Retenues sur salaire : 28 février 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/04644

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Retenues sur salaire : 28 février 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/04644

C4

N° RG 21/04644

N° Portalis DBVM-V-B7F-LDHS

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SELARL NCAMPAGNOLO

Me David HERPIN

SELAS FIDAL

Me Nicolas LEGER

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 28 FEVRIER 2023

Appel d’une décision (N° RG F19/00005)

rendue par le Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de VALENCE

en date du 04 octobre 2021

suivant déclaration d’appel du 02 novembre 2021

jonction avec le dossier 21/04713 prononcée le 23 novembre 2021

APPELANT :

Monsieur [V] [F],

né le 01 Septembre 1956 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représenté par Me Nathalie CAMPAGNOLO de la SELARL NCAMPAGNOLO, avocat au barreau de MARSEILLE, substituée par Me Cyril BOUDAULT, avocat au barreau de MARSEILLE,

INTIMES :

Maître [G] [O], ès qualités de liquidateur judiciaire de la Société VORTEX,

Arche Jacques Coeur

[Adresse 2]

[Localité 5]

représenté par Me David HERPIN, avocat postulant inscrit au barreau de VALENCE, substitué par Me Pierre LAURENT, avocat au barreau de VALENCE,

et par Me Ingrid BARBE, avocat plaidant inscrit au barreau de MONTPELLIER,

plaidé par Me LAURENT,

Maître [M] [T], ès qualités de liquidateur judiciaire de la Société VORTEX,

[Adresse 4]

[Localité 5]

représenté par Me David HERPIN, avocat postulant inscrit au barreau de VALENCE, substitué par Me Pierre LAURENT, avocat au barreau de VALENCE,

et par Me Ingrid BARBE, avocat plaidant inscrit au barreau de MONTPELLIER,

plaidé par Me LAURENT,

Organisme DELEGATION UNEDIC AGS-CGEA

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Guillaume SCHENCK de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de VALENCE substituée par Me Giovanna RODA, avocat au barreau de VALENCE,

S.A.S.U. JL INTERNATIONAL, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 9]

[Adresse 9]

[Adresse 9]

représentée par Me Nicolas SAUVAGE de la SELASU SEA AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Nicolas LEGER, avocat au barreau de PARIS,

dont la déclaration d’appel a été déclarée caduque par ordonnance juridictionnelle du 22/03/2022,

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente,

Madame Gwenaëlle TERRIEUX, Conseillère,

Madame Isabelle DEFARGE, Conseillère,

DÉBATS :

A l’audience publique du 09 janvier 2023,

Mme Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente chargée du rapport, assistée de Mme Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, en présence de Mme [L] [W], stagiaire IUT Carrières Juridiques, a entendu les parties en leurs conclusions et observations, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile.

Puis l’affaire a été mise en délibéré au 28 février 2023, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L’arrêt a été rendu le 28 février 2023.

Exposé du litige :

M. [F] a été embauché par la SAS VORTEX selon contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à compter du 30 août 2014 en qualité de conducteur accompagnateur de personnes présentant un handicap et/ou à mobilité réduite en période scolaire, coefficient 137 V groupe 7 bis.

Le contrat de travail a été repris par la SAS JL INTERNATIONAL (ci-après SAS JLI) suivant avenant du 23 août 2018 à effet au 1er août 2018, à la suite de la perte du marché sur lequel était affecté M. [F].

M. [F] a saisi le Conseil de prud’hommes de Valence le 8 janvier 2019, aux fins d’obtenir la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, et la condamnation de la SAS VORTEX et de la SAS JLI à lui payer des rappels de salaire dus en conséquence.

Me [E] et Me [Y] ont été désignés co-administrateurs judiciaires et Me [T] et Me [O] ont été désignés co-mandataires judiciaires.

Le 2 octobre 2019, M. [F] a été désigné en qualité de représentant de section syndicale.

Le 27 janvier 2020, M. [F] a été mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable à une mesure disciplinaire, fixé au 6 février 2020.

Par jugement du tribunal de commerce de Montpellier du 7 février 2020, la SAS VORTEX a été placée en redressement judiciaire, converti en liquidation judiciaire par jugement du 29 avril 2020 du même tribunal, avec poursuite d’activité jusqu’au 22 juin 2020.

Le 26 février 2020, M. [F] s’est vu notifier un blâme.

Le 9 mars 2020, M. [F] a été placé en arrêt de travail jusqu’au 13 mars 2020.

Le 13 mars 2020, M. [F] a pris acte de la rupture de son contrat de travail.

Le 15 juin 2020, M. [F] a saisi le Conseil de prud’hommes de Valence aux fins d’obtenir l’annulation du blâme, des dommages et intérêts pour licenciement nul, et les indemnités de licenciement afférentes, des dommages et intérêts pour discrimination syndicale, outre une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 4 octobre 2021, le Conseil de prud’hommes de Valence a :

Ordonné la jonction des procédures 19/00005 et 20/00192 qui seront appelées sous le numéro 19/00005,

Dit que le contrat de travail intermittent est à temps partiel,

Débouté M. [F] de l’ensemble de ses demandes à l’encontre de la SAS VORTEX, représentée par Me [M] [T] et [G] [O], ès-qualités de co-mandataires liquidateurs,

Dit que la prise d’acte de la rupture est imputable à l’employeur,

Dit que le licenciement est nul,

En conséquence,

Dit que le salaire de référence est de 857,10 euros bruts,

Condamné la société JL INTERNATIONAL (SAS) à payer à M. [F] les sommes de :

5 142,60 euros au titre de l’indemnité pour licenciement nul,

1 714,20 euros au titre du préavis,

171,42 euros au titre des congés payés y afférents,

1 199,94 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

16 284,90 euros au titre de l’indemnité pour violation du statut protecteur,

Dit que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter de la présente décision avec capitalisation par année entière,

Condamné la société JL INTERNATIONAL (SAS) à payer à M. [F] la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Débouté M. [F] de ses demandes, fins et prétentions plus amples et contraires,

Débouté la SAS VORTEX, représentée par Me [M] [T] et [G] [O], ès-qualités de co-mandataires liquidateurs, de sa demande d’indemnité fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejeté la demande de condamnation relative aux sommes retenues par l’huissier instrumentaire en application du décret du 12 décembre 1996 devant être supportées par la société JL INTERNATIONAL (SAS),

Rejeté la demande relative à la transmission de la décision à Pôle Emploi et de la condamnation de la société JL INTERNATIONAL (SAS) au remboursement des allocations versées,

Débouté la société JL INTERNATIONAL de sa demande d’indemnité fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamné la société JL INTERNATIONAL (SAS) aux entiers dépens.

La décision ainsi rendue a été notifiée aux parties par lettres recommandées avec avis de réception.

M. [F] et la société JL INTERNATIONAL en ont relevé appel par déclaration de son conseil au greffe de la présente juridiction.

Le 10 février 2022, un avis de caducité de la déclaration d’appel de la SAS IL INTERNATIONAL a été adressé par le greffe aux parties.

Par ordonnance juridictionnelle du 22 mars 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la caducité de la déclaration d’appel de la SAS IL INTERNATIONAL du 5 novembre 2022.

