Retenues sur salaire : 30 septembre 2022 Cour d’appel de Douai RG n° 19/02181

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Retenues sur salaire : 30 septembre 2022 Cour d’appel de Douai RG n° 19/02181

ARRÊT DU

30 Septembre 2022

N° 1619/22

N° RG 19/02181 – N° Portalis DBVT-V-B7D-SVXE

FB / GD

Jugement du

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LENS

en date du

04 Octobre 2019

(RG 18/00317 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 30 Septembre 2022

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

– Prud’Hommes-

APPELANT :

M. [B] [P]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représenté par Me Nathalie EXPOSTA, avocat au barreau de DOUAI substitué par Me Mathilde WACOGNE, avocat au barreau de DOUAI, et assisté par Me Caroline BALDACCHINO, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉE :

SARL [U] [R]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Alice VANDAELE, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS : à l’audience publique du 03 Mai 2022

Tenue par Frédéric BURNIER

magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Gaetan DELETTREZ

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

[M] [L]

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

[H] [T]

: CONSEILLER

Béatrice REGNIER

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Septembre 2022,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par Frédéric BURNIER, Conseiller, pour le Président empêché (art. 456 CPC) et par Cindy LEPERRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 12 avril 2022

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [B] [P] a été engagé par la société [U] [R] par contrat à durée déterminée, du 12 mai au 12 novembre 2016, en qualité d’installateur thermique et sanitaire.

Par courrier du 2 novembre 2016, Monsieur [P] a informé la société [U] [R] de sa volonté de rompre le contrat de travail de manière anticipée.

Le 26 avril 2017, Monsieur [B] [P] a saisi le conseil de prud’hommes de Lens et formé des demandes afférentes à l’exécution du contrat de travail, à la requalification de celui-ci en contrat de travail à durée indéterminée et de la démission en prise d’acte de la rupture aux torts de l’employeur.

Par jugement du 4 octobre 2019, le conseil de prud’hommes de Lens a débouté Monsieur [B] [P] de ses demandes.

Monsieur [B] [P] a régulièrement interjeté appel de ce jugement par déclaration du 7 novembre 2019, en visant expressément les dispositions critiquées.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 3 février 2020, Monsieur [B] [P] demande à la cour d’infirmer le jugement et de :

– prononcer la requalification du contrat à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée ;

– prononcer la requalification de la démission en prise d’acte de la rupture aux torts exclusifs de la société [U] [R] et considérer qu’elle produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– condamner la société [U] [R] à lui verser les sommes de:

– 1 475,77 euros à titre de rappel de salaire pour la période de mai à novembre 2016 ;

– 147,57 euros à titre d’indemnité de congés payés sur rappel de salaire ;

– 361,05 euros à titre de rappel sur indemnités de repas ;

– 36,10 euros à titre d’indemnité de congés payés sur indemnités de repas ;

– 1 482,60 euros à titre d’indemnité de requalification ;

– 1 482,60 euros à titre de dommages et intérêts pour requalification de la démission en prise

d’acte de la rupture;

– 741,30 euros à titre d’indemnité conventionnelle de préavis ;

– 74,13 euros à titre d`indemnité de congés payés sur préavis ;

– 480,32 euros à titre d’indemnité de congés payés ;

– 1 500,00 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1240 du code civil;

– 2 000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

A l’appui de ses demandes, Monsieur [P] expose que:

– la société [U] [R] ne lui a pas fourni du travail chaque jour ; elle a déduit du salaire les heures de travail qu’elle n’avait pas été en capacité de fournir, en mentionnant sur les bulletins de salaire des ‘heures absences non rémunérées’ ou ‘absences congés sans solde’ ; il a dû se tenir à la disposition de son employeur sans toutefois être réglé de la rémunération contractuellement prévue ;

– il n’a jamais demandé à travailler moins ;l’employeur n’apporte nullement la preuve de ses allégations en la matière ;

– l’employeur a considéré comme des absences non rémunérées certaines périodes de congés payés qu’il avait accordées de manière anticipée ;

-le versement par Pôle emploi d’indemnités complémentaires ne saurait exonérer l’employeur de ses obligations légales et contractuelles ;

