Saisie-attribution : décision du 11 janvier 2024 Cour d’appel de Douai RG n° 23/01609

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Saisie-attribution : décision du 11 janvier 2024 Cour d’appel de Douai RG n° 23/01609

11 janvier 2024
Cour d’appel de Douai
RG n°
23/01609

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 3

ARRÊT DU 11/01/2024

N° de MINUTE :24/10

N° RG 23/01609 – N° Portalis DBVT-V-B7H-U2XZ

Jugement rendu le 25 Novembre 2022 par le Juge de l’exécution de Lille

APPELANTS

Monsieur [Z] [G]

[Adresse 2]

[Localité 4]

SARL SGC prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliée en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentés par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai, avocat constitué assisté de Me Jean-Luc Trigoudja, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant

INTIMÉE

SA Bail ACTEA

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Benoît De Berny, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

DÉBATS à l’audience publique du 23 novembre 2023 tenue par Sylvie Collière magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Ismérie Capiez

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Sylvie Collière, président de chambre

Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Catherine Ménegaire, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 11 janvier 2024 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Sylvie Collière, président et Ismérie Capiez, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 17 octobre 2023

EXPOSE DU LITIGE

Par ordonnance du 6 décembre 2002, le président du tribunal de commerce de Lille a enjoint à M. [Z] [G] de payer à la SA Bail actea la somme de 17 408,69 euros outre les dépens fixés à 27,19 euros.

Cette ordonnance a été signifiée à M. [G] le 2 janvier 2003 à mairie et a été revêtue de la formule exécutoire le 7 février 2003.

L’ordonnance revêtue de la formule exécutoire a été signifiée à M. [G] à domicile le 3 mars 2003 avec un commandement de payer la somme de 17 848,02 euros aux fins de saisie-vente.

A la suite d’une requête de la société Bail actea aux fins de saisie des rémunérations de M. [G] et à défaut de conciliation entre les parties, le greffier en chef du tribunal d’instance de Lille a établi le 8 juin 2006 un acte de saisie à concurrence de la somme de 17 408,69 euros.

Le même jour, un acte de saisie des rémunérations de M. [G] a été établi au profit de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Nord pour un total de

72 338,98 euros.

Dans le cadre de la répartition effectuée par le régisseur du tribunal d’instance de Lille le 3 avril 2008 la société Bail actea a reçu le 28 avril 2008 la somme de

1 939,74 euros.

Par lettre du 25 septembre 2008, le greffier en chef du tribunal d’instance de Lille a informé la société Bail actea de la suspension de la procédure de saisie des rémunérations en raison d’un avis à tiers détenteur de la trésorerie de Seclin du 25 septembre 2008 portant sur la somme de 34 370 euros.

Le 9 octobre 2019, la société Bail actea est intervenue à la procédure de saisie des rémunérations du travail de M. [G] en cours afin de participer à la répartition des sommes saisies à hauteur de 34 676,13 euros.

Par acte du 2 septembre 2020, la société Bail actea a fait signifier à la SARL SGC, en sa qualité d’employeur du débiteur, l’avis d’intervention du 9 octobre 2019.

Par ordonnance de contrainte du 22 novembre 2021, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Lille a :

– déclaré la société SGC personnellement débitrice des retenues qui auraient dû être opérées ;

– condamné la société SGC à verser au régisseur du tribunal la somme de 9 867 euros ainsi qu’aux dépens.

Par acte du 10 décembre 2021, la société Bail actea a fait signifier cette ordonnance à la société SGC.

Par requêtes déposées au greffe le 10 décembre 2021, M. [G] et la société SGC ont formé opposition à l’intervention du 9 octobre 2019 de la société Bail actea à la procédure de saisie des rémunérations et à l’ordonnance de contrainte du 22 novembre 2021.

