PC/PR
ARRÊT N° 498
N° RG 20/00887
N° Portalis DBV5-V-B7E-F7X5
[O]
C/
S.A. SEMAF LOCATION
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
Chambre Sociale
ARRÊT DU 07 JUILLET 2022
Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 mars 2020 rendu par le Conseil de Prud’hommes de LA ROCHE-SUR-YON
APPELANT :
Monsieur [F] [O]
né le 1er juin 1964 à [Localité 8] (86)
[Adresse 1]
[Localité 4]
Ayant pour avocat plaidant Me Isabelle BLANCHARD substituée par Me Marine MASSIOT de la SELARL ADLIB, avocats au barreau de LA ROCHE-SUR-YON
INTIMÉE :
S.A. SEMAF LOCATION
[Adresse 9]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS – ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS
Et pour avocat plaidant Me Marie GIRINON de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 09 mars 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Patrick CASTAGNÉ, Président
Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente
Madame Valérie COLLET, Conseiller
qui en ont délibéré
GREFFIER, lors des débats : Madame Patricia RIVIERE
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile que l’arrêt serait rendu le 2 juin 2022. A cette date, le délibéré a été prorogé à la date de ce jour.
– Signé par Monsieur Patrick CASTAGNÉ, Président, et par Monsieur Lionel DUCASSE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE :
M. [F] [O] a été engagé le 26 janvier 1998 en qualité de cadre, responsable technique par la société SEMAF Location, spécialisée dans la réalisation de projets événementiels.
Dans le dernier état de la relation contractuelle et à la suite de diverses restructurations de l’entreprise, M. [O] occupait, en vertu d’un avenant à effet du 1er novembre 2017, le poste de directeur technique de la S.A.S. SEMAF, les fonctions précédemment exercées de directeur de production et de directeur délégué lui ayant été retirées.
Le 25 mai 2018, M. [O] s’est vu notifier son licenciement pour faute grave par une LRAR ainsi rédigée :
– en votre qualité de directeur technique, et conformément à votre fiche de poste, vous avez en charge la gestion des stocks de l’ensemble des matériels, ainsi que son suivi sous l’outil de gestion Locassyst. Or, depuis le 1er novembre 2017, aucune gestion sous Locassyst n’a été réalisée.
En outre, en février 2018, nous vous avons demandé de réaliser une mission d’inventaire nécessaire au suivi de notre activité, demandes consignées lors des PV des réunions techniques.
Vous vous êtes engagé à réaliser l’inventaire et la saisie sous Locassyst avant le 30 avril 2018. Au 17 avril2018, date de votre départ en vacances, seule 20 % de la saisie était réalisée. Nous avons dû mobiliser en urgence, pendant deux jours, l’ensemble des équipes pour pallier votre carence et pointer manuellement le matériel dont nous disposions afin de préparer nos chantiers et ce, deux semaines avant le démarrage de la saison.
– en votre qualité de directeur technique, vous avez en outre à votre charge l’établissement des nomenclatures dont notamment celle de la structure Tria. Cette dernière est indispensable au montage du dossier à destination du salon nautique d'[Localité 5]. Vous en avez pleinement conscience eu égard à votre expérience et responsabilité dans notre société. Pourtant, à ce jour, cette nomenclature n’est toujours pas réalisée.
– au titre de votre fonction, il vous est également confié la mission de ‘mettre en oeuvre les réponses des disponibilités de matériels sur la base de gestion du parc dans un délai de 24 heures et proposer d’éventuelles solutions techniques’. Or force est de constater que vous vous dispensez de la tenue de ce délai de 24 h, obligeant régulièrement vos collègues là encore à prendre le relais sur vos dossiers pour maintenir de bonnes relations avec nos clients et partenaires.
-vous vous devez encore d’assurer le transfert dans des conditions optimales des matériels demandés par les chargés d’affaires pour la bonne réalisation des chantiers. Or, vous avez à plusieurs reprises bloqué du matériel pour des transferts irréalistes techniquement et excessivement onéreux. Pour illustration, vous avez souhaité organiser un transfert de matériel entre le site du festival Les Culturales et le site de l’événement de la Golden Globe pour des structures de 10 m sans même regarder les dates de montage et démontage des deux événements fixées sur le planning. Il a fallu complètement se réorganiser et relancer la solution extérieure de sous-traitance ayant un coût supplémentaire de 25 000 € H.T.
– Il vous est aussi demandé d’informer les chargés d’affaires sur la marque de matériel à utiliser dans le cadre de leur débit. Or, notamment pour la préparation du dossier Les Culturales, nous ne disposions d’aucune répartition du plancher, aucune vue claire sur la répartition du matériel, il a donc fallu mobiliser MM. [V], [C], [U] et moi-même pour effectuer ces répartitions.
– vous êtes également responsable du blocage définitif du matériel après débit effectué par les chargés d’affaires. Là encore, cette mission n’est pas accomplie, notamment sur les dossiers suivants :
> concernant les dossiers Fib et Evénements Jeunes : il était demandé de bloquer du matériel ‘ring beam’ Vous n’avez absolument pas anticipé ce besoin défini et vous n’avez donc pu voir qu’il manquait un nombre important de ring beam. Aussi il a donc fallu en acheter 180 en urgence, sans possibilité de négocier les tarifs, ce qui a généré un surcoût de 45 000 € (non compris les 4 800 € de transport express). Inutile de vous préciser que nous sommes donc sur un dossier déficitaire.
> dans la gestion du dossier Evénements Jeunes, vous n’avez pas non plus anticipé le manque de toits 10 m Bator. Il ne nous a donc été impossible d’acheter d’autres toits, compte-tenu des délais trop courts et nous n’avons pas d’autre choix que de sous-traiter cet événement, générant un surcoût de 1 000 €.
> dans la gestion du dossier Primerose de Bordeaux, une demande de matériel vous a été faite par M. [R] le 2 mars 2018. Sans réponse de votre part, M. [R] vous a relancé le 20 mars 2018. Le 29 mars 2018, vous avez établi un mail à M. [Y] sur les dates
d’enlèvement de montage et démontage des gradins. Or, les dates données étaient totalement erronées. J’ai dû intervenir pour communiquer les bonnes dates d’intervention à M. [Y].
– vous êtes responsable de l’optimisation de l’accessoirisation du matériel en assurant la compatibilité avec l’ensemble des marques de matériels du parc. Au moment de l’achat de nos nouveaux matériels, il vous a été demandé de remettre des profils standards sur les portes et sur les barres de seuil nouvellement acquises dans un souci d’optimisation de compatibilité des éléments. A ce jour, vous n’avez formulé aucune demande de travaux à notre serrurier, M. [S].
