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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-1
ARRÊT AU FOND
DU 28 JUILLET 2023
N° 2023/ 235
Rôle N° RG 19/18185 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BFHCE
SAS [F] COMPANY
C/
[T] [F]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Aurélie BOURJAC
Me Julien BERENGER
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 10 Septembre 2019 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 16/05623.
APPELANTE
SAS [F] COMPANY SAS prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 2]
Accord pour la téléaudience par visioconférence le 07 Mars 2023
représentée par Me Aurélie BOURJAC, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Laurence COHEN BARRALIS, avocat au barreau de PARIS,
INTIME
Monsieur [T] [F]
né le 26 Janvier 1993 à [Localité 5], demeurant [Adresse 1]
Accord pour la téléaudience par visioconférence le 07 Mars 2023
représenté par Me Julien BERENGER de la SELARL KELTEN SPORT, avocat au barreau de MARSEILLE, et ayant pour avocat plaidant Me Didier DOMAT, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Marie JAMET, avocat au barreau de PARIS
PARTIE(S) INTERVENANTE(S)
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 06 Juin 2023 en audience publique. par le biais de la visioconférence conformément aux articles L.111-12-1 et R.111-7-1 du code de l’organisation .Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Mme DE BECHILLON, conseillère, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Olivier BRUE, Président
Madame Danielle DEMONT, Conseillère
Madame Louise DE BECHILLON, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Céline LITTERI.
Les opérations de visioconférence se sont déroulées sans discontinuité et sans difficulté technique.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Juillet 2023. A cette date le délibéré a été prorogé au 28 Juillet 2023
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Juillet 2023,
Signé par Monsieur Olivier BRUE, Président et Madame Céline LITTERI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
Le 16 octobre 2013, M. [T] [F], footballeur professionnel et M.[E] [H] constituaient la Sas [F] Company, les deux intéressés étant associés à hauteur de 50 %, ayant pour objet la gestion des intérêts économiques de sportifs professionnels et en particulier de footballeurs, et dans ce cadre, la gestion et la commercialisation des droits d’image et la gestion de leurs relations publiques, et toutes opérations financières, commerciales, industrielles, etc… pouvant se rattacher directement ou indirectement à l’objet social ci-dessus et à tous objets similaires ou connexes.
Par convention en date du même jour, un contrat de licence portant sur le droit à l’image et la gestion sportive de la carrière de M. [T] [F] était concédé à la Sas [F] Company, pour une durée de dix ans.
Une mésentente s’étant installée entre les associés, M. [T] [F] dénonçait le 12 mai 2014 la convention de licence portant sur son droit à l’image.
Il assignait la Sas [F] Company en dissolution anticipée devant le tribunal de commerce de Nanterre, qui par jugement en date du 4 juillet 2014, le déboutait de ses demandes.
Par acte d’huissier en date du 4 mai 2016, sur le fondement des articles 1134, 1147 et 1184 du Code civil, la Sas [F] Company assignait devant le tribunal de grande instance de Marseille M. [T] [F], aux fins de voir prononcer la résiliation du contrat de licence en date du 16 octobre 2013, aux torts exclusifs de ce dernier et sa condamnation à lui verser notamment la somme de 2.307.500 euros, en réparation de son préjudice matériel, reprochant à M. [T] [F] d’avoir gravement manqué à ses obligations en fondant notamment la société [X], à l’objet social identique au sien, ou encore, en signant directement un contrat de partenariat avec la société Adidas Marketing.
Par jugement en date du 10 septembre 2019, le tribunal de grande instance de Marseille a :
– rejeté l’irrecevabilité soutenue par la Sas [F] Company de la défense de M. [T] [F] fondée sur le dol,
– dit que le contrat de licence n ‘est affecté ni d ‘un dol, ni d ‘un vice de perpétuité,
– dit fondée la révocation unilatérale du contrat de licence,
– débouté la Sas [F] Company de ses demandes,
– débouté la Sas [F] Company de sa demande dommages et intérêts pour préjudice moral et de sa demande de communication de pièces sous astreinte,
– condamné la Sas [F] Company à payer à M. [T] [F] la somme de 3.000 euros, au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeté le surplus de la demande de ce chef,
– condamné la Sas [F] Company aux dépens.
