Rupture anticipée : 6 novembre 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 18/03175

·

·

Rupture anticipée : 6 novembre 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 18/03175
Ce point juridique est utile ?

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE

————————–

ARRÊT DU : 06 NOVEMBRE 2023

N° RG 18/03175 – N° Portalis DBVJ-V-B7C-KOXH

SARL T.B.A. TRAVAUX BATIMENT ANIBAL

c/

SAS I.G.C.

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 27 avril 2018 (R.G. 2016F00728) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d’appel du 01 juin 2018

APPELANTE :

SARL T.B.A. TRAVAUX BATIMENT ANIBAL, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis, [Adresse 1]

représentée par Maître Grégory BELLOCQ de la SELARL GREGORY BELLOCQ, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SAS I.G.C., prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis, [Adresse 2] / FRANCE

représentée par Maître Daniel RUMEAU de la SCP RUMEAU, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 septembre 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président,

Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller,

Madame Sophie MASSON, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

La société IGC a pour activité la construction de maisons individuelles.

Elle a conclu avec la société Travaux Bâtiment Anibal (ci-après TBA), société spécialisée dans la réalisation des enduits, un contrat de sous-traitance dit ‘conditions générales’ le 28 mars 2014 précisant les conditions générales dans lesquelles divers chantiers seraient confiés à celle-ci dans le cadre, pour chaque chantier, de la signature d’un contrat ‘conditions particulières’.

Par courrier du 10 septembre 2015, la société IGC a demandé à la société TBA :

– de cesser son intervention sur le chantier de M. [W] compte tenu de la mauvaise qualité des travaux réalisés par celle-ci,

– de considérer comme caducs six dossiers ‘précédemment reçus’ et ‘en prévision’.

Elle lui a par ailleurs indiqué qu’elle cessait toute collaboration avec elle.

Par courrier du 22 janvier 2016, le conseil de la société TBA a mis en demeure la société IGC de régler à sa cliente :

– les sommes de 4677,79 euros, 770.19 euros et 9948,59 euros au titre de retenues de garantie sur plusieurs chantiers,

– les sommes de 2960,47 euros et 586,81 euros au titre de deux factures impayées du 21 juillet 2017 concernant le chantier [B].

Il faisait état en outre d’une rupture abusive des relations commerciales établies ouvrant droit à des dommages et intérêts.

Par acte d’huissier de justice du 20 juin 2016, la société TBA a assigné la société IGC devant le tribunal de commerce de Bordeaux aux fins de voir celle-ci condamner à lui verser :

– la somme de 3808,89 euros au titre des factures impayées,

– la somme de 15 356,57 euros au titre des retenues de garantie,

– les sommes de 54 777,91 euros, de 20 000 euros et de 8000 euros sur le fondement de la ‘résiliation fautive d’inexécution contractuelle’ et de la rupture brutale du contrat.

Par jugement contradictoire du 27 avril 2018, le tribunal a :

– condamné la société IGC à verser à la société TBA la somme de 2 847,21 euros TTC au titre du solde de factures non payées,

– condamné la société IGC à verser à la société TBA la somme de 4 209,01 euros TTC au titre du solde des retenues de garantie,

– condamné la société TBA à verser à la société IGC la somme de 7 667,21 euros en réparation des malfaçons,

– ordonné la compensation des sommes dues entre les parties,

– débouté les parties du surplus de leurs demandes,

– ordonné l’exécution provisoire du jugement à intervenir,

– dit n’y avoir lieu à faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société TBA aux dépens.

Par déclaration du 1er juin 2018, la société TBA a interjeté appel de cette décision, énonçant les chefs de la décision expressément critiqués, intimant la société IGC.

La proposition de recours à la médiation a été refusée par la société IGC.

