Retombées nulles d’une publicité : la nullité du contrat retenue

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Retombées nulles d’une publicité : la nullité du contrat retenue

La société Je Rêve, qui exploite une plateforme internet pour la recherche de biens immobiliers à vendre, a confié à la société SCP, régie publicitaire de médias nationaux et régionaux, la mise en ligne par l’éditeur de presse Internet ‘Capital’, d’une vidéo réalisée pour la promotion de sa plateforme moyennant le prix de 5.880 euros.

Les résultats de l’opération étant jugés « absolument nuls et estimant avoir été trompée » sur l’audience de sa publicité mise en ligne, la société Je Rêve a contesté devoir payer le prix du contrat. La nullité du contrat a été prononcée par la juridiction.

La société SCT avait informé la société Je Rêve de la programmation par la revue Capital d’une semaine dédiée à l’immobilier qui n’a pas été programmée, et tandis, d’une part, que la société SCT n’établit pas la réalité de cette programmation par l’éditeur ‘Capital’, et d’autre part, que la saturation des sollicitations publicitaires sur Internet justifiait que la mise en ligne publicitaire pour la promotion d’un site de biens immobiliers soit accompagnée, dans le flux des publications, d’une presse dédiée à cet objet, la société Je Rêve a conclu à bon droit que l’insertion de sa vidéo publicitaire était subordonnée à cette condition essentielle du contrat. Il en résultait, à tout le moins, une erreur sur l’objet du contrat.

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 11

ARRET DU 26 NOVEMBRE 2021

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/22383 –��N° Portalis 35L7-V-B7D-CBD4P

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Novembre 2019 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2019028035

APPELANTE

SARL SERVICES CONSEIL ET PUBLICITE

prise en la personne de ses représentants légaux

[…]

[…]

immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Nanterre sous le numéro 502 050 073

assistée de Me Cathia MARION de l’AARPI UNIK AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : E0179

INTIMEE

SAS JE REVE D’UNE MAISON

prise en la personne de ses représentants légaux

[…]

[…]

immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Paris sous le numéro 800 037 475,

assistée de Me Gaspard BENILAN, avocat au barreau de Paris, toque : C2572

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 Octobre 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Denis ARDISSON, Président de la chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Denis ARDISSON, Président de la chambre

Mme Marion PRIMEVERT, Conseillère

Mme Marie-Sophie L’ELEU DE LA SIMONE, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Saoussen HAKIRI.

ARRÊT :

— contradictoire,

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

— signé par M. Denis ARDISSON, Président de la chambre et par Mme Saoussen HAKIRI, Greffière présent lors de la mise à disposition.

Vu le jugement du tribunal de commerce de Paris du 8 novembre 2019 qui a :

— dit l’opposition de la société Je Rêve D’une maison (‘société Je Rêve’) à l’injonction de payer à la société Services conseil et publicité (‘société SCP’) recevable et bien fondée,

— prononcé la nullité du contrat conclu entre la société SCP et la société et Je Rêve,

— condamné la société Je Rêve à payer 500 euros à la société SCP,

— débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

— ordonné l’exécution provisoire du jugement,

— condamné la société SCP aux dépens ;

Vu l’appel interjeté le 4 décembre 2019 par la société Services conseil et publicité;

* *

Vu les conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 4 juin 2021 pour la société Services conseil et publicité afin d’entendre, en application des articles 4 et 5 et 1416 du code de procédure civile 1103, 1104, 1217, 1130 et 1137 du code civil,

— infirmer le jugement,

juger que le tribunal de commerce a jugé ultra petita en se prononçant sur l’existence d’un dol et en jugeant de la nullité du contrat,

— juger l’absence de dol,

— juger que la société SCP a exécuté l’intégralité des prestations contractuelles auxquelles elle s’est engagée,

— condamner la société Je Rêve au versement de la somme de 5.880 euros TTC en paiement de la facture FAC 20183496, avec intérêt au taux légal à compter de la lettre de mise en demeure,

— condamner la société Je Rêve au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens ;

* *

Vu les conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 24 juin 2021 pour la société Je Rêve D’une maison afin d’entendre, en application des articles 12 du code de procédure civile, 1130, 1131, et 1217 du code civil ;

— débouter la société SCP de toutes ses fins et prétentions,

— confirmer le jugement sauf en ce qu’il a condamné la société Je Rêve à payer à la société SCP la somme de 500 euros,

— constater l’inexécution par la société SCP de son obligation contractuelle,

— dire n’y avoir lieu pour la société Je Rêve au paiement de la somme prévue au contrat,

— condamner la société SCP à verser à la société Je Rêve la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner la société SCP aux entiers dépens de l’instance.