Le tribunal a considéré en substance que la demande fondée sur le dol était recevable, le principe de concentration des moyens ne pouvant être appliqué à deux instances distinctes, que le contrat n’était pas entâché de dol en ce que M. [T] [F] était en mesure de comprendre le sens et la portée de ses actes et ne démontrait pas avoir subi des menaces physiques pour la signature d e ce contrat ; qu’en l’état d’une clause de durée et de la possibilité de mettre un terme au contrat, celui ci n’est pas affecté d’un vice de perpétuité, et que le joueur était fondé à résilier unilatéralement le contrat de licence, en raison de la perte de confiance
Par déclaration en date du 28 novembre 2019, la Sas [F] Company a interjeté appel de cette décision.
Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées par voie électronique en date du 4 mai 2023, la Sas [F] Company demande à la cour de :
– infirmer le jugement déféré en ce qu’il a :
– rejeté l’irrecevabilité soutenue par la Sas [F] Company de la défense de M. [T] [F] fondée sur le dol,
– dit fondée la révocation unilatérale du contrat de licence,
– débouté la Sas [F] Company de ses demandes,
– débouté la Sas [F] Company de sa demande dommages et intérêts pour préjudice moral et de sa demande de communication de pièces sous astreinte,
– condamné la Sas [F] Company à payer à M. [T] [F] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeté le surplus de la demande de ce chef,
– condamné la Sas [F] Company aux dépens
– le confirmer pour le surplus.
Statuant à nouveau,
– dire et juger irrecevable, en ce qu’elle se heurte à l’autorité de chose jugée du jugement du tribunal de commerce de Nanterre en date du 7 juillet 2014, la demande de M. [T] [F] fondée sur le dol ;
En conséquence,
– débouter M. [T] [F] de sa demande de ce chef ;
En tout état de cause,
– dire parfaitement valable le Contrat de Licence de droit à l’image et de gestion sportive du 16 octobre 2013 ;
– dire et juger sans effet la résiliation par M. [T] [F], par courrier RAR en date du 12 mai 2014 du contrat de licence de droit à l’image ;
Pour le moins, et subsidiairement, constater la renonciation de M. [T] [F] à se prévaloir d’une telle résiliation qui devra de ce fait être également DECLAREE sans effet ;
– constater que M. [T] [F] a violé les obligations mises à sa charge aux termes du Contrat de Licence de droit à l’image et de gestion sportive du 16 octobre 2013 ;
– déclarer la Sas [F] Company recevable et bien-fondée en sa demande visant à
obtenir la résiliation judiciaire du Contrat de Licence aux torts exclusifs de M. [T] [F] à compter de la date de l’arrêt à intervenir ;
– prononcer la résiliation judiciaire du Contrat de Licence aux torts exclusifs de M. [T] [F] à compter de la date de l’arrêt à intervenir ;
Subsidiairement,
– dire et juger abusive la résiliation par M. [T] [F], par courrier RAR en date du 12 mai 2014 du contrat de licence de droit à l’image et de ce fait à l’origine du préjudice subi par l’appelante qui devra être réparé;
Par conséquent et en tout état de cause :
– condamner M. [T] [F] à verser à la Sas [F] Company la somme sauf à parfaire de 2.307.000 euros hors taxe en réparation du préjudice financier subi ;
– condamner M. [T] [F] à verser à la Sas [F] Company une somme de 50.000 euros à titre d’indemnisation de son préjudice moral ;
– débouter M. [T] [F] de l’ensemble de ses demandes, fins ou conclusions,
– condamner M. [T] [F] à payer à la Sas [F] Company la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner M. [T] [F] aux entiers dépens.
Sur la validité du contrat de licence conclu le 16 octobre 2013, dont M. [T] [F] prétend qu’il est affecté d’un dol, l’appelante estime en réponse à cette prétention que celle-ci est irrecevable pour autorité de la chose jugée, le tribunal de commerce de Nanterre, dans son jugement du 4 juillet 2014, ayant déjà statué sur ce point et l’en a débouté.
Sur le fond, elle rappelle que le dol du dirigeant social ne peut être opposé à la société que si les manoeuvres dolosives ont été commises en cette qualité, et estime que les griefs développés au soutien de la demande d’annulation sont dirigés à l’encontre de M. [E] [H] à titre personnel, et qu’en tout état de cause il ne rapporte pas la preuve du dol allégué, en lui reprochant de l’avoir éloigné de son entourage afin d’accentuer l’influence exercée sur lui, d’avoir utilisé son argent pour des besoins personnels, puisqu’il disposait de procurations sur ses comptes bancaires, d’avoir reçu des contraventions en conduisant son véhicule, de s’être imposé dans sa villa lorsqu’il a été transféré au club de [3] de [Localité 4], ou encore, d’avoir usé de violences à son encontre pour la signature du contrat.
