Saisie-attribution : décision du 15 décembre 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 22/05573

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Saisie-attribution : décision du 15 décembre 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 22/05573

15 décembre 2023
Cour d’appel de Rennes
RG n°
22/05573

2ème Chambre

ARRÊT N°583

N° RG 22/05573

N° Portalis DBVL-V-B7G-TDZE

(3)

Mme [S] [I] épouse [B]

C/

S.A.S. INTRUM CORPORATE

Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l’égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

– Me LOAREC

– Me DEPASSE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 DECEMBRE 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,

Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,

Assesseur : Madame Hélène BARTHE-NARI, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Philippe LE BOUDEC, lors des débats, et Mme Ludivine BABIN, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l’audience publique du 04 Juillet 2023

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 15 Décembre 2023, après prorogations, par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE :

Madame [S] [I] épouse [B]

née le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 11]

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représentée par Me Manon LOAREC, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-NAZAIRE

INTIMÉE :

Société INTRUM DEBT FINANCE AG représentée par la SAS INTRUM CORPORATE venant aux droits de la société COFINOGA

[Adresse 2]

[Localité 9]

Représentée par Me Jean-Pierre DEPASSE de la SCP DEPASSE, DAUGAN, QUESNEL, DEMAY, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

EXPOSE DU LITIGE :

Par jugement en date 22 mars 1995 du tribunal d’instance de Saint-Nazaire, Mme [S] [L], désormais Mme [S] [I] épouse [B], a été condamnée à payer à la société Cofinoga la somme de 18 448 Francs, outre les intérêts.

Se prévalant d’une cession de cette créance par la société Cofinoga à son profit le 7 décembre 2011, la société Intrum Debt Finance AG a fait signifier à Mme [B] plusieurs mesures d’exécution :

– le 27 septembre 2012, un commandement de payer aux fins de saisie-vente,

– le 20 juillet 2021, un commandement de payer aux fins de saisie-vente,

– le 11 août 2021, une saisie-attribution pratiquée sur ses comptes bancaires le 3 août 2021.

Par acte d’huissier en date du 9 septembre 2021, Mme [B] a formé opposition à la saisie-attribution et fait assigner la société Intrum Debt Finance aux fins de voir prononcer la nullité de cette mesure d’exécution devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Saint-Nazaire.

Par jugement du 8 septembre 2022, le juge de l’exécution a :

– déclaré irrecevable la contestation formée par Mme [I] épouse [B] à la saisie-attribution pratiquée sur son compte bancaire par la société Intrum Debt Finance AG le 3 août 2021 et dénoncée le 11 août 2021,

– condamné Mme [I] épouse [B] à payer à la société Intrum Debt Finance AG la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné Mme [I] épouse [B] à supporter les dépens de l’instance.

Par déclaration en date du 16 septembre 2022, Mme [B] a relevé appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 6 octobre 2022, elle demande à la cour de :

Vu les articles L. 111-4, L. 111-8, L. 121-2, L. 211-1, R. 211-1 et R. 221-1 du Code des procédures civiles d’exécution,

Vu l’ancien article 1689 du Code civil,

Vu l’article 1690 et 2224 du Code civil,

Vu l’article 1240 du Code civil,

Vu l’article D. 214-227 (anc. Art. D 214-102) du Code monétaire et financier,

Vu les articles 699 et 700 du Code de procédure civile,

Vu la loi n°2008-561 du 17 juin 2008,

Vu l’article 32 de la loi n°91-650 du 9 juillet 1991,

Vu l’avis n°16006 de la Cour de cassation du 04 juillet 2016,

Vu la Directive du 11 mai 2005/29/CE,

– réformer le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau :

A titre principal,

– dire Mme [S] [B] recevable et bien fondée en ses demandes,

– prononcer la nullité de la saisie-attribution réalisée sur le compte bancaire de Madame [S] [B],

A titre subsidiaire,

– dire les intérêts sollicités avant le 11 août 2019 comme prescrits,

– cantonner la saisie-attribution à la somme de 2.818,48 €, correspondant au principal,

En tout état de cause,

– condamner la société Intrum Justitia Debt Finance AG à verser à Mme [B] à titre d’indemnités, une somme égale au montant de la créance réclamée,

