Retransmissions non autorisées des compétitions sportives en ligne : Canal + c/ Google

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Retransmissions non autorisées des compétitions sportives en ligne : Canal + c/ Google
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En cas de rediffusion non autorisée de compétitions sportives pensez au référé dédié de l’article L. 333-10 du code du sport : “L’entreprise de communication audiovisuelle, dans le cas où elle a acquis un droit à titre exclusif, par contrat ou accord d’exploitation audiovisuelle, sur une compétition ou manifestation sportive, que cette compétition ou manifestation sportive soit organisée sur le territoire français ou à l’étranger, dès lors que ce droit est susceptible de faire l’objet ou fait l’objet de l’atteinte mentionnée audit premier alinéa.” peut saisir le président du tribunal judiciaire dans les conditions posées à l’alinéa premier de ce même article.

Le groupe Canal + a ainsi obtenu le blocage de nombreux sites internet accessibles depuis la France diffusant de manière quasi-systématique, gratuitement, en streaming et en direct, entre autres les courses de multiples compétitions (championnat MotoGP etc).

Aux termes de l’article L. 333-10 du code du sport, issu de la loi n°2021-1382 du 25 octobre 2021, “I.-Lorsqu’ont été constatées des atteintes graves et répétées au droit d’exploitation audiovisuelle prévu à l’article L. 333-1 du présent code, au droit voisin d’une entreprise de communication audiovisuelle prévu à l’article L. 216-1 du code de la propriété intellectuelle, dès lors que le programme concerné est constitué d’une manifestation ou d’une compétition sportive, ou à un droit acquis à titre exclusif par contrat ou accord d’exploitation audiovisuelle d’une compétition ou manifestation sportive, occasionnées par le contenu d’un service de communication au public en ligne dont l’objectif principal ou l’un des objectifs principaux est la diffusion sans autorisation de compétitions ou manifestations sportives […]”.

Selon l’article L. 333-10 du code du sport “ afin de prévenir ou de remédier à une nouvelle atteinte grave et irrémédiable à ces mêmes droits, le titulaire de ce droit peut saisir le président du tribunal judiciaire, statuant selon la procédure accélérée au fond ou en référé, aux fins d’obtenir toutes mesures proportionnées propres à prévenir ou à faire cesser cette atteinte, à l’encontre de toute personne susceptible de contribuer à y remédier.

Le président du tribunal judiciaire peut notamment ordonner, au besoin sous astreinte, la mise en œuvre, pour chacune des journées figurant au calendrier officiel de la compétition ou de la manifestation sportive, dans la limite d’une durée de douze mois, de toutes mesures proportionnées, telles que des mesures de blocage ou de retrait ou de déréférencement, propres à empêcher l’accès à partir du territoire français à tout service de communication au public en ligne, identifié ou qui n’a pas été identifié à la date de ladite ordonnance, diffusant illicitement la compétition ou manifestation sportive ou dont l’objectif principal ou l’un des objectifs principaux est la diffusion sans autorisation de la compétition ou manifestation sportive. Les mesures ordonnées par le président du tribunal judiciaire prennent fin, pour chacune des journées figurant au calendrier officiel de la compétition ou de la manifestation sportive, à l’issue de la diffusion autorisée par le titulaire du droit d’exploitation de cette compétition ou de cette manifestation.

Le président du tribunal judiciaire peut ordonner toute mesure de publicité de la décision, notamment son affichage ou sa publication intégrale ou par extraits dans les journaux ou sur les services de communication au public en ligne qu’il désigne, selon les modalités qu’il précise.”

Les conditions posées par l’article L. 333-10 du code du sport étant remplies, il sera fait droit aux demandes selon les modalités précisées au dispositif de la présente décision étant relevé qu’il apparaît proportionné de laisser un délai aux fournisseurs de services de moteur de recherche en ligne de trois jours maximum suivant la signification de la présente décision, pour mettre en œuvre la mesure de blocage ordonnée, le délai de trois jours étant décompté ici conformément aux dispositions des articles 641 et 642 du code de procédure civile.

Les mesures de blocage concerneront les noms de domaine mentionnés dans la liste annexée au présent jugement, et permettant l’accès aux sites litigieux, dont le caractère entièrement ou essentiellement illicite a été établi. Compte tenu de leur nécessaire subordination à un nom de domaine, les mesures s’étendront à tous les sous domaines associés à un nom de domaine mentionné dans cette liste.