Par ordonnance juridictionnelle du 8 novembre 2002, le conseiller de la mise en état a rejeté l’exception d’irrecevabilité des conclusions d’intimé et d’appel incident de la SAS IL INTERNATIONAL du 25 avril 2022, soulevée par M. [F]

Par conclusions du 22 juillet 2022, M. [F] demande de :

Infirmer le jugement de départage du Conseil de Prud’hommes de Valence rendu le 4 octobre 2021 sauf en ce qu’il a :

Jugé que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail était imputable à la société JL INTERNATIONAL,

Condamné la société JL INTERNATIONAL au paiement de dommages et intérêts pour licenciement nul, à une indemnité compensatrice de congés payés et à son incidence congés payés, l’indemnité de licenciement, à une indemnité pour violation du statut protecteur (sur ces sommes le quantum sera revu), ainsi qu’à une somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Statuer à nouveau et y ajouter,

Dire et juger que les demandes de M. [F] sont recevables et bien fondées,

Débouter la société VORTEX, ses liquidateurs, le CGEA de [Localité 8] et la société JL INTERNATIONAL de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

Dire et juger que l’ensemble des sommes mises à la charge de la société VORTEX seront inscrites au passif de la liquidation judiciaire de la société VORTEX,

Dire et juger que l’ensemble des sommes mises à la charge de la société VORTEX et inscrites au passif de la procédure collective seront garanties par l’AGS CGEA,

A l’égard de la société VORTEX,

A titre principal sur les rappels de salaire :

Dire et juger que le contrat de travail à temps partiel doit être requalifié en un contrat de travail à temps complet,

En conséquence,

Fixer le salaire à la somme de 1 539,14 euros,

Condamner la société VORTEX et fixer la créance aux sommes suivantes :

Rappel de salaire : 31 627,57 euros,

Congés payés afférents : 3 162,76 euros,

Rappel sur prime de 13e mois : 2 635,63 euros,

Congés payés afférents : 263,56 euros,

A titre subsidiaire sur les rappels de salaire :

Dire et juger que le salarié n’a pas été rémunéré de l’ensemble de ses heures de travail,

En conséquence,

Condamner la société VORTEX et fixer la créance aux sommes suivantes :

Sur la durée minimum annuelle : 7 260,88 euros à titre de rappel de salaire (toutes sommes confondues),

Sur les 30 minutes :

Rappel de salaire : 2 707,56 euros

Congés payés afférents : 270,76 euros

Rappel sur prime de 13e mois : 225,63 euros

Congés payés afférents : 22,56 euros

Sur les travaux annexes :

Rappel de salaire : 1 083,24 euros

Congés payés afférents : 108,32 euros

Rappel sur prime de 13e mois : 90,25 euros

Congés payés afférents : 9,02 euros

En tout état de cause :

Condamner la société VORTEX et fixer la créance aux sommes suivantes :

9 125,68 euros à titre d’indemnité de travail dissimulé,

10 000 euros à titre d’indemnité pour préjudice moral et financier,

A l’égard de la SAS JL INTERNATIONAL :

Juger que l’appel incident de la SAS JL INTERNATIONAL est irrecevable en raison de la caducité de son appel principal,

Débouter la SAS JL INTERNATIONAL de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

Constater la violation par la SAS JL INTERNATIONAL de l’accord du 7 juillet 2009 précité,

Dire et juger que la requalification à temps complet s’appliquera également à l’égard de la SAS JL INTERNATIONAL au titre de la reprise du contrat de travail,

Condamner la société SAS JL INTERNATIONAL à lui verser les sommes suivantes (à parfaire jusqu’à la rupture du contrat de travail et à tout le moins à appliquer à l’avenir) :

A titre principal, dans le cadre de la requalification à temps complet :

Rappel de salaire : 19 500,18 euros,

Congés payés afférents : 1 950,02 euros,

Rappel sur prime de 13e mois : 1 625 ;01 euros,

Congés payés afférents : 156,18 euros,

Dommages et intérêts pour non-respect des dispositions conventionnelles relatives à la garantie d’emploi : 5 000 euros,

A titre subsidiaire, rappel de salaire sur 30 minutes :

Rappel de salaire : 1 863,18 euros,

Congés payés afférents : 186,31 euros,

Rappel sur prime de 13e mois : 155,26 euros,

Congés payés afférents : 15,52 euros,

Condamner la société JL INTERNATIONAL à régulariser son contrat de travail,

Fixer le salaire aux sommes suivantes :

A titre principal, en cas de requalification du contrat de travail à temps complet : 1 569,94 euros,

A titre subsidiaire, 959 euros correspondant à la moyenne des trois derniers salaires perçus,

Dire et juger que la sanction est nulle,

Dire et juger que la mise à pied conservatoire est nulle et abusive, en conséquence, condamner la SAS JL INTERNATIONAL au paiement de :

959 euros à titre de rappel de salaire,

8 000 euros à titre de dommages et intérêts pour mise à pied abusive et vexatoire,

Condamner la société JL INTERNATIONAL au paiement de :

10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

8 000 euros pour discrimination syndicale,

Condamner la société JL INTERNATIONAL au paiement d’un rappel de salaire outre les congés payés afférents (à parfaire),

Condamner la société JL INTERNATIONAL au paiement d’une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé équivalente à six mois de salaire soit :

A titre principal : 9 419,64 euros,

A titre subsidiaire : 5 754 euros,

Sur la rupture du contrat de travail :

Dire et juger que la prise d’acte s’analyse en un licenciement nul et en conséquence, condamner la SAS JL INTERNATIONAL au paiement de :

Indemnité compensatrice de préavis :

A titre principal 3 139,88 euros, outre 313,98 euros de congés payés afférents,

A titre subsidiaire : 1 918 euros, outre 191 euros de congés payés afférents,

Indemnité de licenciement :

A titre principal : 2 197,91 euros,

A titre subsidiaire : 1 342,60 euros,

Dommages et intérêts pour licenciement nul : 20 000 euros,

Indemnité pour violation du statut protecteur :

A titre principal : 47 098 euros,

A titre subsidiaire : 28 770 euros,

A l’égard des deux sociétés :

Condamner la SAS JL INTERNATIONAL au paiement de 2 000 euros chacune sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l’instance,

Fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société VORTEX la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l’instance,

Assortir toutes ces sommes des intérêts de droit avec capitalisation à compter de la présente saisine.

Par conclusions du 28 novembre 2022, la Délégation UNEDIC AGS-CGEA de [Localité 8] demande de :

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 4 octobre 2021 par le Conseil de prud’hommes de Valence (RG n° 19/00005),

Débouter M. [F] de l’ensemble de ses prétentions comme injustes et non fondées,

En tout état de cause,

Dire et juger qu’elle ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-19 et L. 3253-17 du code du travail,

Dire et juger que la procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire puis de liquidation judiciaire de l’employeur a interrompu de plein droit le cours des intérêts et ce, par application de l’article L. 622-28 du code de commerce,

Dire et juger que l’indemnité qui sera fixée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens ainsi que l’astreinte qui serait prononcée doivent être exclus de la garantie de la délégation UNEDIC AGS, les conditions spécifiques de celle-ci n’étant pas réunies notamment au visa de l’article L. 3253-6 du code du travail,

Dire et juger que la garantie de la Délégation UNEDIC AGS est encadrée par les articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail qui prévoient, pour toutes causes de créances confondues, le principe du plafond de garantie de la délégation UNEDIC AGS applicable aux créances qui seraient fixées au bénéfice du demandeur au titre de son contrat de travail,

Dire et juger que l’obligation de la Délégation UNEDIC AGS de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par le mandataire judiciaire,

Condamner M. [F] aux entiers dépens.