– condamner la société Intrum Justitia Debt Finance AG à verser à Mme [B] une somme de 2.500 euros au visa de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société Intrum Justitia Debt Finance AG aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 25 octobre 2022, la société Intrum Debt Finances demande à la cour de :

Vu les articles 1321 et suivants du Code civil dans leur version postérieure à l’ordonnance du 10 février 2016,

Vu les articles L.211-1 et suivants du Code des procédures civiles d’exécution ;

Vu les articles R.211-1 et suivants du même Code,

Vu l’article 9 du Code de procédure civile,

A titre principal :

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 8 septembre 2022 par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Saint Nazaire,

– débouter Mme [S] [B] de toutes ses demandes, fins et prétentions,

A titre subsidiaire et statuant à nouveau :

– juger valable et confirmer la saisie-attribution pratiquée le 3 août 2021, dénoncée à Mme [S] [B] le 11 août 2021,

– débouter Mme [S] [B] de toutes ses demandes, fins et prétentions,

– condamner Mme [S] [B] à régler à la société Intrum Debt Finance AG une somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la même aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision ainsi qu’aux dernières conclusions déposées par les parties, l’ordonnance de clôture ayant été rendue le 13 avril 2023.

EXPOSE DES MOTIFS :

Sur la recevabilité de la contestation :

Mme [B] s’est vue notifiée par acte d’huissier du 11 août 2021, la saisie-attribution pratiquée le 3 août 2021 sur ses comptes bancaires. Elle a formé opposition le 9 août 2021.

Le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Saint-Nazaire a considéré que cette contestation était irrecevable au motif que la débitrice ne justifiait pas de la dénonciation de sa contestation à l’huissier de justice ayant procédé à la saisie par lettre recommandée avec accusé de réception conformément à l’article R.211-11 du code des procédures civiles d’exécution.

Or, devant la cour, Mme [B] produit l’accusé de réception d’un courrier recommandé signé par la SCP Toulbot – Massicot le 10 septembre 2021 portant la référence du courrier de contestation de la saisie-attribution pratiquée entre les mains de la Caisse d’épargne sur ses comptes bancaires. Il apparaît en conséquence, que Mme [B] justifie bien de l’envoi du courrier à l’huissier chargé de la saisie dans les formes et délais mentionnés à l’article R.211-11 du code des procédures civiles d’exécution.

Le jugement sera donc infirmé et la contestation de Mme [B] de la saisie-attribution pratiquée le 3 août 2021 entre les mains de la Caisse d’épargne sera déclarée recevable.

Sur la nullité de la saisie-attribution pratiquée le 3 août 2021:

Mme [B] soutient que la saisie-attribution pratiquée sur ses comptes bancaires auprès de la Caisse d’épargne le 3 août 2021 à la demande de la société Intrum Debt Finances AG, est nulle en raison de l’absence de qualité du créancier saisissant, de la prescription du titre exécutoire sur lequel la saisie est fondée et de l’absence de décompte détaillé des sommes dues.

Ainsi, elle fait valoir tout d’abord que la cession de créance ne lui aurait pas été valablement notifiée puisque le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 27 septembre 2012 qui l’informait, par mention, de la cession de créance intervenue le 7 décembre 2011, a été signifié non à son domicile mais à son ancienne adresse professionnelle, en l’occurrence au siège social de sa société, [Adresse 8] à [Localité 12], alors que l’entreprise avait fermé le 21 septembre 2021à la suite de dégradations causées par un incendie. Elle souligne ensuite que le cédant mentionné sur l’acte de cession serait la société Laser Cofinoga dont le siège social est situé [Adresse 4] à [Localité 10], alors qu’elle s’est vue condamnée en paiement à l’égard de la société Cofinoga située [Adresse 5] [Localité 6]. Enfin, elle prétend que l’annexe au contrat de cession portant liste des créances cédées sans aucun élément d’authentification pour rattacher le document au contrat de cession ne permet pas de rapporter la preuve de la cession de la créance litigieuse, et ce d’autant plus que le montant de la créance n’est pas renseigné.