– vous devez assurer la gestion et la relation avec les fabricants :
Dans le dossier des Culturales, et malgré votre départ en vacances prévu pour le 17 avril 2018, vous n’avez passé aucun bon de commande au fournisseur Losberger pour les structures hexagonales et octogonales et n’avez pas pris le soin d’en avertir vos collègues pour qu’ils puissent prendre le relais durant vos congés.
Lors de la préparation du dossier, M. [V] s’est aperçu de cette situation et a passé la commande en urgence, sans pouvoir occulter le risque de ne pas être livré dans les temps et de ne pas satisfaire le client sur sa demande (client qui ne représente pas moins de 300 000 € de chiffre d’affaires).
Au jour des présentes, nous n’avons toujours aucune certitude de pouvoir être livré dans les délais.
Encore, notre entreprise a réalisé un investissement en matériel de 1,3 K € auprès de la société ATS. Je vous ai demandé dès réception de ce matériel de vous assurer du pointage entre les éléments livrés et les éléments commandés et de réaliser un tableau de suivi qui n’a jamais été réalisé. Nous n’avons à ce jour aucune visibilité.
– enfin, vous devez naturellement rendre compte à la direction de vos activités lors des réunions d’exploitation et lors des réunions techniques. A ce jour, nous n’avons aucun compte-rendu de votre part. Nous comprenons néanmoins aujourd’hui au regard des défaillances pointées que vous cherchiez à dissimuler ces dernières et à empêcher un contrôle effectif de vos prestations.
Au cours de l’entretien, nous vous avons exposé l’ensemble des fautes professionnelles que nous avons relevées ces dernières semaines, ainsi que leur contexte de réitération.
A l’ensemble de ces manquements professionnels, vous n’avez trouvé aucun argument à nous opposer si ce n’est que vous pensiez que les dossiers étaient gérés par vos collègues. Les missions de votre poste de directeur technique devraient donc selon vous être assurées par d’autres salariés. Cette défense illustre bien votre désengagement à l’égard de votre fonction et est bien éloignée des responsabilités d’un cadre de haut niveau.
Dans ces conditions nous avons le regret de vous notifier votre licenciement pour faute grave.’
Par acte reçu le 28 septembre 2018, M. [O] a saisi le conseil de prud’hommes de la Roche-sur-Yon d’une action en contestation de son licenciement et de la rétention opérée par l’employeur au titre d’une somme qu’il n’a jamais perçue.
Par jugement du 16 mars 2020, le conseil de prud’hommes de la Roche-sur-Yon a :
– jugé que le licenciement de M. [O] repose sur une faute simple,
– condamné la S.A.S. SEMAF à lui payer les sommes de :
> 14 610,12 € brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
> 1 461 € brut au titre des congés payés y afférents,
> 29 049,79 € net à titre d’indemnité de licenciement,
– condamné la S.A.S. SEMAF à verser à M. [O] la somme de 1 000 € net injustement retenue au titre d’une avance sur déplacement,
– jugé que la moyenne mensuelle brute du salaire perçu au cours des trois derniers mois travaillés à prendre comme référence est égale à la somme brute de 4 870,04 €,
– ordonné l’exécution provisoire conformément à la loi,
– jugé que les sommes ayant un caractère de salaire et les autres sommes porteront intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,
– rejeté toutes autres demandes,
– condamné la S.A.S. SEMAF à payer à M. [O] la somme de 1 500 € en application de l’article 700 du C.P.C., outre les dépens.
Au soutien de sa décision, le conseil a considéré, en substance :
– que M. [O] avait en charge la gestion des stocks de matériel, l’ensemble des solutions techniques à apporter et l’optimisation des matériels et qu’au vu de l’activité de la société et de sa situation délicate, une gestion rigoureuse du matériel était indispensable,
– qu’aucune pièce n’établit que M. [O] a exprimé avoir des difficultés dans l’accomplissement de sa mission, que la grille complétée par lui-même en vue de l’entretien annuel d’activité ne met en évidence aucune difficulté,
– que les manquements à ses obligations contractuelles constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement mais que ces faits, bien que fautifs, ne présentent toutefois pas un caractère de gravité rendant impossible la poursuite du contrat de travail pendant le préavis.
M. [O] a interjeté appel de cette décision selon déclarations transmises au greffe de la cour les 2 et 9 avril 2020 (instances enrôlées sous les n° 20-0884 et 20-0887).
Par ordonnance du 3 septembre 2020, les dossiers 20-0884 et 20-0887 ont été joints sous le n° 20-0887.
La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance du magistrat de la mise en état en date du 9 février 2022.
Au terme de ses dernières conclusions du 17 décembre 2020, auxquelles il convient de se référer pour l’exposé détaillé des éléments de droit et de fait, M. [O], contestant les griefs articulés à son encontre et soutenant qu’ils relèvent de la notion d’insuffisance professionnelle et non d’un comportement fautif, demande à la cour :
– de réformer le jugement entrepris en ce qu’il a :
> dit que son licenciement repose sur une faute simple,
> rejeté sa demande de voir dire que le licenciement ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse,
> rejeté sa demande d’indemnisation du préjudice résultant de l’absence de cause réelle et sérieuse à concurrence de 75 000 €,
> rejeté sa demande d’indemnisation du préjudice résultant des circonstances abusives et vexatoires dans lequel le licenciement a été prononcé,
– de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société SEMAF Location à lui rembourser la somme de 1 000 € net injustement retenue sur son salaire de mai 2018 et condamné la société SEMAF Location à lui payer la somme de 1 500 € en application de l’article 700 du C.P.C.
– statuant à nouveau :
> de dire que son licenciement est dénué de toute cause réelle et sérieuse,
> de condamner la S.A. SEMAF Location à lui payer les sommes de :
* 75 0485,62 (sic) € net à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi,
* 5 000 € à titre de dommages-intérêts pour les circonstances abusives et vexatoires de la rupture,
* 3 000 € à titre d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du C.P.C. à hauteur d’appel,
– de dire y avoir lieu à application de l’article 1154 du code civil,
– de dire que la moyenne mensuelle brute du salaire perçu au cours des trois derniers mois travaillés est égale à la somme de 4 870,04 € brut et de le préciser dans le ‘jugement’ (sic) à venir,
– de dire que les sommes qui porteront le caractère de salaire porteront intérêts au taux légal à compter de la requête introductive d’instance et que les autres sommes porteront intérêts au taux légal à compter du ‘jugement’ (sic) à intervenir,
– de condamner ‘la même’ aux dépens de l’instance.
