Saisie-attribution : décision du 1 février 2024 Cour d’appel de Paris RG n° 23/00285

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Saisie-attribution : décision du 1 février 2024 Cour d’appel de Paris RG n° 23/00285

1 février 2024
Cour d’appel de Paris
RG n°
23/00285

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 1 – CHAMBRE 10

ARRÊT DU 01 FÉVRIER 2024

(n° 49, 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général

N° RG 23/00285 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CG34P

Décision déférée à la cour

Jugement du 17 novembre 2022-Juge de l’exécution de Paris-RG n° 22/81337

APPELANTE

S.D.C. DE L’IMMEUBLE SITUE [Adresse 3] À [Localité 6]

représenté par son syndic en exercice la société IFF GESTION, SAS immatriculée au RCS de Versailles sous le n°414 592 246, prise en la personne de ses représentant légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé [Adresse 1]

Représenté par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Ayant pour avocat plaidant Me Martin LECOMTE, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE

M.A.F. – MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Anne-Marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0653

Ayant pour avocat plaidant Me Sophie TESSIER, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 21 décembre 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre

Madame Catherine LEFORT, conseiller

Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Catherine LEFORT, conseiller, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT

-contradictoire

-par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Agissant en vertu d’un arrêt rendu le 13 janvier 2020 par la cour d’appel de Versailles, le syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier situé [Adresse 3] à [Localité 6] (92) (ci-après le syndicat [Adresse 5]) a fait pratiquer, suivant procès-verbal du 7 juillet 2022, une saisie-attribution entre les mains de la BNP Paribas à l’encontre de la Mutuelle des Architectes Français (ci-après la MAF), pour avoir paiement d’une somme totale de 88.644,57 euros (87.594,62 euros en principal). La saisie a été dénoncée à la débitrice par acte d’huissier du 12 juillet 2022.

Par acte de commissaire de justice en date 8 août 2022, la MAF a fait assigner le syndicat [Adresse 5] devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Paris en contestation de la saisie-attribution.

Par jugement en date du 17 novembre 2022, le juge de l’exécution a :

– débouté la MAF de sa demande de nullité de la saisie-attribution,

– ordonné la mainlevée de la saisie-attribution opérée le 7 juillet 2022,

– condamné le syndicat [Adresse 5] au paiement d’une somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Pour statuer ainsi, le juge a considéré que la MAF n’invoquait aucun moyen de nullité à l’appui de sa demande d’annulation de la saisie-attribution ; qu’en revanche, la créance n’avait pas été calculée conformément aux décisions s’agissant de l’indice BT01 à prendre en compte et de la TVA, que les intérêts devaient donc être recalculés également, de sorte que le montant des condamnations s’élevait finalement à la somme totale de 1.047.300,95 euros ; que compte tenu des versements de la MAF et ceux de la société Eiffage Construction, un montant de 1.081.671,11 euros avait été réglé, de sorte que la saisie-attribution était inutile.

Par déclaration du 16 décembre 2022, le syndicat [Adresse 5] a fait appel de ce jugement en ce qu’il ordonne la mainlevée de la saisie-attribution et le condamne au paiement d’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par conclusions du 13 décembre 2023, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] à [Localité 6] demande à la cour d’appel de :

infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf sur le rejet de la demande d’annulation de la saisie-attribution,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

débouter la MAF de l’ensemble de ses demandes, fins, prétentions et conclusions, en ce compris :

des contestations qu’elle soulève à l’encontre de la saisie-attribution effectuée le 7 juillet 2022,

de sa demande de mainlevée de la saisie-attribution opérée le 7 juillet 2022 sur ses comptes détenus par la banque BNP Paribas,

de sa demande au titre des frais irrépétibles et des dépens,

juger que la MAF reste lui devoir la somme de 63.418,96 euros,

valider et donner effet à la saisie-attribution effectuée le 7 juillet 2022 à hauteur de la somme de 63.418 ,96 euros,