Par conclusions du 15 avril 2022, Me [T] et Me [O], ès-qualités liquidateurs de la SASU VORTEX, demandent de :

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 4 octobre 2021 par le Conseil de prud’hommes de Valence (RG n° F 19/00005),

Débouter M. [F] de l’ensemble de ses prétentions comme injustes et non fondées,

Condamner M. [F] à leur verser la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Le condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Par conclusions du 6 décembre 2022, la SAS JL INTERNATIONAL demande de :

Confirmer le jugement du Conseil de prud’hommes de Valence, disant que le contrat de travail intermittent de M. [F] était à temps partiel,

Infirmer le jugement du Conseil de prud’hommes de Valence, ayant annulé le licenciement de M. [F] et l’ayant condamnée au titre de la violation du statut protecteur,

Ordonné la restitution des sommes indûment perçues par M. [F], en exécution du jugement de première instance,

Ce faisant,

A titre principal,

Faire sommation à M. [F] de communiquer ses avis d’imposition sur ses revenus déclarés pour 2018, 2019, 2020,

Constater l’absence de violation de l’accord du 7 juillet 2009,

Rejeter l’action en requalification en temps plein de son contrat de travail intermittent,

Constaté le caractère justifié et non vexatoire de la mise à pied conservatoire de M. [F],

Constater le caractère justifié du blâme infligé à M. [F],

Constater l’absence de discrimination syndicale,

Constater l’absence de déloyauté dans l’exécution du contrat de travail,

Constater la rupture du contrat de travail de M. [F] ne lui est pas imputable,

Requalifier en démission la prise d’acte par M. [F] de la rupture de son contrat de travail,

Rejeter la demande au titre du travail dissimulé,

A titre subsidiaire,

Débouter M. [F] de l’intégralité de ses demandes à son encontre,

Condamner M. [F] à lui verser la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamner M. [F] aux entiers dépens.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 6 décembre 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur l’irrecevabilité des conclusions d’intimé et d’appel incident de la SAS JLI tirée de la caducité de sa déclaration d’appel :

M. [F] demande à ce que l’appel incident de la SAS JLI soit déclaré irrecevable en raison de la caducité de sa déclaration d’appel.

Par ordonnance juridictionnelle du 8 novembre 2002, le conseiller de la mise en état a rejeté l’exception d’irrecevabilité des conclusions d’intimé et d’appel incident de la SAS IL INTERNATIONAL du 25 avril 2022, soulevée par M. [F]

Le conseiller de la mise en état ayant déjà statué sur cette fin de non-recevoir, il y a lieu de la déclarer irrecevable devant la présente cour d’appel.

Sur la requalification du contrat de travail à temps partiel avec la SAS VORTEX en contrat de travail à temps complet :

Moyens des parties,

Le salarié fait valoir que de nombreuses irrégularités justifient la requalification :

L’article L. 3123-33 du code du travail qui est d’ordre public, donc sans dérogation possible, rappelle que le recours à des contrats de travail intermittent n’est possible que lorsqu’il existe « une convention ou par un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche étendu qui le prévoit,

Le contrat de travail intermittent ne s’applique qu’aux transports scolaires ; dès lors, tous salariés se voyant travailler hors établissement scolaire, ne peut se voir attribuer un contrat de travail intermittent, coefficient 137V ; le salarié doit ainsi se voir attribuer un contrat de travail à temps partiel, selon les dispositions de droit commun, et bénéficier d’un coefficient 136V ; son contrat de travail doit être automatiquement requalifié,

Son contrat de travail n’indique pas qu’il s’agit d’un contrat intermittent,

Les périodes de travail et de suspension du contrat de travail ne sont pas communiquées au salarié ; aucune annexe prévoyant les vacances scolaires n’était adressée au salarié ; or, l’accord sur les contrats de travail intermittent impose à l’employeur l’obligation « à chaque rentrée scolaire (d’annexer) au contrat de travail du salarié concerné, la liste des jours scolaires et l’horaire type de 1 semaine de travail sans congé scolaire »,

La modification des horaires de travail sans respecter le délai de prévenance démontre l’irrégularité de l’emploi du temps du salarié ; la modification des horaires de travail sans respecter le délai de prévenance démontre l’irrégularité de l’emploi du temps de le salarié,

Le nombre d’enfants transportés par le salarié peut varier d’un mois à l’autre de sorte que là encore, le salarié est nécessairement à la disposition de l’employeur ; ces modifications étaient faites sans respect du délai de prévenance.

Me [T] et Me [O] ès-qualités soutiennent que :

Le contrat de travail est intermittent dès lorsqu’il correspond à la définition donnée par l’article L. 3123-34 du Code du travail, c’est à dire qu’il pourvoit un emploi permanent qui, par nature, comporte une alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées,

L’absence du terme « intermittent » dans la rédaction du contrat n’a aucunement pour effet d’empêcher cette qualification, l’article 5 du contrat de travail étant parfaitement clair à cet égard,

Le salarié ne démontre pas avoir été dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il allait travailler, puisque cinq types de documents permettaient au salarié et à l’entreprise de connaître au préalable et in fine les heures de travail à réaliser ou réalisées,

La répartition des horaires de travail sur la semaine était mentionnée dans les contrats de travail,

Les calendriers des journées d’accueil dans les établissements étaient fournis au salarié ou des plannings annexés aux contrats de travail,

Les feuilles de service permettaient au salarié de connaître l’identité des élèves, leur adresse et l’heure indicative de prise en charge, ainsi que les trajets retours,

Les feuilles de route et/ou déclarations individuelles étaient remplies quotidiennement par le salarié en fonction de son activité ; elles indiquaient le temps total de trajet ainsi que les travaux annexes,

Les décomptes TTE reprenant les heures de travail déclarées et/ou relevées par la géolocalisation étaient joints aux bulletins de paie et pouvaient être rectifiés par le salarié.

Par ailleurs, les mandataires judiciaires ès-qualités exposent que :

Le salarié ne justifie nullement s’être tenu à la disposition permanente de son ancien employeur,

Le salarié était parfaitement informé de son activité de transport scolaire qui ne s’exerce par définition qu’aux horaires d’ouverture et de fermeture des établissements scolaires, lesquels sont constants tout au long de l’année scolaire,

Les horaires de travail pouvaient fluctuer ponctuellement en raison d’aléas indépendants de la volonté de la société VORTEX,

Le salarié ne produit aux débats aucun élément de nature à prouver que l’employeur aurait modifié ses horaires d’intervention ou qu’il n’aurait pas respecté le délai de prévenance de trois jours,

Le salarié ne justifie d’aucun préjudice procédant d’une éventuelle prévenance tardive de l’employeur.

L’UNEDIC AGS-CGEA de [Localité 8] fait valoir que :

Le salarié ne rapporte aucun élément permettant d’établir qu’il était contraint de rester en permanence à la disposition de l’employeur,

Le salarié était au contraire dans la situation de pouvoir prévoir son rythme de travail,

Le contrat de travail est conforme aux exigences légales et conventionnelles relatives aux salariés conducteurs à temps partiel, le contrat mentionnant la répartition des horaires de travail,

Les horaires d’ouverte et de fermeture des établissements scolaires sont constants tout au long de l’année,

Les fluctuations dans ses horaires de travail étaient dues à des aléas exceptionnels et indépendants de la volonté de l’employeur (conditions de circulation, imprévus liés à l’absence de l’élève, etc.),

Ces fluctuations étaient exceptionnelles,

Les feuilles de route permettent de retracer les trajets quotidiens et font apparaître l’existence d’horaires réguliers,

Le salarié ne démontre pas que l’employeur aurait modifié ses horaires de travail sans respecter le délai de prévenance de trois jours,

Lorsque le délai de trois jours n’a pas respecté, les modifications étaient conformes à l’accord du 18 avril 2002,

Le salarié ne démontre pas que le nombre d’enfants variait d’un mois sur l’autre.

Réponse de la cour,

En application de l’article L. 3123-33 du code du travail, des contrats de travail intermittent peuvent être conclus dans les entreprises couvertes par une convention ou par un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche étendu qui le prévoit.

Selon les dispositions de l’article L. 3123-34 du code du travail, le contrat intermittent est un contrat à durée indéterminée. Il peut être conclu afin de pourvoir un emploi permanent qui, par nature, comporte une alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées.

Ce contrat est écrit. Il mentionne notamment :

1° La qualification du salarié ;

2° Les éléments de la rémunération ;

3° La durée annuelle minimale de travail du salarié ;

4° Les périodes de travail ;

5° La répartition des heures de travail à l’intérieur de ces périodes.

En l’absence de définition des périodes travaillées et non travaillées dans le contrat de travail, ce dernier doit être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée de droit commun à temps plein.