Sur la durée du contrat, dont M. [T] [F] indique qu’elle est excessive, elle expose que la durée est raisonnable et usuelle dans ce domaine, le contrat terminant soit à la date du second anniversaire de la fin de la carrière professionnelle du concédant, soit le 31 août 2028, et relève qu’une résiliation anticipée est possible en cas de faute d’une des parties, tandis que l’exclusivité a été consentie pour une durée de dix ans à l’issue de laquelle M. [F] pouvait faire savoir qu’il s’oppose à son renouvellement.
Sur la résiliation judiciaire du contrat de licence de droit à l’image et de gestion sportive, la société [F] rappelle que par cet acte, le joueur a concédé à la société une autorisation d’exploitation portant sur son droit à l’image, et un mandat exclusif de représentation permettant l’exercice de cette autorisation d’exploitation, ce dont elle déduit qu’il est d’intérêt commun arrêt qu’il ne peut être révoqué que par commun accord, sauf en cas de faute du mandataire.
Elle estime donc que M. [T] [F] ne pouvait révoquer ce mandat unilatéralement comme il l’invoque par son courrier du 12 mai 2014, les griefs contenus dans ce courrier visant M. [E] [H] mais pas la société, et ce pour des faits antérieurs à la conclusion du contrat, et n’a pas mis en demeure par courrier la société, d’avoir à exécuter les obligations qu’elle n’aurait pas remplies.
Elle sollicite donc la résolution pour faute du contrat aux torts exclusifs de M. [T] [F] pour avoir violé l’engagement d’exclusivité pris, avoir créé une société concurrente dénommée [X], avoir refusé de façon injustifiée de donner suite au contrata de partenariat négocié avec la société Nike France.
A titre subsidiaire, elle estime que la résiliation unilatérale du contrat par M. [T] [F] est abusive.
Elle estime avoir subi, les préjudices de développement en fonction de l’âge du joueur et des gains espérés, pour calculer une perte de chance.
Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées par voie électronique en date du 17 août 2020, M. [T] [F] demande à la cour de :
A titre principal :
– constater le caractère régulier de la révocation du Contrat de Licence par M. [T] [F];
– constater que le consentement de M. [T] [F] a la signature du Contrat de Licence a été obtenu par dol ;
– constater que le Contrat de Licence conclu entre M. [T] [F] et la Sas [F] Company est atteinte du vice de perpétuité ;
– déclarer que l’article 8 du Contrat de Licence définissant sa durée est nul et de nul effet, de sorte que ce Contrat doit être considérée comme ayant été conclu à durée déterminée résiliable unilatéralement à tout moment par chacune des parties ;
En conséquence,
– confirmer le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Marseille en date du 10 septembre 2019 en ce qu’il a débouté la Sas [F] Company de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
A titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire, la Cour devait infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Marseille en date du 10 septembre 2019 considérant que la rupture du contrat de licence n’est pas justifiée :
– constater le caractère disproportionné du préjudice financier que la Sas [F] Company prétend avoir subi et ramener celui-ci à de plus justes proportions ;
– débouter purement et simplement la Sas [F] Company de sa demande de réparation de son préjudice moral ;
En tout état de cause :
– condamner la Sas [F] Company à payer à M. [T] [F] la somme de 20.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– condamner la Sas [F] Company aux entiers dépens.
Il soutient que le contrat de licence de droit à l’image et de gestion sportive objet du litige est en réalité un contrat de mandat, de sorte qu’il pouvait le révoquer à tout moment, ce qu’il a fait par courrier du 12 mai 2014, en raison de la gravité du comportement de la société [F], dont le président et actionnaire à 50% a effectué des opérations frauduleuses à son égard et en contravention au code du sport, interdisant les mises sur des paris sportifs.
Il considère que le contrat de licence est entâché d’un dol en affectant sa validité, en ce que M. [E] [H] a profité de sa crédulité et de l’affection qu’il lui portait pour exercer une influence sur lui, le convainquant de lui laisser l’accès à ses moyens de paiement.
M. [T] [F] ajoute qu’il pensait avoir conservé la maîtrise de ses droits et qu’il n’aurait jamais signé un tel contrat s’il avait eu connaissance des agissements du président de la société.
Sur le vice de perpétuité revendiqué, il estime que la durée du contrat est anormalement longue, au delà d’une carrière de professionnel classique, assimilable à une durée perpétuelle sanctionnée par la nullité de la clause de durée.
A titre infiniment subsidiaire, il conteste l’ampleur du préjudice allégué.
MOTIFS
Sur la fin de non recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée de l’action en nullité du contrat pour dol
Aux termes de l’article 1355 du code civil, l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.