Par jugement contradictoire du 25 novembre 2022, le juge de l’exécution a :

– dit irrecevables l’ensemble des prétentions dirigées à l’encontre de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Nord, visant à la mainlevée de la saisie des rémunérations autorisée à son bénéfice par acte de saisie du 8 juin 2006 ;

– rejeté l’ensemble des demandes principales, subsidiaires et infiniment subsidiaires de la société SGC et de M. [G] ;

– déclaré la société SGC personnellement débitrice des retenues qui auraient dû être opérées sur les rémunérations de M. [G] au profit de la société Bail actea ;

– condamné la société SGC à verser au régisseur du tribunal judiciaire de Lille la somme de 9 867 euros, par règlement à effectuer au greffe du dit tribunal par chèque libellé à l’ordre de la régie du tribunal judiciaire ;

– condamné la société SGC à régler à la société Bail actea une indemnité de 1 000 euros pour les frais irrépétibles ;

– condamné la société SGC aux entiers dépens ;

– ordonné l’exécution de plein droit du présent jugement ;

– rejeté toute autre demande plus ample ou contraire au dispositif du jugement.

Par déclaration du 3 avril 2023, la société SGC et M. [G] ont relevé appel de ce jugement en toutes ses dispositions.

Aux termes de leurs dernières conclusions du 16 octobre 2023, ils demandent à la cour, au visa des articles 829, 1411, 503, 504, 654, 655, 677 du code de procédure civile, R. 3252-13, R. 3252-22, R. 3252-44, L. 3252-10 du code du travail, L. 111-3 et L. 111-4 du code des procédures civiles d’exécution et L. 333-2 du code de la consommation, de :

– confirmer le jugement déféré en ce qu’il les a jugés recevables à agir ;

– débouter la société Bail actea de son appel incident et de toutes ses demandes, fins et conclusions;

– réformer le jugement déféré pour le surplus ;

Ce faisant,

– les déclarer bien fondés en leur contestation à l’intervention de la société Bail actea dans la procédure de saisie des rémunérations ;

A titre principal,

– juger et prononcer la nullité des significations en date des 2 janvier et 3 mars 2003 de l’ordonnance portant injonction de payer délivrée le 6 décembre 2002 par le tribunal de commerce de Lille, au profit de la société Bail actea ;

– en conséquence, juger et prononcer le caractère non avenu de l’ordonnance portant injonction de payer délivrée le 6 décembre 2002 par le tribunal de commerce de Lille au profit de la société Bail actea ;

– ordonner la mainlevée de la saisie des rémunérations exercée par la société Bail actea ;

A titre subsidiaire,

– juger n’y avoir lieu à saisie des rémunérations en l’absence de lien de subordination entre la société SGC et M. [G] ;

– juger la saisie des rémunérations inopposable à la société SGC tiers-saisi ;

A titre plus subsidiaire,

– ordonner la nullité de la requête en saisie des rémunérations déposée par la société Bail actea ;

– déclarer la société Bail actea irrecevable en son intervention à la procédure de saisie des rémunérations autorisée le 8 juin 2006 ;

– déclarer la saisie des rémunérations inopposable à la société SGC tiers-saisi ;

A titre reconventionnel,

– condamner la société Bail actea à restituer à M. [G] la somme de 1 939,74 euros ;

A titre infiniment subsidiaire,

– limiter la condamnation de la société SGC au paiement de la quotité saisissable du salaire de M. [G], soit la somme de 9 687 euros ;

En toute état de cause,

– condamner la société Bail actea à payer à M. [G] la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner la société Bail actea aux entiers frais et dépens de l’instance

Aux termes de ses dernières conclusions du 17 juillet 2023, la société Bail actea demande à la cour de :

– confirmer partiellement le jugement déféré ;

– déclarer la société SGC irrecevable ou mal fondée en sa contestation de sa dette, de celle de M. [G] et du titre ;

– déclarer M. [G] irrecevable ou mal fondé en sa contestation de l’injonction de payer et de ses significations, et de sa dette ;

– infirmer le jugement en ce qui concerne le montant des retenues et le

bénéficiaire ;

– condamner la société SGC à payer à la société Bail actea la somme de 34 676,13 euros notamment à raison de son refus de retenir la quotité saisissable et de fournir les informations sur les rémunérations ;

– condamner in solidum la société SCG et M. [G] à lui payer 3 000 euros en appel au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– les condamner in solidum aux dépens.

La cour a soumis aux parties à l’audience la requête en intervention déposée par la société Bail actea le 5 juin 2019 ainsi que le procès-verbal en date du 17 septembre 2019 de vérification par le juge de la créance déposée pour intervention, ces pièces étant issues du dossier de première instance. Aucune observation n’a été formulée par M. [G] et la société SGC.

