Rupture anticipée : 11 janvier 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 22/03256

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Rupture anticipée : 11 janvier 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 22/03256
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/03256 – N° Portalis DBVH-V-B7G-ISWX

AV

TRIBUNAL DE COMMERCE DE NIMES

20 septembre 2022

RG:2020J350

S.A. DIAC

C/

S.A.R.L. SOLYTRAD

S.E.L.A.R.L. [G]

Grosse délivrée le 11 janvier 2023 à :

– Me REY

+MP

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

4ème chambre commerciale

ARRÊT DU 11 JANVIER 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de NIMES en date du 20 Septembre 2022, N°2020J350

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre,

Madame Claire OUGIER, Conseillère,

Madame Agnès VAREILLES, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier, lors des débats et Madame Isabelle DELOR, Greffière, lors du prononcé de la décision.

DÉBATS :

A l’audience publique du 01 Décembre 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 11 Janvier 2023.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

MINISTÈRE PUBLIC :

A qui le dossier a été communiqué et qui a présenté ses observations écrites le 22 novembre 2022, lesquelles ont été transmises aux avocats constitués.

APPELANTE :

S.A. DIAC prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Philippe REY de la SCP REY GALTIER, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉES :

S.A.R.L. SOLYTRAD prise en la personne de son représentant légal en exercice, société actuellement domiciliée [Adresse 6],

assignée à étude d’huissier

[Adresse 4]

[Localité 3]

n’ayant pas constitué avocat

S.E.L.A.R.L. [G] Es qualités de « Mandataire judiciaire » de la « SARL SOLYTRAD », en la personne de Me [G] [V]

assignée à personne habilitée

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

n’ayant pas constitué avocat

ARRÊT :

Arrêt rendu par défaut, prononcé publiquement et signé par Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, le 11 Janvier 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Vu l’appel interjeté le 7 octobre 2022 par la SA DIAC à l’encontre du jugement prononcé le 20 septembre 2022 par le tribunal de commerce de Nîmes, dans l’instance n°2020J350,

Vu la requête déposée le 17 octobre 2022 devant le premier président de la cour d’appel de Nîmes par la SA Diac afin de se voir autoriser à assigner à jour fixe la SARL Solytrad et Maître [V] [G], mandataire judiciaire

Vu l’ordonnance du 10 novembre 2022 du premier président de la cour d’appel de Nîmes autorisant la SA Diac à faire délivrer une assignation à jour fixe à la SARL Solytrad et à Maître [V] [G] pour l’audience du 1er décembre 2022,

Vu les assignations d’avoir à comparaître à jour fixe devant la cour d’appel de Nîmes à l’audience du 1er décembre 2022, délivrées à la SARL Solytrad et la SELARL [G] [V], par actes du 8 novembre 2022, contenant signification des conclusions de l’appelante, et du bordereau de pièces qui y est annexé,

Vu les conclusions du ministère public du 22 novembre 2022, notifiées aux parties le même jour,

Par acte sous signature privée du 7 mars 2018, la SA Diac (le crédit bailleur), société de financement du constructeur Renault et de ses filiales, a consenti à la SARL Solytrad (le preneur), société nîmoise de maçonnerie générale et de gros oeuvre en bâtiment, un contrat de crédit-bail portant sur un véhicule Renault Kangoo Express GD Confort Energy DCI 90 d’une valeur de 13 014,09 euros.

Le contrat a été conclu pour une durée de 36 mois, moyennant un loyer mensuel de 273,77 euros à compter du 19 mars 2018 jusqu’au 15 février 2021, assorti d’une option d’achat au 12 mars 2021 pour un montant de 9 172,86 euros.

Par jugement du 22 mai 2018, le tribunal de commerce de Nîmes a ouvert une procédure de sauvegarde à l’égard du preneur et a nommé Maître [V] [G], en qualité de mandataire judiciaire.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 28 mai 2019, le crédit bailleur a indiqué au mandataire judiciaire que le preneur était à jour du paiement de ses loyers.

Le même jour, le crédit bailleur a interrogé le preneur sur ses intentions quant à la poursuite du contrat.

Le 5 juin 2019, le mandataire judiciaire a adressé au crédit bailleur copie du courrier envoyé au preneur dans lequel il indiquait ne pas s’opposer à la poursuite du contrat si celui-ci s’avérait nécessaire à la poursuite de l’exploitation.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 juin 2019, le preneur a informé le crédit bailleur de son souhait de poursuivre le contrat de crédit-bail.

A partir du 27 juin 2019, le crédit bailleur a adressé au preneur et à son mandataire judiciaire des relances et des mises en demeure d’avoir à payer des arriérés de loyers échus.