– il n’a jamais émis de contestations pendant la durée du contrat car il espérait obtenir une embauche en contrat à durée indéterminée ;

– l’employeur ne lui a pas versé l’indemnité de repas conventionnelle lorsqu’il n’a pas travaillé; ce manque à gagner résulte des carences de l’employeur qui n’a pas respecté son obligation de fournir du travail ; la convention collective prévoit une indemnisation forfaitaire sans justification des frais exposés ;

– le contrat de travail ne lui a pas été remis dans les deux jours ouvrables suivant l’embauche, de sorte qu’il encourt la requalification ; des messages démontrent qu’il n’a pas reçu ce document avant le 17 mai 2016 ;le contrat a été antidaté au 12 mai ; étant en période d’essai, il ne se trouvait en position de force pour exiger que cette mention soit corrigée ;

– il a rompu la relation de travail en raison de manquements de l’employeur à ses obligations contractuelles ; les difficultés financières engendrées par la situation imposée par l’employeur l’ont conduit à présenter sa démission après avoir reçu une promesse d’embauche dans une autre entreprise ; cette promesse ne s’est pas concrétisée et il s’est trouvé privé d’allocations chômage pour avoir volontairement quitté son emploi; l’employeur a, dans un premier temps, donné son accord pour cette rupture anticipée avant d’exiger qu’il démissionne ;

– il n’a perçu qu’une partie de l’indemnité de congés payés lui revenant ; il n’a pu être déclaré auprès de la caisse de congés payés qu’à hauteur des heures figurant sur ses bulletins de salaire; la responsabilité de l’employeur peut être engagée sur le fondement de l’article 1240 du code civil.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 22 janvier 2022, la société [U] [R] demande la confirmation du jugement et la condamnation de Monsieur [P] à lui verser une indemnité pour frais de procédure de 3 000 euros.

Elle soulève l’irrecevabilité des demandes de paiement de congés payés et d’indemnités de congés payés.

La société [U] [R] fait valoir que :

– le contrat de travail à durée déterminée a été signé par les parties le 12 mai 2016 ; l’appelant ne rapporte pas la preuve contraire ; le message produit par celui-ci n’est nullement probant ; au regard des règles de computation des délais, le délai légal de transmission a, dans tous les cas, bien été respecté ; l’absence du délai de deux jours n’entraîne plus désormais la requalification du CDD en CDI ;

– la société n’a fait qu’accéder à une demande du salarié qui souhaitait, pour des motifs personnels, s’absenter des chantiers lorsque le travail y était moins prenant ; l’appelant réinterprète les sms qu’il a adressés à son employeur ; celui-ci ne se tenait pas en permanence à la disposition de son employeur ;

-le salarié a continué à percevoir des allocations de Pôle emploi pour les journées non travaillées; il peut se déduire de cette situation que l’intéressé a déclaré une reprise d’activité à temps partiel; ce fait explique le souhait manifesté de moins travailler ;

– le salarié a sollicité des congés qui ont généré des retenues, s’agissant de congés sans soldes;

– l’indemnité de repas constitue la contrepartie de frais exposés par le salarié ; l’appelant ne peut y prétendre au titre des jours qu’il n’a volontairement pas travaillés ;

– la démission du salarié est explicitement motivée par le projet d’être embauché dans une autre entreprise dans le cadre d’un CDD de 12 mois ; ce motif de rupture du contrat à durée déterminée n’était pas valable ; aucune faute rendant la poursuite de la relation contractuelle impossible ne peut être reprochée à l’employeur ; l’appelant ne justifie d’aucun préjudice ;

– la demande d’indemnité de congés payés est irrecevable, l’employeur n’étant pas débiteur des congés payés qui relèvent de la caisse de congés payés du BTP ; l’employeur a remis au salarié le certificat justifiant de ses droits à congé ; il appartenait à ce dernier de le communiquer à la caisse.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 12 avril 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande en requalification du contrat à durée déterminée

L’article L.1242-13 du code du travail prévoit que le contrat de travail est transmis au salarié, au plus tard, dans les deux jours ouvrables suivant l’embauche.