En l’absence de la mention de la durée annuelle minimale de travail du salarié ou de la répartition des heures de travail à l’intérieur des périodes travaillées, le contrat est présumé à temps plein ; il appartient alors à l’employeur qui soutient que le contrat n’est pas à temps plein d’établir la durée annuelle minimale convenue et que le salarié connaissait les jours auxquels il devait travailler et selon quels horaires, et qu’il n’était pas obligé de se tenir constamment à la disposition de l’employeur.

La convention collective applicable est déterminée par l’activité principale de l’entreprise. La mention sur le contrat de travail d’une convention collective autre que celle dont relève l’entreprise a pour effet de rendre applicables les dispositions plus favorables de cette convention à laquelle l’employeur a entendu soumettre la relation.

Il ressort de l’extrait Kbis de la SAS VORTEX versé aux débats par Me [T] et Me [O] ès-qualités que la SAS VORTEX exerçait l’activité de transport routier public de voyageurs et accompagnement de personnes à mobilité réduite.

Il en résulte que la SAS VORTEX devait appliquer la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950 et ses annexes.

Selon les dispositions de l’article 1 de l’accord du 15 juin 1992 relatif au contrat de travail intermittent des conducteurs scolaires, l’accord s’applique exclusivement aux conducteurs engagés pour effectuer des transports liés à l’activité scolaire : ramassage et desserte des établissements scolaires, cantines, piscines, centres aérés, classes vertes, classes de neige, tiers temps pédagogique.

En conséquence, le contrat de travail intermittent conclu avec pour objet l’exercice d’activités liées aux transports scolaires n’est proposé que dans les cas où ces activités conduisent, au sein de l’entreprise, à devoir y pourvoir par des emplois de conduite, comportant une alternance de périodes travaillées et non travaillées, pour lesquelles les autres formes de contrat de travail à durée indéterminée sont inadaptées.

Il ressort des pièces versées aux débats que :

M. [F] a été engagé par la SAS VORTEX par contrat de travail à durée indéterminée du 30 août 2014 en qualité de « conducteur accompagnateur de personnes présentant un handicap et/ou à mobilité réduite, en période scolaire » au coefficient 137V groupe 7 bis, tel que défini dans la convention collective nationale des transports routiers et des activités auxiliaires du transport,

Ce contrat précise que son emploi relève du groupe « Conducteur en périodes scolaires (CPS) », de l’annexe ouvriers de la convention collective nationale des transports à laquelle le présent contrat de travail se trouve rattaché, ainsi que des dispositions de l’accord sur la définition des conditions d’exercice de l’activité de conducteur accompagnateur de personnes présentant un handicap ou à mobilité réduite,

Des avenants au contrat de travail ont été conclus par la suite, afin de modifier les dispositions relatives au lieu de travail et à la durée et répartition du travail.

M. [F], qui soutient que la SAS VORTEX ne pouvait pas faire application des dispositions susvisées de l’accord du 15 juin 1992 relatif au contrat de travail intermittent des conducteurs scolaires, et ainsi conclure un contrat de travail intermittent en application des dispositions des articles L. 3123-33 et L. 3123-34 du code du travail, ne démontre pas, comme conclu, qu’il n’était pas amené à exercer uniquement des transports liés à l’activité scolaire, tel que ceux-ci sont définis par l’article 1 de cet accord, à savoir, ramassage et desserte des établissements scolaires, cantines, piscines, centres aérés, classes vertes, classes de neige, tiers temps pédagogique.

Ainsi, M. [F] ne produit aucun élément permettant à la cour d’appel de constater ou de convaincre la cour que les élèves en situation de handicap et/ou de mobilité réduite qu’il avait la charge de transporter, n’étaient pas tous inscrits dans des établissements scolaires, et que certains d’entre eux, devaient être transportés en instituts spécialisés (IME), lesquels ne sont pas, selon ses dires, soumis aux vacances scolaires, ce qu’il ne démontre pas non plus.

Ainsi, il y a lieu de retenir que la SAS VORTEX était bien fondée à faire application des dispositions susvisées de l’accord du 15 juin 1992 autorisant la conclusion de contrats de travail intermittent pour les fonctions de transport d’enfants porteurs d’un handicap et/ou à mobilité réduite, celles-ci impliquant une alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées.

Les conditions posées par les dispositions susvisées de l’article L. 3123-34 du code du travail sont reprises par l’article 2 de l’accord du 15 juin 1992, et l’article 4 de l’accord du 24 septembre 2004 relatif à la définition, au contenu et aux conditions d’exercice de l’activité des conducteurs en périodes scolaires des entreprises de transport routier de voyageurs ajoute les conditions suivantes :

La durée annuelle minimale contractuelle de travail en périodes scolaires, ne peut être inférieure à 550 heures pour une année pleine comptant au moins 180 jours de travail ;

Le volume d’heures complémentaires dans la limite du quart de la durée annuelle minimale de travail est fixé au contrat de travail ;

Le contrat doit comporter la référence, lorsqu’il existe, à l’accord d’entreprise ou d’établissement instituant la modulation du temps de travail ;

Le contrat doit préciser le lieu habituel de prise de service.

Ce même accord prévoit également que le contrat de travail doit préciser ou renvoyer à une annexe mentionnant les périodes scolaires travaillées mise à jour à chaque rentrée scolaire lorsque l’évolution du calendrier scolaire le nécessite.

S’agissant de la qualification du contrat, il est sans incidence que le contrat soit désigné par les termes « contrat à temps partiel à durée indéterminée » et non par l’appellation « contrat de travail intermittent », la désignation du contrat par les parties n’étant pas une condition de validité prévue par l’article susvisé.

Il ressort en outre des termes de l’article 5 du contrat de travail objet du litige qu’il a été « expressément convenu que le travail de M. [F] étant lié au rythme de l’activité scolaire, le présent contrat se trouve automatiquement suspendu lors des vacances scolaires ».

Il résulte de cette disposition dénuée d’ambiguïté que les parties ont bien entendu conclure un contrat de travail intermittent, en application des dispositions combinées des articles L. 3123-33, L. 3123-34 et de l’accord du 15 juin 1992 qui autorisait l’employeur à recourir à ce type de contrat pour le transport scolaire.

S’agissant des mentions devant figurer dans le contrat, il doit être relevé que le contrat du 30 août 2014 mentionne :

La qualification de M. [F] à l’article 1, le salarié étant recruté en qualité de « conducteur accompagnateur de personnes présentant un handicap et/ou à mobilité réduite, en période scolaire »,

Les éléments de la rémunération à l’article 6,

La durée annuelle minimale de travail à l’article 5.1 : « La durée du travail annuelle contractuelle de M. [F] hors heures complémentaires, est fixée à 472 heures pour une année scolaire complète, appréciée prorata temporis pour les années incomplètes de travail. La durée annuelle minimale contractuelle de travail en période scolaire ne peut être inférieure à 550 heures pour une année pleine comptant au moins 180 jours de travail »,

Les périodes de travail, dès lors qu’il ressort explicitement du contrat que le salarié n’exerce son activité que durant les périodes scolaires, ce que précise par ailleurs l’article 5.3 : « M. [F] exerce son activité uniquement les jours habituels de classe des établissements scolaires. Le planning annuel prévisionnel des jours travaillés au cours de l’année scolaire en cours est joint au présent contrat (cf. annexe). Ce planning annuel pourra être modifié chaque année en fonction du nouveau calendrier scolaire défini par le Ministère de l’Education Nationale ou de l’établissement d’accueil spécialisé. Un nouveau planning prévisionnel sera communiqué au salarié au plus tard le 31 août de chaque année et se substituera automatiquement au précédent. Chaque nouveau planning prévisionnel constituera une annexe au présent avenant. Ce planning prévisionnel est susceptible d’évoluer en cours d’année scolaire en fonction des aménagements académiques ou des établissements »,

La répartition des heures de travail à l’intérieur de ces périodes à l’article 5.3, lequel mentionne la répartition et la durée des horaires de travail par jour du lundi au samedi, ce même article précisant : « La répartition ci-dessus (horaires, nombre d’heures journalières, nombre de jours hebdomadaire), pourra être modifiée dans les cas suivants : Tout demande en provenance d’un établissement scolaire ou plus généralement du client ou du donneur d’ordre, liée à toute cause d’ordre scolaire ou familial : absence ponctuelle ou définitive des enfants, enfants supplémentaires à transporter, modification des tournées scolaires, etc’ ; Affectation sur une autre tournée ; Perte ou gain d’un nouveau marché ; Remplacement d’un salarié absent ; Accroissement temporaire d’activité. Toute modification de la répartition des horaires et/ou de la durée du travail de M. [F], lui sera communiquée en respectant un délai de prévenance de 3 jours ouvrés ».