MOTIFS

Sur la recevabilité des contestations de la société SGC :

La recevabilité des contestations de M. [G] à l’encontre de l’ordonnance de contrainte du 22 novembre 2021, admise par le premier juge, n’est pas remise en cause par la société Bail actea devant la cour.

S’agissant de la recevabilité des contestations de la société SGC à l’encontre, non seulement de l’ordonnance de contrainte, mais également de l’intervention de la société Bail actea, il faut considérer que, dans le cadre de l’opposition à l’ordonnance de contrainte, le tiers-saisi a intérêt à contester l’existence ou le montant de la dette du débiteur ou encore la qualité de salarié de ce dernier puisque ces contestations sont de nature à avoir une influence sur l’existence ou le montant de sa propre dette fixée par l’ordonnance de contrainte. C’est donc à juste titre que le jugement déféré a déclaré les contestations de la société SGC recevables.

Sur le caractère non avenu de l’ordonnance d’injonction de payer :

Aux termes de l’article L. 213-6 alinéa 1er du code de l’organisation judiciaire, le juge de l’exécution connaît de manière exclusive des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu’elles n’échappent à la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire.

Selon l’article 1411 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable en l’espèce, une copie certifiée conforme de la requête et de l’ordonnance portant injonction de payer est signifiée, à l’initiative du créancier, à chacun des débiteurs et l’ordonnance est non avenue si elle n’a pas été signifiée dans les six mois de sa date.

Selon l’article 1416 du même code, l’opposition est formée dans le mois qui suit la signification de l’ordonnance.

Toutefois, si la signification n’a pas été faite à personne, l’opposition est recevable jusqu’à l’expiration du délai d’un mois suivant le premier acte signifié à personne ou, à défaut, suivant la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponibles en tout ou partie les biens du débiteur.

Selon l’article 1422 du même code dans sa rédaction applicable en l’espèce, en l’absence d’opposition dans le mois qui suit la signification de l’ordonnance portant injonction de payer, quelles que soient les modalités de la signification, ou en cas de désistement du débiteur qui a formé opposition, le créancier peut demander l’apposition sur l’ordonnance de la formule exécutoire. Le désistement du débiteur obéit aux règles prévues aux articles 400 à 405.

L’ordonnance produit tous les effets d’un jugement contradictoire. Elle n’est pas susceptible d’appel même si elle accorde des délais de paiement.

M. [G] et la société SGC font valoir que l’ordonnance d’injonction de payer est non avenue en application de l’article 1411 du code de procédure civile dans la mesure où les significations des 2 janvier 2003 et 3 mars 2003 sont nulles.

Le jugement déféré a retenu qu’à l’examen de la fiche comptable éditée le 3 juillet 2013 et issue du dossier tenu par le tribunal d’instance, devenu depuis le 1er janvier 2020 le tribunal judiciaire de Lille, il apparaît qu’à cette date la société Bail actea avait déjà perçu des rémunérations du travail de M. [G] pour une somme de 1 939,74 euros, qu’il y avait donc lieu de juger qu’à cette date, des mesures d’exécution forcée ayant pour effet de rendre pour partie indisponibles les biens de M. [G] avaient déjà été réalisées, ceci en vertu de l’ordonnance d’injonction de payer du 6 décembre 2002 et que, faute d’opposition dans le délai de ‘six’ mois, cette ordonnance avait produit tous les effets d’un jugement contradictoire à l’égard de M. [G] qui ne pouvait donc la remettre en cause à l’occasion d’une contestation portant sur une mesure d’exécution forcée, en soutenant un moyen visant à faire déclarer cette ordonnance non avenue.

Le fait que M. [G] ne puisse plus faire opposition à l’ordonnance d’injonction de payer n’empêche pas que le juge de l’exécution doive vérifier que la saisie des rémunérations est pratiquée en vertu d’un titre exécutoire. Or, la nullité de la signification d’une ordonnance d’injonction de payer aboutit à une absence de signification de cette ordonnance dans les six mois et conduit donc à constater le caractère non avenu de l’ordonnance qui ne vaut pas titre exécutoire.

