Rupture du contrat de distribution commerciale exclusive

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Rupture du contrat de distribution commerciale exclusive
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[well type=””][icon type=”fa fa-cube” color=”#dd3333″] Réflexe juridique  

Attention à bien respecter les conditions de rupture du contrat de distribution commerciale et s’assurer de laisser un préavis suffisant au distributeur, sous peine d’une condamnation pour rupture abusive de relations commerciales établies.[/well]

 

Affaire Annick Goutal

 

Le distributeur commercial Dispar, spécialisé dans la distribution de produits cosmétiques et des parfums de luxe, a obtenu la condamnation de la société Annick Goutal.  En 1998, les parties ont conclu un contrat de distribution par lequel la société Annick Goutal a confié à la société Dispar la distribution exclusive des produits Annick Goutal sur le territoire italien. Ce contrat a été renouvelé par tacite reconduction pour des périodes successives d’une année.  A l’occasion du repositionnement stratégique de sa marque, est né un litige entre la société Annick Goutal et la société Dispar relatif à l’évaluation du volume de stock des produits commercialisés sous l’ancienne charte graphique et du devenir de ce stock dans le cadre de la nouvelle politique commerciale.  La société Annick Goutal a notifié à la société Dispar sa volonté de ne pas poursuivre le contrat. La société Dispar a assigné la société Annick Goutal pour rupture brutale et abusive de leurs relations commerciales. Les parties s’accordaient sur le caractère établi de leurs relations commerciales, leur durée, à savoir 14 ans, sur l’auteur et la date de la rupture. Elles s’opposaient en revanche sur la brutalité de la rupture, la durée du préavis, son effectivité et les fautes commises par la société Dispar.

Non reconduction n’est pas rupture

Aux termes de l’article L 442-6, I, 5° du code de commerce : « Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers … de rompre unilatéralement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d’inexécution par l’autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ».

La rupture des relations commerciales établies peut intervenir à effet immédiat à la condition qu’elle soit justifiée par des fautes suffisamment graves imputées au partenaire commercial. En l’occurrence, la société Annick Goutal a signifié à la société Dispar qu’elle ne renouvelait pas le contrat de distribution qui les liait lors de sa prochaine échéance contractuelle. La société Annick Goutal n’avait donc pas résilié le contrat mais avait choisi de ne pas le renouveler en application des dispositions du contrat de distribution. En conséquence, au moment de la rupture, la société Annick Goutal ne considérait pas que les fautes de son distributeur revêtaient une gravité suffisante pour justifier une rupture immédiate sans préavis.

Question du préavis suffisant

Le respect du préavis contractuel n’empêche pas qu’une rupture puisse revêtir un caractère brutal, si les conditions de l’article L 442-6, I, 5° du code de commerce précité sont réunies. Il ressort également dudit article que la brutalité de la rupture résulte de l’absence de préavis écrit ou de l’insuffisance de la durée de ce préavis. L’évaluation de la durée du préavis à accorder est fonction de toutes les circonstances de nature à influer son appréciation au moment de la notification de la rupture, notamment de l’ancienneté des relations, du volume d’affaires réalisé avec l’auteur de la rupture, du secteur concerné, de l’état de dépendance économique de la victime, des dépenses non récupérables dédiées à la relation et du temps nécessaire pour retrouver un partenaire sur le marché de rang équivalent.

En l’espèce, les relations commerciales établies ont duré 14 années et le chiffre d’affaires moyen annuel était de près d’un million d’euros. Eu égard à ces éléments et du temps nécessaire pour que la société Dispar puisse se réorganiser et redéployer son activité, le préavis aurait dû être de 12 mois. N’ayant bénéficié que d’un délai de 5 mois, la rupture des relations commerciales établies entre les parties a été brutale.

Calcul du préjudice

Le préjudice résultant du caractère brutal de la rupture est constitué par la perte de la marge dont la victime pouvait escompter bénéficier pendant la durée du préavis qui aurait dû lui être accordé. La référence à retenir est la marge sur coûts variables, définie comme la différence entre le chiffre d’affaires dont la victime a été privée sous déduction des charges qui n’ont pas été supportées du fait de la baisse d’activité résultant de la rupture. Au regard des éléments du dossier et de la nature du secteur économique, les juges ont fixé le taux de marge sur coûts variables à 30%.  La société Annick Goutal a été condamnée à payer à la société Dispar la somme de près de 200 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture brutale des relations commerciales établies.

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