S’agissant de la définition des périodes travaillées et non travaillées dans le contrat de travail, Me [T] et Me [O] ès-qualités versent aux débats un avenant du 26 février 2015, auquel est attaché, en annexe, un planning annuel prévisionnel de travail, et deux autres avenants modifiant les dispositions de l’article 5 relatif à la durée et répartition du travail.

S’il n’est pas contestable que certains des avenants produits ne contiennent pas en annexe un calendrier scolaire signé par le salarié, il ne peut valablement être soutenu par M. [F] qu’il ne connaissait pas la zone académique dont il relevait et qu’ainsi le contrat de travail n’aurait pas défini les périodes travaillées et les périodes non travaillées, conformément aux dispositions de l’article L. 3123-34 du code du travail. La partition géographique du territoire national en zones ne variant pas d’une année sur l’autre, et les périodes de vacances pour chacune des trois zones étant mises à la disposition du public par le Ministère de l’éducation nationale officiellement une année en avance, M. [F] ne produit aucun élément permettant de convaincre la cour que la SAS VORTEX ne respectait pas le délai de prévenance prévu par le contrat de travail en cas de modification des horaires de travail prévus par le contrat de travail et les avenants successifs.

Outre, le fait que le contrat de travail prévoyait expressément que le nombre d’enfants à prendre en charge pourrait varier, M. [F] ne démontre pas que la SAS VORTEX aurait régulièrement fait varier le nombre d’enfants dont il avait la charge sans respecter aucun délai de prévenance.

Enfin, l’écart entre les horaires de travail du salarié par rapport aux horaires définis dans les avenants successifs, tel que celui-ci ressort des feuilles de route qu’il verse aux débats n’est pas tel qu’il s’en déduirait que le salarié se tenait en permanence à la disposition de son employeur, cet écart s’expliquant par les aléas propres au transport scolaire (difficultés de circulation, retard des enfants lors de leur prise en charge ou lors de leur récupération à leur établissement scolaire), les feuilles de route produites démontrant au contraire une certaine régularité dans les horaires de travail de M. [F].

Eu égard à l’ensemble de ces constatations, l’employeur ayant bien défini dans les avenants les périodes travaillées, et le salarié échouant à démontrer qu’il se tenait en permanence à la disposition de son employeur, il y a lieu de rejeter sa demande de requalification de son contrat de travail intermittent en contrat de travail à temps complet, et les demandes de rappel de salaire afférentes.

Le jugement entrepris est confirmé de ce chef.

Sur la demande de rappel de salaire au titre de la retenue de 30 minutes par jour du temps de travail effectif :

Moyens des parties,

Le salarié soutient qu’il n’occupe pas les fonctions de « conducteur accompagnateur », soumis à un régime spécifique et à des missions spécifiques, mais celles « conducteur de personne présentant un handicap ».

Il fait valoir que :

– Il n’exerçait pas les fonctions de conducteur accompagnateur, qui sont soumises à un régime différent en application de « l’accord du 7 juillet 2009 relatif à la définition et aux conditions d’exercice de l’activité de conducteur accompagnateur de personnes présentant un handicap ou à mobilité réduite »,

– L’activité principale de la société détermine l’application d’une convention collective et non pas d’un accord spécifique,

– La lecture des bulletins de salaire distingue bien les salariés conducteurs accompagnateurs et les salariés simplement conducteurs,

– Si la société VORTEX transportait des personnes handicapées, il n’est pas démontré que la réalisation effective du transport devait assurer l’accompagnement des personnes prises en charge dépassant l’utilisation des équipements de véhicule.

Le salarié fait également valoir que :

La société VORTEX applique à tort l’accord dérogatoire du 7 juillet 2009 relatif à la définition et aux conditions d’exercice de l’activité de conducteur accompagnateur de personnes présentant un handicap ou à mobilité réduite applicables exclusivement aux conducteurs accompagnateurs pour retenir 30 minutes chaque jour sur le salaire de chaque salarié,

Aux termes de l’accord ARTT du 18 avril 2002, dont la société VORTEX ne conteste pas l’application, le temps de travail effectif des conducteurs à temps complet ou à temps partiel comprend les temps de conduite, les temps de travaux annexes ainsi que les temps à disposition : dès lors, le trajet domicile-lieu de prise en charge du premier enfant est du temps de conduite qui doit être considéré comme du travail effectif,

L’accord du 7 juillet 2009 dit TPMR n’est applicable qu’aux conducteurs accompagnateurs : aux termes de l’accord TPMR du 7 juillet 2009, les dispositions de cet accord ne sont applicables qu’aux conducteurs accompagnateurs de transport spécialisé de personnes handicapées et/ou à mobilité réduite, reconnus comme tel par les conditions obligatoires et cumulatives dudit accord ; dès lors, si l’employeur se prévaut d’un accord spécifique applicable à une certaine catégorie de conducteurs, il lui appartient de justifier de cette application et que les fonctions exercées par le salarié correspondent à la catégorie de conducteur accompagnateur, ce qu’il ne fait pas,

Il ressort de l’ensemble de ces éléments que l’employeur a opéré à tort une retenue sur salaire équivalente à 30 minutes de trajet par jour travaillé.

Me [T] et Me [O] ès-qualités soutiennent pour leur part que :

Au regard de la nature de son activité de transport routier public de voyageurs et accompagnement de personnes à mobilité réduite ou handicapées, la société VORTEX (NAF 4939B) devait appliquer les dispositions de la Convention collective des transports routiers et ses annexes,

Son activité se concentrait particulièrement autour du transport des élèves et des étudiants handicapés pour le compte des Conseils Départementaux, mais aussi pour le compte d’établissements tels que les Instituts Médico-Educatifs (IME), les Services d’Éducation Spécialisée et de Soins À Domicile (SESSAD), etc.,

Compte tenu de cette activité, les annexes étendues suivantes de la convention collective lui étaient donc applicables :

L’accord du 15 juin 1992 relatif au contrat de travail intermittent des conducteurs scolaires : les conducteurs concernés sont classés au coefficient 135V, Groupe 7 bis et la durée annuelle minimale contractuelle de travail ne peut être inférieure à 400 heures,

L’accord du 24 septembre 2004 mentionne que les services liés aux activités scolaires, à savoir le service du matin et le retour le soir, justifient le recours à des conducteurs dont le temps de travail n’atteint pas celui d’un conducteur à temps complet,

L’accord du 7 juillet 2009 relatif à l’emploi de conducteur accompagnateur a été rédigé afin de permettre le transport de personnes présentant un handicap ou à mobilité réduite, en dehors des lignes régulières ; cet accord est étendu, ce qui signifie qu’il s’applique de droit à toutes les sociétés qui entre dans son champ d’application ;

S’agissant plus précisément de l’application de l’accord du 7 juillet 2009 :

Les salariés de la société VORTEX étaient formés spécifiquement pour l’activité dite « TPMR » (transport de personnes à mobilité réduite), notamment par le biais de l’organisme de formation FT FORMATION,

