Rupture anticipée : 11 janvier 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 21/02320

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Rupture anticipée : 11 janvier 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 21/02320
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MINUTE N° 24/23

Copie exécutoire à

– Me Joëlle LITOU-WOLFF

– Me Nadine HEICHELBECH

Le 11.01.2023

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRET DU 11 Janvier 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : 1 A N° RG 21/02320 – N° Portalis DBVW-V-B7F-HSP4

Décision déférée à la Cour : 26 Février 2021 par le Tribunal judiciaire de STRASBOURG – Greffe du contentieux commercial

APPELANTE :

S.A.S. GRENKE LOCATION

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Joëlle LITOU-WOLFF, avocat à la Cour

INTIMEE :

S.A.S. FONCIA AD IMMOBILIER venant aux droits de la société BERGE GESTION

prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

Représentée par Me Nadine HEICHELBECH, avocat à la Cour

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 modifié du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 Juin 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme PANETTA, Présidente de chambre, et M. ROUBLOT, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme PANETTA, Présidente de chambre

M. ROUBLOT, Conseiller

Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE

ARRET :

– Contradictoire

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

– signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS PROCÉDURE PRÉTENTIONS DES PARTIES :

 

Par acte sous seing privé des 02 et 12 février 2016, la société BERGE GESTION a pris en LOCATION auprès de la SAS GRENKE LOCATION, pour une durée de 63 mois et moyennant le paiement de 21 loyers trimestriels de 816 € HT, soit 979,20 € TTC, un logiciel GED EUKLES fourni par la société RESOLIA SOLUTIONS (ci-après ‘RESOLIA’).

 

Le matériel a été livré à la société BERGE GESTION le 08 février 2016 et facturé le même jour à la société GRENKE LOCATION pour un montant de 13.877,50 € HT, soit 16.653 € TTC.

 

Dès juin 2016, la société BERGE GESTION s’est plainte auprès de RESOLIA de dysfonctionnements du logiciel. Ces dysfonctionnements n’ont pas été contestés par RESOLIA, qui a pris à sa charge les loyers jusqu’au 1er trimestre 2017 inclus.

 

Par courrier avec accusé de réception des 9 février et 21 février 2017, la société BERGE GESTION a notifié respectivement à la SAS GRENKE LOCATION et RESOLIA la rupture du contrat.

 

              Le 13 juin 2017, la SAS GRENKE LOCATION a mis en demeure la société BERGE GESTION de régulariser le loyer exigible au 1er avril 2017, impayé, sous peine de résiliation du contrat.

 

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 juillet 2017, la SAS GRENKE LOCATION a notifié à la société BERGE GESTION la résiliation du contrat et l’a mise en demeure de restituer le matériel loué et de lui payer la somme de 14.258,14 €.

 

La société RESOLIA a été radiée du Registre du Commerce et des Sociétés à compter du 30 octobre 2017.

 

Le 30 juillet 2019, la société BERGE GESTION a fait l’objet d’une dissolution par voie de transmission à titre universel de son patrimoine à la société FONCIA.

 

Par assignation remise au greffe le 19 décembre 2017, la SAS GRENKE LOCATION a fait citer la société BERGE GESTION devant la chambre commerciale du Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG afin d’obtenir sa condamnation au paiement du loyer échu et de l’indemnité de résiliation anticipée et à la restitution du matériel loué.

 

Par une décision rendue le 26 février 2021, le Tribunal judiciaire de STRASBOURG a débouté la SAS GRENKE LOCATION de l’ensemble de ses demandes, condamné la SAS GRENKE LOCATION aux dépens et condamné la SAS GRENKE LOCATION à payer à la société FONCIA AD IMMOBILIER, venant aux droits de la société BERGE GESTION, une indemnité de 3.000 € en couverture de ses frais non compris dans les dépens.

  

Par déclaration faite au greffe en date du 28 avril 2021, la SAS GRENKE LOCATION a interjeté appel de la décision rendue le 26 février 2021 par le Tribunal judiciaire de STRASBOURG.

Par déclaration faite au greffe en date du 30 juin 2021, la SAS FONCIA AD IMMOBILIER, venant aux droits de la société BERGE GESTION, s’est constituée intimée.

