Rupture anticipée : 5 janvier 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 21/01323

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Rupture anticipée : 5 janvier 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 21/01323
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PhD/ND

Numéro 23/29

COUR D’APPEL DE PAU

2ème CH – Section 1

ARRET DU 05/01/2023

Dossier : N° RG 21/01323 – N° Portalis DBVV-V-B7F-H27Q

Nature affaire :

Demande en paiement des loyers et charges et/ou tendant à la résiliation du bail et/ou à l’expulsion

Affaire :

S.A.R.L. FANTINE

C/

[C] [V]

[K] [L] [U] épouse [V]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 05 janvier 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 07 Novembre 2022, devant :

Monsieur Philippe DARRACQ, magistrat chargé du rapport,

assisté de Madame SAYOUS, Greffière présente à l’appel des causes,

Philippe DARRACQ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Marc MAGNON et en a rendu compte à la Cour composée de :

Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller faisant fonction de Président

Monsieur Marc MAGNON, Conseiller

Madame Joëlle GUIROY, Conseillère

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTE :

S.A.R.L. FANTINE

immatriculée au RCS de Tarbes sous le n° 814 121 109, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Fabienne BARNECHE de la SELARL FABIENNE BARNECHE, avocat au barreau de PAU

INTIMES :

Monsieur [C] [V]

né le 02 Mars 1967 à [Localité 4] (94)

de nationalité française

[Adresse 5]

[Localité 2]

Madame [K] [L] [U] épouse [V]

née le 10 Juillet 1967 à [Localité 7] (65)

de nationalité française

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentés par Me Jean-Pierre POUDENX, avocat au barreau de DAX

sur appel de la décision

en date du 01 MARS 2021

rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE TARBES

FAITS – PROCEDURE – PRETENTIONS et MOYENS DES PARTIES

Par acte notarié du 23 novembre 2015, M. [C] [V] et Mme [K] [V] (les consorts [V], ou le bailleur) ont donné à bail commercial la société Fantine (sarl) un local commercial sis à [Localité 6], à compter du 1er novembre 2015 pour se terminer le 31 octobre 2024 moyennant un loyer annuel de 12.000 euros, outre provisions sur charges.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 avril 2017, le preneur a informé le bailleur de la fermeture du fonds de commerce et sollicité une résiliation amiable et anticipée du bail au 30 avril 2017.

Le 3 août 2018, le bailleur a fait signifier un commandement de payer, visant la clause résolutoire, la somme de 15.375 au titre des loyers impayés impayés entre juin 2017 et août 2018 et 375 euros au titre des provisions sur charges.

Suivant exploit du 12 décembre 2018, les consorts [V] ont fait assigner la société Fantine en référé par devant le président du tribunal de grande instance de Tarbes en résiliation du bail, expulsion et paiement de sommes.

Par jugement du 1er mars 2021, auquel il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens initiaux des parties, le juge des référés a :

– constaté la résiliation du bail à la date du 31 octobre 2018

– condamné la société Fantine à payer aux consorts [V] la somme de 15.182,64 euros au titre des loyers impayés, déduction faite du dépôt de garantie

– condamné la société Fantine aux dépens, en ce compris le coût du commandement de payer

– condamné la société Fantine au paiement d’une indemnité de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration faite au greffe de la cour le 16 avril 2021, la société Fantine a relevé appel de ce jugement.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 12 octobre 2022.

***

Vu les dernières conclusions notifiées le 15 juillet 2021 par la société Fantine qui a demandé à la cour de réformer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de :

– dire et juger que les consorts [V] ont accepté de manière claire et non équivoque la résiliation anticipée et amiable proposée par elle

– dire et juger que le contrat de bail liant les parties a été résilié de manière anticipée et amiable, avec prise d’effet de cette résiliation au 30 avril 2017

– condamner solidairement les consorts [V] à lui payer la somme de 1.998,92 euros au titre du dépôt de garantie

– condamner solidairement les consorts [V] à lui payer une somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, outre celle de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

*

Vu les dernières conclusions notifiées le 22 juillet 2021 par les consorts [V] qui ont demandé à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, et y ajoutant :

– dire et juger que la société Fantine est fondée à déduire des sommes dont elle est redevable la somme de 2.000 euros correspondant à la restitution du dépôt de garantie

– condamner la société Fantine au paiement d’une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

A titre liminaire, la cour précise que, eu égard à la date de sa conclusion, le bail commercial liant les parties est régi, outre par les dispositions statutaires applicables à la date de sa conclusion, par les dispositions légales du droit des obligations dans sa version antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

L’appelante fait grief au jugement d’avoir écarté son moyen tiré d’une résiliation amiable du bail au 30 avril 2017 alors que la preuve de celle-ci résulte de la volonté tacite mais non équivoque du bailleur, matérialisée par la restitution des clés « au printemps », la reprise des lieux loués, le retrait de l’enseigne, la mise en location des locaux et l’absence de réclamation du paiement des loyers.