Par conclusions remises et notifiées le 11 août 2020, auxquelles il convient de se référer pour l’exposé détaillé des éléments de droit et de fait, la S.A. SEMAF Location, formant appel incident, demande à la cour :
– d’infirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu’il a requalifié le licenciement de M. [O] comme reposant sur une cause réelle et sérieuse et non sur une faute grave et l’a, par suite, condamnée au paiement des indemnités de rupture : 14 610,12 € brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 1 461 € brut au titre des congés payés y afférents et 20 049,79 € à titre d’indemnité légale de licenciement, en ce qu’il l’a condamnée à payer à M. [O] la somme de 1 000 € pour retenue abusive sur avance de déplacement et la somme de 1 500 € en application de l’article 700 du C.P.C.,
– statuant à nouveau :
> de juger que le licenciement de M. [O] repose sur une faute grave,
> de débouter M. [O] de ses demandes d’indemnité de licenciement, d’indemnité compensatrice de préavis et de congés payés y afférents, d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d’indemnité pour licenciement vexatoire,
> de juger qu’elle n’a pas à procéder au remboursement de la retenue de 1 000 € pour avance des frais de déplacement,
– de condamner M. [O] au paiement de la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du C.P.C., outre les dépens.
MOTIFS
I – Sur la contestation du licenciement :
La solution du litige suppose que soit dans un premier temps appréciée l’existence même des griefs articulés dans la lettre de licenciement dont M. [O] conteste la matérialité, avant d’en déterminer la qualification juridique au regard de la distinction par lui invoquée entre motifs disciplinaires et insuffisance professionnelle puis, dans l’hypothèse où le caractère disciplinaire des motifs de licenciement serait retenu, d’en apprécier la gravité en termes de rupture immédiate du contrat de travail.
Il doit par ailleurs être rappelé :
– que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, énoncée dans une lettre notifiée au salarié qui fixe les limites du litige et doit exposer des motifs précis et matériellement vérifiables, permettant au juge d’en apprécier la réalité et le sérieux (articles L.1232-1 et L.1232-6 du code du travail),
– que le juge ne peut pas examiner d’autres motifs que ceux évoqués dans la lettre de licenciement mais qu’il doit examiner tous les motifs invoqués, quand bien même ils n’auraient pas tous été évoqués dans les conclusions des parties,
– que la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement ne pèse sur aucune des parties en particulier, le juge formant sa conviction au vu des éléments produits par chacun et que l’employeur est en droit, en cas de contestation, d’invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif,
– que lorsque le motif allégué n’est pas le motif réel du licenciement, celui-ci est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
– qu’il appartient au juge d’apprécier la nature de la faute invoquée par l’employeur, que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise, que la gravité de la faute s’apprécie en tenant compte du contexte des faits, de l’ancienneté du salarié, des conséquences que peuvent avoir les agissements du salarié, de l’existence ou de l’absence de précédents disciplinaires,
– que lorsque le licenciement est prononcé pour faute grave, il incombe à l’employeur de prouver la réalité de la faute grave, c’est à dire de prouver non seulement la réalité de la violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail mais aussi que cette faute est telle qu’elle impose le départ immédiat du salarié, le contrat ne pouvant se poursuivre même pour la durée limitée du préavis.
– que pour apprécier la gravité de la faute, les juges doivent tenir compte des circonstances qui l’ont entourée et qui peuvent atténuer la faute et la transformer en faute légère, ou qui peuvent l’aggraver.
Sur la matérialité même des manquements évoqués dans la lettre de licenciement :
1 – Défaut de suivi des stocks sous l’outil de gestion Locasyst et de réalisation de l’inventaire :
La société SEMAF expose :
– que, malgré des demandes répétées dans le cadre de réunions professionnelles régulières, M. [O] s’est abstenu de tracer les stocks par le biais du logiciel ou de corriger les nombreuses erreurs visées par la direction, de sorte que la société n’avait aucune visibilité précise et sérieuse des stocks, situation confirmée par un rapport d’un prestataire extérieur et par des collègues,
– que M. [O] s’était vu confier en février 2018 la réalisation d’un inventaire avec une date butoir au 30 avril 2018, ce qu’il a accepté, tout en partant en congés le 17 avril en laissant 80 % des travaux de saisie non réalisés, contraignant ses collègues à y remédier.
Elle produit à cet égard :
– la fiche de fonctions de M. [O] (pièce 4) prévoyant au titre des missions techniques : ‘est responsable de la gestion des stocks (entrées/sorties) de l’ensemble des matériels et en assure le suivi sous l’outil de gestion Locasyst, est responsable de la bonne tenue des stocks en collaboration avec le chef de parc, doit tenir à jour des inventaires intermédiaires afin de pouvoir avoir un stock juste lors du bilan financier… est le garant de la justesse de tenue des stocks’,
– le procès-verbal d’une réunion professionnelle du 22 décembre 2017 (pièce 10) préparation du chantier : lors de la formation de Locasyst il a été vu que la liste des articles ne peut pas être extraite sur Excel en conséquence continuer à cleaner les listes (en + d’un inventaire précis) et faire des listes type en parallèle sur Excel
– le procès-verbal de réunion professionnelle du 3 janvier 2018 (pièce 11) : actuellement, les Cafs travaillent sur Locasyst, lorsque, sur le document de préparation du matériel, la quantité est en négatif, 2 solutions : un transfert et/ou un achat => on ne peut pas anticiper sans que les besoins du chantier soient rentrés dans Locasyst,
– le procès-verbal de réunion professionnelle du 24 janvier 2018 (pièce 12)
L’inventaire en cours aidera à avoir une meilleure vison de notre stock. Il devrait se finaliser mi-mars maximum…
– un ‘état des lieux Locasyst’ (pièce 5) établi par un cabinet conseil en février 2018 proposant le calendrier suivant : fin février saisie correcte des clients, affaires, locations par les chargés d’affaires, mars : mise à jour base articles ; devis et locations en circulation avec les nouveaux articles composés afin d’avoir une gestion du stock, commencer une procédure de contrôle des bons de préparation et des retours qui devront être ramenés au chef de parc puis transmis à l’exploitation Locasyst pour mise à jour des quantités réellement parties, fin avril mise à jour du stock avec les quantités réelles pour la gestion en live, renseigner précisément les articles, gestion des retours,
– le procès-verbal de réunion professionnelle du 20 mars 2018 (pièce 13) : saisie inventaire dans Locasyst : l’inventaire a été finalisé mais le résultat est assez moyen. Nuançons : c’est le premier depuis des années, c’est toujours mieux que rien… Pour l’améliorer dans les années à venir, tous les cadres du bureau participeront à l’inventaire 2019, sur le dépôt, de manière active et efficace. Pour permettre à T. [O] de finaliser la saisie de l’inventaire sur Locasyst, [I] gérera certaines parties techniques (ex : fournisseurs etc) Deadline pour la saisie de l’inventaire par T. [O] => 30 avril 2018,
– le procès-verbal de réunion professionnelle du 9 avril 2018 (pièce 14) Saisie de l’inventaire sur Locasyst : [F] [O] respectera la dead-line qui lui a été fixée,
– attestation de M. [C] (pièce 16) lorsque nous avons repris le tableau de bord matériel pour attribuer ou acheter du matériel pour couvrir des besoins de chantiers et ceci avec [K] [U] (back-up provisoire de M. [O]) nous nous sommes rendus compte que malgré des demandes réitérées en réunions, celui-ci n’avait pas suivi 20 % des inventaires faits en février,
– une attestation de M. [U] (pièce 24) j’ai constaté suite à des remontées d’indisponibilités du service parc, que l’inventaire 2018 des structures et des entoilages n’avait pas été saisi dans Locasyst. En saisissant ce dernier, je me suis aperçu qu’il existait des incohérences entre le volume annoncé à la location et la réalité du stock, notamment sur notre capacité de montage en 10 et 30 (aluminium et entoilage manquants).