Par ses dernières conclusions en date du 19 janvier 2022, auxquelles a été joint le bordereau de communication des pièces récapitulatif qui n’a fait l’objet d’aucune contestation, la SAS GRENKE LOCATION demande à la Cour :

– de dire bien fondé son appel

et Y faisant droit,

– d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes et l’a condamnée aux dépens et à payer 3.000 € au titre de l’article 700 du CPC,

et statuant à nouveau,

– de condamner la société BERGE GESTION aux droits de laquelle vient la SAS FONCIA A.D IMMOBILIER à lui payer la somme en principal de 14.258,14 € augmentée des intérêts au taux légal majoré de 5 points sur la somme de 14.238,40 € à compter du 19 juillet 2017, date de la dernière sommation extrajudiciaire,

– d’ordonner la capitalisation des intérêts échus depuis plus d’un an,

– de condamner la société BERGE GESTION aux droits de laquelle vient la société FONCIA A.D IMMOBILIER à lui restituer à ses frais l’ensemble du matériel, à savoir le programme GED EUKLES, sous astreinte comminatoire de 500 € par jour de retard après la signification du jugement à venir.

Subsidiairement,

Vu l’article 1217 du code civil,

– condamner la société BERGE GESTION aux droits de laquelle vient la société FONCIA A.D IMMOBILIER à lui payer la somme en principal de 14.258,14 € à titre de réparation des conséquences de l’inexécution de ses obligations.

Très subsidiairement,

Vu l’article 1147 du code civil,

– de condamner la société BERGE GESTION, aux droits de laquelle vient la société FONCIA A.D IMMOBILIER à lui rembourser le prix du matériel, soit la somme de 16.653 € majorée des intérêts au taux légal à compter de la décision à venir,

– de condamner la société BERGE GESTION aux droits de laquelle vient la société FONCIA A.D IMMOBILIER à lui verser la somme de 3.258,50 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

– débouter la société BERGE GESTION aux droits de laquelle vient FONCIA A.D IMMOBILIER de toutes conclusions contraires et de l’intégralité de ses fins, moyens et prétentions.

Sur l’appel incident subsidiaire de la société BERGE GESTION aux droits de laquelle vient FONCIA, la SAS GRENKE LOCATION demande à la Cour :

– de le dire mal fondé,

– en débouter la société BERGE GESTION,

– la condamner aux frais de l’appel incident

et en tout état de cause,

– condamner la société BERGE GESTION aux droits de laquelle vient la société FONCIA A.D IMMOBILIER aux entiers frais et dépens de toute la procédure ainsi qu’au paiement de la somme de 3.500 € en application de l’article 700 du CPC.

 

Par ses dernières conclusions en date du 21 octobre 2021, auxquelles a été joint le bordereau de communication de pièces récapitulatif qui n’a fait l’objet d’aucune contestation, la SAS FONCIA AD IMMOBILIER, venant aux droits de la société BERGE GESTION, demande à la Cour :

– de déclarer l’appel mal fondé,

– de confirmer le jugement entrepris,

– de débouter la SAS GRENKE LOCATION de ses demandes

A titre subsidiaire, vu l’article 1231-5 du code civil,

– de réduire à de plus justes proportion le montant de la clause pénale,

– de condamner la SAS GRENKE LOCATION à payer une indemnité de 2.000 € au titre de l’article 700 du CPC et aux entiers frais et dépens.

La Cour se référera aux dernières conclusions des parties pour plus ample exposé des faits, de la procédure et de leurs prétentions.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 18 Mai 2022.

L’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 15 Juin 2022.

MOTIFS DE LA DECISION :

Les premiers juges ont retenu, une interdépendance entre les contrats et sur la résiliation du contrat par la société BERGE GESTION, qu’en cas de faute grave de son cocontractant, la société BERGE GESTION avait le droit de mettre fin au contrat avec la société RESOLIA unilatéralement à ses risques et périls, ce qu’elle a fait auprès de RESOLIA.

La SAS GRENKE LOCATION indique qu’il n’y a pas d’interdépendance entre les différents contrats, contrairement à ce qu’indique le juge en première instance, que le premier contrat ne concerne que la SAS GRENKE LOCATION et RESOLIA, la société BERGE GESTION n’étant pas partie à cette convention, qu’elle intervient uniquement au niveau du financement et que son obligation principale consiste à louer le matériel qu’elle met à la disposition du locataire après l’avoir obtenu auprès d’un fournisseur.

Or, il est constant que par acte sous seing privé des 02 et 12 février 2016, la société BERGE GESTION a pris en location auprès de la SAS GRENKE LOCATION, pour une durée de 63 mois et moyennant le paiement de 21 loyers trimestriels de 816 € HT, soit 979,20 € TTC, un logiciel GED EUKLES fourni par la société RESOLIA SOLUTIONS et

que les contrats concomitants ou successifs qui s’inscrivent dans une opération incluant une location financière sont interdépendants et que sont réputées non écrites les clauses des contrats inconciliables avec cette interdépendance.

En conséquence, c’est à bon droit que les premiers juges ont retenu l’interdépendance liant les parties.