condamner la MAF aux entiers dépens de première instance et d’appel et au paiement de la somme de 20.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il expose que la décision du juge de l’exécution relève d’une erreur d’addition puisqu’il a omis un poste de préjudice, et qu’il a déposé une requête en rectification d’erreur matérielle qui a été déclarée irrecevable au motif qu’il appartenait à la cour de statuer. Sur l’erreur de calcul, il explique que le juge de l’exécution a indiqué que la TVA sur les honoraires de maîtrise d’oeuvre n’était pas due, mais que dans son calcul il a supprimé non seulement la TVA mais également le montant des honoraires eux-mêmes, alors même que la MAF n’a jamais contesté devoir les honoraires de maîtrise d’oeuvre sur les travaux de reprise, expressément prévus dans les décisions de justice, et n’a contesté que la TVA. Il fait valoir que selon le raisonnement du juge de l’exécution, la créance totale du syndicat à l’égard de la MAF s’élève alors en réalité à la somme totale de 1.148.997,87 euros, de sorte qu’après paiement de la somme totale de 1.081.671,11 euros, il restait dû, à la date de la saisie, la somme de 67.326,76 euros, ce qui justifiait de valider la saisie-attribution pour ce montant, outre les frais de saisie de 439,84 euros, soit un total de 67.766,60 euros.

Il ajoute qu’il a été payé par la MAF seule la somme totale de 1.018.003,40 euros (et non 1.081.671,11 euros), qu’en l’absence de précision sur l’imputation des paiements, il a fait application de l’article 1343-1 du code civil et a imputé les paiements en priorité sur les intérêts, et qu’il reste dû, à la date des conclusions, la somme de 62.979,12 euros, se décomposant comme suit :

-coût des travaux de reprise : 986.893,65 euros TTC

-honoraires de maîtrise d’oeuvre : 89.717,60 euros

-condamnations au titre de l’article 700 du code de procédure civile : 13.000 euros

-dépens : 39.080,58 euros

-intérêts arrêtés au jour de la saisie : 20.306,03 euros,

-sous déduction de la somme totale de 1.086.018,75 euros,

Elle demande donc la validation de la saisie pour la somme de 63.418,96 euros, soit 62.979,12 + 439,84 euros au titre de l’acte d’huissier contesté.

Par conclusions du 12 décembre 2023, la MAF demande à la cour de :

– dire l’appel non fondé,

– confirmer le jugement entrepris,

– juger que les frais relatifs à la saisie-attribution resteront à la charge du syndicat,

– condamner le syndicat [Adresse 5] au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle fait valoir que le syndicat des copropriétaires tente, sous couvert d’une erreur matérielle, de contester les sommes qu’elles a versées ; qu’elle a payé pour le syndicat des copropriétaires un total de 1.021.003,40 euros, comprenant la somme de 4.347,64 euros versée le 3 novembre 2022 ; que la somme due au syndicat des copropriétaires s’élève à la somme de 1.006.705,09 euros ; que le jugement doit être confirmé en ce qu’il constate qu’elle a payé 1.081.671,11 euros alors que le montant des condamnations s’élèvent à 1.047.300,95 euros.

Elle précise qu’elle a bien appliqué l’indice BT 01 ; que les frais d’expertise de 28.068,47 euros ont été réglés, ce dont il n’a pas été tenu compte, de sorte qu’elle reste devoir au titre des dépens la somme de 11.012,11 euros ; qu’elle conteste l’application de la TVA sur les honoraires de maîtrise d’oeuvre ; que le solde d’intérêts légaux est de 5.764,96 euros.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de mainlevée de la saisie-attribution

Il résulte du jugement rendu le 30 mai 2017 par le tribunal de grande instance de Nanterre que la MAF a été condamnée à payer (ou à garantir le paiement) au syndicat des copropriétaires les sommes suivantes  :

– 1.200 euros HT, avec la TVA au taux en vigueur au jour du jugement, actualisée au jour du jugement sur l’indice BT01 du coût de la construction à compter du mois de février 2014, outre les honoraires de maîtrise d’oeuvre de 10% du montant HT des travaux,

– 33.200 euros HT

– 25.950 euros HT

– 2.200 euros HT

– 14.660 euros HT,

ces condamnations étant assorties de la TVA au jour du jugement et actualisée au jour du jugement sur l’indice BT01 du coût de la construction du mois de février 2014,

– les frais de maîtrise d’oeuvre à hauteur de 10% du montant des travaux de reprise,

– 8.000 euros au titre des frais irrépétibles,

– les dépens de l’instance, comprenant les frais d’expertise.