Par ordonnance du 10 septembre 2021, le conseiller de la mise en état de la chambre commerciale de la cour d’appel de Bordeaux a déclaré irrecevable l’appel relevé par la société TBA s’agissant de la demande formée au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies, demande relevant de la compétence exclusive de la cour d’appel de Paris.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 04 septembre 2023 et le dossier a été fixé à l’audience du 18 septembre 2023, date à laquelle il a été plaidé et mis en délibéré au 6 novembre 2023.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières écritures notifiées par RPVA le 26 juillet 2023, auxquelles la cour se réfère expressément, la société TBA, demande à la cour de :

– vu les articles 565 et 566 du code de procédure civile,

– vu les articles 1134, 1147, 1153 et 1154 (anciens) du code civil,

– vu les articles 1793 et 1794 du code civil,

– vu la loi n° 71-584 du 16 juillet 1971,

– la dire et juger toute aussi recevable que bien fondée en son action,

– débouter la société IGC de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

– réformer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société IGC à lui verser seulement la somme de 2 847,21 euros TTC au titre du solde de facture non payée, condamné la société IGC à lui verser seulement la somme de 4 209,01 euros TTC au titre du solde des retenues de garantie, l’a condamné à verser à la société IGC la somme de 7 667,21 euros en réparation des malfaçons, ordonné la compensation des sommes dues entre les parties, l’a débouté du surplus de ses demandes, dit n’y avoir lieu à faire application des dispositions de l’article 700 CPC et l’a condamné aux dépens,

– statuant à nouveau,

– condamner la société IGC à lui verser les sommes de :

– 3 808,89 euros hors retenues de garantie au titre des factures impayées,

– 6 416,95 euros au titre des retenues de garantie,

– prononcer la résiliation aux torts de la société IGC fautive d’inexécution contractuelle,

– condamner la société IGC à la réparation du préjudice de la résiliation fautive d’inexécution contractuelle soit aux sommes suivantes :

– 54 777,91 euros HT de manque à gagner,

– 8 000 euros de préjudice moral,

– condamner la société IGC à lui verser, la somme de 3 000 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice de trésorerie subi,

– dire et juger que les sommes s’entendent avec intérêts au taux légal à compter du 22 janvier 2016, date de la mise en demeure,

– ordonner la capitalisation des intérêts par année entière,

– condamner la société IGC au paiement d’une indemnité de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 CPC,

– condamner la société IGC qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées par RPVA le 19 avril 2023, auxquelles la cour se réfère expressément, la société IGC, demande à la cour de :

– réformer partiellement le jugement entrepris,

– juger que la société TBA a engagé sa responsabilité contractuelle pour la mauvaise exécution des travaux sur les différents chantiers qui lui ont été confiés notamment sur le chantier [B],

– juger que le coût qui lui est imputable s’élève à 8 863,20 euros,

– confirmer le jugement entrepris,

– juger que seule la facture de la société TBA concernant le chantier [B] pour un montant TTC de 2 847,21 euros est recevable et fondée,

– débouter la société TBA de ses demandes relatives au paiement des autres factures,

– juger que les retenues de garantie dues à la société TBA s’élèvent à 4 209,01 euros,

– à titre subsidiaire et si la conservation d’une partie des retenues de garantie devait être considérée comme contraire aux règles applicables, condamner la société TBA à verser cette somme de 1 083,30 euros en paiement des prestations contractuellement déléguées à la concluante,

– en conséquence et après compensation entre les créances respectives des parties, condamner la société TBA à verser la somme de 1 806,98 euros,

– déclarer irrecevables les demandes de la société TBA visant à obtenir 54 777,91 euros de manque à gagner et 8 000 euros de préjudice moral en application de l’ordonnance du conseiller de la mise en état du 10 septembre 2021,

– à titre subsidiaire,

– juger que le retrait des six marchés notifié le 10 septembre 2015 ainsi que la résiliation des contrats étaient justifiés par les fautes commises par la société TBA et débouter cette dernière de toutes ses demandes,

– à titre infiniment subsidiaire, juger que le retrait n’a porté que sur cinq chantiers pour un chiffre d’affaires cumulé de 14 988,31 euros et que la résiliation anticipée de ces marchés ne peut être sanctionnée qu’à hauteur de 20 %,

– débouter la société TBA de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

– condamner la société TBA à lui verser une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du CPC ainsi qu’aux entiers dépens d’instance et d’appel.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les sommes réclamées par l’appelante au titre des factures impayées :

1- Aux termes de l’article 1134 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

2- Il est réclamé le paiement de trois factures, deux pour le chantier [B] et une pour le chantier [R].

– la facture F 15 07 180 du chantier [B] du 21 juillet 2015 d’un montant de 2960,45 euros TTC :

3- Le tribunal a retenu cette facture mais en a diminué le montant à la somme de 2847,21 euros, montant de la facture initiale avant rectification des métrés.

