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Nos Conseils:
– Pour toute demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, il est essentiel de formuler une demande claire et précise, en se basant sur des preuves tangibles telles que les bulletins de paie. |
→ Résumé de l’affaireMme [F] [L] a travaillé pour la société [6] en tant qu’employée de gîtes avant d’être embauchée en tant que responsable de salle du restaurant. Elle a été placée en arrêt maladie et a demandé une rupture conventionnelle, mais l’employeur a refusé. Elle a finalement démissionné et a saisi le conseil de prud’hommes pour obtenir le paiement d’heures supplémentaires, d’une prime de nourriture, et la requalification de sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le conseil de prud’hommes a jugé en faveur de l’employeur, mais Mme [L] a interjeté appel. L’affaire est en attente de délibération après une audience en avril 2024.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 22/02144
N° Portalis DBVM-V-B7G-LMSS
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée le :
la SELAS AGIS
la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
Ch. Sociale -Section B
ARRÊT DU JEUDI 13 JUIN 2024
Appel d’une décision (N° RG 20/00324)
rendue par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BOURGOIN JALLIEU
en date du 05 mai 2022
suivant déclaration d’appel du 01 juin 2022
APPELANTE :
Madame [F] [L]
née le 09 Novembre 1988 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Alexine GRIFFAULT de la SELAS AGIS, avocat au barreau de VIENNE
INTIMEE :
S.A.R.L. [6] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY, avocat postulant au barreau de GRENOBLE,
et par Me Florian GROBON de la SELARL ELECTA JURIS, avocat plaidant au barreau de LYON substituée par Me Laetitia LOPEZ, avocat au barreau de LYON
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président,
M. Jean-Yves POURRET, Conseiller,
Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,
DÉBATS :
A l’audience publique du 10 avril 2024,
Frédéric BLANC, conseiller faisant fonction de président chargé du rapport, et Jean-Yves POURRET, conseiller, ont entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, assistés de Mme Carole COLAS, Greffière, conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, les parties ne s’y étant pas opposées ;
Puis l’affaire a été mise en délibéré au 13 juin 2024, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.
L’arrêt a été rendu le 13 juin 2024.
Mme [F] [L] a travaillé pour le compte de la société à responsabilité limitée (SARL) [6] suivant contrat de mission d’intérim du 20 au 31 mars 2019 en qualité d’employée de gîtes en charge du nettoyage des chambres.
Le société [6] développe une activité spécialisée de restauration, hôtellerie, réceptions, séminaires et événementiel.
Au début de l’année 2019, la société [6] a ouvert un restaurant.
C’est dans le cadre de cette nouvelle activité que Mme [L] a été embauchée par la société [6] suivant contrat à durée indéterminée à compter du 1er avril 2019 en tant que responsable de salle du restaurant, niveau 2, échelon 3 de la convention collective des hôtels, cafés et restaurants, moyennant une rémunération brute mensuelle de 2’000 euros, outre des commissions sur vente, pour une durée du travail mensuelle de 169 heures.
Mme [L] travaillait 39 heures par semaine, conformément à l’horaire collectif en vigueur dans l’établissement, les heures supplémentaires étant majorées de 10 % à partir de la 35ème heure.
Mme [L] a été placée en arrêt de travail pour maladie à compter du 11 juin 2019.
Cet arrêt a été renouvelé plusieurs fois jusqu’au 12 novembre 2019.
Au cours du mois de juin 2019, Mme [L] a sollicité la mise en ‘uvre d’une rupture conventionnelle de son contrat de travail, demande à laquelle l’employeur a répondu par courrier du 2 juillet 2019 dans les termes suivants’: «’Nous avons bien reçu votre courrier nous demandant une rupture conventionnelle. Nous acceptons votre demande. Cependant, nous mettrons en place la procédure lorsque votre état de santé sera amélioré et lorsque vous pourrez vous rendre à notre société pour effectuer les formalités de rupture […]’».