Par arrêt du 13 janvier 2020, la cour d’appel de Versailles a ajouté les sommes suivantes :

– 352.227,34 euros HT, avec la TVA au taux en vigueur au jour du prononcé de l’arrêt, outre actualisation selon la variation de l’indice BT01 entre la date du rapport d’expertise du 5 février 2014 et la date du prononcé de l’arrêt, outre les honoraires de maîtrise d’oeuvre s’élevant à 10% HT du montant HT des travaux,

– 412.764 euros HT, avec la TVA au taux en vigueur au jour du prononcé de l’arrêt, outre actualisation selon la variation de l’indice BT01 entre la date du rapport d’expertise du 5 février 2014 et la date du prononcé de l’arrêt, outre les honoraires de maîtrise d’oeuvre s’élevant à 10% HT du montant HT des travaux,

– 5.075,75 euros HT, avec la TVA au taux en vigueur au jour du prononcé de l’arrêt, outre actualisation selon la variation de l’indice BT01 entre la date du rapport d’expertise du 5 février 2014 et la date du prononcé de l’arrêt, outre les honoraires de maîtrise d’oeuvre s’élevant à 10% HT du montant HT des travaux,

– 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– les dépens d’appel.

Par arrêt du 16 février 2022, la cour de cassation a rejeté le pourvoi formé contre cet arrêt et a condamné notamment la MAF à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Le juge de l’exécution a retenu que l’indexation devait être calculée en appliquant les indices (BT 01) 105,1 à la date de l’expertise, 106,2 à la date du jugement et 111,8 à la date de l’arrêt. Il ressort des décomptes du syndicat des copropriétaires que c’est précisément ces indices qui ont été appliqués par le créancier. La MAF n’explicite pas sa contestation sur l’indice BT 01 et n’indique pas quels seraient les indices à prendre en compte et ne fournit aucun calcul alternatif. La cour retiendra donc le calcul opéré par le créancier, qui est conforme au jugement dont appel, dont la MAF demande d’ailleurs la confirmation.

Par ailleurs, à hauteur d’appel, le syndicat des copropriétaires ne réclame plus la TVA sur les frais de maîtrise d’oeuvre qui était contestée par la MAF, le premier juge ayant fait droit à cette contestation, et a établi un nouveau décompte dans lequel les frais de maîtrise d’oeuvre de 10% ont été calculés sur le montant indexé hors taxes de chaque condamnation au titre de la réparation des désordres.

Ainsi, il résulte des décomptes du créancier, établis à hauteur d’appel, qu’il était dû par la MAF au syndicat des copropriétaires, au titre du jugement du 30 mai 2017 et de l’arrêt du 13 janvier 2020, la somme totale de 1.076.611,26 euros TTC en principal, soit 1.089.611,26 euros TTC incluant les indemnités pour frais irrépétibles, outre les dépens et les intérêts.

Le syndicat des copropriétaires fournit un décompte des dépens qui s’élèvent à la somme totale de 39.080,58 euros dont 28.068,47 euros au titre de la rémunération de l’expert judiciaire selon ordonnance de taxe du 29 avril 2014. La MAF soutient que les frais d’expertise ont déjà été réglés à hauteur de 28.068,47 euros, ce dont le syndicat des copropriétaires n’aurait pas tenu compte, et que les dépens restant à régler s’élèvent à un total de 11.012,11 euros. Ce montant de 28.068,47 euros n’apparaît effectivement pas dans le décompte des versements établi par le créancier, mais la MAF n’apporte pas la preuve de ce paiement dont elle n’indique d’ailleurs pas la date. Ce montant n’apparaît pas en débit parmi ses justificatifs de paiement, ni même dans son décompte. Elle ne justifie pas non plus, ni n’allègue, avoir réglé cette somme directement à l’expert. Il convient donc de retenir la somme de 39.080,58 euros au titre des dépens.