Selon l’article L. 333-10 du code du sport in fine, “III.-Pour la mise en œuvre des mesures ordonnées sur le fondement du II portant sur un service de communication au public en ligne non encore identifié à la date de l’ordonnance, et pendant toute la durée de ces mesures restant à courir, le titulaire de droits concerné communique à l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique les données d’identification du service en cause, selon les modalités définies par l’autorité.

Lorsque les agents habilités et assermentés de l’autorité mentionnés à l’article L. 331-14 du code de la propriété intellectuelle constatent que le service mentionné au premier alinéa du présent III diffuse illicitement la compétition ou la manifestation sportive ou a pour objectif principal ou parmi ses objectifs principaux une telle diffusion, le président de l’autorité ou, en cas d’empêchement, tout membre du collège de l’autorité désigné par lui notifie les données d’identification de ce service aux personnes mentionnées par l’ordonnance prévue au II afin qu’elles prennent les mesures ordonnées à l’égard de ce service pendant toute la durée de ces mesures restant à courir.

En cas de difficulté relative à l’application du deuxième alinéa du présent III, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique peut demander aux services de se justifier. Sans préjudice d’une telle demande, le président du tribunal judiciaire peut être saisi, en référé ou sur requête, pour ordonner toute mesure propre à faire cesser l’accès à ces services.

L’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique adopte des modèles d’accord que les titulaires de droits mentionnés au I, la ligue professionnelle, l’entreprise de communication audiovisuelle ayant acquis un droit à titre exclusif et toute personne susceptible de contribuer à remédier aux atteintes mentionnées au même I sont invités à conclure. L’accord conclu entre les parties précise les mesures qu’elles s’engagent à prendre pour faire cesser d’éventuelles violations de l’exclusivité du droit d’exploitation audiovisuelle de la manifestation ou compétition sportive et la répartition du coût des mesures ordonnées sur le fondement du II.”

Les mesures concernant les services non encore identifiés doivent être demandées à l’ARCOM selon les modalités rappelées ci-dessus et au dispositif de la présente décision.

Résumé de l’affaire

La Société d’édition de Canal Plus (SECP) détient les droits d’exploitation audiovisuelle du championnat MotoGP et constate que de nombreux sites internet diffusent gratuitement en streaming les courses de diverses compétitions, y compris le MotoGP. Elle assigne les sociétés Google en vue d’obtenir des mesures pour empêcher l’accès à ces sites depuis la France. La SECP demande au tribunal d’ordonner à Google de déréférencer ces sites et de mettre en place des mesures de blocage. Google demande que seuls les sites identifiés par la SECP soient concernés par les mesures et que la SECP justifie des actions similaires sur d’autres plateformes. L’affaire est mise en délibéré pour le 26 juin 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

26 juin 2024
Tribunal judiciaire de Paris
RG n°
24/06764
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Annexe page 12

Le
Expédition exécutoire délivrée à :
– Maître Willemant, #J106
Copie certifiée conforme délivrée à :
– Maître Neri, #J25

3ème chambre
3ème section

N° RG 24/06764 –
N° Portalis 352J-W-B7I-C46PJ

N° MINUTE :

Assignation du :
7 mai 2024

JUGEMENT
rendu le 26 juin 2024
selon la procédure accélérée au fond
(article 481-1 du code de procédure civile)

DEMANDERESSES

Société GROUPE CANAL+
intervenante volontaire accessoire
[Adresse 2]
[Localité 3]

S.A.S. SOCIETE D’EDITION DE CANAL PLUS
[Adresse 2]
[Localité 3]

représentées par Maître Richard WILLEMANT de la SELEURL WILLEMANT LAW, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #J0106

DEFENDERESSES

Société GOOGLE IRELAND LIMITED
[Adresse 6]
[Localité 5], (IRLANDE)

Société GOOGLE LLC
[Adresse 1],
[Localité 4] (ETATS-UNIS)

représentées par Maître Alexandra NERI du PARTNERSHIPS HERBERT SMITH FREEHILLS PARIS LLP, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #J0025
Décision du 26 juin 2024
3ème chambre 3ème section
N° RG 24/06764 – N° Portalis 352J-W-B7I-C46PJ

COMPOSITION

Jean-Christophe GAYET, premier vice-président adjoint
assisté de Lorine MILLE, greffière,

DEBATS

A l’audience du 06 juin 2024, avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue le 26 juin 2024.