-attestation de M. [V] (pièce 15) : la gestion administrative de Locasyst n’était pas verrouillée par M. [O], laissant à tous la possibilité de modifier les nomenclatures de matériel, la matrice du logiciel et la mise à jour des volumes, cet outil de gestion est truffé d’informations erronées, de listes et quantitatifs qui ne sont pas en phase avec les inventaires,
M. [O] expose :
– qu’il utilise le logiciel Locasyst depuis 20 ans et qu’aucune pièce ne démontre le caractère volontaire de ce prétendu manquement,
– s’agissant de la réalisation de l’inventaire :
> que l’employeur ne peut lui imputer un grief qui ne relève plus de ses fonctions dès lors que, depuis la signature de l’avenant du 1er novembre 2017, il n’assurait plus la gestion des hommes ni du parc mais seulement la gestion du matériel dans le logiciel, qu’il ne pouvait dès lors donner d’instruction au chef de dépôt pour lui remettre la liste du stock en vue de sa saisie informatique,
> qu’ainsi, sa fiche de fonction (pièce 5) précise qu’il est responsable de la bonne tenue des stocks en collaboration avec le chef de parc et qu’il doit se soumettre aux directives du directeur des opérations,
> qu’il a vainement tenté d’obtenir de celui-ci les informations nécessaires à la réalisation de l’inventaire.
Il apparaît, à l’examen des pièces versées aux débats, que la matérialité même de ce grief est établie dès lors :
– que M. [O] n’a pas respecté le calendrier d’achèvement de l’inventaire qu’il avait accepté sans réserve lors de la réunion du 20 mars 2018,
– qu’il ne justifie d’aucun motif légitime à la non-réalisation de cette mission entrant dans le cadre des fonctions qui lui étaient attribuées, étant considéré que la responsabilité d’un service n’exclut pas une reddition de comptes à la hiérarchie qui n’implique pas une dépossession par le salarié de ses prérogatives.
2 – Défaillance dans l’établissement et le contrôle des nomenclatures des produits
La société Semat :
– invoque à ce titre le nombre ‘vertigineux’ de codes articles, nomenclatures, intitulés de produits erronés rendant impossible le suivi sérieux des stocks en indiquant que cette mission relevait bien de ses fonctions et lui a été rappelée à de maintes reprises lors des réunions professionnelles, que M. [O] ne peut invoquer sa prétendue méconnaissance de la nomenclature Tria dont il est à l’initiative du développement,
– s’appuie sur les pièces
> 6 (PV de réunion du 7 novembre 2017) : Nomenclature Locasyst [F] [O] est le garant de la bonne nomenclature des structures sur Locasyst => un travail de nettoyage devra être fait. C’est [F] [O] et lui seul qui créera les codes.
> 7 : mail de confirmation du 13 novembre 2017
> 8 : PV réunion du 28 novembre 2017 erreurs dans les listes de préparation : les produits sur la liste doivent être uniformes et avoir la même dénomination pour tous. Refaire les listes sur les structures de base. T. [O] devra cleaner cette liste en février.
> 9 : mail de confirmation du 29 novembre 2017
> 15 : attestation M. [V] : la gestion administrative de Locasyst n’était pas verrouillée par M. [O], laissant à tous la possibilité de modifier les nomenclatures de matériel, la matrice du logiciel et la mise à jour des volumes, cet outil de gestion est truffé d’informations erronées, de listes et quantitatifs qui ne sont pas en phase avec les inventaires, remettre en cohérence la gestion du matériel et des préparations dans Locasyst demande un travail long et fastidieux, les plans liés aux matériels ainsi que les informations techniques, liste et détail de pièces n’ont pas fait l’objet d’un traitement de mise à jour par M. [O].. Nous ne trouvons pas de traces de fabrication ou de lancement de modification sur certains matériels, certaines demandes étant faites par M. [O] sans feuille de travaux, donc sans historique et archivage.
M. [O] conteste la réalité même de ce grief en exposant :
– qu’établir une nomenclature consiste à référencer l’intégralité du matériel nécessaire à une structure déterminée,
– qu’établir une nomenclature pour la structure Tria n’a jamais fait partie de ses missions, chaque modèle de cette structure étant différent en fonction des besoins du client, de sorte que la nomenclature était réalisée lorsque le besoin du client était formalisé, qu’il ne peut lui être reproché de n’avoir pas réalisé la nomenclature pour le salon nautique d'[Localité 5] alors qu’il ignorait les besoins spécifiques du client, qu’il n’a jamais eu pour mission de réaliser les nomenclatures de toutes les structures Tria possibles et imaginables,
– qu’il était le garant de la bonne nomenclature des structures les plus utilisées pour lesquelles précisément une nomenclature s’avère utile,
– que le PV de la réunion du 7 novembre 2017 établit qu’il avait une mission de ‘nettoyage’ sur les nomenclatures des structures sur Locasyst, constituant un travail de longue durée pour lequel il ne peut être sanctionné en quelques mois d’activité.
La matérialité même de ce grief ne peut être considérée comme établie à défaut de production aux débats d’un quelconque élément objectivement vérifiable afférent au salon nautique d'[Localité 5] au titre duquel il a été invoqué dans la lettre de licenciement.