Par courrier du 13 août 2019, Mme [L] a écrit à son employeur : « Je vous fais part de mon accord pour la rupture conventionnelle comme mentionnée lors de notre dernier échange par lettre recommandée. Après avoir refusé une rupture antidatée au 1er juin (‘) je me suis présentée sur mon lieu de travail le 2 août afin de vous amener ma prolongation d’arrêt de travail (…) et afin d’avoir un échange pour mettre en place la procédure de rupture conventionnelle. Vous n’étiez malheureusement pas présent au domaine à ce moment-là, j’ai donc échangé avec votre femme Mme [A] qui m’a fait part de votre refus pour la rupture conventionnelle et qui m’a demandé de démissionner (…)’».
L’employeur a répondu par courrier du 19 août 2019 : «'(…) [U] [A] vous a fait part de notre refus de la rupture conventionnelle compte tenu du fait que vous étiez encore en arrêt de travail. Confirmant ainsi ce que nous avions précédemment dit (…) [U] [A] vous a dit, et nous vous le confirmons, que si vous souhaitez absolument rompre immédiatement votre contrat de travail rien ne vous empêche de démissionner. Cette décision vous appartient mais en aucun cas nous vous avons demandé de démissionner.’».
L’arrêt de travail de Mme [L] a pris fin le 12 novembre 2019.
Mme [L] a repris son poste le 14 novembre et elle a donné sa démission le 16 novembre 2019 en sollicitant une dispense de son préavis’; ce que l’employeur a accepté par courrier du 18 novembre 2019.
Par requête du 12 novembre 2020, Mme [L] a saisi le conseil de prud’hommes de Bourgoin Jallieu aux fins de voir reconnaitre des manquements de son employeur à son obligation de sécurité, au titre de la mutuelle, des heures supplémentaires, des durées maximales de travail, d’obtenir le paiement de majorations rectifiées d’heures supplémentaires, d’une prime de nourriture, de voir requalifier la démission en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et d’obtenir la condamnation de la société [6] à lui payer les indemnités afférentes.
La société [6] s’est opposée aux prétentions adverses.
Selon ordonnance en date du 17 décembre 2020, le bureau d’orientation et de conciliation a ordonné à la société [6] de transmettre à Mme [L] les documents suivants’:
– les plannings manquants soit du 06 mai au 12 mai 2019 et du 20 mai au 13 juin 2019
– les relevés d’heures établis chaque jour par la salariée et remis à son employeur chaque fin de semaine sur la totalité de la période d’emploi
– débouté Mme [L] de sa demande d’astreinte.
Par jugement du 5 mai 2022, le conseil de prud’hommes de Bourgoin Jallieu a’:
Dit et jugé que la rupture du contrat de travail de Mme [L] s’analyse en une démission pure et simple ;
Dit et jugé que la société [6] a satisfait à son obligation de sécurité et de résultat ;
Condamné [6] à verser à Mme [L] la somme de 296,84 euros au titre de l’indemnité de nourriture ;
Débouté Mme [L] toutes ses autres demandes ;
Débouté le [6] de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens.
La décision a été notifiée par le greffe par lettres recommandées avec accusé de réception signé le 09 mai 2022 pour la société [6], le courrier étant revenu ‘pli avisé non réclamé’ pour Mme [L].
Par déclaration en date du 1er juin 2022, Mme [L] a interjeté appel.
