Saisie-attribution : décision du 11 janvier 2024 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/08360

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Saisie-attribution : décision du 11 janvier 2024 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/08360

11 janvier 2024
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
19/08360

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT AU FOND

DU 11 JANVIER 2024

N° 2024/2

Rôle N° RG 19/08360 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BEKEM

SAS E-ILE DE FRANCE

SAS E-PREMIER

C/

S.A.S. SOCIETE KYOSEIL AM

[I] [Z]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Cécile DESHORMIERE

Me Paul DRAGON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce d’AIX-EN-PROVENCE en date du 09 Avril 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 2008002705.

APPELANTES

SAS E-ILE DE FRANCE représentée par la société EVYSEM, elle-même représentée par Monsieur [S] [R],

dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Me Cécile DESHORMIERE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

SAS E-PREMIER représentée par la société EVYSEM, elle-même représentée par Monsieur [S] [R],

dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Me Cécile DESHORMIERE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

S.A.S. SOCIETE KYOSEIL AM, anciennement dénommée SOCIETE CONSEIL PLUS GESTION (CPG),

dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Me Paul DRAGON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

PARTIE INTERVENANTE

Maître Me [I] [Z], intervenant volontairement es qualité de liquidateur des SAS E.PREMIER et E-ILE DE FRANCE

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Cécile DESHORMIERE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 26 Octobre 2023 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Valérie GERARD, Présidente de chambre

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère, magistrat rapporteur

Mme Marie-Amélie VINCENT, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Janvier 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Janvier 2024,

Signé par Madame Valérie GERARD, Présidente de chambre et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Par acte du 14 mars 2018 la société Conseil Plus Gestion a assigné les sociétés E-Premier et E-Ile de France devant le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence en paiement de factures de commissions établies au titre de la gestion des investissements de ces deux sociétés.

La société Conseil Plus Gestion était ainsi chargée depuis le 8 juillet 2012 de la gestion des investissements des sociétés E-Premier et E-Ile de France, prenant la suite de la société Evysem, dont M. [R], par ailleurs salarié de la société Conseil Plus Gestion, était le dirigeant.

Le contrat a été exécuté par la société Conseil Plus Gestion jusqu’au 31 décembre 2016, date à laquelle la société Evysem a souhaité reprendre elle-même la gestion des deux sociétés, dans un contexte de relations conflictuelles entre la société Conseil Plus Gestion et M. [R].

Par jugement en date du 9 avril 2019 le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence a :

-débouté la société E-Ile de France et la société E-Premier de leurs demandes de désignation d’un conciliateur ou d’un médiateur, de sursis à statuer dans l’attente de l’issue d’une telle démarche préalable et de dommages et intérêts pour procédure abusive,

-condamné la société E-Premier à payer à la société Conseil Plus Gestion la somme de 76 086,08 euros et dit qu’elle pourra s’acquitter de cette somme par versements de 24 mensualités égales, la première à intervenir dans les trente jours de la signification du présent jugement, mais que faute pour elle de payer à bonne date une seule des mensualités prévues, la totalité des sommes restant dues deviendra de plein droit immédiatement exigible,

-condamné la société E-Ile de France à payer à la société Conseil Plus Gestion la somme de 19 275 euros et dit qu’elle pourra s’acquitter de cette somme par versements de 24 mensualités égales, la première à intervenir dans les trente jours de la signification du présent jugement, mais que faute pour elle de payer à bonne date une seule des mensualités prévues, la totalité des sommes restant dues deviendra de plein droit immédiatement exigible,

-condamné la société E-Premier à payer à la société Conseil Plus Gestion la somme de 49 024,60 euros au plus tard le 31 décembre 2022 ou dès la dissolution ou la liquidation de la société E-Premier si cette dernière intervient avant cette date et dans ce dernier cas au plus tard 30 jours après la publication de cet événement dans un journal d’annonces légales comme lui impose la loi,

-condamné la société E-Ile de France à payer à la société Conseil Plus Gestion la somme de 19 275 euros au plus tard le 31 décembre 2022 ou dès la dissolution ou la liquidation de la société E-Ile de France si cette dernière intervient avant cette date et dans ce dernier cas au plus tard 30 jours après la publication de cet événement dans un journal d’annonces légales comme lui impose la loi,

-condamné la société E-Premier à payer à la société Conseil Plus Gestion la somme de 750 euros à titre d’indemnité en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

-condamné la société E-Ile de France à payer à la société Conseil Plus Gestion la somme de 750 euros à titre d’indemnité en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens,

-ordonné l’exécution provisoire,

-débouté pour le surplus les parties de toutes leurs autres demandes, fins et conclusions

———-

Par acte du 22 mai 2019 la société E-Premier et la société E-Ile de France ont interjeté appel du jugement.