ORDONNANCE

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

La Société d’édition de Canal Plus (ci-après « SECP ») est une entreprise de communication audiovisuelle exploitant plusieurs chaînes de télévision, accessibles au public français, majoritairement par abonnement payant. Elle est notamment spécialisée dans la diffusion en direct et en différé de programmes sportifs, dont le FIM World Championship Grand Prix, dit « MotoGP ». Cet évènement a lieu du 28 novembre 2023 au 17 novembre 2024, la prochaine course ayant lieu le 28 juin 2024.

Les sociétés Google Ireland limited et Google LLC (ci-après « les sociétés Google ») sont des fournisseurs de services de moteur de recherche en ligne via le moteur de recherche « Google ».
Les droits d’exploitation audiovisuelle du championnat MotoGP sont détenus par la société Dorna sports, organisatrice de l’évènement, laquelle les a cédés à titre exclusif à la SECP, pour la diffusion de toutes les courses du MotoGP, les essais qualificatifs, les séances d’entrainement et les échauffements (pièce SECP n°13).

La SECP expose que de nombreux sites internet accessibles depuis la France diffusent de manière quasi-systématique, gratuitement, en streaming et en direct, entre autres les courses de multiples compétitions.

Les sites concernés sont accessibles par les noms de domaine suivants:
1.f1livestream.xyz
2.volkastream.xyz
3.allworldhd.net
4.elixx.xyz
5.crichd.vip
6.adisports.xyz
7.futbolenvivo.ru
8.centralareana.live
9.crvsport.ru
10.livetv.lol
11.freestreams-live1se.nu
12.livetv764.me
13.daddylivehd.icu
14.fan2.financefirefly.com
15.fan6.travelplanspro.com
16.top2.financefirefly.com
17.fan5.wellnessjourney.pro
18.streams.score808.football
19.ldcstreaming.info
20.totalsportek.soccer
21.f1livestream.xyz
22.primefoot.ru
23.streamonsport.ru
24.fiveyardlab.com
25.livetv765.me
26.godzcast.com
27.livetv768.me
28.claplivehdplay.ru

Dûment autorisées par une ordonnance du 25 avril 2024, la SECP a, par actes d’huissier délivrés le 07 mai 2024, fait assigner, selon la procédure accélérée au fond, les sociétés Google, devant le Président du tribunal judiciaire de Paris, siégeant à l’audience du 06 juin 2024 à 09 heures 15, en vue d’obtenir la mise en oeuvre, par ces dernières, en leur qualité de fournisseur de services de moteur de recherche en ligne, des mesures propres à empêcher l’accès par leurs utilisateurs à ces sites à partir du territoire français et à faire cesser les atteintes aux droits de leurs membres.

Aux termes de son assignation signifiée le 07 mai 2024 et réitérée oralement à l’audience, la SECP demande au tribunal, au visa des articles L. 333-10 du code du sport, L. 216-1 du code de la propriété intellectuelle et 481-1 du code de procédure civile, de :
– JUGER recevables et bien fondées les demandes de la SECP en vue de prévenir une nouvelle atteinte grave et irrémédiable au droit d’exploitation audiovisuelle et aux droits voisins dont elle est titulaire sur le championnat du monde de course automobile dénommé « FIM Grand prix world championship » ou « MotoGP » organisé par Dorna sports sociedad limitada, société de droit espagnol ;
En conséquence,
– ORDONNER aux sociétés Google, de mettre en œuvre toutes mesures de déréférencement propres à empêcher l’apparition sur le service du moteur de recherche « Google » de tout résultat en réponse à une requête émanant d’internautes à partir du territoire français, pointant vers les sites internet identifiés suivants accessibles à partir des noms de domaine ou sous-domaines suivants, et ce pour chacune des journées figurant au calendrier officiel de la compétition « MotoGP », jusqu’à la date de fin de la saison 2024, actuellement fixée au 17 novembre 2024 : […] ;
– ORDONNER aux sociétés Google de mettre en oeuvre les mesures précitées au plus tard dans un délai de trois jours à compter de la signification du jugement à intervenir ;
– ORDONNER aux sociétés Google de mettre en œuvre, toutes mesures de déréférencement propres à empêcher l’apparition sur le service du moteur de recherche « Google » de tout résultat en réponse à une requête émanant d’internautes à partir du territoire français, pointant vers les sites internet non encore identifiés à la date du jugement à intervenir, sur la base des données d’identification de ces sites qui leur seront, le cas échéant, notifiées par l’ARCOM, conformément à l’article L. 333-10 III du code du sport, et ce selon les modalités déterminées par l’ARCOM ;