Dans ces conditions, c’est à tort que le premier juge n’a pas examiné la validité des significations des 2 janvier 2003 et 3 mars 2003.

Par ailleurs, le juge de l’exécution peut être saisi, même après l’acte de saisie, d’une contestation de la saisie des rémunérations et l’article R. 3252-32 du code du travail précise que l’intervention d’un nouveau créancier peut être contestée à tout moment.

Dans ces conditions, la société Bail actea ne peut soutenir que la validité de l’ordonnance d’injonction de payer ne peut plus être contestée parce que la saisie du 8 juin 2006 ‘n’a pas été contestée dans les six mois’ ou que M. [G] ne pourrait ‘faire valoir qu’un argument postérieur à la saisie de 2006’.

– Sur la nullité de la signification du 2 janvier 2003

Selon l’article 693 du même code, ce qui est prescrit par les articles 654 à 659 est observé à peine de nullité.

Selon l’article 694 du même code, la nullité des notifications est régie par les dispositions qui gouvernent la nullité des actes de procédure.

Enfin, l’article 114 alinéa 2 du même code dispose qu’une nullité pour vice de forme ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public.

En l’espèce, M. [G] et la société SGC soulèvent la nullité de la signification du 2 janvier 2003 au regard des dispositions des articles 654 et 655 du code de procédure civile. La nullité encourue est une nullité de forme soumise à la démonstration d’un grief.

Or, à supposer même que l’acte du 2 janvier 2003 soit affecté d’une irrégularité, force est de constater qu’à aucun moment, dans ses conclusions, M. [G] ne démontre ni même n’allègue le grief que cette irrégularité lui aurait causé. S’il invoque un grief qui lui serait causé par l’irrégularité de la signification du 3 mars 2003 (page 13 de ses écritures), tel n’est pas le cas pour la signification du 2 janvier 2003.

La nullité de cet acte ne saurait donc être retenue.

– Sur la nullité de la signification du 3 mars 2003 :

Selon l’article 655 du code de procédure civile dans sa rédaction en vigueur du 1er janvier 1976 au 1er mars 2006, applicable en l’espèce, si la signification à personne s’avère impossible, l’acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence. La copie peut être remise à toute personne présente qui doit déclarer ses nom, prénoms et qualité.

Si le décret n°2005-1678 du 28 décembre 2005, en vigueur depuis le 1er mars 2006, a ajouté à cet article un alinéa 2 ainsi rédigé ‘ l’huissier de justice doit relater dans l’acte les diligences qu’il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l’impossibilité d’une telle signification’, il reste que, contrairement à ce qui est soutenu par la société Bail actea, l’huissier devait mentionner les circonstances caractérisant l’impossibilité de la signification à personne, avant même l’ajout résultant du décret susvisé.

Selon l’article 693 du même code, ce qui est prescrit par les articles 654 à 659 est observé à peine de nullité.

Selon l’article 694 du même code, la nullité des notifications est régie par les dispositions qui gouvernent la nullité des actes de procédure.

Enfin, l’article 114 alinéa 2 du même code dispose que la nullité pour vice de forme ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public.

En l’espèce, l’acte du 3 mars 2003 mentionne qu’il a été remis à la mère de [Z] [G], Mme [C] [G], qui l’a accepté.

Il n’est mentionné aucune circonstance caractérisant l’impossibilité de signifier l’acte à personne de sorte que cet acte est irrégulier.

M. [G] soutient que cette irrégularité lui a nécessairement causé un grief puisque, de ce fait, il n’a pas été mis en capacité d’exercer une voie de recours.

Or, force est de constater que le fait que l’acte du 3 mars 2003 n’ait pas été signifié à M. [G] à personne gardait intacte la possibilité pour ce dernier de former opposition à l’encontre de l’ordonnance d’injonction de payer jusqu’au premier acte signifié à sa personne ou jusqu’à la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponibles ses biens en tout ou partie.

A supposer même que M. [G] n’ait pas eu connaissance du premier acte de saisie sur ses rémunérations du 8 juin 2006, il reconnaît lui-même dans sa requête en opposition du 10 décembre 2021 avoir été avisé de l’intervention du 9 octobre 2019. Dès lors, il pouvait former opposition à l’ordonnance d’injonction de payer dans le mois suivant cet avis, ce qu’il n’a pas fait.