Il en résulte un total dû de 1.128.691,84 euros, outre les intérêts.

S’agissant du montant des versements à déduire, il ressort des décomptes du créancier que la MAF a réglé les sommes suivantes :

– 9.798,31 euros le 7 août 2017

– 890.382,37 euros le 6 juin 2020

– 109.579,75 euros le 15 septembre 2020

– 3.895,33 euros le 8 avril 2021

– 4.347,64 euros le 3 novembre 2022,

soit un total de 1.018.003,40 euros.

La MAF soutient qu’elle a versé au syndicat des copropriétaires la somme totale de 1.021.003,40 euros, mais ce montant inclut la somme de 3.000 euros versée en exécution de sa condamnation prononcée par la Cour de cassation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Or le syndicat des copropriétaires ne poursuit pas le recouvrement de cette condamnation qui, effectivement, a été exécutée spontanément. Il en résulte que les parties sont d’accord sur le montant des versements effectués par la MAF à hauteur de 1.018.003,40 euros en exécution du jugement du 30 mai 2017 et de l’arrêt du 13 janvier 2020.

Compte tenu des versements effectués également par la Smabtp en exécution du jugement du 30 mai 2017, d’un montant total de 68.015,35 euros, le syndicat des copropriétaires a perçu un montant total de 1.086.018,75 euros, déduit à juste titre de son décompte de créance.

S’agissant des intérêts, le syndicat des copropriétaires produit un décompte actualisé au 7 juillet 2022 (date de la saisie-attribution) dont il ressort que les intérêts s’élèvent à 20.306,03 euros après imputation de tous les versements (y compris ceux de la Smabtp) sur les intérêts. La contestation de la MAF sur l’imputation n’est donc plus d’actualité.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, c’est à juste titre que le syndicat des copropriétaires estime que la MAF lui doit encore un solde de 62.979,12 euros, se décomposant comme suit :

– principal : 1.076.611,26 euros TTC

– article 700 : 12.000 euros

– dépens : 39.080,58 euros,

– versements à déduire : – 1.086.018,75 euros

– intérêts : 20.306,03 euros.

Il convient donc d’infirmer le jugement en ce qu’il a ordonné la mainlevée totale de la saisie-attribution et de dire qu’elle produira ses effets pour ce montant de 62.979,12 euros, outre les frais de saisie-attribution pour 439,84 euros, qui n’ont plus lieu de rester à la charge du créancier, soit un total de 63.418,96 euros.

Sur les demandes accessoires

L’issue du litige justifie d’infirmer les condamnations accessoires du syndicat des copropriétaires et de condamner la MAF aux dépens de première instance et d’appel.

L’équité justifie de laisser à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles. Les demandes respectives des parties fondées sur l’article 700 du code de procédure civile seront donc rejetées.

PAR CES MOTIFS,

CONFIRME le jugement rendu le 17 novembre 2022 par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Paris en ce qu’il a débouté la Mutuelle des Architectes Français de sa demande de nullité de la saisie-attribution du 7 juillet 2022,

INFIRME le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau dans cette limite, et y ajoutant,

DIT que la saisie-attribution pratiquée le 7 juillet 2022 à l’encontre de la Mutuelle des Architectes Français entre les mains de la BNP Paribas produira ses effets pour la somme totale de 63.418,96 euros, intérêts et frais inclus,

DEBOUTE les parties de leurs demandes respectives fondées sur l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la Mutuelle des Architectes Français aux entiers dépens de première instance et de la procédure d’appel.

Le greffier, Le président,

 


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