– DIRE que les sociétés Google devront informer, sans délai, la SECP, par l’intermédiaire de leurs conseils, de la réalisation des mesures ordonnées à l’égard des sites identifiées précités et, le cas échéant, des difficultés qu’elles rencontreraient ;
– DIRE que la SECP devra informer les sociétés Google de toute modification de la date de fin de la saison 2024 de la compétition « MotoGP », à laquelle les mesures ordonnées prendront fin ;
– RAPPELER que, pendant toute la durée des mesures ordonnées, la SECP pourra communiquer à l’ARCOM les données d’identification de tout service de communication au public en ligne qui n’était pas été identifié à la date du jugement à intervenir, diffusant illicitement la compétition « MotoGP», ou dont l’objectif principal ou l’un des objectifs principaux est la diffusion sans autorisation de la compétition « MotoGP », et ce aux fins de mise en œuvre des pouvoirs conférés à l’ARCOM par les articles L. 333-10 III et L. 333-11 du code du sport;
– DIRE qu’aux fins d’actualisation des mesures ordonnées ou en cas de difficulté dans la mise en œuvre des mesures ordonnées à l’encontre des sites identifiés ou des sites non encore identifiés à la date du jugement à intervenir, la SECP pourra en tout état de cause saisir le Président du Tribunal judiciaire de Paris, sur requête ou en référé ;
– RAPPELER que le jugement à intervenir est de droit exécutoire à titre provisoire ;
– DIRE n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– DIRE que chaque partie conservera la charge de ses frais et dépens.

Par des conclusions d’intervention volontaire accessaire signifiées par voie électronique le 04 juin 2024, la société Groupe Canal + demande au tribunal de :
– DECLARER recevable son intervention volontaire accessoire ;
– FAIRE DROIT aux demandes de la SECP ;

Aux termes de leurs conclusions signifiées le 05 juin 2024 et réitérées oralement à l’audience du 06 juin 2024, les sociétés Google demandent au tribunal de :
– DONNER ACTE aux sociétés Google de ce qu’elles s’en remettent à justice concernant la demande de mesure de déréférencement propres à empêcher l’apparition sur le service du moteur de recherche Google de tout résultat en réponse à une requête émanant d’internautes à partir du territoire français, pointant vers des services de communication au public identifiés, accessibles à partir des noms de domaine et sous-domaines limitativement listés par la SECP ; à l’exclusion de tout autre domaine ou sous-domaine non listé, et sous réserve qu’elle réponde aux exigencesde cohérence et de systématicité ;
– LIMITER toute mesure de déréférencement éventuellement ordonné:
*s’agissant des services de communication au public identifiés, aux résultats pointant vers des pages Web accessibles sous les noms de domaine et sous-domaines limitativement listés par la SECP, à l’exclusion de tout autre domaine ou sous-domaine non listé ;
*s’agissant des services de communication au public non encore identifiés aux résultats pointant vers des noms de domaiou sous-domaines donnant effectivement accès à ces services, dûment signalés par la SECP à l’ARCOM avant la fin du championnat en cours de MotoGP, à l’exclusion de tout autre domaine ou sous-domaine ;
– PRECISER que les sous-domaines non listés dans l’assignation ou non signalés par la SECP à l’ARCOM ne sont pas visés par la mesure éventuellement ordonnée ;
– RAPPELER QUE, s’agissant des services de communication au public non encore identifiés, et conformément aux dispositions du III de l’article L. 333-10 du code du sport, la mesure éventuellement ordonnée ne pourra être mise en oeuvre que lorsque les agents habilités et assermentés de l’ARCOM auront constaté que chacun desdits services
* est bien accessible par l’intermédiaire d’un nom de domaine ou d’un sous-domaine dûment signalé par la SECP, à l’exclusion de tout autre domaine ou sous-domaine, et
* diffuse illicitement la compétition de MotoGP ou a pour objectif principal ou parmi ses objectifs principaux une telle diffusion,
et que le président de l’autorité ou, en cas d’empêchement, tout membre du collège de l’autorité désigné par lui, aura notifié lesdits noms de domaine ou sous-domaines aux sociétés Google afin qu’elles prennent les mesures ordonnées à l’égard des services non identifiés concernés pendant toute la durée de ces mesures restant à courir ;
– DIRE que, à première demande, la SECP devra justifier auprès des sociétés Google qu’elle a bien poursuivi l’exécution de mesures de déréférencement équivalentes visant le moteur de recherche Bing de la société Microsoft, ainsi que de mesures de blocage visant les fournisseurs d’accès à internet Free, SFR, Orange et Bouygues ;
– CONDAMNER la SECP à supporter les dépens de l’instance.