Le 28 juin 2019 la demande de suspension de l’exécution provisoire formée par les sociétés appelantes a été rejetée par le Premier président.

Par jugement en date du 12 décembre 2019 le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’encontre de la société E-Ile de France et désigné Maître [Z] en qualité de liquidateur.

Par ordonnance d’incident en date du 7 janvier 2020 le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de radiation de l’affaire sollicitée par la société Conseil Plus Gestion.

Par acte du 24 janvier 2020 la société Conseil Plus Gestion a délivré assignation à Maître [Z], en qualité de liquidateur judiciaire de la société E-Ile de France en reprise d’instance devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence.

La société E-Premier a également fait l’objet d’un jugement de liquidation judiciaire le 7 avril 2020, désignant Maître [Z] en qualité de mandataire liquidateur.

———

Par arrêt avant-dire-droit en date du 10 novembre 2022 la présente cour a notamment :

-ordonné la réouverture des débats à l’audience collégiale du jeudi 15 juin 2023,

-invité le Conseil de la société E-Ile de France à régulariser l’intervention du liquidateur judiciaire de cette société en vue d’une reprise de l’instance au visa de l’article L.622-21 du code de commerce, les conclusions prises au nom de Maître [Z], mandataire judiciaire, ne concernant que la société E-Premier,

-invité le Conseil de la société Conseil Plus Gestion à justifier de la déclaration de créance faite dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société E-Ile-de-France

———-

Par conclusions enregistrées par voie dématérialisée le 6 avril 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, Maître [I] [Z], agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société E-Ile de France et de la société E-Premier, demande à la cour de :

Vu les articles 448 du Code de procédure civile et 6§1 de la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme ;

Vu les articles 1134, 1156, 1168, 1181, 1175, 1348 et 1382 anciens du code civil ;

Vu les pièces versées aux débats ;

Recevoir en son intervention volontaire Maître [I] [Z], es qualité de mandataire liquidateur des sociétés E-Premier et E-Ile de France, en liquidation judiciaire, commis à cette fonction par jugements du tribunal de commerce d’Aix-en-Provence des 12 décembre 2019 et 7 avril 2020 ;

Prononcer la reprise de l’instance d’appel ;

Y faisant droit,

A titre principal,

Prononcer l’annulation du jugement du tribunal de commerce d’Aix-en-Provence du 9 avril 2019 ;

A titre subsidiaire, en l’absence d’annulation du jugement déféré

Infirmer le jugement du tribunal de commerce d’Aix-en-Provence du 9 avril 2019 en ce qu’il :

– condamne les sociétés E-Premier et E-Ile de France à payer à la société CPG respectivement les sommes de 76.086,08 € et 19.275 € ;

– dit qu’elles pourront s’acquitter de cette somme par le versement de 24 mensualités égales, la première à intervenir dans les trente jours de la signification du jugement, mais que, faute pour l’une d’elle de payer à bonne date une seule des mensualités prévues, la totalité des sommes restant dues deviendra de plein droit immédiatement éligible ;

– les condamne à payer à la société CPG respectivement les sommes de 49.024,60 € et 19.275 €, au plus tard le 31 décembre 2022 ou dès la dissolution ou la liquidation de la société concernée, si cette dernière intervient avant cette date, et dans ce dernier cas au plus tard 30 jours après la publication de cet événement dans un journal d’annonces légales ;

– les condamne à payer à la société CPG chacune la somme de 750 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– condamne la SAS E-Ile de France aux dépens ;

– les déboute de leurs autres demandes, fins et conclusions ;

En tout état de cause, en cas d’annulation ou d’infirmation du jugement,

Statuant à nouveau :

Fixer la créance de la société Kyoseil AM anciennement dénommée CPG à la somme de 106.439,68 € TTC au passif de la société E-Premier ;