SUR CE, LA COUR,

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties.

Il sera succinctement rapporté que la société Je Rêve, exploitant une plateforme internet pour la recherche de biens immobiliers à vendre, a confié le 22 août 2018 à la société SCP, régie publicitaire de médias nationaux et régionaux, la mise en ligne par l’éditeur de presse Internet ‘Capital’, d’une vidéo réalisée pour la promotion de sa plateforme moyennant le prix de 5.880 euros.

Insatisfaite de l’audience de sa publicité mise en ligne à compter de septembre 2018, la société Je Rêve a contesté devoir payer le prix du contrat qu’après mise en demeure du 17 janvier 2019, la société SCT a obtenu sur ordonnance en injonction de payer du président du tribunal de commerce de Paris du 29 mars 2019, et à laquelle la société Je Rêve s’est opposée.

1. Sur le bien fondé de la nullité du contrat

Pour voir infirmer le jugement en ce qu’il a limité le droit sur sa prestation à la somme de 500 euros, la société SCT conteste, en premier lieu, la requalification du litige sur le fondement du dol qui n’était pas invoqué par la société Je Rêve devant la juridiction de premier degré.

Au demeurant, en concluant devant cette juridiction ‘[constater] que les résultats de cette opération sont absolument nuls et ‘[estimer] avoir été trompée’, la société Je Rêve a compris dans l’objet de sa demande l’application de l’article 1130 du code civil relatif au dol en matière contractuelle, de sorte que c’est sans excéder ses pouvoirs que le tribunal de commerce a retenu cette qualification et restitué la sanction qui lui correspondait suivant la prescription de l’article 12 du code de procédure civile.

La société SCT conteste en second lieu le dol que lui reproche la société Je Rêve dont elle soutient que ni sa preuve matérielle ni celle de l’intention ne sont rapportées, et en réplique aux moyens de la société Je Rêve elle conclut, d’une part, que son dirigeant avait une idée très précise du média de communication qu’il avait choisi pour promouvoir sa société, qu’il avait à cet égard acquise par la consultation d’autres prestataires de publicités sur les prestations proposées, d’autre part, que l’objet du contrat avait été discuté entre les parties, décrit au bon de commande et que la prestation réalisée lui correspondait en tout point, relevant qu’aucune exclusivité dans la diffusion de la vidéo publicitaire n’était stipulée au contrat, de sorte qu’elle pouvait être diffusée aux cotés d’autres messages concurrents, et qu’enfin, aucun abus ne peut ressortir de l’utilisation du logo de l’éditeur ‘Capital’, la société SCT opposant enfin qu’il a été dénombré 1181 vues du contenu de la vidéo entre le 1er septembre et le 1er octobre 2018.

Néanmoins, il est constant que la société SCT avait informé la société Je Rêve de la programmation par la revue Capital d’une semaine dédiée à l’immobilier qui n’a pas été programmée, et tandis, d’une part, que la société SCT n’établit pas la réalité de cette programmation par l’éditeur ‘Capital’, et d’autre part, que la saturation des sollicitations publicitaires sur Internet justifiait que la mise en ligne publicitaire pour la promotion d’un site de biens immobiliers soit accompagnée, dans le flux des publications, d’une presse dédiée à cet objet, la société Je Rêve conclut à bon droit que l’insertion de sa vidéo publicitaire était subordonnée à cette condition essentielle du contrat, et tandis qu’il est constant que la revue Capital n’a pas programmé sa publication sur la presse immobilière, il en résulte, à tout le moins, une erreur sur l’objet du contrat, de sorte qu’il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a déduit la nullité.

Par ailleurs, la société Je Rêve prétend à l’infirmation du jugement en ce qu’il a retenu sa condamnation à payer la somme de 500 euros, en invoquant les inexécutions de la société SCP.

Toutefois, la sanction de la nullité du contrat consiste à remettre les parties dans l’état dans lequel elles se trouvaient avant la signature de celui-ci, et donne lieu à la restitution de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu’il a, d’une part, rejeté la demande de la société SCP en paiement du prix, et d’autre part, condamné la société Je Rêve à verser la somme de 500 euros représentative des droits de propriété sur la vidéo publicitaire que détient la société Je Rêve et dont elle a par ailleurs reconnue les qualités.

2. Sur les frais irrépétibles et les dépens

La société SCP succombant à l’action, le jugement sera confirmé en ce qu’il a statué sur les frais irrépétibles ainsi que sur les dépens, et en cause d’appel, elle supportera les dépens et acquittera la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne la société Services conseil et publicité aux dépens ;

Condamne la société Services conseil et publicité à payer à la société Je Rêve D’une maison la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


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