A l’issue de l’audience, l’affaire a été mise en délibéré au 26 juin 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

I- Sur la qualité à agir

Aux termes de l’article L. 333-10 du code du sport, “[…] 2° L’entreprise de communication audiovisuelle, dans le cas où elle a acquis un droit à titre exclusif, par contrat ou accord d’exploitation audiovisuelle, sur une compétition ou manifestation sportive, que cette compétition ou manifestation sportive soit organisée sur le territoire français ou à l’étranger, dès lors que ce droit est susceptible de faire l’objet ou fait l’objet de l’atteinte mentionnée audit premier alinéa.” peut saisir le président du tribunal judiciaire dans les conditions posées à l’alinéa premier de ce même article.

La société Dorna détient les droits exclusifs de diffusion audiovisuelle et de retransmission du MotoGP.

La société Dorna atteste avoir cédé à la SECP à titre exclusif les droits de transmission en direct de toutes les courses, essais qualificatifs, séances d’entrainement et échauffements du MotoGP 2022 (pièce SECP n°13).

En outre, la SECP et la société Groupe Canal +, intervenant volontaire, sont titulaires du droit voisin des entreprises de communication audiovisuelle prévu à l’article L. 216-1 du code de la propriété intellectuelle sur les programmes diffusés sur les chaînes : Canal+, Canal+ Cinéma, Canal+ Sport, Canal+ Family, Canal+ Séries et Canal+ Décalé.
En conséquence, la société Groupe Canal + est recevable en son intervention volontaire et la SECP en ses demandes.

II- Sur les atteintes aux droits

Aux termes de l’article L. 333-10 du code du sport, issu de la loi n°2021-1382 du 25 octobre 2021, “I.-Lorsqu’ont été constatées des atteintes graves et répétées au droit d’exploitation audiovisuelle prévu à l’article L. 333-1 du présent code, au droit voisin d’une entreprise de communication audiovisuelle prévu à l’article L. 216-1 du code de la propriété intellectuelle, dès lors que le programme concerné est constitué d’une manifestation ou d’une compétition sportive, ou à un droit acquis à titre exclusif par contrat ou accord d’exploitation audiovisuelle d’une compétition ou manifestation sportive, occasionnées par le contenu d’un service de communication au public en ligne dont l’objectif principal ou l’un des objectifs principaux est la diffusion sans autorisation de compétitions ou manifestations sportives […]”.

La SECP a fait dresser par huissier de justice plusieurs procès-verbaux de constat qui permettent d’établir que les sites accessibles depuis les adresses litigieuses, diffusent des compétitions ou manifestations sportives, notamment des courses automobiles, sur certaines desquelles la SECP atteste disposer d’un droit exclusif d’exploitation et/ou de droits voisins.