3 – Défaut de mise en oeuvre des réponses de disponibilité de matériels dans le délai requis :
La société SEMAF :
– expose que M. [O] a fait preuve d’un manque de réactivité récurrent, obligeant régulièrement ses collègues à prendre le relais pour éviter une insatisfaction chronique chez les auteurs demandes, alors que sa fiche de fonction prévoyait une mise en oeuvre des réponses dans un délai de 24 heures,
– produit à l’appui de son argumentation :
> la fiche de fonction (pièce 4) stipulant que M. [O] doit mettre en oeuvre les réponses de disponibilité de matériel sur la base de gestion du parc intégré dans un délai de 24 heures,
> les messages vainement adressés à M. [O] par Mme [X], assistante commerciale, les 15 février, 7 et 8 mars 2018, afin d’obtenir un chiffrage pour des travaux de bardage (pièce 17)
> un message de relance du 22 mars 2018 de cette même salariée sollicitant des informations pour chiffrage, précisant que les clients la relancent avec impatience (pièce 18),
> une demande de disponibilité du 8 mars 2018 au titre d’un événement important et la réponse de M. [O] du 22 mars 2018 (pièce 19)
M. [O] soutient :
– que le délai de réponse de 24 heures n’était pas contractualisé,
– qu’il était concrètement difficile de répondre dans un délai de 24 heures compte-tenu des aléas liés aux conditions de réalisation des chantiers pouvant avoir un impact imprévisible sur la disponibilité des matériels,
– qu’en toute hypothèse, il n’a jamais eu de retour négatif de ce chef.
Les pièces produites par la société SEMAF établissent tant l’obligation contractuelle pesant sur M. [O] de répondre aux demandes de disponibilité de matériels dans les 24 heures que les manquements de celui-ci visés dans la lettre de licenciement.
4 – Blocages de matériels :
La société SEMAF :
– expose que M. [O] n’hésitait pas à organiser des transferts de matériels irréalistes et économiquement aberrants, qu’ainsi à l’occasion du salon ‘Les Culturales’, M. [O] a proposé de récupérer du matériel sur un autre chantier pour le déplacer sur le site du salon alors qu’à la date voulue, ce matériel n’était pas disponible, que M. [O] ne peut se retrancher derrière un compte-rendu de réunion du 9 avril 2018 qui, s’il précise que les quantités exactes ne sont pas encore arrêtées, ne contient aucune mention sur le calendrier puisqu’un planning de l’ensemble des événements validés était établi, qu’elle a dû louer le matériel manquant sans possibilité de négociation du prix,
– verse aux débats :
> la fiche de poste de M. [O] stipulant que celui-ci est garant de la livraison des matériels sous-traités sur chantier en temps et en heures, a la responsabilité de l’optimisation du matériel sur parc en maximisant ses rotations et doit rechercher des solutions éventuelles d’externalisation des matériels auprès de partenaires si nécessaire,
> les factures afférents au salon Les Culturales, pour un montant de 236 000 € HT (pièces 20-21)
> le message du directeur général du 24 janvier 2018 demandant de lancer, pour deux événements dont le salon Les Culturales, des recherches de matériel auprès des confrères/partenaires,
> le PV de réunion professionnelle du 9 avril 2018 (pièce 14) mentionnant, s’agissant de cet événement qu’on ne connaît pas encore les quantités finales de matériel
> une facture des Ets Vignaut (location de chapiteaux) (pièce 23) d’un montant de 25 040 € H.T. concernant la location d’un chapiteau réception pour un montage entre les 23 et 30 mai et un démontage entre le 8 et 11 juin 2018.
M. [O] conteste ce grief en soutenant qu’au moment de la demande de disponibilité, il ne connaissait pas les dates précises des événements concernés, qu’une fois le devis accepté et les dates certifiées, le blocage devait être terminé, qu’il est parti en congés le 18 avril 2018 et s’est vu évincé de ses fonctions dès son retour, le 2 mai 2018, que le PV de réunion du 9 avril 2018 le confirme en ce qu’il est mentionné qu’on ne connaît pas les quantités finales de matériel, que M. [V] a du mal à avoir tous les retours et va essayer néanmoins de quantifier tout ceci et, s’agissant de la Golden Race que la société est en attente des informations commerciales et souligne l’urgence de la mise en commande.
Ce grief doit être considéré comme établi dès lors :
– qu’il résulte des pièces versées aux débats que M. [O] en sa qualité de directeur technique avait la responsabilité de l’optimisation du matériel sur parc en maximisant ses rotations et de la recherche de solutions d’externalisation si nécessaire (fiche de poste),
– que si les quantités de matériel nécessaire peuvent constituer une variable pouvant évoluer jusqu’à la commande définitive, les dates des événements, fixées par les clients, constituent des données acquises dès l’établissement des contacts commerciaux,
– qu’en l’espèce, le PV de réunion du 8 avril 2018 précise que les Culturales et la Golden Race, événements d’importance, constituent tous les dossiers de mai et juin, de sorte que M. [O] ne peut sérieusement prétendre avoir pu ignorer leurs dates respectives et leur concomitance ne permettant pas un transfert de matériel d’un site à un autre.
5 – Absence d’information des chargés d’affaires sur la marque de matériel à utiliser :
La société SEMAF expose à ce titre :
– qu’il appartient au directeur technique d’apporter et rechercher des solutions techniques et économiques sur les produits standard et spécifiques, en appui des chargés d’affaires en les orientant sur le matériel disponible et sur les marques à privilégier en fonction des contraintes données par le client,
– que s’agissant du salon Les Culturales, M. [O] n’a apporté aucun soutien au chargé d’affaires, n’ayant aucune visibilité sur le matériel à défaut de suivre correctement les stocks, malgré les conseils prodigués par le responsable des procédures.
Elle verse aux débats :
– la fiche de fonction de M. [O],
– une attestation de M. [U] (pièce 24) : en avril 2018 pendant les congés de M. [O], j’ai constaté que de nombreuses incohérences apparaissaient dans le planning matériel de mai et juin 2018. Des structures, tentes et planchers n’étaient pas planifiées pour les chantiers de la FIV et des Culturales. Une réunion a été déclenchée d’urgence pour reprendre tous les chantiers de cette période et effectuer correctement le planning pendant plus de deux jours. Cette réunion a permis de constater notre incapacité à réaliser le chantier des Culturales en l’état de ce qui avait été vendu au client. Elle a généré une modification substantielle des plannings de montage/démontage de cette période pour permettre des transferts de matériel supplémentaires et de la sous-traitance matériel sur des structures 10 M.
– un mail de M. [V] daté du 4 janvier 2018 transmettant à M. [O] un modèle de tableau prévisionnel de matériel (pièce 25).
M. [O] conteste ce grief en soutenant que lorsqu’il effectue le blocage de disponibilité du matériel, il n’a pas connaissance du détail de chaque pièce et ne peut donc communiquer la marque du matériel, qu’ensuite le chargé d’affaires prend connaissance de la répartition de la disponibilité dans le logiciel Locasyst et revient vers lui pour ajuster la répartition de la surface en fonction des disponibilités , qu’ainsi, lors d’une réunion du 28 novembre 2017, la direction a été contrainte de rappeler la procédure à respecter, tout en reconnaissant que cette procédure devait parfois être contournée du fait de la faible quantité de produits en stock.