En application des articles 1134 et 1315 du code civil, dans sa version antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, il incombe à la société Fantine de rapporter la preuve de l’existence de l’accord des parties sur la résiliation amiable du bail au 30 avril 2017.

Mais, d’abord, les consorts [V] n’ont donné aucune suite écrite à la demande de résiliation amiable et d’établissement d’état des lieux de sortie formée par le propre conseil de la société Fantine dans son courrier du 21 avril 2017.

Ensuite, la société Fantine ne démontre pas avoir sollicité un rendez-vous pour établir l’état des lieux de sortie, lequel n’a pas été fait, ni avoir effectivement restitué les clés, matérialisant la libération des lieux, étant même dans l’incapacité non seulement de préciser les modalités mais de dater cette restitution alléguée, faisant seulement état du « printemps 2017 après la lettre de notification de la correspondance de résiliation ».

Il n’existe aucune manifestation de volonté du bailleur contemporaine à cette époque et il est seulement acquis que la société Fantine a quitté les lieux, en les délaissant et en cessant de régler les loyers dès le mois de juin 2017.

Il se déduit des constatations qui précèdent que la société Fantine a quitté les lieux loués, à une certaine date, dans des circonstances exclusives de tout accord, même tacite, sur le principe d’une résiliation amiable du bail acceptée par le bailleur.

Le procès-verbal de constat d’huissier du 22 novembre 2017, établi à la demande de la société Fantine, décrit des lieux libres de toute occupation ainsi que de tout aménagement, refaits à neuf, et qu’une annonce « à louer » avec le numéro de téléphone du bailleur, est fixée sur la vitrine.

Ce constat permet d’établir que le bailleur a effectivement repris matériellement possession des locaux qu’il a refait à neuf en vue de leur remise en location.

S’il peut être reproché au bailleur d’avoir repris possession des lieux loués, délaissés par le locataire, sans y avoir été autorisé en justice, il reste que le comportement de la société Fantine, qui a quitté les lieux et cessé de payer les loyers en manifestant une volonté de rupture définitive des relations contractuelles, ôte tout caractère dommageable à la reprise des lieux par le bailleur.

Et, il ne peut être déduit des circonstances de cette reprise que le bailleur a accepté la résiliation amiable du bail sollicitée par la société Fantine.

Enfin, il résulte de l’article L. 145-4 du code de commerce que la durée du contrat de location ne peut être inférieure à neuf ans, mais que le preneur a la faculté de donner congé à l’expiration d’une période triennale, dans les formes et délai de l’article L. 145-9 du même code.

En l’espèce, la société Fantine, qui n’a donné aucun congé, fût-ce même à une date prématurée au regard de la première période triennale, n’est pas libérée de son obligation d’exécuter le bail jusqu’à son terme conventionnel.

Cependant, les consorts [V] ont expressément accepté de considérer que le bail était résilié à la date d’expiration de la première période triennale, soit au 31 octobre 2018.

Et, non seulement, il n’est pas justifié d’une relocation des lieux loués avant cette date, mais, en l’absence de délivrance d’un congé régulier donné par la locataire, six mois à l’avance, et portant sur les locaux délaissés, la conclusion même d’un nouveau bail était sans effet sur le droit du bailleur à obtenir paiement des loyers dus au titre du premier bail conclu avec la société Fantine.

Par conséquent, les consorts [V] sont fondés à demander le paiement des loyers et charges échus entre juin 2017 et octobre 2018 inclus, soit la somme de 17.181,56 euros.

Le intimés acquiescent à la restitution du dépôt de garantie de sorte que, après compensation, la créance des consorts [V] s’élève à 15.182,64 euros.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en toutes ses dispositions,y compris sur les dépens et frais irrépétibles.

La société Fantine sera condamnée aux dépens d’appel.

Les parties seront déboutées de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

la cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

CONDAMNE la société Fantine aux dépens d’appel,

DEBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

AUTORISE Me Poudenx, avocat, à procéder au recouvrement direct des dépens d’appel, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe DARRACQ, conseiller faisant fonction de Président et par Madame Nathalène DENIS, greffière suivant les dispositions de l’article 456 du Code de Procédure Civile.

La Greffière, Le Président,

 


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