La société [6] a formé appel incident.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 26 août 2022, auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, M. [L] sollicite de la cour de’:
«’Confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Bourgoin Jallieu en ce qu’il a condamné la société [6] à verser à Mme [L] la somme de 296,84 euros au titre de l’indemnité de nourriture’;
Réformer le jugement en ce qu’il a :
– Jugé que la rupture du contrat travail de Mme [L] s’analysait en une démission pure et simple’;
– Jugé que la société [6] a satisfait à son obligation de sécurité de résultat’;
– Débouté Mme [L] de ses demandes en paiement :
D’heures supplémentaires impayées d’un montant de 371,87 euros’;
De dommages et intérêts au titre des heures supplémentaires impayées d’un montant de 1000 euros’;
D’une somme de 2 000 euros au titre du non-respect du temps de repos entre deux jours de travail consécutif’;
D’une somme de 25,57 euros au titre de la majoration de la journée travaillée du 1er mai 2019′;
D’une somme de 1 000 euros au titre du dépassement de la durée quotidienne maximale de travail’;
D’une somme de 500 euros au titre du retard de traitement dans le dossier de la mutuelle’;
D’une indemnité de préavis de 2 000 euros, outre 200 euros au titre des congés payés afférents’;
D’une somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse’;
– Débouté Mme [L] de sa demande de rectification des bulletins de salaire et de l’attestation pour l’emploi’;
– Débouté Mme [L] de sa demande d’article 700 du code de procédure civile’;
Et statuant à nouveau,
Déclarer Mme [L] recevable et bien fondée en ses demandes’;
Juger que la démission de Mme [L] résulte d’un manquement de la société [6] à son obligation de sécurité de résultat’;
Juger que la démission de Mme [L] doit produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse’;
Condamner la société [6] au paiement de la somme de 371,87 euros au titre des heures supplémentaires impayées, outre 37,18 euros au titre des congés payés’;
Condamner la société [6] au paiement de la somme de 1 000 euros de dommages et intérêts au titre des heures supplémentaires impayées’;
Condamner la société [6] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre du non-respect du temps de repos entre 2 jours de travail consécutif’;
Condamner la société [6] au paiement de la somme de 25,57 euros au titre de la majoration de la journée travaillée du 1er mai 2019′;
Condamner la société [6] au paiement de la somme de 1 000 euros au titre du dépassement de la durée quotidienne maximale de travail’;
Condamner la société [6] au paiement de la somme de 500 euros au titre du retard de traitement du dossier de la mutuelle’;
Condamner la société [6] au paiement de la somme 2 000 euros au titre de l’indemnité de préavis, outre 200 euros au titre des congés payés afférents’;
Condamner la société [6] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse’;
Subsidiairement,
Condamner la société [6] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre du manquement à son obligation de sécurité de résultat’;
Ordonner la rectification des bulletins de salaire ainsi que de l’attestation Pôle emploi, sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter du prononcé de l’arrêt’;
Condamner la société [6] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile s’agissant de la procédure de première instance’;
Condamner la société [6] aux entiers dépens. »
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 24 novembre 2022, auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la société [6] sollicite de la cour de’:
« Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Bourgoin Jallieu en ce qu’il a :
– Dit et jugé que la rupture du contrat de travail de Mme [L] s’analyse en une démission pure et simple ;
Dit et jugé que la société [6] a satisfait à son obligation de sécurité et de résultat ;
Débouté Mme [L] de toutes ses autres demandes ;
Débouté la société [6] de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens’;
Et infirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société [6] à verser à Mme [L] la somme de 296,84 euros au titre de l’indemnité de nourriture’;
En tout état de cause,
Débouter Mme [L] de l’ensemble de ses demandes, moyens, fins et prétentions’;
Condamner Mme [L] à payer à la société [6] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.’»
Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l’article 455 du code de procédure civile de se reporter aux conclusions des parties susvisées.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 8 février 2024.
L’affaire, fixée pour être plaidée à l’audience du 10 avril 2024, a été mise en délibéré au 13 juin 2024.
EXPOSE DES MOTIFS’:
Sur l’indemnité de nourriture’:
L’obligation de nourrir le personnel ou de lui verser une indemnité compensatrice a été instituée par l’arrêté du 22 février 1946 fixant les salaires des ouvriers et employés des hôtels, cafés, restaurants (dit arrêté Croizat), modifié par l’arrêté du 1er octobre 1947 (dit arrêté Parodi) et maintenu par l’article 2 de la loi no 50-205 du 11 février 1950. Aux termes de l’article 7, alinéas 1 à 3, de ce texte, L’employeur est tenu, soit de nourrir l’ensemble de son personnel, soit de lui allouer une indemnité compensatrice correspondant, sur la base journalière, à deux fois le salaire horaire du man’uvre de la métallurgie, classé au coefficient 100.
L’avantage prévu au présent arrêté est accordé dans tous les cas en sus des salaires ou des minima garantis tels qu’ils résultent du présent arrêté.
Les employés qui ne prendront pas leur repas dans l’établissement percevront obligatoirement l’indemnité compensatrice.