Avant l’entrée en vigueur des dispositions de l’article L.1245-1 alinéa 2, issues de l’ordonnance du 22 septembre 2017, il était constant que la transmission tardive du contrat de travail à durée déterminée équivalait à une absence d’écrit qui entraînait la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée.

En l’espèce, la société [U] [R] verse au dossier un contrat de travail à durée déterminée conclu avec Monsieur [P] pour la période allant du 12 mai au 12 novembre 2016.

Ce contrat, fait en deux exemplaires et daté du 12 mai 2016, porte la signature du salarié accompagnée de la mention manuscrite ‘lu et approuvé’. La mention relative à la date n’a fait l’objet d’aucune rature ou modification.

Le message adressé le lundi 16 mai suivant par Monsieur [P] à Monsieur [R], non contesté par celui-ci, ainsi libellé : ‘[U] c’est [B] ! Pourrais-tu me ramener le contrat demain  » Merci et à demain’, ne saurait suffire, seul et en l’absence de tout autre élément, à prouver que le contrat de travail n’était pas signé à cette date et que le document susvisé a été antidaté. Ce message n’est pas suffisamment clair et précis pour écarter toute équivoque (en effet, il pourrait tout autant signifier que le salarié a oublié son exemplaire du contrat au siège de l’entreprise).

Dès lors, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Monsieur [P] de sa demande de requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée et de sa demande d’indemnité de requalification afférente.

Sur la demande en rappel de salaire

L’employeur étant tenu, par le contrat de travail, de payer sa rémunération et de fournir un travail au salarié, il lui appartient, en cas de contestation portant sur une retenue sur salaire pour absence, de démontrer que le salarié a refusé d’exécuter son travail ou qu’il ne s’est pas tenu à sa disposition, et que le salaire n’était pas dû en raison de l’absence injustifiée.

En l’espèce, Monsieur [P] conteste les retenues sur salaire apparaissant sur ses fiches de paie sous les mentions : ‘heures absences non rémunérées’ et ‘absences congés sans solde’. Il allègue que ces retenues correspondent à des périodes aux cours desquelles l’employeur n’a pas été en mesure de lui fournir du travail ou à des congés payés accordés par anticipation.

Pour sa part, la société [U] [R] ne verse aux débats aucun élément démontrant que le salarié, qui venait de conclure un contrat à durée déterminée et à temps plein, aurait demandé à réduire son activité et à pouvoir quitter les chantiers lorsque la charge de travail ne rendait pas sa présence indispensable. Elle ne justifie ni d’avoir autorisé des absences non rémunérées ni d’avoir rappelé à l’ordre, voire sanctionné, le salarié en raison d’absences injustifiées.

Elle se réfère aux échanges de sms produits par l’appelant.

Or, aucun de ces messages ne porte mention d’une demande d’autorisation d’absence, d’une information donnée à l’employeur concernant une indisponibilité ou d’un refus d’assurer une prestation (hormis un message du lundi 10 octobre qui mentionne que le salarié ne sera pas disponible le mercredi matin suivant).

Dans la majorité des messages, Monsieur [P] demande à son employeur de lui indiquer le prochain lieu de rendez-vous.

Les messages des 21 et 23 juin 2016 apparaissent explicites.

Dans les deux cas, Monsieur [P] a pris l’initiative de contacter son employeur, à la mi-journée, pour lui demander : ‘tu vas avoir besoin de moi aujourd’hui  », témoignant de sa disponibilité. Il a reçu une réponse le 21 juin lui indiquant qu’il n’était attendu que le lendemain matin, mais aucune réponse le 23 juin.

Par ailleurs, le lundi 4 juillet 2016, l’employeur a envoyé un message au salarié lui donnant rendez-vous uniquement le lendemain.

De même, le dimanche 31 juillet, alors que le salarié lui demandait s’il devait se présenter le lendemain à 7 heures, l’employeur lui a indiqué qu’il n’était attendu que le mardi suivant. Le même échange s’est reproduit le dimanche 7 août 2016.