Force est de constater qu’aucune des pièces invoquées par la société Semaf au soutien de ce grief n’établit un manquement de M. [O] à une obligation d’informer les chargés d’affaires sur la marque de matériel à utiliser dans le cadre de leur débit, non expressément mentionnée dans la fiche de poste, les documents invoqués par l’employeur faisant état d’un défaut de planification dont le lien avec une information sur la marque de matériel à utiliser n’est pas établi.
6 – Défaillances dans le blocage du matériel :
La société SEMAF soutient :
– que M. [O] devait assurer le blocage du matériel demandé pour la réalisation des marchés et était responsable du blocage définitif du matériel après débit effectué par les chargés d’affaires (fiche de fonction),
– qu’à l’occasion de deux chantiers (Foire Internationale de [Localité 6] et Evénement Jeune à [Localité 7]), il a été découvert, une semaine avant le montage, que M. [O] n’avait pas signalé que du matériel d’assemblage (ring beam) nécessaire à la réalisation des planchers temporaires et des éléments de toiture Bator, n’étaient pas en stock, ce qui a nécessité des acquisitions en urgence à des prix prohibitifs,
– que de même, M. [O] n’a apporté aucune réponse correcte à une demande de la société Alcor, fournisseur d’éléments de gradins pour un chantier Primerose.
Elle verse de ce chef aux débats :
– une attestation de M. [Z] (pièce 26) : dossier [Localité 7] j’ai pu constater l’absence d’anticipation de la part de M. [O], nous avons du louer en urgence de l’outillage à nos confrères car nous n’avions plus le stock nécessaire pour réaliser ce dossier, 7 toits de structure loués auprès de la société SE location. Nous n’avons à aucun moment été avertis par M. [O] du possible manque de cet outillage,
– factures d’acquisition et transport du matériel d’assemblage ‘ring beam’ du 3 mai 2018 et courriels associés faisant état d’une date de début de montage au 2 mai 2018 (pièces 27, 28, 29),
– facture de location et transport d’éléments de toiture Bator (pièce 30),
– échanges de mails entre le responsable du bureau d’études de la société Alcor Equipements et M. [O] relativement à la réalisation de trois tribunes en gradins (pièce 31).
M. [O] conteste la réalité même de ce grief en soutenant :
– qu’aucune pièce n’établit qu’il était en mesure d’effectuer le blocage définitif des éléments d’assemblage pour le chantier FIB,
– qu’en l’absence d’indication de la date de l’Evénement Jeunes invoqué par la société Semaf et compte-tenu de la multiplicité de ces manifestations, il lui est impossible de s’expliquer de ce chef,
– s’agissant du dossier [M], qu’aucune faute n’est caractérisée à son encontre, à l’exception d’une erreur purement matérielle de date d’enlèvement, sans aucune incidence, étant considéré qu’entre la demande du 2 mars et la réponse du 20 mars, des contacts avaient eu lieu avec le représentant de la société Alcor.
S’agissant du dossier Evénements Jeunes – [Localité 7] : la réalité des griefs formulés par l’employeur est établie au regard de la lecture combinée de l’attestation de M. [Z] et des factures de location/transport de matériel.
S’agissant du dossier F.I.B. : la seule production des factures d’acquisition/transport d’éléments ‘ring-beam’ est insuffisante à établir un manquement de M. [O] dans la communication d’informations actualisées sur le stock disponible.
S’agissant du dossier [M], que les courriels versés aux débats n’établissent pas un manquement de M. [O] à ses obligations en matière de blocage de matériel.
7 – Manquements en termes d’optimisation de l’accessoirisation du matériel :
La société SEMAF expose que M. [O] a été défaillant dans sa mission, ès qualités de directeur technique, de donner des directives au serrurier auquel elle faisait appel pour la maintenance et l’entretien de certains matériels afin d’assurer leur compatibilité, (mise en place de produits standardisés sur de nouvelles portes achetées pour permettre un usage général…).
Elle verse de ce chef aux débats :
– la fiche de fonction prévoyant que M. [O] est responsable de l’optimisation et de l’accessoirisation du matériel en assurant la compatibilité avec l’ensemble des marques du parc,
– le procès-verbal de la réunion professionnelle du 24 janvier 2018 (pièce 12) : travaux sur matériels pour évolution de ceux-ci ; portes : uniformiser les passages de portes, le but étant que les portes deviennent multistandard, faire une feuille de travail à T. [S] pour les réparations de portes avec canon unique pour fin février 2018,
– l’attestation de M. [V] ne contenant aucun développement relatif à ce grief.
M. [O] conteste ce grief en exposant que dès l’acquisition d’un nouveau matériel ou la modification d’un ancien matériel, M. [S] était bien missionné pour l’accessoirisation et que sur les nouveaux produits et s’agissant des portes et barres de seuil nouvellement acquises, les accessoires n’étaient pas encore tous livrés au moment de son licenciement.
Les éléments versés aux débats permettent de constater que M. [O] s’est vu confier mission d’établir une feuille de travail pour les réparations de portes avec canon unique pour fin février 2018, qu’il ne justifie pas de l’exécution de cette mission.
8 – Défaillances dans la mission de gestion des relations avec les fabricants :
La société SEMAF soutient :
– que M. [O] avait mission d’assurer la gestion et la relation avec les fabricants (fiche de fonction, pièce 4)
– qu’il est parti en congés sans avoir commandé aux fournisseurs le matériel nécessaire à l’exécution du chantier des Culturales ni informé ses collègues de la situation, lesquels ont dû procéder dans l’urgence,
– que M. [O] n’a pris aucune précaution quant à la vérification de l’adéquation entre une commande de plus d’un million d’euros de matériel passée auprès de la société ATS.
Elle produit à ce titre :
– les documents afférents à des commandes de matériels passées auprès de la société Losberger les 23 et 24 avril 2018 pour des livraisons prévues en mai 2018 (pièce 32),
– des devis de la société Guillet pour la réalisation de raccords de planchers, datés du 4 mai 2018 (pièce 33),
– divers messages de M. [C], directeur des opérations, adressés entre le 25 et le 27 avril 2018, à la société Vinaut dans le cadre de la conclusion de la location de plusieurs structures pour le salon Les Culturales (pièces 34 à 36),
– les bons de confirmation de diverses commandes de matériel auprès de la société ATS en janvier, février et mars 2018 (pièce 38)
– un mail du directeur général à M. [O], daté du 3 avril 2018 : ‘je n’ai toujours pas reçu de ta part le tableau que je t’ai demandé’ dont la copie versée aux débats porte une mention manuscrite : ‘livraison ATS (pointage)’.