4- L’appelante ne justifie pas d’un accord de sa cocontractante pour une modification des métrés alors que le marché est global et forfaitaire ( article 4.1 des conditions générales). Dès lors, les annotations modifiant le métré figurant sur la facture initiale et à l’origine d’une nouvelle facturation, même à supposer qu’elles émanent de M. [P], le conducteur de travaux, n’ont pas d’incidence sur le prix du marché.

5- Le tribunal de commerce a pu ainsi à bon droit retenir la première facture correspondant aux métrés figurant dans le contrat. La décision de première instance sera confirmée.

– la facture F 15 07 181 du chantier [B] du 21 juillet 2015 d’un montant de 586,81 euros :

6- Le tribunal a rejeté la demande portant sur cette facture au motif qu’il n’y avait pas de preuve de l’accord de la société IGC sur une facturation d’un changement de couleur.

7- Contrairement à ce que soutient l’appelante, il n’est ni établi, par sa pièce 7, ni par la pièce 4 de son contradicteur, l’existence d’un accord des parties pour une facturation en supplément d’un changement de type ou de couleur de l’enduit, les plus-values figurant sur cette pièce 4 portant uniquement sur la fourniture de deux châssis.

8- La décision de première instance, qui a rejeté cette demande, sera confirmée.

– la facture F 14 10 106 du chantier [R] du 16 octobre 2014 d’un montant de 261,61 euros :

9- Le tribunal n’a pas statué expressément sur cette demande dans les motifs de sa décision mais a débouté les parties ‘ du surplus de leurs demandes’ dans le dispositif.

10- L’appelante soutient qu’il s’agit d’une facture de réajustement concernant la finition de l’enduit gratté au lieu de la finition rustique à la demande de la société IGC.

11- A défaut d’avenant, le sous-traitant ne peut modifier les prix d’un marché forfaitaire.

12- Cette demande sera dès lors également rejetée et la décision de première instance confirmée.

Sur les sommes réclamées par l’appelante au titre des retenues de garantie :

13- L’article 2 du contrat cadre de sous-traitance stipule que la retenue de garantie correspond à la retenue légale de 5% des travaux pendant la première année qui suit la réception des travaux.

14- L’article 14 du même contrat stipule que 4% du montant des travaux seront reversés à l’entreprise lors de la réception définitive et sous la condition que les réserves éventuellement présentées aient été entièrement levées et que le certificat de conformité ait été délivré et qu’1% du marché sera définitivement conservé par le constructeur au titre de la gestion du registre journal conformément aux nouvelles règlementations de l’hygiène et de la sécurité du chantier.

15- L’appelante sollicite la somme de 6416,95 euros au titre des retenues de garantie. Elle soutient que l’argumentation de l’intimée relative au compte prorata ne peut prospérer au regard des dispositions contractuelles et de la jurisprudence applicable.

16- L’intimée reconnait devoir au titre des retenues de garantie la somme de 5292,84 euros, soit après déduction du 1% conservé par le constructeur au titre de la gestion du registre journal la somme de 4209,01 euros.

Sur ce :

17- Le tribunal a, à juste titre, relevé que la société TBA ne produisait pas le listing des factures justifiant des retenues de paiement dont elle réclame le paiement. La production d’une copie de son grand livre ne suffit pas à lui seul à justifier le montant de sa demande et ce d’autant plus qu’elle y ajoute de manière manuscrite un certain nombre de montant sans aucune justification.

18- La sous-traitante a en outre librement accepté les conditions du marché et plus précisément qu’1% de celui-ci soit affecté au paiement de la gestion par le constructeur de la gestion du registre journal.

19- Le tribunal de commerce a ainsi pu à juste titre condamné la société IGC au seul paiement de la somme de 4209,01 euros au titre des retenues de garantie.

Sur les sommes réclamées par l’intimée au titre de la réparation des malfaçons :

20- L’entreprise principale soutient que l’entreprise sous-traitante est responsable de nombreuses malfaçons sur cinq chantiers qui seront étudiés successivement. Le tribunal a fait droit à ses demandes pour quatre des chantiers.

Le chantier [B] :

21- L’entreprise principale ne justifie pas de la réalité de ce désordre. La décision de première instance qui l’a déboutée de cette demande sera confirmée.

Le chantier [K] :

22- L’entreprise principale explique que l’entreprise sous-traitante a réalisé un enduit rustique au lieu d’un enduit gratté et que celle-ci est dès lors intervenue à nouveau sur le chantier pour réaliser un enduit gratté qui a cloqué.