Il a été jugé que l’indemnité compensatrice, destinée à compenser un avantage en nature mis à la charge de l’employeur, n’était pas due aux salariés qui, par suite de leur horaire, n’étaient pas en mesure de profiter de cet avantage (Cass. soc., 16 février 1983, no 80-41.751, bull. civ., V, 85 ; 24 janvier 2001, n°98-43.380.)
Au visa de l’article 954 du code de procédure civile, Mme [L] n’a pas développé de nouveau moyen au soutien de sa demande de confirmation de la condamnation à son profit au titre de l’indemnité de nourriture si bien qu’elle est réputée s’en remettre aux motifs du jugement entrepris.
Les premiers juges se sont fondés sur la convention collective prévoyant au bénéfice des salariés présents au moment des repas soit un repas fourni par l’employeur, soit une indemnité de nourriture.
Il y a lieu d’observer que la convention collective applicable fait effectivement référence à cette indemnité de nourriture en son article 35 mais que l’obligation de l’employeur de fournir un repas ou une indemnité de nourriture est réglementaire.
L’employeur ne discute pas la circonstance que Mme [L] remplissait les conditions pour bénéficier soit de l’indemnité de nourriture soit d’un repas, à savoir que le restaurant était ouvert et qu’elle travaillait à ce moment-là mais affirme qu’un repas lui était fourni.
La société [6] supporte la charge de la preuve qu’il s’est libéré de son obligation dont elle admet le principe.
L’employeur soutient que Mme [L] prenait ses repas sur place et se fonde sur deux attestations de salariées allant en ce sens, Mmes [E] et [B], ainsi que sur une note de service du 05 novembre 2019 produite par la partie adverse indiquant qu’aucun repas n’est prévu sur le domaine et instaurant une prime de repas, tout en assurant aux salariés un tarif promotionnel sur les repas et les autorisant à prendre leur pause repas dans le restaurant.
Toutefois, il ne développe aucun moyen critique concernant l’attestation de M. [H], qui a exercé l’emploi de chef de cuisine dans l’entreprise du 05 mai au 27 juillet 2019 et qui a témoigné du fait que Mme [L] n’avait jamais pris de repas dans l’entreprise, qu’il était en charge du repas du personnel et qu’il ne l’avait fait que pour les femmes de chambre.
Au demeurant, dans un SMS échangé le 06 mai 2019 avec le dirigeant, Mme [L] lui a demandé l’autorisation de pouvoir manger au restaurant avec une représentante d’un fournisseur de l’entreprise’; ce qui ne concorde pas avec la circonstance que la salariée se voyait habituellement garantir un repas par son employeur, sans au demeurant qu’il soit déterminé qui a pris en charge ce repas précis.
Il s’ensuit que preuve suffisante n’est pas rapportée par l’employeur qu’il s’est libéré de son obligation au titre de l’avantage en nature de nourriture de sorte que le jugement entrepris est confirmé en ce qu’il a condamné la société [6] à payer à Mme [L] la somme de 296,84 euros à titre d’indemnité de nourriture.
Sur la demande au titre de la majoration des heures supplémentaires’:
L’article L 3121-33 du code du travail énonce notamment que’:
I.-Une convention ou un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche :
1° Prévoit le ou les taux de majoration des heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale ou de la durée considérée comme équivalente. Ce taux ne peut être inférieur à 10 %.
L’avenant n° 19 du 29 septembre 2014 relatif à l’aménagement du temps de travail adopté dans le cadre de la convention collective des hôtels, cafés, restaurants prévoient certes des taux de majoration des heures supplémentaires minoré mais uniquement en cas d’organisation du travail sur une durée supérieure à la semaine.
L’avenant n° 2 du 5 février 2007 relatif à l’aménagement du temps de travail stipule en son article 4 relatif aux taux de majoration des heures supplémentaires que’:
Les heures effectuées entre la 36e et la 39e heure sont majorées de 10 %.
Les heures effectuées entre la 40e et la 43e heure sont majorées de 20 %.
Les heures effectuées à partir de la 44e heure sont majorées de 50 %.