Les conducteurs ne devaient donc pas s’en tenir à récupérer les élèves à un arrêt de bus, mais devaient aller les chercher devant leur domicile, assurer leur sécurité lors du transport et les amener à l’entrée de leur établissement scolaire pour les confier à une personne responsable,

La société VORTEX était chargée, selon les termes des marchés conclus, du transport d’élèves et d’étudiants gravement handicapés,

Le transport de personnes à mobilité réduite (TPMR) ne permettant que l’emploi de conducteurs accompagnateurs, l’emploi du salarié ne pouvait donc être que celui de conducteur accompagnateur,

Dans le cadre de ses fonctions pour le compte de la société VORTEX, le salarié conduisait un véhicule de moins de 10 places assises,

Tous les salariés de la société VORTEX ont exercé leurs fonctions dans le cadre de marchés publics attribués par les Conseils généraux afin d’amener des enfants handicapés dans des établissements d’enseignement qui mettent également en ‘uvre des actions éducatives,

Ainsi, l’activité de la société VORTEX était bien une activité de transport spécialisé de personnes handicapées et/ou à mobilité réduite en période scolaire et à destination des établissements scolaires qui relevait des dispositions de l’accord TPMR du 7 juillet 2009,

Enfin, la formation des conducteurs et le moyen de communication rapide ne sont pas des conditions d’application de l’accord du 7 juillet 2009 précédemment exposé, mais des conséquences de cette application,

Le salarié ne saurait donc se prévaloir de l’absence de formation TPMR et d’un téléphone portable pour prétendre ne pas avoir été soumis aux dispositions de l’accord du 7 juillet 2009, ces éléments ne constituant pas une condition d’application de l’accord,

C’est légitimement que la société VORTEX a qualifié le salarié, chargé du transport d’enfants en périodes scolaires, de conducteur en périodes scolaires et lui a appliqué, compte tenu du fait qu’il avait la responsabilité d’élèves et d’étudiants handicapés et/ou à mobilité réduite entre leur domicile et leur établissement d’éducation, le statut de conducteur accompagnateur.

Ils ajoutent que :

L’article 3-C de l’accord du 7 juillet 2009 offre notamment la possibilité, pour les conducteurs, de conserver le véhicule à leur domicile, en contrepartie de quoi les employeurs sont autorisés à ne pas considérer comme du temps de travail (et donc de ne pas rémunérer) un temps forfaitaire de 15 minutes sur la première et sur la dernière vacation des conducteurs correspondant au temps de trajet domicile-lieu de prise en charge du client,

Conformément à ces dispositions, le contrat de travail conclu par les parties avait prévu, pour le cas où le salarié faisait le choix de conserver le véhicule confié à son domicile afin de n’avoir pas à le remiser chaque jour au parking de l’agence dont il dépendait, la retenue d’une demi-heure de temps de conduite par jour qui correspondait à un forfait accordé pour le temps de trajet domicile-lieu de travail,

Le salarié a dûment accepté ces dispositions de son contrat de travail et consenti au décompte en remplissant et en signant une « demande d’utilisation du véhicule »,

Il s’agit d’une disposition spécifique dont l’application ne peut être remise en cause par les termes de portée beaucoup plus générale issus de l’accord du 18 avril 2002,

En l’espèce, il n’est pas contesté que ces 30 minutes correspondent au temps de trajet domicile-lieu de travail ; or, le salarié ne démontre pas en quoi son temps de trajet aurait excédé un temps « normal » de trajet, notion interprétée à plusieurs reprises par la Cour de cassation, notamment dans le cas de salariés itinérants.

L’UNEDIC AGS-CGEA de [Localité 8] fait valoir que :

La société VORTEX relevait de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport routier et activités auxiliaires de transport,

Cette convention collective comporte en annexe un accord étendu du 7 juillet 2009 qui est relatif à l’emploi de conducteurs accompagnateurs et qui s’applique aux sociétés exerçant à titre exclusif ou accessoire une activité de transport de personnes à mobilité réduite (TPMR),

Le TPMR implique la réunion de quatre conditions posées par l’accord : l’activité, le client utilisateur, le matériel de transport, la prestation de transport,

Toutes ces conditions d’application de l’accord sont réunies dans le cas d’espèce,

En outre, le contrat de travail informait précisément le salarié de la particularité de ses fonctions, il était formé pour la fonction de conducteur accompagnateur, il disposait de l’équipement nécessaire, et l’établissement était un établissement scolaire,

Le transport de personnes à mobilité réduite ne permet que l’emploi de conducteur accompagnateur,

Le contrat du salarié ne peut donc qu’être un contrat de conducteur accompagnateur ;

Le conducteur accompagnateur n’exerçant qu’en période scolaire, le contrat était par nature intermittent,

Ainsi, les dispositions de l’accord du 7 juillet 2009 étaient applicables à la société VORTEX, qui était en droit de qualifier l’emploi du salarié de conducteur accompagnateur.

Elle ajoute que :

L’accord du 7 juillet 2009 prévoit la possibilité pour l’employeur de décompter trente minutes par journée de temps de travail effectif, correspondant au temps moyen nécessaire au trajet entre le domicile du conducteur et le dépôt de l’entreprise le plus proche,

Les dispositions de cet accord étant spécifiques, elles priment sur les dispositions de portée plus générale,

Selon les dispositions de l’article L. 3121-4 du code du travail, le temps de transport entre le domicile et le lieu d’exécution de la prestation de travail ne constitue pas du temps de travail effectif.

Réponse de la cour,

La qualification professionnelle d’un salarié s’apprécie en considération des fonctions qu’il remplit effectivement au sein de l’entreprise, cette appréciation devant se faire par ailleurs au regard de la classification conventionnelle applicable à la relation contractuelle de travail entre les parties.

Il ressort des dispositions de l’article 1 de l’accord du 7 juillet 2009 relatif à l’emploi de conducteur accompagnateur que cet accord s’applique aux activités de transport de personnes à mobilité réduite (TPMR) exercées par une entreprise à titre exclusif ou accessoire et que le transport de personnes à mobilité réduite se caractérise par quatre conditions cumulatives : l’activité, le client utilisateur, le matériel de transport et la prestation de transport.

La notion d’activité visée désigne tout transport exclusivement dédié aux personnes handicapées et/ou à mobilité réduite pour lequel le conducteur est amené à apporter un accompagnement au voyageur dépassant l’utilisation des équipements du véhicule (élévateur, palette, etc.). Il peut être régulier, occasionnel ou à la demande. Ne sont donc pas concernés par le présent accord tous autres transports même occasionnellement ou partiellement fréquentés par des personnes handicapées ou à mobilité réduite.

S’agissant du matériel de transport, ce même article précise qu’il s’agit pour l’essentiel d’un véhicule de moins de dix places, spécialement équipé ou non, ne nécessitant pas la possession du permis D.

Il est également prévu que la prestation de transport est définie par le cahier des charges établi par l’autorité organisatrice qui en détermine les modalités, conditions et limites. Les particularités de la prise en charge du client (affections physiques ou psychologiques du client, conditions d’accès au lieu de prise en charge, accompagnement, sécurisation du client) sont, le cas échéant, précisées et indiquées sur la feuille de liaison dont un modèle est joint en annexe.