Dans ces conditions, il ne peut sérieusement soutenir que l’irrégularité affectant la signification du 2 mars 2003 lui a causé un grief en l’empêchant de faire opposition à l’ordonnance d’injonction de payer.

En tout état de cause, la nullité de la signification du 2 mars 2003 ne pourrait rendre l’ordonnance d’injonction de payer du 6 décembre 2002 non avenue puisque cette décision a été régulièrement signifiée le 2 janvier 2003.

Il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a rejeté les demandes de M. [G] et de la société SGC tendant à voir déclarer non avenue l’ordonnance d’injonction de payer du 6 décembre 2002 ainsi que les demandes en découlant.

Sur la qualité de salarié de M. [G] :

Selon l’article L. 3252-1 du code du travail, les dispositions du présent chapitre sont applicables aux sommes dues à titre de rémunération à toutes les personnes salariées ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs, quels que soient le montant et la nature de la rémunération, la forme et la nature du contrat.

M. [G] fait valoir à hauteur d’appel que, faute de lien de subordination, il n’est pas salarié et que dès lors ses rémunérations ne pouvaient pas faire l’objet d’une saisie régie par les articles L. 3252-1 et suivants du code du travail mais d’une saisie-attribution.

La société Bail actea soutient que ‘la validation de la saisie en 2006 a autorité de la chose jugée’.

Or, ainsi qu’il a été indiqué ci-dessus, le juge de l’exécution peut être saisi, même après l’acte de saisie, d’une contestation de la saisie des rémunérations et l’article R. 3252-32 du code du travail précise que l’intervention d’un nouveau créancier peut être contestée à tout moment. Dans ces conditions la contestation est recevable, peu important qu’elle soit formée après l’acte de saisie du 8 juin 2006.

Sur le fond de la contestation, s’il ne le produit pas en appel, M. [G] indique lui-même dans ses conclusions qu’il avait produit en première instance un contrat de travail, et s’il verse aux débats un courrier de Pôle Emploi en date du 17 mars 2022 qui retient l’absence de lien de subordination entre la société SGC et son dirigeant, [Z] [G], force est de constater que la situation de M. [G] a été soumise à Pôle Emploi par la société SGC elle-même afin de plus verser de cotisations d’assurance chômage et que ce courrier est à lui seul insuffisant à démontrer l’absence de lien de subordination, alors qu’un contrat de travail a été établi.

Il convient donc de rejeter la demande subsidiaire de M. [G] tendant à voir débouter la société Bail actea de sa demande de saisie des rémunérations et à déclarer la saisie des rémunérations inopposable à la société SGC.

Sur la validité de la requête en intervention :

Selon l’article R. 3252-13 du code du travail, la demande aux fins de saisie des rémunérations est formée par requête remise ou adressée au greffe par le créancier, qui contient à peine de nullité, (…) 2° le décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus ainsi que l’indication du taux des intérêts.

Selon l’article R. 3252-22 du même code, l’acte de saisie établi par le greffe contient (…) 2° le décompte distinct des sommes pour lesquelles la saisie est pratiquée, en principal, frais et intérêts échus ainsi que l’indication du taux des intérêts.

Selon l’article R. 3252-30 du même code, l’intervention d’un créancier à une procédure de saisie des rémunérations en cours est formée par requête qui contient les mentions prescrites par l’article R. 3252-13.

Selon l’article R. 3252-31 alinéa 1er du même code, après que le juge a vérifié le montant, en principal, intérêts et frais, de la créance nouvelle faisant l’objet d’une intervention à une saisie en cours, le greffier avise le débiteur et les créanciers qui sont parties à la procédure de cette intervention.

M. [G] et la société SGC font valoir que le point de départ des intérêts n’est pas mentionné dans l’avis d’intervention du 9 octobre 2019 de sorte qu’ils ne peuvent pas vérifier leur éventuelle prescription et qu’il est exigé par ailleurs un décompte détaillé des intérêts, son absence en l’espèce leur causant nécessairement grief puisqu’ils ne sont pas en mesure de connaître l’étendue de la créance alléguée, alors même que M. [G] n’ayant pas reçu de la société Bail actea l’information annuelle que les textes imposent au créancier de donner à la caution, elle était déchue du droit aux intérêts.