23- Or, elle ne produit aux débats qu’un rapport d’expertise amiable qui fait état de cloques apparaissant sur l’enduit gratté, mais qui n’est corroboré par aucune pièce. La sous-traitante conteste l’existence de ce désordre.

24- L’entreprise principale, sur qui repose la charge de la preuve de l’existence d’un désordre imputable à son sous-traitant, sera déboutée de cette demande. La décision de première instance sera infirmée de ce chef.

Le chantier [U] :

25- L’entreprise principale sollicite le remboursement d’une facture de réalisation d’une peinture sur la façade d’un montant de 2960,01 euros . Au soutien de cette demande, elle produit deux courriers qu’elle a adressés à sa sous-traitante.

Ces pièces ne justifient ni de l’existence ni de l’ampleur des désordres allégués. L’intimée ne démontre pas par ailleurs avoir mis en demeure la sous-traitante d’y remédier.

26- L’entreprise principale sera déboutée de cette demande. La décision de première instance sera infirmée de ce chef.

Le chantier [W] :

27- L’entreprise principale a demandé à l’occasion de ce chantier à sa sous-traitante de stopper sa prestation et de ‘tomber ce qui a été appliqué’, ‘la qualité de mise en oeuvre et de finition ne correspondant pas à nos attentes’.

28- Il n’est produit aucune autre pièce, hormis la facture d’intervention de la société El Amri ite, qui n’est pas susceptible d’établir la réalité des désordres allégués.

29- L’entreprise principale sera déboutée de cette demande. La décision de première instance sera infirmée de ce chef.

Le chantier [C] :

30- L’entreprise principale produit aux débats un procès-verbal de réunion pré-réception dans lequel il est fait état de la nécessité de reprendre la façade avec la mention ‘couleur cendrée’.

31- L’entreprise principale ne justifie pas avoir mis sa cocontractante en mesure de reprendre ce menu désordre ( reprise évaluée à moins de 300 euros) avant la date de réception et avant de faire appel à une entreprise tierce.

32- L’entreprise principale sera déboutée de cette demande. La décision de première instance sera infirmée de ce chef.

Sur la demande formée par l’appelante au titre de la résiliation du contrat de sous-traitance :

33- Aux termes de l’article 1134 dans sa version applicable à ce litige, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

34- Aux termes de l’article 1147 du code civil, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.

35- L’appelante reproche à la société IGC d’avoir résilié 19 marchés qu’elle lui avait confiés sans justifier d’une grave inexécution fautive de sa part justifiant une résiliation sans préavis. Cette résiliation brutale lui a causé un préjudice de 54 777,91 euros correspondant au montant cumulé des différents marchés résiliés dont elle sollicite le paiement sur le fondement de l’article 1134 et 1147 du code civil, et ‘au besoin’ de 1793 et 1794.

Elle affirme que cette demande est recevable sur le fondement de l’article 564 du code de procédure civile car elle tend aux même fins que les demandes formées en première instance.

36- L’intimée rétorque que la demande est irrecevable au motif que l’appelante tenterait de contourner l’ordonnance d’irrecevabilité du conseiller de la mise en état portant sur la demande en réparation du préjudice subi par la rupture brutale des relations commerciales établies. Sur le fond, elle fait valoir que la rupture est justifiée par les très nombreuses fautes commises par sa sous-traitante sur les différents chantiers qui lui étaient confiées. Elle fait par ailleurs valoir que seulement 6 chantiers lui ont été retirés et que le préjudice ne peut être constitué par la perte du montant du marché mais tout au plus par la perte du bénéfice que l’entreprise aurait pu en retirer. Enfin, elle renvoie la cour aux dispositions de l’article 8 du contrat qui prévoit des dommages et intérêts à hauteur de 20% du marché dans l’hypothèse d’une résiliation du marché.

Sur ce :

37- La demande fondée sur le droit commun des contrats qui tend aux mêmes fins que les demandes formées en première instance est recevable en appel.

38- La société appelante produit 19 contrats qui selon elle lui ont été retirés par l’entreprise principale suite au courrier du 10 septembre 2015. L’intimée justifie que 13 chantiers originellement attribués à la société TBA ont été attribués à une autre société, la société SDEI, bien avant le courrier mettant fin à ses relations avec sa sous-traitante, du fait de l’indisponibilité de celle-ci aux périodes prévues pour son intervention, compte tenu d’un retard pris dans le chantier. La société TBA ne justifie s’être opposée à l’époque à son remplacement pour ces chantiers.