C’est ainsi que :
– Les 22 et 24 mars 2024, le site accessible à l’adresse , après redirection automatique vers les noms de domaine , , , et , diffusait les essais libres 1 et une course du Grand prix du Portugal du championnat MotoGP.
– Les 22 et 24 mars 2024, le site accessible à l’adresse , après redirection automatique vers le nom de domaine , diffusait les essais libres 1 et une course du Grand prix du Portugal du championnat MotoGP. Les images constatées comportaient le logo des chaînes Canal + Sport 360 et Canal +.
– Les 22 et 24 mars 2024, le site accessible à l’adresse , après redirection automatique vers les noms de domaine , , et , diffusait les essais et une course du Grand prix du Portugal du championnat MotoGP.
– Les 22 et 24 mars 2024, le site accessible à l’adresse diffusait les essais libres 1 et une course du Grand prix du Portugal du championnat MotoGP.
– Les 22 et 24 mars 2024, le site accessible à l’adresse diffusait les essais libres 1 et une course du Grand prix du Portugal du championnat MotoGP.
– Les 22 et 24 mars 2024, le site accessible à l’adresse , après redirection automatique vers les noms de domaine , , et , diffusait les essais libres 1 et une course du Grand prix du Portugal du championnat MotoGP.
– Les 22 et 24 mars 2024, le site accessible à l’adresse , après redirection automatique vers les noms de domaine et , diffusait les essais libres 1 et une course du Grand prix du Portugal du championnat MotoGP. Les images constatées comportaient le logo des chaînes Canal + Sport 360 et Canal +.
– Les 22 et 24 mars 2024, le site accessible à l’adresse diffusait les essais libres 1 et une course du Grand prix du Portugal du championnat MotoGP. Les images constatées comportaient le logo des chaînes Canal + Sport 360 et Canal +.
– Les 22 et 24 mars 2024, le site accessible à l’adresse diffusait les essais libres 1 et une course du Grand prix du Portugal du championnat MotoGP. Les images constatées comportaient le logo des chaînes Canal + Sport 360 et Canal +.
– Les 22 et 24 mars 2024, le site accessible à l’adresse diffusait les essais libres 1 et une course du Grand prix du Portugal du championnat MotoGP. Les images constatées comportaient le logo des chaînes Canal + Sport 360 et Canal +.
– Les 22 et 24 mars 2024, le site accessible à l’adresse , après redirection vers le nom de domaine , diffusait les essais libres 1 et une course du Grand prix du Portugal du championnat MotoGP.
– Les 08 et 22 mars 2024, le site accessible à l’adresse , après redirection vers les noms de domaine et , diffusait les essais libres 1du Grand prix du Qatar et les essais libres 1 du Grand prix du Portugal du championnat MotoGP. Le procès-verbal de constat dressé par l’ALPA (pièce SECP n°20-1) atteste que les images et le son sont identiques à ceux diffusés au même moment sur la chaîne Canal + Sport 360. Les flux vidéo proviennent de l’adresse .
– Les 08 et 10 mars 2024, le site accessible à l’adresse diffusait les essais libres 1du Grand prix du Qatar et une course du Grand prix du Portugal du championnat MotoGP. Les procès-verbaux de constat dressés par l’ALPA (pièces SECP n°20-2 et 20-3) attestent que les images et le son sont identiques à ceux diffusés au même moment sur les chaînes Canal + Sport 360. Les flux vidéo proviennent de l’adresse .

Les sites litigieux ont pour objectif principal la diffusion de compétitions sportives, notamment de courses, sur une partie au moins desquelles la SECP jouit d’un droit exclusif d’exploitation et/ou un droit voisin des entreprises de communication audiovisuelle.

Ils donnent accès à des données, qui ne sont pas des correspondances privées. Il s’agit donc de services de communication au public en ligne.

Il est, par ailleurs, observé que, bien que les sites énumérés soient majoritairement accessibles en langue anglaise, leur usage est néanmoins aisé pour des utilisateurs francophones.

Il ressort de l’ensemble de ces éléments que les différents sites accessibles par les noms de domaine susvisés portent des atteintes graves et répétées aux droits de la société demanderesse sur le championnat MotoGP, au moyen d’un service dont l’un des objectifs principaux est la diffusion sans autorisation de compétitions sportives.

***
Il est ainsi démontré de manière suffisamment probante que les sites litigieux, permettent aux internautes d’accéder, sans autorisation, à des manifestations et compétitions sportives sur lesquelles la SECP détient des droits exclusifs d’exploitation audiovisuelle et/ou un droit voisin des entreprises de communication audiovisuelle. Sont ainsi établies des atteintes graves et répétées au sens de l’article L. 333-10 du code du sport, ces atteintes étant commises au moyen de différents services dont l’un des objectifs principaux est la diffusion sans autorisation de compétitions sportives.

La SECP est donc fondée à solliciter la prescription de mesures propres à prévenir ou faire cesser la violation de ses droits sur le championnat MotoGP.

III- Sur les mesures sollicitées

Aux termes de l’article L. 333-10 du code du sport “ afin de prévenir ou de remédier à une nouvelle atteinte grave et irrémédiable à ces mêmes droits, le titulaire de ce droit peut saisir le président du tribunal judiciaire, statuant selon la procédure accélérée au fond ou en référé, aux fins d’obtenir toutes mesures proportionnées propres à prévenir ou à faire cesser cette atteinte, à l’encontre de toute personne susceptible de contribuer à y remédier.