Fixer la créance de la société Kyoseil AM anciennement dénommée CPG à la somme de 38.550 € TTC au passif de la société E-Ile de France, sous réserve de la communication aux débats de sa déclaration de créance ;

Débouter la société Kyoseil AM anciennement dénommée CPG de toutes autres demandes, fins et moyens ;

Condamner la société Kyoseil AM anciennement dénommée CPG à verser à Me [Z] une somme de 106.500 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par la société E-Premier ;

Condamner la société Kyoseil AM anciennement dénommée CPG à verser à Me [Z] une somme de 38.550 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par la société E-Ile de France ;

Condamner la société Kyoseil AM anciennement dénommée CPG à rembourser à Me [Z] l’ensemble des frais et sommes exposées sur le fondement du jugement annulé, y compris les honoraires d’avocat pour le suivi de la procédure de première instance ainsi que toutes celles exposées, y compris les honoraires d’avocat, au titre de la saisie-attribution du 7 février 2020 pratiquée à l’encontre de la société E-Premier sur le fondement d’un titre exécutoire annulé ;

Condamner la société Kyoseil AM anciennement dénommée CPG à verser à Me [Z], une somme de 5.000 € es qualité de mandataire liquidateur de la société E-Premier et une somme de 5.000 € es qualité de mandataire liquidateur de la société E-Ile de France en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Condamner la société Kyoseil AM anciennement dénommée CPG aux entiers dépens de première instance et d’appel, qui seront recouvrés par Me Cécile Deshormière, avocat au Barreau d’Aix-en-Provence, conformément aux dispositions de l’article 699 du même code ;

Ordonner la compensation entre les sommes dues.

Au soutien de leur appel, les sociétés E-Premier et E-Ile de France font valoir que le jugement de première instance doit être annulé pour violation des règles du délibéré et des droits de la défense.

Les sociétés E-Premier et E-Ile de France ajoutent que la société Conseil Plus Gestion n’était pas fondée à se prévaloir de l’exigibilité de sa créance en raison du différé de paiement contractuellement prévu en 2010 au moment de la conclusion du contrat d’assistance signé avec Evysem.

Enfin, elles soulignent que la société Conseil Plus Gestion a manifestement abusé de son droit d’agir en justice, provoquant des conséquences irrémédiables et particulièrement dommageables, justifiant sa condamnation à des dommages et intérêts.

———-

Par conclusions enregistrées par voie dématérialisée le 21 avril 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Conseil Plus Gestion, devenue Kyoseil AM (SAS), demande à la cour de :

Vu l’article 1103 du Code Civil,

Vu la lettre contrat du 8 juillet 2012 qui transfère les contrats des 19 avril 2010 et 29 septembre 2010 à la société Conseil Plus Gestion,

Confirmer le jugement en ce qu’il a fixé la créance de la société Kyoseil AM, anciennement CPG sur E.Premier à 125 120,68 euros.

Le confirmer en ce qu’il a fixé la créance de la société Kyoseil AM, anciennement CPG sur E.Ile de France à 35 550 euros.

Reformer le jugement en ce qu’il a différé l’exigibilité d’une partie des créances jusqu’à la date de la dissolution de la liquidation des sociétés débitrices.

Statuant de nouveau sur ce point,

Fixer la créance de la société Kyoseil AM, anciennement CPG au passif de la liquidation judiciaire de la société E.Ile de France à la somme exigible de 35 550 euros.

Fixer la créance de la société Kyoseil AM, anciennement CPG au passif de la liquidation judiciaire de la société E.Premier à la somme de 125 120,68 euros

Y Ajoutant,

Condamner la société E-Ile de France à une indemnité complémentaire de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 CPC.

Condamner la société E-Premier à une indemnité complémentaire de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 CPC.

Condamner les sociétés appelantes aux dépens.

La société Conseil Plus Gestion précise en réponse que la copie officieuse du jugement a été signifiée par erreur aux sociétés E-Premier et E-Ile de France, expliquant la mention apposée.

La société Conseil Plus Gestion soutient qu’elle ne conteste pas le report de la rémunération d’un exercice, ainsi que l’indique l’article 4-1 du contrat de prestation de service, mais conteste en revanche que ce report ait un caractère permanent et qu’il lui soit applicable.

