Rupture anticipée : 14 septembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 23/00992

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Rupture anticipée : 14 septembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 23/00992
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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 2

ARRÊT DU 14 SEPTEMBRE 2023

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/00992 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CG5XO

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 14 Décembre 2022 -Président du TC de BOBIGNY – RG n° 2022R00221

APPELANTE

S.A.R.L. L’ETOILE K, RCS de Paris sous le n°514 178 375, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Emmanuelle FARTHOUAT – FALEK, avocat au barreau de PARIS, toque : G097

Assistée à l’audience par Me Fabienne MOUREAU-LEVY, avocat au barreau de PARIS,

INTIMEE

S.C.I. DEAL’S, RCS de Paris sous le n°537 486 193, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée et assistée par Me Henri ROUCH de la SELARL WARN AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0335

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 804, 805 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 Juin 2023, en audience publique, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous sein privé en date du 30 mai 2012, la société SCI Deal’s a donné à bail commercial à la société L’Etoile K, pour son activité d’organisation de réceptions -événementiel, un local d’environ 100 m² situé [Adresse 2] à [Localité 3] (Seine-Saint-Denis) . Le bail a été consenti pour une durée de neuf ans à effet du 1er juin 2012 pour se terminer le 31 mai 2021, moyennant un loyer annuel initial de 6.000 euros hors taxes et hors charges et une provision sur charges de 150 euros par mois.

Ce bail a fait l’objet d’une résiliation anticipée à effet du 8 août 2021.

Par acte du 24 mai 2022, la société SCI Deal’s a assigné la société L’Etoile K devant le juge des référés du tribunal de commerce de Bobigny pour la voir condamner au paiement des sommes provisionnelles de 4.983,40 euros TTC au titre des loyers et charges restant impayés et de 498,34 euros au titre de la clause pénale, et d’une indemnité de 5.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

En réponse, la société Deal’s a conclu à la nullité de l’assignation, à titre subsidiaire au dessaisissement au profit du tribunal judiciaire de Bobigny pour connexité, à titre plus subsidiaire encore au sursis à statuer jusqu’à la décision du juge des référés du tribunal judiciaire de Bobigny sur la désignation d’un mandataire pour la société Deal’s. A défaut, elle a demandé qu’il soit dit n’y avoir lieu à référé, se prévalant de contestations sérieuses tant sur le principe que sur le quantum de la créance revendiquée par le bailleur à son encontre.

Par ordonnance du 14 décembre 2022, le juge des référés du tribunal de commerce de Bobigny a :

– débouté la société L’Etoile K de toutes ses demandes, fins et conclusions,

– ordonné à la société L’Etoile K de payer à la SCI Deal’s les sommes provisionnelles de 4.938,40 euros au titre des loyers et charges et de 498,34 euros au titre de la clause pénale, outre la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté les parties du surplus de leurs prétentions,

– dit que les entiers dépens sont à la charge de la société L’Etoile K,

– liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 41,98 euros TTC (dont 7 euros de TVA).

Par déclaration du 23 décembre 2022, la société L’Etoile K a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 12 juin 2023, elle demande à la cour de :

– la juger recevable et bien fondée en son appel,

– débouter la société Deal’s de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

– infirmer l’ordonnance de référé déférée en ce qu’elle a ordonné à la société L’Etoile K de payer à la SCI Deal’s les sommes de 4.983,40 euros au titre des loyers et charges, 498,34 euros au titre de la clause pénale et 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau,

– juger que l’intégralité des demandes formées par la SCI Deal’s sont sérieusement contestables,

– débouter la SCI Deal’s de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

– dire n’y avoir pas lieu à référé,

– condamner la SCI Deal’s à lui payer la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la SCI Deal’s aux entiers dépens de la procédure.

En substance, la société L’Etoile K soutient que l’action formée par la société Deal’s constitue une mesure de rétorsion à sa propre action engagée sur le fond pour avoir paiement de l’indemnité de rupture anticipée de son bail commercial, alors que la créance invoquée se heurte à plusieurs contestations sérieuses tenant à :

– l’inexactitude des comptes présentés par la société Deal’s, la société L’Etoile K ayant versé depuis le mois de janvier 2017 la somme totale de 62.293,10 euros et non celle de 44.654 euros dont se prévaut la bailleresse,

– le défaut de justificatifs des charges dont il est demandé le paiement au titre de la taxe foncière, charges ‘syndic’ et charges EDF,

– l’absence de clé de répartition des charges locatives,

– l’impossibilité pour le locataire de réclamer le remboursement des provisions sur charges faute de régularisation annuelle des charges locatives,

– la prescription des sommes sollicitées de janvier à mai 2017,

– la compensation légale qui s’opère entre la créance revendiquée par la société Deal’s et celle de la société L’Etoile K au titre de l’indemnité de résiliation anticipée du bail commercial,

– l’inexactitude du calcul de l’indexation des loyers quant à la nature de l’indice appliqué et à la date de l’indexation.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 6 juin 2023, la société Deal’s demande à la cour de :

– considérer l’appel comme non fondé et injustifié ;

En conséquence,

– confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance entreprise ;

En conséquence,

– condamner la société L’Etoile K à lui payer :

4.983,40 euros au titre des sommes dues en vertu du bail,

498,34 euros au titre de la clause pénale,

5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Y ajoutant,

– condamner la société L’Etoile K à lui verser, au titre de l’article 700 du code de procédure civile dans le cadre de la procédure d’appel, la somme de 5.000 euros ;

– condamner la société L’Etoile K aux entiers dépens de la procédure.