II.-Le président du tribunal judiciaire peut notamment ordonner, au besoin sous astreinte, la mise en œuvre, pour chacune des journées figurant au calendrier officiel de la compétition ou de la manifestation sportive, dans la limite d’une durée de douze mois, de toutes mesures proportionnées, telles que des mesures de blocage ou de retrait ou de déréférencement, propres à empêcher l’accès à partir du territoire français à tout service de communication au public en ligne, identifié ou qui n’a pas été identifié à la date de ladite ordonnance, diffusant illicitement la compétition ou manifestation sportive ou dont l’objectif principal ou l’un des objectifs principaux est la diffusion sans autorisation de la compétition ou manifestation sportive. Les mesures ordonnées par le président du tribunal judiciaire prennent fin, pour chacune des journées figurant au calendrier officiel de la compétition ou de la manifestation sportive, à l’issue de la diffusion autorisée par le titulaire du droit d’exploitation de cette compétition ou de cette manifestation.

Le président du tribunal judiciaire peut ordonner toute mesure de publicité de la décision, notamment son affichage ou sa publication intégrale ou par extraits dans les journaux ou sur les services de communication au public en ligne qu’il désigne, selon les modalités qu’il précise.”

Les conditions posées par l’article L. 333-10 du code du sport étant remplies, il sera fait droit aux demandes selon les modalités précisées au dispositif de la présente décision étant relevé qu’il apparaît proportionné de laisser un délai aux fournisseurs de services de moteur de recherche en ligne de trois jours maximum suivant la signification de la présente décision, pour mettre en œuvre la mesure de blocage ordonnée, le délai de trois jours étant décompté ici conformément aux dispositions des articles 641 et 642 du code de procédure civile.

Les mesures de blocage concerneront les noms de domaine mentionnés dans la liste annexée au présent jugement, et permettant l’accès aux sites litigieux, dont le caractère entièrement ou essentiellement illicite a été établi. Compte tenu de leur nécessaire subordination à un nom de domaine, les mesures s’étendront à tous les sous domaines associés à un nom de domaine mentionné dans cette liste.

Selon l’article L. 333-10 du code du sport in fine, “III.-Pour la mise en œuvre des mesures ordonnées sur le fondement du II portant sur un service de communication au public en ligne non encore identifié à la date de l’ordonnance, et pendant toute la durée de ces mesures restant à courir, le titulaire de droits concerné communique à l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique les données d’identification du service en cause, selon les modalités définies par l’autorité.

Lorsque les agents habilités et assermentés de l’autorité mentionnés à l’article L. 331-14 du code de la propriété intellectuelle constatent que le service mentionné au premier alinéa du présent III diffuse illicitement la compétition ou la manifestation sportive ou a pour objectif principal ou parmi ses objectifs principaux une telle diffusion, le président de l’autorité ou, en cas d’empêchement, tout membre du collège de l’autorité désigné par lui notifie les données d’identification de ce service aux personnes mentionnées par l’ordonnance prévue au II afin qu’elles prennent les mesures ordonnées à l’égard de ce service pendant toute la durée de ces mesures restant à courir.

En cas de difficulté relative à l’application du deuxième alinéa du présent III, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique peut demander aux services de se justifier. Sans préjudice d’une telle demande, le président du tribunal judiciaire peut être saisi, en référé ou sur requête, pour ordonner toute mesure propre à faire cesser l’accès à ces services.

IV.-L’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique adopte des modèles d’accord que les titulaires de droits mentionnés au I, la ligue professionnelle, l’entreprise de communication audiovisuelle ayant acquis un droit à titre exclusif et toute personne susceptible de contribuer à remédier aux atteintes mentionnées au même I sont invités à conclure. L’accord conclu entre les parties précise les mesures qu’elles s’engagent à prendre pour faire cesser d’éventuelles violations de l’exclusivité du droit d’exploitation audiovisuelle de la manifestation ou compétition sportive et la répartition du coût des mesures ordonnées sur le fondement du II.”

Les mesures concernant les services non encore identifiés doivent être demandées à l’ARCOM selon les modalités rappelées ci-dessus et au dispositif de la présente décision.

IV – Sur les demandes reconventionnelles

En premier lieu les quatre premières demandes formulées au dispositif des conclusions des sociétés Google constituent en réalité des moyens au fond auxquels il a été répondu par les motifs ci-avant développés.