Enfin, la société Conseil Plus Gestion souligne que sa réclamation n’était pas prématurée et met en avant l’absence de lien de causalité entre sa demande en paiement et la liquidation judiciaire des deux sociétés E-Premier et E-Ile de France. Elle dénonce également le caractère fantaisiste des demandes de dommages et intérêts.

MOTIFS

Sur la reprise de l’instance :

A titre liminaire il convient de donner acte à Maître [X] de son intervention volontaire aux intérêts de la société E-Premier.

Par ailleurs, il a été appelé en cause par acte du 24 janvier 2020 aux intérêts de la société E-Ile de France, également en qualité de mandataire liquidateur.

La société Conseil Plus Gestion, devenue la société Kyoseil AM, a justifié de sa déclaration de créance au passif de la société E-Ile de France selon courrier du 16 janvier 2020.

Ainsi, et au vu de l’arrêt avant-dire-droit rendu le 10 novembre 2022, l’instance est valablement reprise.

Sur la nullité du jugement :

Les sociétés E-Premier et E-Ile de France font valoir que le jugement de première instance doit être annulé pour violation des règles du délibéré et des droits de la défense au regard de la mention ” document non diffusable ” apposée sur le jugement qui leur a été signifié, laissant supposer une violation du secret des délibérés et une atteinte aux droits de la défense en l’absence de procès équitable au visa des articles 448 du code de procédure civile et 6.1 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Elles ajoutent que cette suspicion est d’autant plus légitime que la société Conseil Plus Gestion a fait procéder à une nouvelle signification, cette fois de la copie exécutoire du jugement, à chacune des sociétés.

En application de l’effet dévolutif, les sociétés demandent à la cour de statuer à nouveau.

En réponse, la société Conseil Plus Gestion, devenue la société Kyoseil AM, réplique qu’une copie officieuse du jugement leur a été communiquée avant de mettre à leur disposition une copie signée et que c’est par erreur qu’elle a signifié la première copie.

Sur ce, il ressort de l’article 448 du code de procédure civile que ” les délibérations des juges sont secrètes “. Par ailleurs, aux termes de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme ” toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial (..) ”

Pour autant, les sociétés E-Premier et E-Ile de France ne justifient pas en quoi la signification d’une copie non exécutoire du jugement rendu par le tribunal de commerce, postérieurement à la date du délibéré, serait de nature à constituer une violation du secret des délibérations.

De même, elles ne justifient pas en quoi la détention d’une copie non exécutoire aurait eu une incidence sur leurs droits.

En conséquence, il y a lieu de rejeter la demande de nullité du jugement formée par les sociétés E-Premier et E-Ile de France.

Sur les créances de la société Conseil Plus Gestion, devenue la société Kyoseil AM :

Les sociétés E-Premier et E-Ile de France soutiennent que la demande de la société Conseil Plus Gestion en paiement des factures d’assistance était infondée dès lors que les créances n’étaient ni échues ni exigibles.

Elles font valoir que selon la commune intention des parties, la clause de paiement différé des créances de gestion prévue à l’article 4 des contrats d’assistance doit s’entendre d’un report de la créance de chaque exercice d’année en année jusqu’à ce que la trésorerie de la société E-Ile de France et de la société E-Premier permette son règlement, et qu’en outre, en raison de la substitution de la société Conseil Plus Gestion à la société Evysem, cette première ne pouvait avoir plus de droits que n’en avait la société Evysem de sorte que ces créances étaient nécessairement conditionnelles.

La société Conseil Plus Gestion réplique qu’elle ne conteste pas le report de la rémunération d’un exercice, ainsi que l’indique l’article 4-1 du contrat de prestation de service, mais conteste en revanche que ce report ait un caractère permanent.

Elle ajoute que le report d’un exercice a été consenti par la société Evysem et devait donc être supporté par cette société au titre de l’exercice 2010 et non par la société Conseil Plus Gestion, laquelle n’a repris la gestion qu’en juillet 2012.

La société Conseil Plus Gestion souligne également que l’exigibilité des commissions de gestion ne saurait être suspendue au retour à meilleure fortune des sociétés E-Premier et E-Ile de France, événement incertain et aléatoire.