Par courrier daté du 3 août 2020 dont le preneur a accusé réception le 6 août 2020, le crédit bailleur l’a informé que, faute de règlement dans un délai de huit jours, le contrat de crédit-bail serait résilié.

Par requête du 8 septembre 2020, le crédit bailleur a saisi le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nîmes aux fins de se voir autoriser à l’appréhension du véhicule, objet du contrat de crédit-bail.

Par ordonnance du 16 septembre 2020, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nîmes a ordonné au preneur de restituer le véhicule au crédit bailleur.

Par acte du 21 octobre 2020, cette ordonnance a été frappée d’opposition par le preneur.

Par exploit du 2 décembre 2020, le crédit bailleur a saisi le tribunal de commerce de Nîmes aux fins de voir condamner le preneur au paiement de la somme de 10 294,99 euros, avec intérêts au taux contractuel à compter du 26 novembre 2020, et de lui voir ordonner d’avoir à restituer le véhicule, sous astreinte.

Par jugement du 20 septembre 2022, le tribunal de commerce de Nîmes a, au visa des articles 73 à 91 et 96 du code de procédure civile, des articles L. 622-13, L. 622-17 et R. 622-13 du code de commerce:

-Déclaré recevable l’exception d’incompétence matérielle soulevée in limine litis par la SARL Solytrad

-S’est déclaré incompétent pour connaître des demandes formées par la SA Diac à l’encontre de la SARL Solytrad

-Renvoyé la SA Diac à se pourvoir devant le juge commissaire

-Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

-Rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires

-Rappelé le principe de l’exécution provisoire de droit attaché à la présente décision;

-Condamné la SA Diac aux dépens de l’instance, liquidés et taxés à la somme de 95,30 euros, en ce non compris le coût de la citation introductive d’instance, le coût de la signification de la décision, ainsi que tous autres frais et accessoires.

Le 7 octobre 2022, la SA Diac a interjeté appel de cette décision aux fins de la voir réformer en toutes ses dispositions.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, l’appelante demande à la cour de :

Accueillant l’appel en la forme,

Au fond,

-Le déclarer bien fondé

Quoi faisant,

-Réformer la décision querellée

En conséquence,

-Déclarer irrecevable l’exception d’incompétence matérielle retenue par le premier juge

-Faire droit de plus fort aux demandes de la SA Diac

Tenant les dispositions de l’article 1353 du code civil et les articles 12-1 et 12-2 du contrat

-Condamner la SARL Solytrad à payer à la SA Diac la somme principale de 10 294,99 euros, avec intérêts au taux contractuel à compter du 26 novembre 2020, date du décompte produit aux débats, jusqu’au parfait paiement,

Tenant les dispositions de l’article R. 222-14 du code des procédures civiles d’exécution,

-Ordonner à la requise d’avoir à restituer le véhicule, sous astreinte de 155 euros par jour de retard, l’opposition formalisée s’avérant manifestement dilatoire

-Condamner la SARL Solytrad en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

-Dire et juger que, toujours sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, la requise sera tenue à procéder au remboursement de toutes sommes qui pourraient être mises à la charge de la requérante en application des dispositions du décret n°2001-212 du 8 mars 2001, modifiant le décret 96-1080 du 12 décembre 1996 portant fixation du tarif des huissiers de justice en matière civile et commerciale et relatif à la détermination du droit proportionnel de recouvrement ou d’encaissement mis à la charge des créanciers

-Ordonner la capitalisation des intérêts dus depuis au moins une année, selon les conditions de l’article 1343-2 du code civil

-Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir

-Condamner la SARL Solytrad aux entiers dépens.

L’appelante fait grief au tribunal de commerce d’avoir décliné sa compétence aux motifs que la résiliation de plein droit du contrat dont les échéances n’ont pas été honorées et dont la continuation avait été décidée, doit, pour prendre effet être constatée par le juge commissaire, en vertu des dispositions de l’article L622-13 du code de commerce; que la saisine du juge commissaire doit se faire dès lors qu’il résulte du défaut de paiement que l’administrateur ne dispose pas des fonds nécessaires pour remplir les obligations nées du contrat ; qu’il ne s ‘agit pas d’une simple faculté mais bien d’une obligation, même en cas de clause résolutoire contractuelle ; qu’à défaut pour la SA DIAC d ‘avoir saisi le juge commissaire aux fins de faire constater la résiliation de plein droit dont elle se prévaut, alors que cette constatation est indispensable à son efficacité, la résiliation prononcée le 14 aout 2020 doit être regardée comme étant non avenue; que la SA DIAC n’est, en conséquence, pas fondée à réclamer l’indemnité de résiliation anticipée afférente à un contrat qui n’a pas été régulièrement résilié ; qu’il en va de même s ‘agissant des loyers échus et restés impayés entre le 22 mai 2019 et le 15 juillet 2020, période pendant laquelle le contrat de crédit-bail s’est poursuivi avec l ‘accord du mandataire judiciaire, qui sont dus en tout état de cause et qui relèvent tout autant de la procédure visée à l’article L622-13 du code de commerce.