39- Le litige ne porte donc que sur six chantiers, à savoir les chantiers [S], [W], [V], [O], [L] et [I]. Or, l’entreprise principale ne démontre pour aucun de ces chantiers l’existence des désordres graves et récurrents qu’elle invoque justifiant une résiliation immédiate et simultanée de ces six contrats.

40- Il sera dès lors jugé que la résiliation de ces six marchés est injustifiée et doit dès lors être prononcée aux torts de l’entreprise principale.

41- La clause 8 du contrat cadre intitulé conditions générales stipule que la résiliation anticipée par l’une ou l’autre des parties, de tout avenant aux présentes ( conditions particulières) dûment accepté apportera à la partie lésée des dommages équivalents à 20% du marché dénoncé. Somme à porter au compte courant commun.

42- Il y a lieu de faire application de cette clause. Le montant total des six chantiers s’élève à 17 807,52 euros. La somme due par l’entreprise principale est donc de 3561,50 euros. Il n’y a pas lieu de la porter au compte courant commun compte tenu de la rupture de la résiliation du contrat cadre.

43- La résiliation du contrat cadre lui-même qui ne comportait aucune condition de durée ne peut donner droit à une indemnisation complémentaire pour l’entreprise sous-traitante sur le fondement du droit commun.

44- La société IGC sera ainsi condamnée à verser la somme de 3561,50 euros à la société TBA en indemnisation de la rupture anticipée de six marchés de travaux.

45- La décision de première instance sera infirmée de ce chef.

46- La société TBA qui ne justifie pas de son préjudice moral sera déboutée de ce chef de demande. Elle sera également déboutée de la demande formée au titre de la résistance abusive en réparation de son préjudice de trésorerie qui n’est pas justifié. La décision de première instance sera confirmée de ce chef.

Sur les autres demandes :

47- Les condamnations prononcées au titre des factures et des retenues de garantie seront assorties du versement des intérêts au taux légal à compter du 22 janvier 2016, date de la mise en demeure. Les autres condamnations seront assorties du versement des intérêts au taux légal à compter du prononcé de cette décision. La capitalisation des intérêts sera en outre ordonnée.

48- La société IGC qui succombent partiellement dans ses demandes sera condamnée aux dépens d’appel et de première instance.

49- Elle sera condamnée à verser la somme de 4000 euros à la société TBA au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en indemnisation de ses frais de procédure de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire et en dernier ressort,

Infirme la décision du tribunal de commerce de Bordeaux du 27 avril 2018, sauf en ce qu’il a :

– condamné la société IGC à verser à la société TBA la somme de 2 847,21 euros TTC au titre du solde de factures non payées,

– condamné la société IGC à verser à la société TBA la somme de 4 209,01 euros TTC au titre du solde des retenues de garantie,

– ordonné l’exécution provisoire du jugement à intervenir,

et statuant à nouveau,

Déboute la société IGC de sa demande de dommages et intérêts formée au titre de la reprise des malfaçons des enduits,

Déclare recevable la demande d’indemnisation formée par la société TBA en indemnisation de ses préjudices découlant de la résiliation des marchés fondée sur le droit commun,

Condamne la société IGC à verser la somme de 3561,50 euros à la société TBA en indemnisation de la rupture anticipée de six marchés de travaux,

Déboute la société TBA du surplus de ses autres demandes indemnitaires au titre des marchés résiliés, et notamment de sa demande de réparation de son préjudice moral et de sa demande d’indemnisation de son préjudice de trésorerie,

Dit que les condamnations prononcées au titre des factures et des retenues de garantie seront assorties du versement des intérêts au taux légal à compter du 22 janvier 2016, date de la mise en demeure,

Dit que les autres condamnations seront assorties du versement des intérêts au taux légal à compter du prononcé de cette décision,

Ordonne la capitalisation des intérêts échus pour une année au moins,

y ajoutant

Condamne la société IGC aux dépens d’appel et de première instance,

Condamne la société IGC à verser la somme de 4000 euros à la société TBA au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en indemnisation de ses frais de procédure de première instance et d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jean-Pierre FRANCO, président, et par Monsieur Hervé GOUDOT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x