La société Intrum Debt Finance AG soutient de son côté qu’elle n’était pas tenue de notifier à Mme [B] la cession de créance litigieuse préalablement à la dénonciation de la saisie-attribution dès lors que celle-ci n’invoque pas d’atteinte à ses droits ni ne prétend avoir procédé au paiement de sa dette entre les mains d’un tiers. Elle fait valoir qu’en tout état de cause, la saisie-attribution a été pratiquée en vertu d’un jugement réputé contradictoire prononcé par le tribunal d’instance de Saint-Nazaire en date du 22 mars 1995 qui a été signifié à la personne de Mme [B] et que la cession de créance lui a été notifiée par commandement de payer valant saisie du 27 septembre 2012 mentionnant expressément l’acte en question, produit en annexe avec la liste des créances cédées par la société Cofinoga sur laquelle figurait la référence attachée au contrat de Mme [B]. Soulignant en outre que l’article 1324 alinéa 1er du code civil dans sa version issu de l’ordonnance du 10 février 2016 sanctionne le défaut de notification de la cession de créance au débiteur cédé par son inopposabilité, la société Intrum Debt Finance AG fait valoir que celle-ci ne remet nullement en question la validité ou l’efficacité du contrat de cession intervenu entre le créancier cédant et le créancier cessionnaire de sorte que celui-ci est devenu un créancier légitime du détenteur cédé mais également détenteur légitime du titre exécutoire.

Mais la cession de créance, intervenue en 2011, est régie par les dispositions antérieures à l’ordonnance de 2016 contrairement à ce que soutient l’intimée. Selon l’article 1690 du code civil, dans sa version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, le cessionnaire n’est saisi à l’égard des tiers que par la signification du transport fait au débiteur.

Or, comme aux termes de l’article L. 211-1 du code des procédures civiles d’exécution, la saisie-attribution ne peut être pratiquée par le créancier saisissant que s’il dispose d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible à l’encontre du débiteur saisi et que l’article L. 211-2 du même code dispose que la saisie-attribution a pour effet d’attribuer immédiatement la créance saisi au créancier saisissant, il s’ensuit que le cessionnaire de la créance, cause de la saisie, dont la cession n’est opposable au débiteur que par la signification qui lui en est faite, ne peut pratiquer une saisie-attribution, qu’après avoir signifié cette cession de créance au débiteur saisi.

Il est admis que la signification de la cession de créance au débiteur peut intervenir par des formes équivalentes à la signification par huissier de justice, pourvu qu’elles fassent mention de la cession et contiennent les précisions requises.

En l’espèce, la société Intrum Debt Finances AG se prévaut du commandement de payer aux fins de saisie vente qu’elle a fait diligenter par huissier de justice le 27 septembre 2012 et fait valoir que la cession de créances conclue avec la société Cofinoga, comportant en annexe le contrat de cession de portefeuille de créances avec la référence du contrat de prêt consenti par la société Cofinoga à Mme [S] [L] désormais [S] [B], a été signifiée par le même acte.

Pour signifier ce commandement, l’huissier s’est présenté à l’adresse du [Adresse 8] à [Localité 12]. Après avoir constaté le nom de Mme [B] sur la boîte aux lettres et considéré qu’elle était absente, il a laissé un courrier informant de la remise en étude.

Mme [B] soutient qu’elle ne résidait pas à cette adresse et qu’il s’agissait de l’adresse de sa société laquelle avait été fermée à la suite d’un incendie le 21 septembre 2012 de sorte que la signification de ce commandement n’ayant pas été valablement faite à sa personne, la cession de créance n’a pu lui être notifiée. Mais outre le fait que les éléments produits par Mme [B] sont insuffisants à établir que l’adresse du [Adresse 8] n’était pas son adresse personnelle, il convient de constater que dans le dispositif de ses conclusions, l’appelante, bien que contestant la validité de ce commandement, n’en sollicite pas la nullité.

Il est donc établi que l’acte de cession intervenu le 7 décembre 2011 entre la société Laser Cofinoga, la société Sygma Banque, la compagnie de gestion des prêts et la société Intrum Justitia Debt Finance a été joint au commandement de payer valant saisie signifié le 27 septembre 2012 à étude, sur le fondement du jugement rendu le 22 mars 1995 par le tribunal d’instance de Saint-Nazaire et que cet acte comporte en annexe une liste des créances ‘Laser Cofinoga Cofinoga’ cédées sur laquelle figure distinctement la créance détenue sur Mme [S] [L], désormais [S] [B], avec le numéro 44739504023 correspondant au numéro de dossier du contrat de crédit accessoire à un contrat de vente consenti par la société Cofinoga le 4 octobre 1982 à Mme [L].