M. [O] conteste ces griefs en soutenant :
– s’agissant du dossier des Culturales : que lors de son départ en congés, tous les besoins du client n’étaient pas encore déterminés et qu’il avait fait un point de situation avec MM. [V] et [U] en convenant avec eux d’une répartition des tâches,
– s’agissant des commandes passées auprès d’ATS : qu’il n’a jamais été en mesure de connaître la liste précise des éléments commandés et livrés, que lors de la réunion du 9 avril 2018, il ne lui a été fait aucune remarque à ce titre et qu’ont été même notées les difficultés rencontrées avec cette société.
La mise en perspective des documents commerciaux produits par la société SEMAF et de l’attestation précitée de M. [U] (pièce 24) ci-dessus relatée établit la réalité des manquements allégués par l’employeur quant à la gestion du dossier des Culturales et M. [O] ne produit aucun élément objectif et vérifiable à l’appui de son allégation d’un partage des tâches et/ou d’une délégation de ses pouvoirs.
S’agissant des commandes passées auprès d’ATS, force est de constater que M. [O] ne justifie pas avoir répondu à la demande d’établissement d’un pointage des éléments effectivement livrés par ATS tel que sollicité dans le message du 3 avril 2018.
9 – Absence de comptes-rendus d’activité :
La société SEMAF expose que M. [O] n’a jamais effectué le moindre compte-rendu d’activité, qu’il tente d’entretenir une confusion entre la formalisation d’échanges au cours de réunions de cadrage intéressant tous les services et le suivi de son activité spécifique suite aux directives données dans le cadre de ces réunions.
M. [O] conteste tout manquement en exposant que 2 à 3 réunions étaient organisées par la direction chaque semaine dans le cadre desquelles était établi un compte-rendu écrit et qu’aucune demande de la direction sur ses activités n’a été formulée par la direction au cours de l’exécution du contrat.
La fiche de fonctions de M. [O] ne contient, s’agissant du compte-rendu de son activité que les mentions suivantes :
– travaille en collaboration étroite et en lien permanent sous les directives et le contrôle du directeur des opérations,
– rend compte à la direction de ses activités lors des réunions exploitation et chargés d’affaires ainsi que lors des réunions techniques et commerciales,
– doit se référer à la direction générale lors de la rencontre de tout problème.
Il ne peut dès lors être reproché à M. [O] une absence de reporting de son activité en dehors des comptes-rendus prévus dans le cadre des réunions opérationnelles auxquelles il participait régulièrement, de telles redditions de comptes n’étant pas prévues dans la fiche de fonctions et l’employeur ne justifiant pas d’un quelconque refus de M. [O] de répondre à des demandes du directeur des opérations en vue de contrôler son activité.
10 – Récapitulatif :
En définitive, sont matériellement établis les griefs 1, 3, 4, 6 (partiellement au titre des chantiers Evénement Jeunes de [Localité 7] et F.I.B.), 7 et 8 (partiellement, à l’exception des commandes ATS).
Sur la qualification juridique des manquements avérés :
La société SEMAF soutient que les manquements visés dans la lettre de licenciement constituent, non des erreurs révélatrices d’une insuffisance professionnelle, mais un comportement fautif caractérisant un manque de sérieux dans le travail et un non-respect délibéré des consignes, en faisant observer que la modification de ses attributions consécutive à l’avenant du 31 octobre 2017 n’a pas eu pour effet de lui confier de nouvelles missions/ fonctions mais seulement de recentrer son activité sur une partie de ses fonctions antérieures, que ses défaillances, toutes nées après la réorganisation ne peuvent ainsi trouver leur source que dans des négligences/carences volontaires de sa part et par suite fautives, la ‘rupture’ dans un parcours professionnel jusqu’alors sans faille démontrant qu’il s’agit d’une attitude nouvelle et choisie.
M. [O] soutient :
– que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement relèvent d’une éventuelle insuffisance professionnelle ne pouvant donner lieu à licenciement disciplinaire, l’insuffisance professionnelle devant être distinguée du comportement fautif du salarié pouvant se traduire par des négligences volontaires, des refus d’obéissance ou le non-respect des règles de l’entreprise, soit, en toute hypothèse, des comportements délibérés,
– que la société SEMAF ne rapporte pas la preuve de sa volonté de faire mal son travail, qu’il lui est reproché des erreurs, omissions et carences dans l’exécution de certaines tâches, éléments ne caractérisant aucune faute en ce qu’ils ne révèlent aucune défaillance volontaire de la part du salarié, mais d’éventuelles simples négligences ou carences non fautives,
– qu’il convient de tenir compte du faible temps utilisé par l’employeur pour se débarrasser de lui alors qu’il venait de modifier ses fonctions dans le cadre d’une restructuration perturbatrice pour l’ensemble du personnel,
– qu’en toute hypothèse, le doute doit profiter au salarié.
Sur ce,
Il convient de considérer que :
– si l’insuffisance professionnelle n’est en soi pas constitutive d’une faute et ne peut justifier une sanction disciplinaire, sauf lorsqu’elle résulte d’une volonté délibérée de mal exécuter le contrat de travail,
– par leur multiplicité, leur diversité et leur concomitance avec la restructuration de l’entreprise ayant entraîné une réduction des attributions de M. [O] (qui n’établit pas que les fonctions résiduelles de directeur technique qui lui ont été confiées étaient différentes de celles exercées en la même qualité avant la restructuration, exposant, notamment, utiliser le logiciel Locasyst depuis 20 ans) les manquements dont la matérialité a ci-dessus été constatée traduisent une volonté délibérée de sa part de ne pas/plus remplir ses fonctions avec la diligence et le sérieux nécessaires, nonobstant les directives précises de ses supérieurs, comportement constitutif d’une faute justifiant la mise en ouvre d’une procédure disciplinaire.
,
Sur l’appréciation de la gravité des manquements retenus :
Compte-tenu de l’importance stratégique des fonctions occupées par M. [O], devant garantir la logistique nécessaire à l’activité commerciale de l’entreprise et de son haut niveau de responsabilité dans l’organisation de celle-ci, les manquements multiples constatés sur une courte période, ayant eu des conséquences financières non négligeables (s’agissant en particulier des chantiers Culturales et F.I.B.), révélateurs d’un désengagement volontaire suite à la restructuration de l’entreprise, ruinant le lien de confiance devant exister à l’égard d’un des personnages clés de la société, caractérisent une faute grave justifiant le départ immédiat du salarié en raison de l’impossibilité de poursuivre le contrat de travail, même pendant la durée limitée du préavis.