En outre, l’article 2 de l’accord définit précisément les spécificités de l’emploi de conducteur accompagnateur comme suit :

Au-delà de la seule conduite, le conducteur est aussi accompagnateur de la personne qu’il transporte, et à ce titre, il doit être formé pour réagir face aux différentes situations et toujours laisser la personne en position sécurisée ; en outre, le conducteur doit être équipé d’un moyen de communication rapide fourni par l’entreprise (un téléphone portable, par exemple) ;

S’agissant de l’aide qui doit être apportée à la personne handicapée ou à mobilité réduite, à l’exclusion de toute autre prestation et notamment du portage, une aide à la personne handicapée et/ou à mobilité réduite sera apportée par le conducteur accompagnateur, si besoin, entre le véhicule de transport et le lieu de prise en charge et/ou la destination de manière à toujours laisser la personne en position sécurisée ;

Dans les cas d’accès difficile au domicile de la personne handicapée et/ou à mobilité réduite, et lorsque le conducteur ne peut pas accompagner seul cette personne ou laisser une ou des personnes dans le véhicule avec une sécurité optimale, il devra être aidé soit : par l’organisation mise en place par l’autorité organisatrice ; par une personne valide et autonome de l’entourage de la personne handicapée et/ou à mobilité réduite, l’accord précisant que ces éléments doivent être identifiés avec précision dans la feuille de liaison.

Ce même article 2 précise par ailleurs, s’agissant de la formation, qu’au-delà de la possession d’un permis de conduire B, ou d’un permis D, le conducteur accompagnateur de transport spécialisé de personnes handicapées et/ou à mobilité réduite doit obligatoirement avoir suivi une formation complémentaire et spécifique dans les domaines suivants :

PSC1 ou équivalent ;

Connaissance de la clientèle : accueil personnalisé, enfants handicapés, précautions gériatriques, troubles spécifiques ;

Gestes et posture.

Enfin, aux termes de l’article 3.A de l’accord susvisé, l’emploi de conducteur de véhicule de moins de dix places est défini comme celui d’un ouvrier chargé de la conduite d’un véhicule ne nécessitant la possession du permis B, qui doit être capable d’effectuer les contrôles de base du véhicule (plein, niveaux, pneumatiques, fonctionnement de l’élévateur, organes intérieurs de sécurité des passagers, nettoyage du véhicule’), d’apporter une aide à la personne en situation de handicap et/ou à mobilité réduite, dans la limite de la formation reçue, le cas échéant, entre le véhicule de transport et le lieu de prise en charge et/ou la destination de manière à toujours laisser la personne transportée en position sécurisée, à l’exclusion de toute autre prestation à caractère médical et ou paramédical et de portage.

Il résulte de l’ensemble de ces dispositions que l’aide de la personne handicapée et/ou à mobilité réduite par le conducteur ne doit être apportée que dans les cas où elle est nécessaire, et non de manière systématique, que l’activité de conducteur accompagnateur n’implique pas nécessairement qu’une autre personne soit présente à bord afin d’assurer la surveillance et la sécurité des autres passagers lorsque le conducteur accompagnateur apporte son aide à un passager, et que l’entourage de la personne handicapée et/ou à mobilité réduite peut être amené à intervenir pour accompagner ladite personne au plus près du passage du véhicule.

Enfin, aux termes de l’article 3.D de cet accord, il est rappelé que lorsqu’un conducteur accompagnateur de transport spécialisé de personnes handicapées et/ou à mobilité réduite ne travaille que pendant les périodes scolaires, en application de l’accord du 24 septembre 2004, l’ensemble des dispositions de cet accord et notamment du coefficient 137V, de la garantie d’horaire annuel de 550 heures pour 180 jours de travail, de la garantie d’horaire journalier, selon le nombre de vacations, de l’indemnisation de l’amplitude et des coupures, s’applique.

Le guide pour la scolarisation des enfants et adolescents handicapés du Ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative produit par le salarié n’ayant aucune force normative, il ne peut avoir pour effet de déterminer des conditions d’application de l’accord du 7 juillet 2009.

Il ressort du contrat de travail conclu avec la SAS VORTEX le 30 août 2014 que M. [F] a été recruté en qualité de « conducteur accompagnateur de personnes présentant un handicap et/ou à mobilité réduite, en période scolaire » au coefficient de 137 V groupe 7 bis.

M. [F] ne peut exciper du seul fait que ses bulletins de paie font mention de la qualification de « conducteur en période scolaire » et du fait que la SAS VORTEX ait pu, sur des bulletins de salaire d’autres salariés, mentionner la qualification de conducteur accompagnateur, pour établir qu’il n’exerçait pas réellement les fonctions de conducteur accompagnateur, dès lors que son contrat de travail prévoit expressément qu’il est engagé en qualité de « conducteur accompagnateur ».

Il ressort des dispositions susvisées de l’accord du 7 juillet 2009 que celui-ci fait la distinction entre les transports permettant, occasionnellement, leur utilisation par des personnes handicapées et/ou à mobilité réduite, et la mise en place de transports dédiés uniquement au transport de ce type de personnes, pouvant impliquer un accompagnement de la personne handicapée ou/à mobilité réduite de la part du conducteur.

Eu égard à la définition de l’accompagnement telle qu’elle ressort des dispositions susvisées, il ne peut valablement être soutenu par M. [F] que cet accord implique, pour que la qualification de conducteur accompagnateur puisse être retenue, que le conducteur réalise pour chaque personne transportée un acte d’accompagnement, l’accord faisant plusieurs fois mention d’un accompagnement « en cas de nécessité », ou « lorsque celui-ci s’avère nécessaire », cet accompagnement ne devant pas nécessairement s’entendre, comme le conclut le salarié, en ce sens que le conducteur doit aller chercher lui-même la personne handicapée et/ou en situation de mobilité réduite jusqu’à son domicile, et l’accompagner jusqu’au sein de son établissement scolaire, et en faire de même lors du retour, l’accompagnement pouvant se limiter à une aide du conducteur permettant à la personne handicapée et/ou à mobilité réduite de prendre place dans le véhicule et d’en descendre.

Ainsi, c’est à tort que M. [F] soutient qu’il n’exerçait pas les fonctions de conducteur accompagnateur au motif que la SAS VORTEX avait décidé dans une note de service interne du 15 novembre 2010 que l’enfant devait être prêt au passage du véhicule, ce qui impliquait de sensibiliser les parents à la nécessité de présenter l’enfant au véhicule à son arrivée, et que le temps de prise en charge ne devait pas excéder deux minutes, le temps de dépose devant être encore plus rapide.

En effet, il ne peut se déduire du fait que le temps imparti au salarié pour effectuer la prise en charge (2 minutes) serait insuffisant pour réaliser un véritable accompagnement, que les conditions d’application de l’accord n’étaient pas remplies, cette durée, si elle devait s’avérer insuffisante pour prendre en charge la personne, pouvant seulement engager la responsabilité de l’employeur à l’égard de son client, ou, à l’égard du salarié pour exécution déloyale du contrat de travail.

Enfin, il ne peut être valablement soutenu que le fait d’avoir à disposition un moyen de communication ou d’avoir suivi les formations sont des conditions déterminant l’application de l’accord, son champ d’application dépendant uniquement de l’activité effectivement exercée par le salarié. Le fait pour l’employeur de ne pas mettre à disposition un moyen de communication ou d’omettre de faire suivre au salarié les formations nécessaires, constitue un manquement de celui-ci à ses obligations susceptibles d’engager sa responsabilité.

M. [F] ne conteste pas qu’il était chargé uniquement du transport d’enfants en situation de handicap et/ou à mobilité réduite.

En conséquence, il y a lieu de retenir que, eu égard aux fonctions réellement exercées par M. [F], qui correspondaient à celles de « conducteur accompagnateur », la SAS VORTEX était tenue d’appliquer l’ensemble des dispositions de l’accord du 7 juillet 2009 relatif à l’emploi de conducteur accompagnateur.

Selon les dispositions de l’article 3C de cet accord, l’activité est régie par la convention collective nationale des transports routiers et des activités auxiliaires du transport (CCNTR) et notamment par les dispositions des accords du 18 avril 2002 et du 24 septembre 2002. Il est rappelé à cet égard que, conformément à l’accord du 18 avril 2002, le temps de travail effectif des conducteurs comprend les temps de conduite, les temps de travaux annexes ainsi que les temps à disposition, et que le salarié doit être informé mensuellement de la situation de son compteur « durée du travail » au moyen d’un document annexé à son bulletin de paie. De même, conformément à la CCNTR, les salariés bénéficient de la garantie d’horaire annuel de 550 heures pour 180 jours de travail, de la garantie d’horaire journalier selon les nombre de vacations (‘)

Par exception et selon les usages ou accords d’entreprise, la mise à disposition du véhicule de moins de 10 places utilisé pour l’activité de TPMR peut permettre de joindre le domicile du salarié au lieu de prise en charge du client et inversement.