En l’espèce, les heures supplémentaires de la 36ème à la 39ème dans le cadre du contrat à durée indéterminée sont majorées de 10 % sur les bulletins de paie conformément aux stipulations sus-visées de sorte que Mme [L] ne saurait revendiquer les majorations légales supérieures de 25 et 50 %, étant observé qu’elle indique bien dans ses conclusions, critiquant le jugement entrepris, que sa demande se rapporte aux heures figurant sur les bulletins de salaire et non à la démonstration des heures supplémentaires mais qu’elle se prévaut de 31,75 heures supplémentaires pour le mois de mai 2019 alors que le bulletin de salaire n’en mentionne que 17,33 heures.
Sur la demande indemnitaire au titre des heures supplémentaires’:
Mme [L] n’a en définitive formé aucune demande de rappel d’heures supplémentaires au-delà des heures mentionnées sur ses bulletins de paie et ne saurait le faire sous couvert d’une demande indemnitaire dès lors que les rappels d’heures supplémentaires sont des créances salariales, étant observé que l’appelante ne développe en définitive que des moyens relatifs à la preuve alléguée desdites heures.
Il s’ensuit qu’il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mme [L] de sa demande indemnitaire au titre des heures supplémentaires non payées.
Sur le non-respect du repos entre deux jours de travail consécutif’:
L’article 21 de la convention collective des hôtels, cafés et restaurants prévoit notamment que’:
4. Temps de repos entre 2 jours de travail
Le temps de repos entre 2 jours de travail est fixé pour l’ensemble du personnel à 11 heures consécutives et 12 heures consécutives pour les jeunes de moins de 18 ans.
Le temps de repos entre 2 journées de travail peut être ramené à 10 heures dans les conditions suivantes :
4.1. Champ de la dérogation
a) Sont concernés par la dérogation :
– les salariés des établissements saisonniers ;
– les salariés titulaires d’un contrat saisonnier dans les établissements permanents ;
– les salariés des établissements des communes qui bénéficient d’un fonds d’action locale touristique (2) ;
– ou qui ont été désignées par la commission décentralisée.
b) Parmi ces personnels, seuls peuvent être visés par la dérogation les salariés logés par l’employeur ou résidant dans un périmètre tel que le temps consacré au trajet aller-retour n’excède pas 1 demi-heure.
c) En revanche, en sont exclus les jeunes travailleurs pour lesquels les dispositions de l’article L. 213-9 du code du travail s’appliquent.
La charge de la preuve du respect de cette durée minimale de repos quotidien pèse sur l’employeur.
Alors que la salariée vise de manière précise des semaines pour lesquelles elle affirme au vu des plannings communiqués par l’employeur que le repos quotidien conventionnel n’a pas été respecté, l’employeur développe un moyen inopérant tenant à la circonstance que la salariée comptabilise en temps effectif des heures qui ne le seraient pas alors même que les dépassements ressortent des propres plannings de l’employeur (pièce n°26 de l’appelante).
En outre, s’agissant d’une atteinte au droit au repos de la salariée, le préjudice est caractérisé.
Infirmant le jugement entrepris, tenant compte de la récurrence du manquement entre son embauche et l’arrêt maladie du 11 juin 2019, il est alloué de ce chef à Mme [L] la somme de 1500 euros net à titre de dommages et intérêts par infirmation du jugement entrepris, le surplus de la demande à ce titre étant rejeté.
Sur le dépassement de la durée quotidienne de travail’:
La convention collective des hôtels, cafés et restaurants prévoit en son article 21 une durée maximale de travail journalière de 11h30.
L’employeur doit démontrer qu’il a respecté ce plafond.
En l’espèce, alors que la salariée se prévaut de dépassement de cette durée les 23 mars, 18 avril, 11 mai, 16 mai et à deux reprises au cours de la semaine du 12 juin 2019 et que l’inspection du travail a relevé lors d’un contrôle cinq infractions à la durée maximale du travail dans un courrier du 31 janvier 2022 qu’elle a adressé à Mme [L], l’employeur développe des moyens inopérants en inversant la charge de la preuve et en se prévalant d’une absence de préjudice prouvé alors que celui-ci se déduit du manquement en définitive avéré, faute pour l’employeur de justifier du respect de la durée maximale de travail de 11h30, puisque cela porte atteinte au droit au repos de la salariée.
Infirmant le jugement entrepris, il convient de condamner la société [6] à payer à Mme [L] la somme de 1000 euros net à titre de dommages et intérêts de ce chef.