Il convient donc, faisant droit à l’appel incident de la société Semaf et réformant le jugement entrepris en ce qu’il a dit requalifié le licenciement de M. [O] en licenciement ‘pour faute simple’ et condamné la société Semaf à lui payer des indemnités de préavis et congés payés afférents et une indemnité légale de licenciement, de juger que le licenciement pour faute grave de M. [O] est justifié et de débouter celui-ci de l’ensemble de ses demandes relatives à la rupture du contrat de travail, s’agissant tant des demandes pécuniaires que des demandes tendant à la remise de documents de fin de contrat rectifiés.
II – Sur la demande en dommages-intérêts pour licenciement brutal et vexatoire :
M. [O] expose qu’il a été brutalement évincé de la société après plus de 20 ans de service sans avoir jamais fait l’objet de sanction disciplinaire et après avoir toujours fait preuve d’un professionnalisme sans faille, que la société SEMAF a utilisé le prétexte d’un entretien annuel programmé à son retour de vacances pour le mettre à pied brutalement à titre conservatoire, ce dont il a été profondément traumatisé.
La société SEMAF conclut à la confirmation du jugement entrepris ayant débouté M. [O] de ce chef de demande en exposant que M. [O] ne peut se dissimuler derrière la mise en oeuvre parfairtement régulière d’une procédure légale pour en déduire un préjudice moral de principe.
Sur ce,
L’analyse des documents versés aux débats (lettre du 20 avril 2018 de convocation à entretien annuel d’évaluation fixé au 2 mai 2018 (date de retour de congés de M. [O]), convocation à entretien préalable avec notification de mise à pied à titre conservatoire en date du 2 mai 2018) ne permet pas de reconnaître à la procédure suivie par la société un caractère brutal et vexatoire, alors même que la plupart des griefs invoqués par celui-ci ont été constatés pendant les congés de printemps de M. [O], dans le cadre de diligences accomplies pour pallier l’absence momentané de celui-ci.
Le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a débouté M. [O] de ce chef de demande indemnitaire.
III – Sur la demande de remboursement de retenue sur rémunération :
Les premiers juges ont condamné la société SEMAF à verser à M [O] une somme de 1 000 € ayant fait l’objet d’une retenue sur le bulletin de salaire de mai 2018 pour avance sur déplacement, en considérant qu’aucun document contractuel (contrat initial et/ou avenant) ne prévoit le versement d’une somme de 1 000 € à titre d’avance sur déplacement, que les contrats produits par l’employeur pour illustrer la pratique par lui invoquée sont postérieurs à la date d’embauche de M. [O] et concernent des fonctions de chargés d’affaires que celui-ci n’a jamais exercées, que la société ne prouve pas que la somme de 1 000 € a été effectivement versée à ce titre à M. [O].
La société SEMAF conclut à la réformation du jugement déféré en exposant :
– que M. [O] évoque en une ligne dans son dispositif l’existence d’une somme de 1 000 € qui aurait été injustement retenue au titre d’une avance sur déplacement qu’il n’aurait jamais perçue, ‘de quoi parle-t-il exactement ‘ Quelle avance ‘ Quel déplacement ‘ (sic)’, qu’en l’absence d’éléments d’explication et probants au soutien de sa demande, il doit en être débouté,
– qu’en matière de frais professionnels, elle procède au remboursement sur présentation de justificatifs et met à disposition des cartes bancaires et carburants,
– que néanmoins, pour faciliter leur activité, elle verse également à ses salariés, au moment de leur embauche, une avance pour frais de déplacement d’un montant de 1 000 € qui n’est retenue sur le bulletin de paie du salarié qu’au moment de son départ définitif,
– que ce dispositif constitue un usage dont a bénéficié M. [O] à son arrivée dans l’entreprise, même s’il n’a été formalisé contractuellement qu’à compter de 2006,
– que M. [O] s’est toujours vu rembourser ses frais professionnels, sans impact sur l’avance consentie à son embauche de sorte que cette ‘réserve’ n’a jamais été utilisée,
-que M. [O] ne justifie d’aucun frais professionnel qui aurait fait l’objet d’une imputation sur l’avance de 1 000 €.
M. [O] – qui ne développe aucun moyen de droit ou de fait de ce chef – doit être réputé solliciter la confirmation du jugement entrepris.
Sur ce,
C’est par une motivation pertinente tant en droit qu’en fait que la cour adopte expressément que les premiers juges ont condamné la société SEMAF à verser à M. [O] la somme de 1 000 € objet de retenue à titre d’avance sur frais de déplacement sur le bulletin de salaire de mai 2018, relevant exactement que la société SEMAF ne justifie pas de son versement effectif, que l’usage auquel elle se réfère n’a été contractualisé que plusieurs années après l’engagement de M. [O], que les contrats de travail produits à ce titre par l’employeur concernent des salariés exerçant des fonctions différentes de celles de M. [O].
IV – Sur les demandes accessoires :
L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du C.P.C. en faveur de l’une quelconque des parties, s’agissant tant des frais irrépétibles exposés en première instance que de ceux exposés en cause d’appel.
M. [O] sera condamné aux dépens d’appel et de première instance.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
Vu le jugement du conseil de prud’hommes de la Roche-sur-Yon en date du 16 mars 2020,
1 – Sur la contestation de la légitimité de la rupture du contrat de travail :
Réformant partiellement le jugement entrepris et statuant à nouveau :
– Juge que le licenciement de M. [O] par la S.A.S. SEMAF est justifié par la faute grave du salarié,
– Déboute M. [O] de ses demandes en paiement d’indemnité compensatrice de préavis et d’indemnité de congés payés y afférents et de sa demande en paiement d’indemnité de licenciement,
Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [O] de sa demande en dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
2 – Sur la demande indemnitaire pour licenciement brutal et vexatoire :
Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [O] de ce chef de demande,
3 – Sur la demande de remboursement de retenue sur salaire :
Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la S.A.S. SEMAF à verser à M. [O] la somme de 1 000 € net injustement retenue au titre d’une avance sur déplacement,
Réformant la décision entreprise sur le point de départ des intérêts, dit que la somme de 1 000 € net produira intérêts au taux légal à compter de la réception par la société SEMAF de la convocation à l’audience de conciliation,
4 – Sur les demandes accessoires :
Réformant le jugement entrepris :
– Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du CP.C. en faveur de l’une quelconque des parties relativement aux frais irrééptibles exposés en première instance,
– Condamne M. [O] aux dépens de première instance,
Ajoutant au jugement entrepris :
– Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du C.P.C. en faveur de l’une quelconque des parties en cause d’appel,
– Condamne M. [O] aux dépens d’appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,