L’échange du dimanche 28 août 2016 paraît le plus évocateur. Au salarié qui a pris l’initiative de demander : ‘demain rdv 7 h00  », l’employeur a répondu : ‘Rdv lundi prochain à 7h00″, indiquant que le salarié ne travaillerait pas pendant une semaine. Ce dernier a rétorqué : ‘ok pas de souci !! Par contre on fais passer la semaine en congés payer anticipés  » Bonne semaine’.

Ces échanges, non équivoques, établissent que le salarié s’est maintenu à la disposition de l’employeur qui n’a pas systématiquement eu recours à ses services, le laissant des journées, voire une semaine entière, sans activité.

Il s’ensuit que les retenues sur salaire correspondant à des journées où l’employeur n’a pas été en capacité de fournir du travail au salarié sont infondées.

Toutefois, il ressort également de ces messages que le salarié a pris l’initiative de demander des journées de congés : les 11, 12, 18, 19 et 22 août (message du 2 août 2016), les 1er, 2, 22, 23, 26 et 28 septembre (message du 30 septembre 2016). Qu’il s’agisse de congés sans soldes ou de congés anticipés susceptibles d’être indemnisés par la caisse de congés payés du bâtiment, ces journées n’avaient pas à être rémunérées par l’employeur.

Les retenues opérées au titre de ces journées sont donc fondées.

Il résulte de l’ensemble de ces considérations que Monsieur [P] est en droit de prétendre à un rappel de salaire d’un montant de 1 046,37 euros.

Sur la demande relative aux indemnités de repas

L’article 8-15 de la convention collective des ouvriers employés dans des entreprises du bâtiment occupant jusqu’à 10 salariés, dans sa version applicable au litige, prévoit le versement d’une indemnité de repas qui ‘a pour objet d’indemniser le supplément de frais occasionné par la prise du déjeuner en dehors de la résidence habituelle de l’ouvrier’.

Cette indemnité de repas, qui a pour objet de compenser le surcoût du repas pris en dehors du domicile, constitue, nonobstant son caractère forfaitaire et le fait que son versement ne soit soumis à la production d’aucun justificatif, un remboursement de frais et non un complément de salaire.

Monsieur [P] ne peut prétendre au paiement d’indemnités de repas au titre des journées non prestées dans la mesure où il n’a engagé aucun frais imposé par son activité professionnelle. Le manquement de l’employeur à ses obligations contractuelles est, en l’espèce, indifférent, ces indemnités n’ayant pas le caractère d’un complément de salaire.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a débouté Monsieur [P] de sa demande à ce titre.

Sur la rupture de la relation de travail

Selon l’article L.1243-1 du code du travail, le contrat à durée déterminée peut être rompu avant l’échéance du terme avec l’accord des parties, ou à défaut, en cas de faute grave, de force majeure ou d’inaptitude constatée par le médecin du travail.

Il est constant que la faute grave peut résulter de manquements de l’employeur rendant impossible le maintien du lien contractuel.

En l’espèce, alors que le contrat à durée déterminée devait arriver à son terme le 12 novembre 2016, Monsieur [P] a manifesté le souhait d’une rupture anticipée.

Dans un premier temps, il a soumis à son employeur, le 31 octobre, un projet de rupture amiable.

Puis, par courrier du 2 novembre 2016, il a informé ce dernier en ces termes : ‘je vous informe que je souhaite quitter mon poste actuel que j’occupe depuis le 12/05/2016 au sein de votre entreprise en contrat à durée déterminée. En effet, j’ai obtenu un contrat à durée déterminée de 12 mois dans une autre entreprise, et conformément à l’article L.1243-2 je peux rompre par anticipation le contrat à durée déterminée que nous avons conclu. Comme l’oblige la loi, je respecterai un préavis d’une semaine et la fin de mon contrat sera donc effective le 04/11/2016.’

Le motif de cette rupture anticipée est clair et non équivoque, le salarié souhaitant entrer au service d’un nouvel employeur.

Le courrier susvisé ne porte mention d’aucune réserve.

Ce courrier n’a été précédé ou accompagné d’aucun grief adressé à l’employeur.