Il résulte de la requête en intervention déposée par la société Bail actea le 5 juin 2019 (présentée aux parties à l’audience) qu’elle comporte, conformément à l’article R. 3252-13 auquel renvoie l’article R. 3252-30, un décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts et mentionne en outre que les intérêts sont calculés au taux légal à compter du 6 décembre 2012 et au taux légal majoré à compter du 2 avril 2003. Cette requête contient même, alors même que les textes susvisés ne l’exigent pas un décompte détaillé des intérêts réclamés pour un montant total de 18 540,11 euros.

En outre, en matière d’intervention, si l’article R. 3252-30 procède par renvoi à l’article R. 3252-13 s’agissant du contenu de la requête en intervention, l’article R. 3252-31 qui ne renvoie pas à l’article R. 3252-22 n’exige pas que le greffier dresse un acte de saisie contenant un décompte distinct des sommes pour lesquelles la saisie est pratiquée, en principal, frais et intérêts échus ainsi que l’indication du taux des intérêts, mais seulement qu’il avise le débiteur de l’intervention, ce qui a été le cas. En tout état de cause, l’article R. 3252-22 ne sanctionne pas le défaut de mention d’un décompte en principal, intérêts et frais par la nullité.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté la demande tendant à voir prononcer la nullité de la requête en intervention de la société Bail actea et les demandes subséquentes.

Sur le montant de la condamnation de la société SGC :

La société Bail actea fait valoir que la société SGC a été condamnée à régler la somme de 9 867 euros alors qu’elle n’a payé depuis 2006 que 1 939,74 euros et qu’elle doit dès lors être condamnée à payer les retenues qu’elle aurait dû effectuer depuis 2006 et dont le total atteint au moins 34 676,13 euros.

Or, la société Bail actea ne détaille aucunement au terme de quel calcul il faudrait considérer que le montant des sommes non retenues par l’employeur sur les rémunérations de M. [G] serait de 34 676,13 euros, alors notamment qu’il y a lieu de rappeler que la saisie des rémunérations a été suspendue à compter du 25 septembre 2008 et pendant plusieurs années à la suite d’un avis à tiers détenteur émis pour un montant de 34 370 euros.

Par ailleurs, la société Bail actea ne peut réclamer que la société SGC soit condamnée à lui payer directement les sommes non retenues alors que, dans la mesure où il existe plusieurs créanciers saisissants, en l’espèce, la société Bail actea et la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Nord, le paiement est adressé au régisseur du tribunal judiciaire afin qu’il procède à la répartition entre les différents créanciers.

Dans ces conditions, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a condamné la société SGC à payer au régisseur du tribunal judiciaire de Lille la somme de 9 867 euros retenue par l’ordonnance de contrainte

Sur la demande en restitution de M. [G] :

Il résulte de ce qui précède que M. [G] ne peut qu’être débouté de sa demande en restitution de la somme de 1 939,74 euros, formée à hauteur d’appel.

Sur les frais du procès :

La solution donnée au litige conduit à confirmer le jugement déféré en ses dispositions relatives aux dépens et à l’application de l’article 700 du code de procédure civile.

Partie perdante en appel, M. [G] et la société SGC seront condamnés in solidum aux dépens d’appel ainsi qu’à régler à la société Bail actea la somme de 1500 euros au titre des frais irrépétibles qu’elle a été contrainte d’exposer en appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant,

Déboute M. [Z] [G] et la SARL SGC de leurs demandes tendant à voir juger n’y avoir lieu à saisie des rémunérations en l’absence de lien de subordination entre la société SGC et M. [G] et à voir juger la saisie des rémunérations inopposable à la société SGC ;

Déboute M. [Z] [G] de sa demande en restitution de la somme de

1 939,74 euros ;

Condamne in solidum M. [Z] [G] et la SARL SGC à payer à la SA Bail actea la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

Condamne in solidum M. [Z] [G] et la SARL SGC aux dépens d’appel.

Le greffier

Ismérie CAPIEZ

Le président

Sylvie COLLIERE

 


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