 1.276,40 euros

. Provisions pour intérêt à échoir un mois : ””””” 1.695,79 euros.

Le principal de la créance est ainsi constitué :

. Sommes dues antérieurement à la déchéance du terme : ””’ 74.541,04 euros

. Capital restant dû : ”””””””””’ 475.395,24 euros

. Frais de change : ””””””””””’7.130,93 euros

. Indemnité de 7 % sur le capital restant dû : ””””” 33.277,67 euros

. Intérêt 1,40 % du 10 février 2015 au 11 février 2015 : ”””’…36,44 euros

. Intérêt 1,40 % du 12 février 2000 15 au 18 février 2015 : ””’… 127,55 euros.

Pourtant, le décompte de la créance (Pièce N° 35 des appelants) mentionne que la date d’exigibilité anticipée du prêt est e 10 mai 2015, date postérieure à la saisie-attribution litigieuse.

Selon son BCP, la BNP PPF verse aux débats une pièce N° 8, relative au courrier en date du 30 septembre 2015, informant Monsieur et Madame [L] de la déchéance du terme du prêt.

Or, ce document est la communication du décompte susvisé mais ne constitue pas la mise en demeure préalable à la déchéance du terme ou la lettre recommandée réclamant le solde impayé du prêt.

L’offre de prêt contient une clause intitulée « DEFINITION ET CONSEQUENCES DE LA DEFAILLANCE » ainsi rédigée :

« L’emprunteur est réputé défaillant sans qu’il soit besoin d’adresser une mise en demeure en cas de :

‘ renseignements personnels ou confidentiels inexacts (‘) ;

‘ fausses déclarations de sa part (‘) ;

‘ non-paiement à la bonne date d’une somme quelconque due par lui ;

(‘)

En cas de défaillance de l’emprunteur :

‘ si la monnaie de compte est toujours le franc suisse, le prêteur pourra à tout moment et unilatéralement transformé le crédit en crédits à taux révisable en euros suivant les conditions décrites au § « opérations de change »

‘ le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du solde du compte. Jusqu’à la date du règlement effectif, ce solde produit des intérêts de retard au taux du crédit alors en vigueur lors du prononcé de l’exigibilité ; en outre le prêteur perçoit une indemnité de 7 % calculés sur le montant du solde rendu exigible.

‘ Tant que le prêteur n’exige pas le remboursement immédiat du solde débiteur du compte, le taux du crédit en vigueur est majoré de’, jusqu’à reprise du paiement normal des règlements.

(‘) »

Toutefois, si le contrat de prêt d’une somme d’argent peut prévoir que la défaillance de

l’emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d’une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle, quelle que soit la nature de la défaillance en cause.

Or, les stipulations rappelées plus haut ne précisent pas explicitement et de manière non équivoque qu’une déchéance du terme était possible sans mise en demeure préalable des emprunteurs défaillants.

Cette situation ne permet donc pas à la cour de vérifier que les sommes réclamées en capital et intérêts étaient exigibles le 6 mai 2015, jour de la saisie-attribution, alors que la date d’exigibilité de la créance alléguée par la BNP PPF est le 10 mai 2015.

En conséquence, en l’absence de preuve de l’exigibilité de la totalité du solde du prêt HELVET IMMO à la date du 6 mai 2015, et compte tenu des conséquences prévisibles du calcul de la dette en faveur des appelants par l’effet des clauses abusives insérée au contrat de prêt, il convient de juger que la BNP PPF ne démontre pas l’exigibilité des sommes réclamées lors de la saisie-attribution du 6 mai 2015.

A cet égard, aucune des parties ne propose un décompte actualisé des sommes restant éventuellement dues par Monsieur et Madame [L], une fois écarté le jeu des clauses abusives, réputées non écrites.

Considérant que les conditions de mise en ‘uvre de la procédure de saisie-attribution initiée par BNP PPF ne sont pas remplies, il convient d’en ordonner la mainlevée.

Sur la demande de dommages et intérêts des appelants :

Monsieur et Madame [L] sollicitent la condamnation de la BNP PPF à leur payer la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 123 du code de procédure civile, outre toute amende civile qui serait jugée opportune.

La BNP PPF n’a pas répondu à ce chef de demande.

Sur ce,

L’article 123 du code de procédure civile prescrit que les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, à moins qu’il en soit disposé autrement et sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt.

Cependant, les fins de non-recevoir ont été soulevées par la société BNP PPF en cause d’appel à propos des moyens tirés du caractère abusif des clauses du contrat de prêt, soulevés eux-mêmes seulement en appel par Monsieur et Madame [L].

Monsieur et Madame [L] doivent être déboutés de cette prétention.

Sur les autres demandes :

La société BNP PPF supportera les dépens de première instance et d’appel.

Elle sera condamnée à payer à Monsieur et Madame [L] la somme de 20.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, en matière civile par mise à disposition au greffe, conformément à l’article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;

FAIT DROIT à la demande de révocation de l’ordonnance de clôture pour recevoir les dernières conclusions et pièces des parties ;

REVOQUE l’ordonnance de clôture du 23 février 2023 à effet du 13 octobre 2023 ;

RECOIT les dernières pièces et écritures des parties ;

ORDONNE la clôture à la date du 13 octobre 2023 ;

ECARTE la fin de non-recevoir soulevée par la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE tendant au rejet du moyen relatif au caractère abusif de certaines clauses du contrat de prêt ;

DIT N’Y AVOIR LIEU à écarter la demande reconventionnelle de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, inexistante ;

INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

DECLARE abusives les clauses du contrat de prêt « HELVET IMMO » proposé par la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et accepté par Monsieur [H] [L] et Madame [M] [F], épouse [L], le 7 juillet 2008, contenant indexation, révision des indices de variation du taux d’intérêt ;

DEBOUTE les appelants de leur demande en déclaration de clause abusive d’une « clause N° 9 de reconnaissance d’information » du contrat « HELVET IMMO » ;

CONSTATE l’absence d’exigibilité de la créance de la BNP PPF à la date du 6 mai 2015 ;

ORDONNE la mainlevée de la saisie-attribution diligentée par la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE le 6 mai 2015 ;

REJETTE la demande d’annulation rétroactive du contrat de prêt « HELVET IMMO » ;

DEBOUTE Monsieur [H] [L] et Madame [M] [F], épouse [L], de leur demande de condamnation de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à leur payer la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 123 du code de procédure civile et d’amende civile ;

CONDAMNE la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux dépens de première instance et d’appel ;

CONDAMNE la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à Monsieur [H] [L] et Madame [M] [F], épouse [L], la somme de 20.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Madame Nathalie BEBEAU, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

 


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