Ainsi, les parties diffèrent sur l’interprétation de la clause 4.1 contenue aux deux contrats d’assistance signés le 19 avril 2010 entre la société Evysem et la société E-Ile de France d’une part et le 29 septembre 2010 entre la société Evysem et la société E-Premier d’autre part, aux termes de laquelle ” il est précisé qu’Eyvisem a accepté, au titre d’un exercice, de reporter la perception de tout ou partie de sa rémunération sur les exercices suivants, éventuellement jusqu’à la dissolution et liquidation de la société “.

En l’espèce, le report de la perception de rémunération ayant été convenu au titre d’ ” un ” exercice, il ne saurait s’appliquer à l’ensemble des exercices, sauf à ajouter des conditions à ladite clause, dont les termes sont clairs et ne sont contredits par aucune pièce.

Par ailleurs, l’exercice reporté s’entend du premier exercice entre les parties signataires, et à supposer même qu’il s’agisse d’un autre exercice, aucun élément ne permet de retenir qu’il s’agirait précisément de l’exercice 2012, première année de reprise des prestations par la société Conseil Plus Gestion alors même que cette dernière n’était pas parties aux deux conventions susvisées.

En conséquence, en l’absence de report d’exigibilité de ses créances par la société Conseil Plus Gestion, celle-ci était fondée à en demander le paiement intégral devant le tribunal de commerce de sorte que le jugement sera infirmé.

La société Conseil Plus Gestion, devenue la société Kyoseil AM, sollicite la fixation de ces créances comme suit :

-35 550 euros à l’égard de E-Ile de France

-125 120,68 euros à l’égard de la société E-Premier

La société E-Premier justifie en cause d’appel qu’elle a réglé divers montants dans le courant des mois de juillet 2019 et novembre 2019 (pièces 30 à 30-3 des appelantes). Elle conteste dès lors le montant de la déclaration de créance effectuée par la société Conseil Plus Gestion.

Au vu des pièces produites et de l’absence de contestation quant à l’imputation des paiements effectués, il y a lieu de fixer les créances au passif des sociétés comme suit, notamment au regard des prétentions de la société Kyoseil limitant sa demande à la somme de 35 550 euros à l’égard de E-Ile de France :

-106 439,68 euros à l’égard de la société E-Premier

-35 550 euros à l’égard de la société E-Ile de France

Sur la demande de dommages et intérêts formée par la société E-Premier et la société E-Ile de France :

La société E-Premier et la société E-Ile de France invoquent le préjudice subi en raison des man’uvres déloyales commises par la société Conseil Plus Gestion et de sa volonté de nuire.

Elles font valoir en outre que l’engagement de la procédure devant le tribunal de commerce, sans possibilité de conciliation ou d’échelonnement de la dette, a conduit à les placer dans des difficultés financières importantes, conduisant à leur liquidation judiciaire.

Néanmoins, outre que ces demandes indemnitaires, dont le fondement juridique n’est pas précisé, sont nouvelles en cause d’appel, il apparaît qu’au regard des motifs adoptés quant à l’absence de nullité du jugement et quant au bien-fondé des demandes formées par la société Conseil Plus Gestion, elles n’ont pas vocation à prospérer.

Sur les frais et dépens :

La société E-Premier et la société E-Ile de France, parties succombantes, seront tenues pour moitié chacune aux dépens de première instance et d’appel, recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile et seront tenues de payer chacune à la société Conseil Plus Gestion, devenue la société Kyoseil AM, la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Dit que l’instance est valablement reprise,

Déboute les sociétés E-Premier et E-Ile de France de leur demande de nullité du jugement,

Infirme le jugement rendu le 9 avril 2019 par le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence sauf en ce qu’il a débouté la société E-Premier et la société E-Ile de France de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Statuant à nouveau, et y ajoutant,

Fixe la créance de la société Conseil Plus Gestion, devenue la société Kyoseil AM, au passif de la société E-Premier à la somme de 106 439,68 euros,

Fixe la créance de la société Conseil Plus Gestion, devenue la société Kyoseil AM, au passif de la société E-Ile de France à la somme de 35 550 euros,

Déboute la société E-Premier et la société E-Ile de France de leur demande de dommages et intérêts,

Condamne la société E-Premier et la société E-Ile de France pour moitié chacune aux entiers dépens de première instance et d’appel, recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile,

Condamne la société E-Premier à payer à la société Conseil Plus Gestion, devenue la société Kyoseil AM, la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société E-Ile de France à payer à la société Conseil Plus Gestion, devenue la société Kyoseil AM, la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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