Il s’ensuit d’une part que la société Intrum Debt Finance AG est bien cessionnaire de la créance de Mme [B] envers la société Cofinoga et d’autre part que la cession de créance qui figurait en annexe du commandement de payer valant saisie a été valablement signifiée à Mme [B], préalablement à la saisie-attribution pratiquée entre les mains de la Caisse d’épargne le 3 août 2021.

Dès lors, le commandement de payer valant saisie a valablement interrompu la prescription du titre exécutoire en application de l’article 2244 du code civil et fait courir un nouveau délai à compter de la signification de cette mesure d’exécution, de sorte au moment de la saisie-attribution pratiquée le 3 août 2021, la société Intrum Debt Finance AG disposait d’un titre exécutoire qui n’était pas prescrit. La saisie a en conséquence été mise en oeuvre dans les délais ouverts au créancier pour procéder au recouvrement de sa créance.

Par ailleurs, c’est en vain que Mme [B] soutient que l’acte de saisie serait nul pour ne pas comporter le décompte détaillé de la créance réclamée alors que l’huissier a, au contraire, bien précisé le détail de la créance en indiquant le montant en principal, les intérêts acquis et le taux d’intérêt pratiqué de 8,47 % ainsi que les frais de procédure et émoluments. Si ce décompte ne figure pas sur une annexe distincte, Mme [B] n’établit pas le grief que cette absence lui cause alors qu’elle s’est vue notifiée le 20 juillet 2021, quelques jours avant la saisie-attribution, un commandement aux fins de saisie-vente mentionnant dans un décompte distinct le détail de la créance en principal et accessoires et qu’elle n’invoque aucun paiement de sa part susceptible de venir modifier le montant des sommes réclamées.

En conséquence, la saisie-attribution pratiquée le 3 août 2021 entre les mains de la Caisse d’épargne sur les comptes détenus par Mme [B] a été valablement mise en oeuvre par la société Intrum Debt Finance AG.

Sur l’abus de saisie:

Se prévalant de l’arrêt Gelvora UAB rendu le 20 juillet 2017 par la Cour de justice de l’Union européenne, Mme [B] soutient que la mesure de saisie-attribution pratiquée le 3 août 2021 sur son compte bancaire, à la supposer régulière, a été entreprise de manière déloyale et abusive. Elle expose que la société Intrum Debt Finance AG est spécialisée dans le rachat de créances auprès d’organismes de crédit à vil prix et qu’elle use de moyens de pression déloyaux envers les débiteurs pour tenter de recouvrer des sommes. Ainsi, elle souligne que le cessionnaire n’a pas hésité à mettre en oeuvre un commandement de payer et une saisie-attribution en moins de dix jours alors que depuis 2012, en tenant pour valable le commandement de payer, ce qu’elle conteste, aucune somme ne lui a été réclamée.

Mais la saisie-attribution litigieuse ne saurait se voir qualifiée de voie d’exécution abusive. En effet, si par l’arrêt du 20 juillet 2017, la cour de justice de l’Union européenne a dit que la directive du 11 mai 2005 interdisant les pratiques commerciales déloyales dès lors que les mesures qu’elles adoptent sont susceptibles d’influencer le décision du consommateur relativement au paiement du produit, était applicable à la relation juridique existant entre la société de recouvrement cessionnaire de créance et le débiteur défaillant et ce y compris lorsque la créance cédée est fondée sur un titre exécutoire, il n’en découle pas pour autant que la cession de créances à une société de recouvrement soit constitutive par elle même d’une pratique déloyale ou abusive, même si en sa qualité de cessionnaire des créances de la société Cofinoga, la société Intrum Justitia Debt Finance AG est susceptible de voir sa pratique dans le recouvrement sanctionnée.

Le fait que l’activité puisse présenter un caractère spéculatif n’est aucunement prohibé et résulte de l’acceptation d’un aléa sur la solvabilité du débiteur et le caractère recouvrable de la créance. Il sera également rappelé que par l’effet de la cession de créances, le cessionnaire ne dispose pas de plus de droits que le cédant de sorte que la cession n’emporte par elle-même aucune aggravation des obligations du débiteur telles qu’il les avait initialement acceptées. Ainsi, le fait que les emprunteurs ne soient pas été initialement informés de ce que la créance puisse être cédée est sans incidence défavorable pour eux et ne saurait permettre de caractériser un abus ou un comportement déloyal.