En second lieu, la demande tendant à “dire que, à première demande, la SECP devra justifier auprès des sociétés Google qu’elle a bien poursuivi l’exécution de mesures de déréférencement équivalentes visant le moteur de recherche Bing de la société Microsoft, ainsi que de mesures de blocage visant les fournisseurs d’accès à internet Free, SFR, Orange et Bouygues” vise des sociétés non parties à l’instance.

De plus, si les dispositions applicables aux mesures propres à prévenir ou à faire cesser une atteinte aux droits de propriété intellectuelle de la SCEP doit être proportionnnée, cette disposition, en ce qu’elle prévoit qu’elle peut être requise “à l’encontre de toute personne susceptible de contribuer à y remédier” n’implique pas nécessairement que le titulaire de droits ait à justifier auprès de l’une de ces personnes, en l’occurrence les sociétés Google, des mesures équivalentes qu’elle aurait sollicitées auprès d’autres opérateurs. Cette demande des sociétés Google sera, en conséquence rejetée.

La présente décision est exécutoire par provision et chaque partie conservera la charge de ses propres dépens et de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal,

Declare recevable l’intervention volontaire accessoire de la société Groupe Canal+ ;

Constate l’existence d’atteintes graves et répétées aux droits exclusifs de diffusion du FIM World Championship Grand Prix 2024 dont est titulaire la Société d’édition de Canal plus, commises au moyen de différents services de communication en ligne, dont l’un des objectifs principaux est la diffusion sans autorisation de compétitions sportives;

Ordonne en conséquence aux sociétés Google Ireland limited et Google LLC, de mettre en oeuvre, au plus tard dans un délai de trois jours suivants la signification de la présente décision, toutes mesures propres à empêcher, jusqu’à la date de fin de la saison 2024 du FIM World Championship Grand Prix actuellement fixée au 17 novembre2024, l’accès aux sites identifiés ci-dessus ainsi qu’aux sites non encore identifiés à la date de la présente décision, à partir du territoire français, y compris dans les collectivités, départements et régions d’outre-mer, ainsi que dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises, et/ou par leurs internautes sur ce territoire, par tout moyen efficace, et notamment par le déréférencement des sites accessibles par les noms de domaine et des sous-domaines associés dont la liste figure dans le tableau annexé à la présente ordonnance au format CSV exploitable et faisant partie de la minute ;

Precise que le délai de trois jours maximum prévus ci-dessus sera décompté conformément aux dispositions des articles 641 et 642 du code de procédure civile ;

Ordonne à la Société d’édition de canal plus d’informer dans les plus brefs délais les sociétés Google Ireland limited et Google LLC de toute modification de la date de la dernière course du FIM World Championship Grand Prix 2024, à laquelle les mesures ordonnées prendront fin ;

Dit que les sociétés Google Ireland limited et Google LLC devront informer la Société d’édition de Canal plus de la réalisation de ces mesures et, le cas échéant, des difficultés qu’elles rencontreraient ;

Dit qu’en cas de difficultés d’exécution dans la mise en place des mesures de déréférencement ou pour les besoins de l’actualisation des sites visés, la partie la plus diligente pourra saisir la juridiction, en référé ou sur requête ;

Dit que les sociétés Google Ireland limited et Google LLC pourront, en cas de difficultés, en référer au président du tribunal judiciaire statuant en référé, le cas échéant à heure indiquée, afin d’être autorisées à lever la mesure de blocage ;

Dit que la Société d’édition de Canal plus devra indiquer aux fournisseurs de services de moteur de recherche en ligne les noms de domaine dont elle aurait appris qu’ils ne sont plus actifs ou dont l’objet a changé afin d’éviter les coûts de déréférencement inutiles ;

Rappelle que pendant toute la durée des présentes mesures, la Société d’édition de Canal plus pourra communiquer à l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique les données d’identification de tout service de communication au public en ligne qui n’a pas encore été identifié à la date de la présente décision, diffusant illicitement les courses du FIM World Championship Grand Prix 2024, ou dont l’objectif principal ou l’un des objectifs principaux est la diffusion sans autorisation de courses du FIM World Championship Grand Prix 2024, aux fins de mise en œuvre des pouvoirs conférés à cette autorité par les articles L. 333-10 III et L. 333-11 du code du sport;

Rejette la demande reconventionnelle des sociétés Google Ireland Limited et Google LLC ;

Condamne chaque partie à payer ses propres dépens ;

Rejette les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Faite et rendue à Paris le 26 juin 2024

La greffièreLe président
Lorine MilleJean-Christophe Gayet

ANNEXE

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