Les pièces versées aux débats par la société intimée démontrent qu’un contrat est bien intervenu entre la société BERGE GESTION et la société RESOLIA SOLUTIONS le 12 Février 2016, que les dysfonctionnements du matériel loué n’ont pas été contestés par la société RESOLIA SOLUTIONS qui a même accepté de rembourser des loyers dus à la SAS GRENKE LOCATION au titre des loyers trimestriels pour la période du 1er juillet 2016 au 31 décembre 2016 et au titre du premier trimestre 2017.

Par un mail du 03 Janvier 2017, en raison du dysfonctionnement du programme GED, la société BERGE GESTION a manifesté son souhait de mettre fin au contrat la liant à la société RESOLIA SOLUTIONS, confirmé par un courrier recommandé du 21 Février 2017.

La société BERGE GESTION a procédé à la résiliation du contrat, de façon unilatérale et à ses risques et périls.

La société BERGE GESTION a informé la SAS GRENKE LOCATION de cette résiliation par courrier recommandé en date du 09 Février 2017 et la SAS GRENKE LOCATION a répondu à ce courrier directement à la société BERGE GESTION par courrier du 13 Février 2017 et aux conseils de cette société par courrier du 13 Septembre 2017.

Il convient de relever que la société BERGE GESTION, ne pouvait pas avoir connaissance dès la livraison des dysfonctionnements du logiciel, dès lors qu’il n’a jamais été mis efficacement en ligne.

Cette situation doit s’analyser en un défaut de livraison et les dispositions contractuelles de l’article 3.5 du contrat de location financière trouvent à s’appliquer.

En application de ces dispositions, le locataire, du fait du transfert des droits du bailleur est en droit de solliciter la résolution du contrat de vente et il doit adresser copie de la résolution de vente au bailleur par lettre recommandée avec avis de réception.  Le contrat de location n’ayant plus d’objet, il cessera de produire effet étant devenu caduc.

La société BERGE GESTION a sollicité la résiliation du contrat, ce qui lui était possible, la résolution étant visée dans les dispositions précitées.

La société BERGE GESTION a respecté la procédure d’information prévue dans les dispositions contractuelles précitées.

Le contrat de location financière est en conséquence, caduc.

Pour répondre à l’argumentation de la SAS GRENKE LOCATION qui invoque l’absence dans la procédure de la société fournisseur du matériel, il y a lieu de constater qu’il n’est pas contesté que la société RESOLIA SOLUTIONS n’est pas partie dans la procédure.

En principe, l’anéantissement du contrat principal de prestation de service est un préalable nécessaire à la caducité du contrat de location et la résiliation du contrat de prestation de services ne peut être prononcée en l’absence de la société fournisseur et ce par application de l’article 14 du code civil.

Cependant, en l’espèce, il est démontré que la société RESOLIA SOLUTIONS a accusé réception le 25 Février 2017 de la lettre de résiliation adressée par la société BERGE GESTION et que la société RESOLIA SOLUTIONS n’a pas contesté cette résiliation que la Cour constatera sans qu’il convienne de la prononcer.

En effet, la société BERGE GESTION a procédé à la résiliation du contrat passé avec la société RESOLIA SOLUTIONS en invoquant, l’impossibilité d’utiliser le logiciel, ce qui constitue sans équivoque une application du principe selon lequel la gravité du comportement d’une partie à un contrat peut justifier que l’autre partie y mette fin de façon unilatérale à ses risques et périls, peu important les modalités formelles de résiliation contractuelle, la résiliation étant, en ce cas, acquise à la date de sa notification et s’imposant au juge, lequel peut seulement sanctionner a posteriori la rupture injustifiée par l’allocation de dommages-intérêts au titre de la responsabilité contractuelle du cocontractant qui en a pris l’initiative.

Ainsi, et au surplus, la résiliation du contrat liant les sociétés BERGE GESTION et RESOLIA SOLUTION étant intervenue, le contrat de location financière est en conséquence caduc.

C’est par des motifs pertinents que la Cour adopte, que les premiers juges n’ont pas admis les demandes présentées par la SAS GRENKE LOCATION, en remboursement du matériel et en dommages et intérêts.

Dans ces conditions, la décision entreprise sera confirmée.

Succombant, la SAS GRENKE LOCATION sera condamnée aux entiers dépens et déboutée de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

L’équité commande l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la SAS FONCIA AD IMMOBILIER, venant aux droits de la société BERGE GESTION.

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Confirme le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de Strasbourg le 26 Février 2021,

Y Ajoutant,

Condamne la SAS GRENKE LOCATION aux entiers dépens et la déboute de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SAS GRENKE LOCATION à verser à la SAS FONCIA AD IMMOBILIER, venant aux droits de la société BERGE GESTION, la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La Greffière : la Présidente :

 


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