Le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nanterre le 4 juillet 2014, saisi par M. [T] [F], a statué sur la demande tendant au prononcé de la nullité des statuts de la société ainsi que sur la demande de dissolution judiciaire de cette même société.
Le tribunal n’a donc pas statué sur une demande fondée sur un vice du consentement et si ce terme a été évoqué dans les motifs du jugement, c’est à l’initiative de la juridiction, pour observer qu’aucun vice n’était soulevé. Il ne peut donc être utilement opposé à M. [T] [F] le principe de concentration des moyens, les deux instances ayant un objet distinct.
Il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a rejeté la fin de non recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée.
Sur la nullité du contrat pour dol
L’article 1116 du code civil dispose que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manoeuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté.
Il ne se présume pas et doit être prouvé.
Au cas d’espèce, M. [T] [F] évoque en premier lieu, au titre des manoeuvres frauduleuses, l’utilisation par M. [E] [H] de ses moyens de paiement et de ses biens mobiliers ou immobiliers. Ces griefs sont néanmoins sans lien avec la validité de l’engagement contractuel discuté, ne caractérisant pas des manoeuvres dolosives, de sorte qu’ils seront écartés.
S’il est produit plusieurs échanges de SMS entre les deux hommes, illustrant à la fois leur proximité mais aussi le rôle de conseil de M. [E] [H] à l’égard du joueur de football, y compris dans la communication de ce dernier avec de potentiels agents, il n’est cependant pas démontré que par cette relation, la capacité de jugement de M. [T] [F] a été altérée, ni que celui-ci a été isolé de toute relation.
En tout état de cause, il n’est pas établi que les agissements reprochés à M. [E] [H] et au demeurant non intégralement démontrés, ont conduit M. [T] [F] à prendre un engagement contractuel dont il ne connaissait pas l’étendue et qu’il n’aurait donc pas accepté s’il avait eu connaissance des agissements de son cocontractant.
Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande tendant à la nullité du contrat pour vice du consentement.
Sur le vice de perpétuité
L’article VIII du contrat de licence définissant la durée du contrat stipule en son paragraphe 8.1 que ‘sous réserve des stipulations de l’article 8.2 ci-après, le contrat est conclu pour une durée s’achevant à la date plus proche des deux dates suivantes:
Date du second anniversaire de la fin de la carrière professionnelle du Concédant (étant entendu que le Concédant sera réputé avoir mis fin à sa carrière de joueur de football professionnel s’il n’est pas titulaire d’un contrat de joueur de football professionnel, en France ou à l’étranger, pendant plus de deux saisons d’affilées; la date à retenir dans un tel cas étant celle quand son dernier contrat de joueur de football professionnel aura pris fin) ; et le 31 août 2028.’
Les stipulations de l’article 8.2 prévoient pour leur part que le contrat pourra être résilié par anticipation par une partie, sans qu’elle puisse encourir de ce fait une responsabilité d’aucune sorte de de ce fait, en cas de faute de l’autre partie.
S’il est acquis, comme le soutient M. [T] [F], que le caractère perpétuel, ou au moins excessif dans la durée d’un engagement peut se déduire de la longueur de l’engagement par comparaison la durée de la vie professionnelle, la teneur de l’article 8.2 est de nature à écarter le caractère perpétuel de l’engagement en permettant la résiliation du contrat par anticipation en cas de faute.
Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande tendant à la nullité du contrat de licence en raison de sa perpétuité.
Sur la validité de la résiliation par M. [T] [F] du contrat de licence de droit à l’image
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 14 mai 2014, M. [T] [F] a révoqué le mandat donné à la Sas [F] Company au titre du contrat signé le 16 octobre 2013, fondant sa démarche sur les dispositions de l’article 2004 du code civil, formulant plusieurs reproches à l’encontre de M. [E] [H].
Il est acquis que le contrat de mandat est révocable en cas de motif légitime tiré de la faute du mandataire dans l’exécution du contrat, conformément aux dispositions de l’article 1184 ancien du code civil applicable au cas d’espèce, de sorte que ce moyen doit être écarté.
Pour rapporter cette preuve de l’inexécution fautive de cet engagement contractuel, M. [T] [F] expose que M. [E] [H] a réalisé des opérations frauduleuses à son préjudice, alors qu’il n’était pas en mesure de prendre connaissance des relevés bancaires des comptes litigieux.