Si effectivement en l’espèce, la saisie-attribution a été mise en oeuvre 26 ans après l’obtention du titre exécutoire, il sera rappelé que le moyen de prescription du jugement a été écarté par la cour qui a dit que la saisie avait été mise en oeuvre dans les délais ouverts au créancier pour procéder au recouvrement de sa créance.

De surcroît, l’ancienneté du jugement ne saurait être imputée exclusivement au prêteur et à la société Intrum Debt Finance Ag mais résulte également de la passivité de Mme [B] dans le règlement de sa dette alors que le jugement lui a été signifié à personne le 1er juin 1995. Il est pour le moins curieux que l’appelante soutienne qu’informée du risque qu’elle puisse faire l’objet de poursuites plus de vingt ans après la signification de la dernière décision de justice, elle n’aurait certainement pas contracté alors qu’elle a bénéficié des plus larges délais pour s’acquitter de sa dette.

En considération de ces éléments, la mesure de saisie-attribution attaquée ne saurait être qualifiée de déloyale ou abusive.

Sur le paiement des sommes sollicitées :

Mme [B] fait valoir à juste titre, que la société Intrum Debt Finance AG ne peut lui réclamer le montant des intérêts échus avant le 11 août 2019 lesquels seraient prescrits.

Il est de principe en effet que les créances périodiques nées d’une créance en principal fixée par un titre exécutoire à la suite de la fourniture d’un bien ou d’un service par un professionnel à un consommateur sont soumises au délai de prescription biennal prévu à l’article L. 137-2 devenu l’article L. 218-2 précité du code de la consommation.

En l’espèce, la créance invoquée par la société Intrum Debt Finance AG résulte d’un contrat de crédit conclu entre un professionnel et un consommateur. La prescription biennale doit recevoir application, ce que la créancière ne conteste pas, de sorte que la poursuite en recouvrement sur la créance d’intérêts n’est recevable que pour les intérêts échus deux ans avant la date de la saisie attribution interruptive de prescription, étant rappelé que le procès-verbal de saisie a été signifié le 10 août 2021.

En revanche c’est à tort que Mme [B] prétend que les demandes formées au titre des frais de procédure antérieure pour 285,18 euros et du coût de l’acte pour 118,22 euros ne seraient pas exigibles faute de justificatif de l’engagement de ces frais et de leur caractère nécessaire. Il n’est pas contesté que la SCP Toulbot-Massicot a agi pour le recouvrement de la somme due en vertu du titre exécutoire et qu’elle avait reçu mandat en ce sens du créancier de sorte que ces frais, nécessaires au moment où ils ont été exposés, sont à la charge du débiteur conformément à l’article 111-8 du code des procédures civiles d’exécution.

Mais s’agissant de l’émolument dont le calcul est détaillé à l’article A444-31 du code de commerce, il résulte de l’article R. 444-55 du même code que celui-ci mentionné au 129 du tableau 3-2 annexé à l’article R. 444-3 est à la charge du créancier.

La saisie-attribution sera donc validée à hauteur du principal soit la somme de 2 818,48 euros, augmenté des intérêts au taux légal à compter du 11 août 2019, des frais de procédure antérieure de 285,18 euros et du coût de l’acte pour 118,22 euros.

Sur les demandes accessoires :

Mme [B] supportera la charge des dépens de première instance et d’appel.

Il n’y a pas matière à application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de quiconque en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 8 septembre 2022 par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Saint- Nazaire,

Statuant à nouveau :

Déclare la contestation de Mme [S] [B] recevable,

Déclare régulière et valide la saisie-attribution pratiquée le 3 août 2021 à la demande de la société Intrum Debt Finance AG entre les mains de la Caisse d’épargne sur les comptes détenus par Mme [S] [B],

Dit cependant qu’elle ne produira ses effets que pour la somme de 2 818,48 euros augmenté des intérêts au taux légal à compter du 11 août 2019, de la somme de 285,18 euros au titre des frais de procédure antérieure et de la somme de 118,22 euros au titre du coût de l’acte,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [S] [B] aux entiers dépens de première instance et d’appel,

Rejette toute demande plus ample ou contraire aux présentes dispositions.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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