Les messages qui ont été échangés au cours de la relation contractuelle ne font état d’aucune réclamation, d’aucun reproche. Ils n’expriment ni acrimonie ni ressentiment. Par exemple, lorsque l’employeur a indiqué au salarié le 28 août qu’il ne travaillerait pas pendant une semaine, ce dernier a répondu ‘Ok pas de souci !!’. Les absences répétées de fourniture de travail n’ont manifestement pas embarrassé Monsieur [P], celui-ci percevant un complément de salaire de Pôle emploi variant en fonction du montant de la rémunération perçue. Ainsi, les seules demandes émanant de Monsieur [P], à compter du 12 septembre 2016, visent à obtenir sa fiche de paie du mois d’août pour pouvoir procéder à sa déclaration auprès de Pôle emploi.

Monsieur [P] n’a exposé des griefs à l’encontre de son ancien employeur que près de 6 mois après cette rupture anticipée à l’occasion de la saisie du conseil de prud’hommes.

Lorsque le conseil de Monsieur [P] a, par courrier du 6 mars 2017, contacté la société [U] [R] pour solliciter un rappel de salaire, il n’a nullement prétendu que ce manquement de l’employeur était à l’origine de la décision de rupture anticipée.

Enfin, Monsieur [P] ne peut utilement arguer que sa recherche d’un nouvel emploi démontre la réalité d’un litige implicite avec la société [U] [R]. En effet, aucun élément ne permet de retenir qu’il existait une perspective de renouvellement du contrat à durée déterminée ou d’une embauche à durée indéterminée avec cet employeur. Dès lors, la recherche d’un autre emploi, moins de deux semaines avant l’échéance du terme du contrat en cours, ne peut être regardée comme révélatrice d’une difficulté.

Il résulte de l’ensemble de ces considération qu’il n’est nullement établi l’existence d’un quelconque différend entre les parties, antérieur ou contemporain de la rupture anticipée à l’initiative du salarié. Aucun lien de causalité entre cette décision de rupture anticipée et les reproches énoncés tardivement à l’encontre de l’employeur n’apparaît caractérisé.

Il convient donc de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Monsieur [P] de sa demande de requalification de la rupture anticipée du contrat de travail en prise d’acte de la rupture aux torts exclusifs de l’employeur produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de ses demandes indemnitaires afférentes.

Sur l’indemnité de congés payés

Il ressort des documents versés au dossier, notamment du certificat établi par l’employeur à destination de la caisse de congés payés du bâtiment et du décompte de paiement établi par cette caisse, que les droits à congés payés de Monsieur [P] ont été calculés à partir des seules informations communiquées par l’employeur.

Or, ce dernier a déclaré un nombre d’heures et un montant total des rémunérations versées ne prenant pas en compte les périodes au cours desquels il n’a pas été en mesure de fournir un travail au salarié qui se tenait à sa disposition.

La société [U] [R] ayant fourni à la caisse de congés payés des informations erronées, elle demeure redevable envers le salarié des conséquences de ce manquement.

La cour a retenu que le solde de rémunération que Monsieur [P] aurait dû percevoir s’élève à 1 046,37 euros. Il est donc en droit de prétendre à un complément d’ indemnité de congés payés d’un montant de 104,64 euros.

En revanche, Monsieur [P] qui ne justifie ni de l’existence ni de l’étendue d’un préjudice distinct doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1240 du code civil.

Sur les autres demandes

Sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, il convient de condamner la société [U] [R] à payer à Monsieur [B] [P] une indemnité destinée à couvrir les frais non compris dans les dépens qu’il a dû engager pour assurer la défense de ses intérêts et qu’il y a lieu de fixer à 1 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il a débouté Monsieur [B] [P] de ses demandes de rappel de salaire et d’indemnité de congés payés, et laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant :

Condamne la SARL [U] [R] à payer à Monsieur [B] [P] les sommes de :

– 1 046,37 euros à titre de rappel de salaire,

– 104,64 euros à titre d’indemnité de congés payés,

Condamne la SARL [U] [R] à payer à Monsieur [B] [P] la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute la SARL [U] [R] de sa demande d’indemnité pour frais de procédure formée en cause d’appel ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la SARL [U] [R] aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER

[W] [Z]

P/ LE PRESIDENT EMPECHE

[H] [T]

 


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