Il apparaît néanmoins que la preuve de l’absence d’accord de M. [T] [F] à ces opérations bancaires n’est pas rapportée, en ce qu’il n’est pas démontré que ce dernier n’avait pas accès à ses comptes bancaires ni qu’il n’avait pas connaissance de ces retraits, le seul fait d’affirmer que les relevés n’ont jamais été réceptionnés par l’intimé étant insuffisant à asseoir ce grief.
En outre, nombre des opérations litigieuses l’ont été antérieurement à la conclusion du contrat dénoncé.
Enfin, ces agissements sont reprochés à M. [E] [H] et non à la Sas [F], de sorte que ceux-ci ne peuvent, à eux seuls, justifier la résiliation d’un engagement contractuel avec la société.
Il apparaît en effet que n’est pas allégué ni démontré de manquement de ladite société dans l’exécution de ses obligations contractuelles consistant en la gestion et la commercialisation des droits d’image et la gestion des relations publiques du joueur.
Ainsi les manquements contractuels développés au soutien de l’envoi de la lettre du 12 mai 2014 ne sont pas démontrés, étant relevé par ailleurs que la rupture des relations de confiance avec le coactionnaire et certes président, ne caractérise pas un manquement.
Il convient donc d’infirmer le jugement en ce qu’il a jugée fondée la résiliation unilatérale du contrat par M. [T] [F].
Sur la demande tendant au prononcé de la résolution du contrat de licence aux torts de M. [T] [F]
La résolution sollicitée par la Sas [F] Company peut être prononcée sur le fondement des mêmes dispositions de l’article 1184 ancien du code civil à la condition de la démonstration de l’inexécution de ses engagements contractuels par le cocontractant.
Au cas d’espèce, la Sas [F] Company, pour solliciter reconventionnellement le prononcé de la résolution du contrat et la condamnation de M. [T] [F] à lui régler des dommages et intérêts, se fonde sur l’article 3.3 ‘Exclusivité du contrat de licence’, aux termes duquel le concédant s’est interdit de consentir des droits sur son nom et/ou son image à d’autres sociétés et s’est interdit d’exploiter directement ces mêmes droits de façon concurrente.
Il est justifié, et au demeurant non contesté, puisque la résiliation unilatérale du contrat de licence par le joueur a été jugée non valable, que M. [T] [F] a conclu seul avec la société Adidas un contrat de collaboration, alors que des discussions étaient en cours par le biais de la Sas [F] Company avec la société Nike France, cette dernière ayant par conséquent renoncé au partenariat envisagé.
Il est par ailleurs établi que M. [T] [F] a constitué le 3 mars 2015 la Sas [X] dont l’objet social est identique à celui de la Sas [F] Company.
Ces deux faits contreviennent aux stipulations contractuelles citées plus avant et leur importance, ainsi que l’atteinte causée à l’essence même du contrat, justifie que sa résolution en soit prononcée, ouvrant ainsi le droit à la Sas [F] de réclamer des dommages et intérêts à M. [T] [F] sous réserve de rapporter la preuve des préjudices dont il est demandé réparation.
Il apparaît, à l’observation des discussions inachevées avec la société Nike France, que la Sas [F] a subi la perte certaine d’une chance moyenne de parvenir à la signature de ce contrat, que la cour estime justement réparée par l’allocation d’une somme de 40 000 euros, à titre de dommages et intérêts.
Il n’est en revanche pas démontré l’existence d’un préjudice moral distinct du préjudice financier ci-avant indemnisé, la Sas [F] sera donc déboutée de cette dernière demande.
Sur les frais du procès
Succombant, M. [T] [F] sera condamné aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Il sera par ailleurs condamné à régler la somme de 5 000 euros à la Sas [F] Company en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière civile et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré en ce qu’il a rejeté l’irrecevabilité soutenue par la Sas [F] Company de la défense de M. [T] [F] fondée sur le dol, dit que le contrat de licence n’est affecté ni d ‘un dol, ni d ‘un vice de perpétuité et débouté la Sas [F] Company de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,
L’infirme pour le surplus des dispositions soumises à la cour ;
Statuant à nouveau,
Dit infondée la résiliation unilatérale du contrat par M. [T] [F] ;
Prononce la résiliation du contrat de licence du 16 octobre 2013 aux torts de M. [T]
[F] ;
Condamne M. [T] [F] à régler à la Sas [F] Company, la somme de 40 000 euros, au titre du préjudice financier consécutif à l’inexécution de son engagement contractuel ;
Y ajoutant,
Condamne M. [T] [F] aux entiers dépens de première instance et d’appel ;
Condamne M. [T] [F] à régler à la Sas [F] Company la somme de 5 000 euros, en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT