Révocation judiciaire du gérant : à quelles conditions ?

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Révocation judiciaire du gérant : à quelles conditions ?
Ce point juridique est utile ?

La demande de révocation judiciaire du gérant ne revêt pas le caractère de mesure conservatoire, que le juge des référés peut prendre en cas de péril imminent.

Demande de désignation d’un administrateur provisoire

Par ailleurs, la demande de désignation d’un administrateur provisoire, lequel se substitue aux organes légaux des sociétés, suppose que soit démontrées cumulativement l’atteinte au fonctionnement normal des organes sociaux et une menace d’un péril imminent pesant sur les sociétés.

La mésentente entre associés

Or, la seule mésentente entre associés ou l’existence d’un conflit entre eux est insuffisant à justifier la désignation d’un administrateur si ce conflit ne paralyse pas le fonctionnement de la société.

Pour rappel, aux termes de l’article L 223-25 alinéa 2 du code de commerce, le gérant (d’une SARL) est révocable par les tribunaux pour cause légitime, à la demande de tout associé.

L’appréciation de la cause légitime permettant la révocation du gérant suppose un examen des éléments de faits, qui excède les pouvoirs du juge des référés.

Les conditions de l’urgence

L’article 872 du code de procédure civile énonce que dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

L’article 873 du même code dispose que le président peut dans les mêmes limites, et même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

En la cause, aucune paralysie ni péril imminent n’étaient démontrés par une associée.

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
 
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 1 – Chambre 3
ARRET DU 18 MAI 2022
 
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/17188 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CENBE
 
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 10 Septembre 2021 – Président du TC de PARIS – RG n° 2021029481
 
APPELANTE
 
Mme [C] [Z], née le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 5] (Algérie) de nationalité algérienne, domiciliée
 
[Adresse 2]
 
[Adresse 2]
 
Représentée par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS – AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055
 
Ayant pour avocat plaidant Me Grégory FENECH, avocat au barreau de PARIS, toque : D0331
 
INTIMES
 
M. [S] [B], née le [Date naissance 3] 1972 à [Localité 4] (06) de nationalité française, domiciliée
 
[Adresse 2]
 
[Adresse 2]
 
Représenté par Me Michael HADDAD de la SELAS HADDAD & LAGACHE, avocat au barreau de PARIS, toque : C2092
 
S.A.R.L. SILVER WAY MEDIA prise en la personne de son représentant légal ayant son siège social
 
[Adresse 2]
 
[Adresse 2]
 
immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de PARIS sous le numéro 508 072 477
 
S.A.S. SILVER WAY MEDIA INTERNATIONAL prise en la personne de son représentant légal ayant son siège social
 
[Adresse 2]
 
[Adresse 2]
 
immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de PARIS sous le numéro 520 508 151
 
S.A.S. SILVERWAY PARIS prise en la personne de son représentant légal ayant son siège social
 
[Adresse 2]
 
[Adresse 2]
 
immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de PARIS sous le numéro 832 542 377
 
Représentées par Me Anne-Marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0653
 
Ayant pour avocat plaidant Me Cédric CHAUMET de la SELARL NEXT STEP AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque :C2416
 
S.E.L.A.R.L. ASCAGNE prise en la personne de Maître [G] [P] ès qualités d’administrateur judiciaire de la société SILVER WAY MEDIA INTERNATIONAL ayant son siège social
 
[Adresse 2]
 
[Adresse 2]
 
S.E.L.A.R.L. FIDES prise en la personne de Maître [H] [U] ès qualités de mandataire judiciaire de la société SILVER WAY MEDIA INTERNATIONAL ayant son siège social
 
[Adresse 2]
 
[Adresse 2]
 
Représentées par Me Nicolas URBAN de l’AARPI ALMATIS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0560
 
COMPOSITION DE LA COUR :
 
L’affaire a été débattue le 28 Février 2022, en audience publique, rapport ayant été fait par Mme Edmée BONGRAND, Conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 905 du CPC, les avocats ne s’y étant pas opposés.
 
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
 
Patrick BIROLLEAU, Premier Président de chambre
 
Jean-Christophe CHAZALETTE, Président de chambre
 
Edmée BONGRAND, Conseillère
 
qui en ont délibéré,
 
Greffier, lors des débats : Meggy RIBEIRO
 
ARRÊT :
 
— CONTRADICTOIRE
 
— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
 
— signé par M. Patrick BIROLLEAU, Premier Président de chambre, et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.
 
***
 
La SARL Silver Way Media est détenue par moitié par Mme [C] [Z] et M. [S] [B]. Elle détient 100% du capital social de la SAS Silverway Paris et 98,62% du capital de la SAS Silver Way Media International(SWMI).
 
La société Silver Way Media International, créée en 2010 est une société spécialisée dans l’activité de post-production de films, vidéos et de manière générale toutes prestations relatives aux activités de techniques d’audiovisuel. Elle emploie plusieurs salariés. La société Silverway Paris, créée en 2017, intervient dans la post-production audiovisuelle.
 
M. [B] est le gérant de la SARL Silver Way Média et président des sociétés SWMI et Silverway Paris. Mme [Z] a été la salariée de la société SWMI de 2014 à janvier 2021.
 
Par jugement du 6 mai 2021, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société SWMI. La Selarl Ascagne en la personne de Me [G] [P] a été désignée en qualité d’administrateur avec mission d’assister la société SWMI et la Selarl Fides, prise en la personne de Me [H] [U], a été désignée en qualité de mandataire judiciaire.
 
Arguant d’une mésentente entre actionnaires et d’un conflit social, Mme [Z] a, par acte du 28 juin 2021, fait assigner en référé devant le tribunal de commerce de Paris M. [B], la société Silver Way Media, la société Silver Way Media International et la société Silverway Paris ainsi que les organes de la procédure collective de la société SWMI afin de voir révoquer M. [B] de ses fonctions de gérant de la société Silver Way Media et de voir nommer un administrateur provisoire des sociétés sus-nommées.
 
Par ordonnance contradictoire du 10 septembre 2021, le tribunal de commerce de Paris
 
a :
 
— débouté les parties de toutes leurs demandes,
 
— dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,
 
— rejeté toutes demandes plus amples ou contraires des parties,
 
— laissé à Mme [C] [Z] la charge des dépens,
 
— rappelé que la décision est de plein droit exécutoire par provision en application des dispositions de l’article 514 du code de procédure civile.
 
Par déclaration du 30 septembre 2021, Mme [Z] a interjeté appel de l’ensemble des chefs expressément énoncés de cette ordonnance.
 
Par conclusions du 21 février 2022, Mme [C] [Z] demande à la cour de :
 
vu les dispositions des articles 70, 872 et 873 du code de procédure civile et de l’article L 223-25 alinéa 2 du code de commerce :
 
— juger Mme [C] [Z] recevable et bien fondée en son appel,
 
— infirmer l’ordonnance rendue le 10 septembre 2021 par le président du tribunal de commerce de Paris en ce qu’il a :
 
* débouté les parties de toutes leurs demandes,
 
— dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,
 
— laissé à Mme [C] [Z] la charge des dépens,
 
— rejeté toutes demandes plus amples ou contraires de Mme [C] [Z] tendant notamment à voir :
 
” nommer tel administrateur provisoire qu’il lui plaira des sociétés Silver Way Media, Silver Way Média International et Silverway Paris jusqu’à ce que les organes sociaux desdites sociétés aient retrouvé un fonctionnement normal avec la mission suivante :
 
”gérer et administrer les sociétés Silver Way Media, Silver Way Média International et Silverway Paris avec les pouvoirs les plus étendus conformément aux statuts et aux dispositions légales et réglementaires en vigueur,
 
”représenter lesdites sociétés avec les pouvoirs de tout représentant légal, notamment au plan judiciaire et des engagements vis à vis des tiers,
 
”conclure tout contrat de travail avec Mme [C] [Z],
 
”réaliser une conciliation entre M. [S] [B] et Mme [C] [Z] en vue de mettre un terme à la crise sociale résultant de leur mésentente,
 
”convoquer des assemblées générales extraordinaires en vue de la désignation d’un nouveau président des sociétés Silver Way Media International et Silverway Paris, et l’autoriser à voter en qualité de représentant de la société Silver Way Media pour le candidat le plus apte à poursuivre la gestion des sociétés conformément à leur intérêt social,
 
”convoquer une assemblée générale en vue de la désignation d’un nouveau gérant de la société Silver Way Média ;
 
” l’autoriser à se faire assister de toute personne de son choix, en particulier de Mme [C] [Z],
 
” dire qu’il établira un compte rendu à la fin de sa mission,
 
” fixer la rémunération de l’administrateur provisoire et dire que cette rémunération sera supportée par M. [S] [B] et condamner celui-ci à régler la rémunération de l’administrateur et les frais résultant de l’administration provisoire,
 
” révoquer M. [S] [B] de ses fonctions de gérant de la société Silver Way Media,
 
” débouter M. [S] [B] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
 
” débouter les sociétés Silver Way Media, Silver Way Media International et Silverway Paris de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
 
” débouter la Selarl Ascagne, prise en la personne de Me [G] [P] et la Selarl Fides prise en la personne de Me [H] [U], de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile
 
” condamner M. [S] [B] au paiement de la somme de 10.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
 
” condamner M. [S] [B] aux dépens.
 
— confirmer l’ordonnance rendue le 10 septembre 2021 par le président du tribunal de commerce de Paris en ce qu’il a débouté M. [S] [B] et les sociétés Silver Way Media, Silver Way Media International et SilverWay Paris de l’ensemble de leurs demandes,
 
et statuant à nouveau :
 
— nommer tel administrateur qu’il lui plaira des sociétés Silver Way Media, SARL, Silver Way Media International, SAS , Silver Way Media International SAS et Silverway Paris, SAS, jusqu’à ce que les organes sociaux desdites sociétés aient retrouvé un fonctionnement normal avec la mission suivante:
 
* gérer et administrer les sociétés Silver Way Media, Silver Way Média International et Silverway Paris avec les pouvoirs les plus étendus conformément aux statuts et aux dispositions légales et réglementaires en vigueur,
 
* représenter lesdites sociétés avec les pouvoirs de tout représentant légal, notamment au plan judiciaire et des engagements vis à vis des tiers,
 
* convoquer des assemblées générales extraordinaires en vue de la désignation d’un nouveau président des sociétés Silver Way Media International et Silverway Paris, et l’autoriser à voter en qualité de représentant de la société Silver Way Media pour le candidat le plus apte à poursuivre la gestion des sociétés conformément à leur intérêt social,
 
* réaliser une conciliation entre M. [S] [B] et Mme [C] [Z] en vue de mettre un terme à la crise sociale résultant de leur mésentente,
 
* convoquer une assemblée générale en vue de la désignation d’un nouveau gérant de la société Silver Way Média, une fois la crise sociale terminée,
 
— l’autoriser à se faire assister de toute personne compétente de son choix,
 
— dire qu’il établira un compte rendu à la fin de sa mission,
 
— fixer la rémunération de l’administrateur provisoire et dire que cette rémunération sera supportée par M. [S] [B] et condamner celui-ci à régler la rémunération de l’administrateur et les frais résultant de l’administration provisoire,
 
— révoquer M.[S] [B] de ses fonctions de gérant de la société Silver Way Media,
 
— débouter M. [S] [B] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
 
— débouter les sociétés Silver Way Media, Silver Way Media International et Silverway Paris de toutes leurs demandes,
 
— condamner M.[S] [B] au paiement de la somme de 15.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
 
— condamner M.[S] [B] aux dépens de première instance et d’appel dont distraction au profit de Me Fréderic Ingold, avocat.
 
Pour solliciter la nomination d’un administrateur provisoire pour les sociétés Silver Way Média, SWMI et Silverway Paris, Mme [Z] expose notamment qu’une grave mésentente l’oppose à M. [B] lequel a nié ses droits d’associée en la privant d’informations notamment financières, a refusé malgré un accord verbal de la désigner cogérante de la société Silver Way Média puis présidente des sociétés filiales, l’a licenciée de manière abusive, son licenciement entraînant la perte de certains clients, ne respecte pas ses obligations de dirigeant quant aux réunions des assemblées générales et au dépôt des comptes annuels. Elle évoque une procédure pénale pour coups et blessures à l’encontre de M.[B]. Elle considère que les manquements de M. [B], en tant que dirigeant de ces sociétés exposent celles-ci à un péril imminent, leur pérennité étant incertaine et sont la cause d’un fonctionnement anormal des organes sociaux justifiant la nomination d’un administrateur judiciaire.
 
Elle soutient pouvoir solliciter la révocation de M. [B] de ses fonctions de gérant de la société Silver Way Media qui est une SARL sur le fondement de l’article L 223-5 alinéa 2 du code du commerce, que cette mesure de révocation peut être prononcée par le juge des référés lequel peut prendre toutes les mesures que justifient l’existence d’un différend et que l’urgence commande.
 
Elle affirme que l’urgence est caractérisée compte tenu des multiples procédures devant le conseil de prud’hommes, des violences physiques et du harcèlement moral de M. [B] et de la perte de plusieurs clients ayant conduit à la cessation de paiement d’une des filiales.
 
Par conclusions du 23 février 2022, M. [B] demande à la cour de :
 
vu les dispositions des articles 1103 et 1104 du code civil,
 
vu les dispositions des articles L 227-5 et L 227-9 du code de commerce,
 
vu les statuts
 
in limine litis
 
sur la compétence du juge des référés :
 
— confirmer l’ordonnance de référé en date du 10 septembre 2021 en ce qu’elle a débouté Mme [C] [Z] de sa demande de révocation de M. [S] [B] de ses fonctions de gérant de la société Silver Way Media aux motifs que cette demande ne rentre pas dans les pouvoirs du juge des référés,
 
sur le fond
 
— confirmer l’ordonnance en date du 10 septembre 2021 en toutes ses dispositions,
 
en conséquence
 
— débouter Mme [C] [Z] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
 
— condamner Mme [C] [Z] à verser à M. [S] [B] la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
 
— condamner Mme [C] [Z] aux entiers dépens.
 
Il expose qu’il n’y a pas de fondement juridique à sa révocation en qualité de président des sociétés Silver Way Media International et SilverWay Paris qui sont toutes les deux des sociétés par actions simplifiées.
 
Il conteste s’être rendu coupable d’une quelconque violence physique ou morale à l’encontre de Mme [Z] et précise qu’aucune décision définitive n’est intervenue sur la plainte déposée pour ce motif par Mme [Z]. Il rappelle avoir été lui-même victime de violences physiques par Mme [Z] en 2020, médicalement constatées.
 
Il souligne que le licenciement de Mme [Z], dont la procédure est parfaitement régulière, n’a pas été considéré à ce jour comme sans cause réelle et sérieuse.
 
Il affirme qu’il n’existe aucun motif justifiant la désignation d’un administrateur judiciaire car les sociétés ont un fonctionnement normal, que les assemblées générales des sociétés SWMI et Silverway Paris sont tenues, que Mme [Z] n’a jamais sollicité la tenue d’une assemblée générale pour la société Silver Way Média qui est une société holding sans aucune activité à associé unique, que les comptes annuels sont déposés.
 
Il conteste sa prétendue incapacité à gérer les sociétés ou à remplir ses obligations d’employeur.
 
Par conclusions du 24 février 2022, la société Silver Way Media, la société Silverway Paris et la société Silver Way Media International demandent à la cour de :
 
vu les articles 872 et 873 du code de procédure civile,
 
vu l’article L 233-25 du code de commerce,
 
— recevoir les sociétés Silver Way Média, Silverway Paris et Silver Way Media International en leurs demandes, fins et conclusions,
 
les déclarant bien fondés :
 
in limine litis :
 
— se déclarer incompétent pour statuer sur une demande de révocation de M. [S] [B] en qualité de gérant de la société Silver Way Media,
 
— confirmer l’ordonnance de référé du 10 septembre en ce qu’elle a débouté Mme [Z] de sa demande de révocation de M. [S] [B] en qualité de gérant de la société Silver Way Media aux motifs de l’incompétence du juge des référés,
 
A titre principal,
 
— confirmer dans toutes ses dispositions l’ordonnance rendue le 10 septembre 2021 par le président du tribunal de commerce de Paris,
 
en conséquence
 
— débouter purement et simplement Mme [C] [Z] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
 
— condamner Mme [C] [Z] à verser à la société Silverway Paris la somme de 7.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
 
— condamner Mme [C] [Z] aux entiers dépens de procédure.
 
Les sociétés évoquent à titre liminaire l’existence d’une relation amoureuse pendant plus de 20 ans entre M. [B] et Mme [Z] et la dégradation de leurs relations depuis 2019.
 
S’agissant de la demande de révocation de M. [B] de ses fonctions de gérant de la société Silver Way Media, ces sociétés soutiennent que cette demande ne peut prospérer sur le fondement des dispositions de l’article L223-25 du code de commerce devant le juge des référés qui n’a pas compétence pour prononcer une telle mesure qui relève du juge du fond.
 
Elles relèvent au surplus que les griefs avancés par Mme [Z] concernent les sociétés SWMI et Silverway Paris, que l’absence de tenue de l’assemblée générale et de dépôt des comptes annuels de la société Silver Way Media ne constitue pas un motif justifiant la révocation puisque cette société est une société holding purement financière qui n’a d’autre fonction que de porter les titres de ses filiales, que Mme [Z] n’a jamais rien contesté ni réclamé à ce titre alors qu’elle est associé à parts égales.
 
Elles affirment que les deux conditions permettant la désignation d’un administrateur judiciaire ne sont pas remplies puisqu’il n’est pas démontré que la mésentente entre les associés paralyse le bon fonctionnement des sociétés visées par la demande et qu’il existe un péril imminent.
 
Par conclusions du 11 janvier 2022, la Selarl Ascagne prise en la personne de Mme [G] [P], ès qualités d’administrateur judiciaire de la société SWMI et la société Fides, prise en la personne de Me [H] [U], ès qualités de mandataire judiciaire de la société SWMI demandent à la cour de constater qu’elles s’en rapportent à justice.
 
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.
 
MOTIFS
 
Mme [Z] sollicite simultanément la désignation d’un administrateur judiciaire pour les sociétés Silver Way Media, SWMI et Silverway Paris et la révocation de M. [B] de ses fonctions de gérant de la société Silver Way Média.
 
Mme [Z] fonde sa demande de révocation de M. [B] de ses fonctions de gérant de la SARL Silver Way Média sur les dispositions de l’article L 223-25 alinéa 2 du code de commerce et invoque l’urgence et le dommage imminent.
 
Aux termes de l’article L 223-25 alinéa 2 du code de commerce, le gérant (d’une SARL) est révocable par les tribunaux pour cause légitime, à la demande de tout associé.
 
L’appréciation de la cause légitime permettant la révocation du gérant suppose un examen des éléments de faits, qui excède les pouvoirs du juge des référés.
 
L’article 872 du code de procédure civile énonce que dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.
 
L’article 873 du même code dispose que le président peut dans les mêmes limites, et même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
 
En l’espèce, outre que la demande de révocation se heurte à une contestation sérieuse, la condition de l’urgence à la révocation de M. [B] de sa qualité de gérant de la société Silver Way Media fait défaut dès lors que la perte de clients invoquée au soutien de cette demande ainsi que la cessation des paiements et l’existence de procédures devant le conseil de prud’hommes ne concernent pas la société Silver Way Media mais la société SWMI et qu’il n’est pas établi que le grief de faits de violence de M. [B] , lesquels ne font l’objet d’aucune décision pénale définitive ainsi que celui du harcèlement ont un impact sur le fonctionnement de la société.
 
Par ailleurs, ne revêt pas le caractère de mesure conservatoire, que le juge des référés peut prendre en cas de péril imminent, la demande de révocation d’un gérant d’une société.
 
Il n’y a donc pas lieu à référé sur la demande de Mme [Z] tendant à obtenir la révocation de M. [B] de ses fonctions de gérant de la SARL Silver Way Media.
 
L’ordonnance entreprise sera confirmée en ce qu’elle a rejeté cette demande.
 
La désignation d’un administrateur provisoire, lequel se substitue aux organes légaux des sociétés, suppose que soit démontrées cumulativement l’atteinte au fonctionnement normal des organes sociaux et une menace d’un péril imminent pesant sur les sociétés.
 
La seule mésentente entre associés ou l’existence d’un conflit entre eux est insuffisant à justifier la désignation d’un administrateur si ce conflit ne paralyse pas le fonctionnement de la société.
 
La demande visant chacune des trois sociétés intimées, il convient en conséquence d’examiner la situation de chacune d’elles successivement.
 
A titre liminaire, il y a lieu de relever d’une part que Mme [Z] qui s’en prévaut de manière générale, ne démontre pas que les faits de violence et de harcèlement dont elle accuse M.[B], à les supposer établis, ce qui n’est pas le cas en l’espèce, aucune décision de justice n’étant versée à ce propos aux débats, ont un impact sur le fonctionnement normal de chacune de ses sociétés d’autre part l’ensemble des griefs sont postérieurs à l’année 2020.
 
S’agissant de la société Silver Way Media, le seul grief articulé par Mme [Z] est celui du défaut de tenue d’assemblée générale et de dépôt de comptes annuels.
 
Il n’est pas contesté que cette société est une société holding à associé unique, qui a pour seul objet la détention des titres de ses filiales les SAS Silverway Paris et SWMI.
 
Ainsi que l’a relevé le premier juge, Mme [Z] ne justifie pas avoir, en sa qualité d’associé, sollicité la tenue d’une assemblée générale ni avoir agi pour faire déposer les comptes de cette société dont elle est associée à parts égales avec M. [B].
 
Il n’est argué d’aucun péril imminent s’agissant de cette société.
 
Pour la société Silverway Paris, il ressort des pièces versées aux débats que les comptes ont été déposés en 2019, 2020, le délai pour le dépôt des comptes 2021 n’étant pas encore expiré à la date des débats, que les assemblées générales ont été tenues, que le chiffre d’affaire réalisé sur l’exercice clos au 31 décembre 2021 est de 1.837.613 euros en augmentation de 4,5% par rapport à l’exercice précédent avec un résultat bénéficiaire de 44.449 euros,
 
Aucune paralysie ni péril imminent ne sont donc démontrés par Mme [Z] pour cette société.
 
S’agissant de la société SWMI pour laquelle a été ouverte une procédure de redressement judiciaire, il est justifié du dépôt des comptes annuels 2019 et 2020, de la tenue des assemblées générales ainsi que du remboursement d’une partie de la dette de la société Silverway Paris auprès de la société soeur SWMI, comme convenu dans l’échéancier proposé par l’administrateur de la procédure collective.
 
Il n’est pas par ailleurs contesté que le tribunal de commerce de Paris a renouvelé la période d’observation du redressement judiciaire une première fois puis une seconde fois jusqu’à son terme le 6 mai 2022.
 
Il s’infère de ces éléments qu’aucun dysfonctionnement de la société SWMI n’est établi, que la poursuite du redressement judiciaire exclut l’existence d’un péril imminent.
 
En conséquence, l’ordonnance critiquée sera confirmée en ce qu’elle a rejeté la demande de désignation d’un administrateur judiciaire pour les sociétés Silverway Paris, SWMI et Silver Way Media.
 
Le sort des dépens et de l’indemnité de procédure a été exactement réglé par le premier juge.
 
Mme [Z], qui succombe, supportera la charge des dépens d’appel ainsi que celle d’une indemnité de procédure de 5.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de M. [B] et la somme de 2.000 euros à chacune des sociétés Silver Way Media, Silver Way Media International et Silverway Paris.
 
PAR CES MOTIFS
 
confirme l’ordonnance du 10 septembre 2021en toutes ses dispositions,
 
y ajoutant,
 
condamne Mme [C] [Z] aux dépens d’appel,
 
condamne Mme [C] [Z] à payer à M. [S] [B] la somme de 5.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et la somme de 2000 euros à chacune des sociétés Silver Way Media, Silver Way Media International et Silverway Paris.
 
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
 

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