En substance, l’intimée fait valoir que son action se limite à demander le paiement d’un arriéré de charges locatives en exécution du bail résilié ; que l’action de la locataire en paiement d’une indemnité de résiliation anticipée du bail commercial est indifférente, la créance de la bailleresse étant certaine liquide et exigible alors que la créance de la locataire n’est qu’éventuelle ; qu’elle sollicite paiement des charges récupérables à hauteur de 10% de la surface louée conformément au bail (le local loué à la société L’Etoile K étant de 100 m² dans un immeuble de 1000 m² comptant trois lots) ; qu’aucune contestation n’a été adressée par la locataire à réception de la mise en demeure qui lui a été adressée le 8 avril 2022 ; que la demande n’est pas prescrite au titre de l’année 2017 alors que les charges de copropriété, taxe foncière et charges EDF ne sont connues du bailleur qu’en 2018 ; qu’il est bien justifié de toutes les charges récupérables sur la période de 2017 à 2021 par la production des comptes de copropriété, du grand livre des comptes généraux s’agissant de la taxe foncière, du grand livre auxiliaire s’agissant des charges EDF.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions susvisées conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

L’article 873 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le président du tribunal de commerce peut, en référé, accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

Le montant de la provision en référé n’a d’autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée.

Une contestation sérieuse est caractérisée lorsque l’un des moyens de défense opposés aux prétentions du demandeur n’apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

En l’espèce, sur la base d’un décompte produit en pièce 6, la société Deal’sollicite le paiement par la société L’Etoile K d’une provision de 4.983,40 euros correspondant au solde que celle-ci resterait devoir, au terme du bail commercial, pour les années 2017 à 2021, tant au titre des loyers que des charges (de copropriété, taxes foncières et consommation EDF).

Il est ainsi réclamé la somme totale de 29.415,14 euros au titre des loyers (indexés chaque année civile avec indication de l’indice d’indexation), celle de 19.3892,30 euros au titre des charges (dont le montant total annuel est mentionné pour chaque type de charges ainsi que la quote-part de la locataire), soit un total dû de 48.807,44 euros duquel est déduite la somme de 44.654,61 euros correspondant aux paiements effectués par la société L’Etoile K sur la période considérée, un solde débiteur de 4.152,83 euros HT soit4.983,40 euros TTC en résultant.

Or il apparaît, à l’examen des contestations émises par la société L’Etoile K et des pièces justificatives qu’elle produit, que ce décompte est sérieusement contestable sur deux points :

– le loyer a été indexé chaque année sur la base de taux d’indice correspondant à ceux du coût de la construction des immeubles à usage d’habitation (ICC), alors que le bail prévoit une indexation sur la base de l’indice Insee des loyers commerciaux (ILC), et cela au mois de janvier de chaque année alors que le bail prévoit une indexation au mois de juin (date de prise d’effet du bail) ;

– le montant des versements effectués par la locataire (44.654,61) n’est pas conforme au montant des versements effectués tel qu’il ressort du grand livre auxiliaire de la société Deal’s que la société L’Etoile K a pu se procurer (pièce 22 intimée), se chiffrant sur ce document comptable à plus de 58.000 euros sur la période de janvier 2017 au 11 octobre 2021, le compte de la locataire étant créancier à cette date d’une somme de 2.347,46 euros, ce que confirme le compte de la société L’Etoile K (sa pièce 23).

Ainsi, et sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres contestations soulevées, la créance résiduelle dont la société Deal’s se prévaut à l’encontre de la société L’Etoile K apparaît sérieusement contestable pour ces deux motifs, et cela dans son entier quantum.

L’ordonnance entreprise sera donc infirmée en toutes ses dispositions et il sera dit n’y avoir lieu à référé.

Partie perdante, la société Deal’s sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d’appel et à payer à la société L’Etoile K la somme de 5000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

Infirme en toutes ses dispositions l’ordonnance entreprise,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de provision de la société SCI Deal’s,

Condamne la société SCI Deal’s aux entiers dépens de première instance et d’appel,

Condamne la société SCI Deal’s à payer à la société L’Etoile K, en application de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 5.000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d’appel,

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


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