Pour s’opposer à l’exception d’incompétence matérielle retenue par le tribunal, l’appelante fait valoir :

-que la mise en demeure ayant entraîné la résiliation du contrat est postérieure à l’adoption du plan de sauvegarde de la débitrice

-que la procédure initiée en première instance concerne l’exécution du dit contrat et non la décision de poursuivre le contrat prise par les organes de la procédure

-que la créance résultant de la résiliation judiciaire, objet du présent litige, n’a pas vocation à être déclarée entre les mains du mandataire judiciaire, du fait de la sortie de la sauvegarde de la débitrice

-que la clause de résiliation de plein droit de la location après l’envoi d’une mise en demeure restée infructueuse, acceptée par les parties co-contractantes, produit pleinement ses effets, sans qu’il soit besoin que cette résiliation soit constatée par le juge commissaire

-que la possibilité de saisir le juge commissaire, en application de l’article R. 622-13 du code de commerce, pour qu’il constate la réalisation de plein droit d’un contrat continué n’est qu’une faculté offerte à tout intéressé qui est sans incidence sur les effets de cette résiliation

-qu’elle ne demandait pas au tribunal de constater la résiliation de plein droit du contrat mais la condamnation du locataire au paiement des loyers impayés entre le 15 février 2019 et le 15 juillet 2020, ainsi que de l’indemnité de résiliation,

-que le tribunal de commerce est bien compétent pour connaître de la demande et non le juge commissaire

-que l’intimée ne conteste ni le bien fondé des demandes, dans leur principe, ni leur quantum.

L’affaire a été communiquée au Ministère Public qui a conclu, par écrit, ‘à l’infirmation du jugement, la compétence du tribunal de commerce en l’espèce devant être retenue’, et s’en est rapporté sur le fond’.

MOTIFS

1) Sur la compétence matérielle du tribunal de commerce

Que ce soit dans ses conclusions ou même dans son exploit introductif d’instance, le crédit bailleur n’a pas saisi le tribunal de commerce d’une demande tendant à voir constater ou prononcer la résiliation du contrat de crédit bail conclu le 7 mars 2018 avec la société Solytrad.

Dès lors, le tribunal de commerce aurait du retenir sa compétence matérielle et se prononcer sur le bien fondé des demandes en paiement de l’indemnité de résiliation et en restitution de véhicule qui lui étaient soumises, en tirant toutes conséquences de la régularité ou non de la résiliation du contrat, invoquée par le bailleur, qui résulterait de la mise en oeuvre de la clause résolutoire, par la lettre recommandée de mise en demeure du 3 août 2020 dont le preneur a accusé réception le 6 août 2020.

Il n’est pas de bonne justice de donner à l’affaire une solution définitive en privant les parties du double degré de juridiction et il n’y a donc pas lieu à évocation, en application de l’article 88 du code de procédure civile.

L’instance devant les premiers juges étant suspendue, en application de l’article 80 du code de procédure civile, il convient de renvoyer l’affaire au tribunal de commerce de Nîmes pour poursuite de l’instance au fond, à l’initiative du juge, conformément à l’article 86 du code de procédure civile.

2) Sur les frais du procès

L’appelante ayant obtenu gain de cause en appel, l’intimée sera condamnée aux dépens de l’instance d’appel.

Il n’y a pas lieu de faire supporter à la débitrice le droit proportionnel de recouvrement ou d’encaissement que le législateur a entendu mettre à la charge du créancier.

L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en faveur de l’appelante.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Infirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,

Statuant à nouveau sur la compétence,

Dit que le tribunal de commerce de Nîmes est compétent pour connaître de l’action engagée par la SA Diac à l’encontre de la SARL Solytrad,

Dit n’y avoir lieu à évocation de l’affaire,

Renvoie l’affaire au tribunal de commerce de Nîmes qui en était initialement saisi pour que l’instance se poursuive à la diligence du juge

Condamne la SARL Solytrad aux entiers dépens d’appel,

Déboute la SA Diac de sa demande d’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de sa demande au titre du remboursement du droit proportionnel de recouvrement ou d’encaissement mis à la charge des créanciers

Dit que le greffier de la cour notifiera aussitôt le présent arrêt aux parties par lettre recommandée avec demande d’avis de réception conformément à l’article 87 du code de procédure civile, étant rappelé que le délai de pourvoi en cassation court à compter de cette notification.

Arrêt signé par Madame Christine CODOL, Présidente de chambre, et par Madame Isabelle DELOR, Greffiere.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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