Sur le rappel de salaire au titre du 1er mai 2019′:
L’article 26.1 de la convention collective des hôtels, cafés et restaurant énonce que’:
26.1. 1er Mai
1. Si le 1er Mai est un jour habituel de fermeture de l’entreprise ou le jour de repos de tel ou tel membre du personnel :
Il n’y a aucune incidence au point de vue des rémunérations :
– les salariés payés au fixe touchent leur salaire normal ;
– les salariés payés au service ne perçoivent aucune rémunération.
2. Si le 1er Mai est un jour habituel d’ouverture pour l’entreprise et que l’employeur décide de fermer l’entreprise :
Il se devra d’assurer la rémunération normale.
3. Si le 1er Mai est un jour normal de travail pour l’entreprise :
Il y a lieu de régler :
– une indemnité proportionnelle au moment du salaire correspondant à cette journée (non compris les avantages en nature) pour les salariés payés au fixe ;
– une indemnité égale au montant de la répartition du service pour cette journée pour les salariés payés au service.
En l’espèce, l’employeur a indiqué dans ses conclusions d’appel que Mme [L] a été sollicitée pour travailler de manière exceptionnelle le 01 mai 2019 mais qu’elle a bénéficié d’une contrepartie en heures de récupération le vendredi 03 mai au soir.
Outre que l’employeur ne rapporte pas la preuve de cette récupération, cela ne correspond en tout état de cause pas aux prévisions de la convention collective, qui impose le paiement d’une indemnité proportionnelle au salaire.
Infirmant le jugement entrepris, il convient de condamner la société [6] à payer à Mme [L] la somme de 25,57 euros brut à titre de majoration pour la journée travaillée du 1er mai 2019.
Sur la mutuelle’:
Si l’employeur justifie certes avoir accompli à compter du 10 avril 2019 des démarches en vue de l’affiliation à la mutuelle de Mme [L], il apparait qu’une difficulté est apparue par la suite de sorte que la procédure d’affiliation a dû être recommencée fin août 2019 et que la salariée n’a bénéficié, certes avec effet rétroactif, de la mutuelle qu’à compter du 16 octobre 2019.
L’employeur apparaît fautif dans la mesure où il lui appartenait de s’assurer lors de l’embauche de l’inscription effective de la salariée à la mutuelle d’entreprise’; ce dont il ne justifie pas puisque l’absence d’affiliation a été portée à sa connaissance par la salariée et qu’il lui a alors fait remplir de nouveau un dossier d’adhésion en août 2019 eu égard au fait que le gestionnaire GPS ne lui avait pas donné la première page de celui-ci lors de la conclusion du contrat de travail d’après un échange entre les parties du 19 août 2019.
Ce manquement a été préjudiciable à la salariée qui a subi un retard dans la prise en charge de ses frais médicaux par la mutuelle alors qu’elle a été en arrêt maladie à compter du 11 juin 2019.
Infirmant le jugement entrepris, il est alloué à Mme [L] la somme de 200 euros net à titre de dommages et intérêts de ce chef, le surplus de la demande à ce titre étant rejeté.
Sur la rupture du contrat de travail’:
D’une première part, la démission émise sans réserve peut être assimilée à une prise d’acte. Tel est le cas lorsqu’elle est remise en cause ultérieurement par le salarié, en raison de manquements qu’il impute à son employeur, le juge doit analyser cette démission en une prise d’acte si des circonstances antérieures ou contemporaines à la rupture la rendent équivoque. S’agissant de la contemporanéité du litige entre le salarié et l’employeur à la démission sans réserve, rendant celle-ci équivoque, s’analyse comme toute contestation émise par le salarié dans les jours, les semaines et jusqu’à tout le moins deux mois, après la démission.
Plus précisément, lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l’annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou de manquements imputables à son employeur, le juge doit, s’il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu’à la date à laquelle elle a été donnée celle-ci était équivoque, l’analyser en une prise d’acte de la rupture qui produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d’une démission.
D’une seconde part, la prise d’acte est un mode de rupture du contrat de travail par lequel le salarié met un terme à son contrat en se fondant sur des manquements qu’il reproche à son employeur.
Elle n’est soumise à aucun formalisme en particulier mais doit être adressée directement à l’employeur.
Elle met de manière immédiate un terme au contrat de travail.
Pour que la prise d’acte produise les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les manquements invoqués par le salarié doivent non seulement être établis, mais ils doivent de surcroît être suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail.
A défaut, la prise d’acte est requalifiée en démission.
Pour évaluer si les griefs du salarié sont fondés et justifient que la prise d’acte produise les effets d’un licenciement, les juges doivent prendre en compte la totalité des reproches formulés par le salarié et ne peuvent pas en laisser de côté : l’appréciation doit être globale et non manquement par manquement.
Par ailleurs, il peut être tenu compte dans l’appréciation de la gravité des manquements de l’employeur d’une éventuelle régularisation de ceux-ci avant la prise d’acte.
En principe, sous la réserve de règles probatoires spécifiques à certains manquements allégués de l’employeur, c’est au salarié, et à lui seul, qu’il incombe d’établir les faits allégués à l’encontre de l’employeur. S’il n’est pas en mesure de le faire, s’il subsiste un doute sur la réalité des faits invoqués à l’appui de sa prise d’acte, celle-ci doit produire les effets d’une démission.
Lorsque la prise d’acte est justifiée, elle produit les effets selon le cas d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul de sorte que le salarié peut obtenir l’indemnisation du préjudice à raison de la rupture injustifiée, une indemnité compensatrice de préavis ainsi que l’indemnité de licenciement, qui est toutefois calculée sans tenir compte du préavis non exécuté dès lors que la prise d’acte produit un effet immédiat.
Par ailleurs, le salarié n’est pas fondé à obtenir une indemnité à raison de l’irrégularité de la procédure de licenciement.
D’une troisième part, l’employeur a une obligation s’agissant de la sécurité et de la santé des salariés dont il ne peut le cas échéant s’exonérer que s’il établit qu’il a pris toutes les mesures nécessaires et adaptées énoncées aux articles L 4121-1 et L 4121-2 du code du travail ou en cas de faute exclusive de la victime ou encore de force majeure.
L’employeur doit notamment mettre en ‘uvre une organisation et des moyens adaptés en vertu de l’article L 4121-1 3° du code du travail.
En l’espèce, premièrement, si la lettre de démission du 16 novembre 2019 de la salariée n’est pas motivée, il n’en demeure pas moins qu’il existait de manière contemporaine entre les parties un litige relatif aux conditions d’exécution du contrat de travail puisque Mme [L] a fait valoir, dans son courrier du 13 août 2019, le fait qu’elle était «’en arrêt maladie pour dépression à la suite de la situation très compliquée au travail entre vous et moi (‘)’», et ce au soutien de sa demande de rupture conventionnelle. Mme [L] met également en avant des difficultés concernant la mutuelle d’entreprise et l’ingérence alléguée de l’employeur dans sa vie privée.
Il s’ensuit que la démission doit être requalifiée en prise d’acte.
Il a été relevé précédemment plusieurs manquements avérés de l’employeur quant aux durées maximales du travail et à la mutuelle, qui ont été préjudiciables à la salariée et ce concernant les durées du travail à plusieurs reprises, tout au long de la relation de travail, hors suspension pour maladie.
En outre, alors que Mme [L] se plaint d’une surcharge de travail, la société [6] ne rapporte pas la preuve suffisante qui lui incombe d’avoir mis en place une organisation et des moyens adaptés par la seule production d’attestations d’autres salariés ([B], [E], [N], [O], [M]) ou d’un de ses prestataires ([T]) dès lors que ces attestations doivent être prises avec précaution puisqu’émanant de témoins placés dans un lien de subordination juridique ou économique à l’égard d’une partie, qu’il est effectué un amalgame entre la charge de travail et la qualité des prestations fournies et que surtout, la surcharge de travail, avec à tout le moins une organisation inadaptée, résulte nécessairement de la circonstance que la salariée a été amenée à plusieurs reprises à travailler au-delà de la durée maximale conventionnelle journalière et n’a pas bénéficié plusieurs fois du repos minimal journalier.
L’employeur développe à ce titre des moyens tenant au fait que Mme [L] prendrait des pauses non programmées, arriverait en retard ou resterait de son propre chef sur son lieu de travail sans demande de l’employeur sans pour autant justifier des horaires de travail effectivement réalisés avec un système fiable de décompte du temps de travail si ce n’est des plannings mettant en évidence les infractions aux durées du travail sus-évoquées.
Là encore, la société [6] procède à un amalgame entre une mauvaise exécution alléguée du contrat par la salariée, rattachable au pouvoir de sanction disciplinaire de l’employeur et l’organisation défectueuse du travail dans l’entreprise.
L’inspection du travail a d’ailleurs relevé ces manquements lors de son contrôle ainsi que cela ressort de son courrier précité du 31 janvier 2022.
L’employeur ne parvient pas davantage à déterminer avec certitude et précision quelles tâches étaient effectivement confiées à Mme [L] dans le cadre de l’organisation mise en place puisqu’il a admis devant l’inspecteur du travail que la liste des tâches figurant dans son contrat de travail n’étaient pas celles réalisées habituellement et à titre principal par la salariée puisque certaines missions n’étaient qu’exceptionnelles, s’engageant auprès de l’inspection du travail à se conformer à une liste de tâches dressée par lui’lors du contrôle’: «’accueil client, service restauration, suivi de réceptions, services bar, encaissement et suivi de caisse, mises en place d’actions commerciales, suivi des réseaux sociaux’».
Des échanges de SMS avec le dirigeant mettent également en évidence que Mme [L] effectuait au vu et au su de celui-ci ses missions de démarchage pour l’entreprise pendant ses jours de repos, sans que cela n’ait suscité de la part de l’employeur le moindre commentaire.
Mme [L] produit divers éléments médicaux mettant en évidence que son arrêt maladie à compter du 11 juin 2019 résulte d’un syndrome anxieux et d’une dépression, étant observé que le Dr [I] a confirmé, dans un courrier du 12 novembre 2019, que les troubles diagnostiqués s’inscrivaient dans le cadre d’un conflit sévère avec l’employeur.
Si le praticien n’a fait en cela que relater les dires de la patiente, la réalité de ce conflit est avérée au vu des échanges de courriels des 13 au 15 novembre 2019, lors de la brève reprise, par la salariée, de son activité après la fin de son arrêt maladie, avant qu’elle n’adresse une lettre de démission le 16 novembre 2019.
L’employeur développe de son côté des moyens non fondés visant à remettre en cause la réalité de la dégradation de l’état de santé de la salariée sans fournir le moindre élément médical venant contredire ceux produits par la salariée.
Ces manquements de l’employeur qui ont perduré jusqu’à la démission requalifiée en prise d’acte sont jugés suffisamment graves pour avoir empêché la poursuite du contrat de travail dès lors qu’ils caractérisent des conditions de travail dégradées et une atteinte aux droits de la salariée, dont certains sont essentiels s’agissant du droit au repos et à la santé de sorte qu’infirmant le jugement entrepris, il y a lieu de requalifier la prise d’acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur les prétentions afférentes à la rupture du contrat de travail’:
Premièrement, dès lors que la rupture est injustifiée, Mme [L] a droit à une indemnité de préavis (article 30.2 de la convention collective HCR), peu important qu’elle ne l’ait pas exécuté, à hauteur de 2000 euros brut, outre 200 euros brut au titre des congés payés afférents.
Deuxièmement, au jour de la rupture injustifiée du contrat de travail, Mme [L] avait moins d’un an d’ancienneté de sorte qu’au vu de son salaire de 2000 euros, il lui est alloué par application de l’article L 1235-3 du code du travail, la somme de 2000 euros brut à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur les demandes accessoires’:
Infirmant le jugement entrepris, l’équité et la situation économique respective des parties commandent de condamner la société [6] à payer à Mme [L] une indemnité de procédure de 2000 euros.
Le surplus des prétentions au titre de l’article 700 du code de procédure civile est rejeté.
Au visa de l’article 696 du code de procédure civile, infirmant le jugement entrepris, il convient de condamner la société [6], partie perdante, aux dépens de première instance et d’appel.