A défaut d’accord d’entreprise existant ou à conclure, ou encore d’usage préexistant et avec l’accord exprès du salarié, le temps à bord d’un véhicule de moins de 10 places utilisé pour l’activité de TPMR et mis à disposition par l’entreprise entre le domicile du salarié et le lieu de prise en charge du client lors de la première et de la dernière prise de service de la journée pourra ne pas être considéré comme du temps de travail, et ce dans la limite d’un temps forfaitaire estimé à 15 minutes (soit ¿ heure au total dans la journée) et correspondant à un temps moyen nécessaire au trajet entre le domicile du conducteur et le dépôt de l’entreprise le plus proche.

Aux termes de l’article 5 de l’avenant au contrat de travail du 26 février 2015, il est prévu que le lieu de travail de M. [F] est « la localité tête de ligne où il prend son service en permanence, située sur la commune de [Localité 7], où est remisé le véhicule. Ce lieu de dépôt peut être modifié, sous quinzaine, et sur simple demande, en fonction des besoins de la société.

Par exception aux dispositions précédentes, suite à la demande de M. [F], et après autorisation expresse de la direction de la société Vortex, le véhicule pourra être remisé à son domicile, tel que défini dans le présent contrat, et permettre de joindre le domicile de M. [F] et le lieu de prise en charge du client, et inversement.

Dans ce cas, il est expressément convenu que le temps à bord du véhicule de service mis à disposition par l’entreprise entre le domicile de M. [F] et le lieu de prise en charge du client lors de la première et la dernière prise de service ne sera pas considéré comme du temps de travail et ce dans la limite d’un temps forfaitaire estimé à 15 minutes (soit une demi-heure au total dans la journée) et correspondant à un temps moyen nécessaire au trajet entre le domicile du conducteur et le dépôt de l’entreprise le plus proche, conformément aux dispositions de l’article 3-C de l’accord sur la définition et les conditions d’exercice de l’activité de conducteurs accompagnateurs de personnes présentant un handicap et/ou à mobilité réduite du 7 juillet 2009 ».

Me [T] et Me [O] ès qualités versent aux débats la « Demande d’utilisation du véhicule » du 30 août 2014, signé par le salarié, dans lequel celui-ci a accepté « expressément les dispositions de l’accord sur la définition et les conditions d’exercice de l’activité de conducteurs accompagnateurs de personnes présentant un handicap ou à mobilité réduite et notamment celles relatives au calcul du temps de travail des conducteurs lorsque le lieu de dépôt du véhicule de service est le domicile du conducteur, dont une copie m’a été remise ce jour ».

M. [F] ne conteste pas qu’il utilisait le véhicule de service qui lui avait été confié pour rentrer à son domicile après le service, et qu’il commençait son service de son domicile, n’ayant pas, de ce fait, à se rendre par ses propres moyens jusqu’au lieu de prise de service défini dans le contrat de travail.

En conséquence, la SAS VORTEX était bien fondée, conformément aux dispositions susvisées de l’accord du 7 juillet 2009 relatif à l’emploi de conducteur accompagnateur à retenir une demi-heure forfaitaire par jour correspondant au temps de trajet domicile-lieu de prise en charge, contrepartie de la conservation du véhicule en fin de service.

M. [F] doit être débouté de sa demande de rappel de salaire formulée à ce titre, par confirmation du jugement entrepris de ce chef.

Sur la demande de rappel de salaire au titre de la durée minimale annuelle :

Moyens des parties,

Le salarié fait valoir que :

L’article 17 de l’accord ARTT du 18 avril 2002 et l’article 5.1 de l’accord du 24 septembre 2004 prévoient une durée annuelle minimale de travail en période scolaire de 550 h pour une année pleine comptant au moins 180 jours de travail,

En outre, le contrat de travail prévoit une durée minimale annuelle inférieure aux minimas conventionnels, ce qui constitue un manquement de l’employeur,

La société VORTEX se contente de faire un décompte annuel du temps de travail pour éventuellement comptabiliser les heures complémentaires,

Le contrat de travail intermittent ne permet pas une annualisation du temps de travail, régime soumis à une réglementation stricte,

En effectuant un tel décompte, les salariés sont privés de toute majoration des heures complémentaires effectuées,

Dès lors, le salarié est bien fondé à solliciter un rappel de salaire correspondant aux majorations non appliquées.

Me [T] et Me [O] es-qualités font valoir pour leur part que :

La section du code du travail, relative aux contrats de travail intermittent dispose que ceux-ci comportent une durée de travail minimale annuelle,

L’article suivant pose le principe du décompte annuel des heures complémentaires dans le cadre du contrat de travail intermittent,

Si les heures travaillées chaque mois sont rémunérées dès leur réalisation, les majorations pour heures complémentaires ne peuvent être versées, le cas échéant, qu’en fin d’année scolaire,

Le principe même du contrat de travail intermittent est de reposer sur une succession de périodes travaillées et non travaillées au cours de l’année, sur la base d’un total annuel d’heures de travail fixé contractuellement,

Ce n’est qu’en fin d’année scolaire que la société est à même de comparer le nombre réel d’heures travaillées avec celui prévu au contrat de travail,

Dans cette logique et conformément aux dispositions légales et conventionnelles précitées, la société VORTEX établissait, à chaque fin d’année scolaire, le décompte des heures complémentaires et versait le cas échéant les majorations dues à ce titre.

L’UNEDIC AGS-CGEA de [Localité 8] fait valoir que :

Le salarié a été rempli de ses droits s’agissant du paiement des heures complémentaires,

La société VORTEX s’est engagée devant le bureau de conciliation à payer au salarié un rappel de salaire au titre du minima conventionnel. Le salarié a donc été rempli de ses droits.

Réponse de la cour,

Selon l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

Il incombe à l’employeur de démontrer, notamment par la production de pièces comptables que le salaire dû afférent au travail effectivement effectué a été payé.

L’article 4 de l’accord du 24 septembre 2004 relatif à la définition, au contenu et aux conditions d’exercice de l’activité des conducteurs en périodes scolaires des entreprises de transport routier de voyageurs, prévoit que doit figurer dans le contrat de travail des conducteurs en périodes scolaires la durée minimale contractuelle de travail en périodes scolaires, qui ne peut être inférieure à 550 heures pour une année pleine comptant au moins 180 jours de travail.

M. [F], qui demande dans le dispositif de ses conclusions, à ce que soit inscrit au passif de la liquidation judiciaire de la SAS VORTEX la somme de 7 260,88 euros, toutes sommes confondues, à titre de rappel de salaire sur « durée contractuelle », produit un tableau détaillant son calcul pour la période de septembre 2017 à octobre 2018.

Il ressort d’un tableau produit par le salarié intitulé « Calcul du rappel de salaire sur durée minimum annuelle » que celui-ci soutient, non pas qu’il n’a pas effectué le minimum conventionnel de 550 heures, mais qu’il n’aurait pas été payé pour le nombre d’heures prévues par le contrat de travail, soit, d’après ce tableau, 131 heures mensuelles.

M. [F] n’apporte aucune explication et ne produit aucun élément permettant de démontrer que la durée mensuelle prévue par le contrat de travail pour la période concernée, la cour d’appel constatant que l’avenant au contrat de travail du 18 janvier 2018 prévoit une durée contractuelle annuelle de 1030 heures.

Il ressort de la décision du bureau de conciliation et d’orientation du 21 février 2019 du Conseil de prud’hommes de Valence que la SAS VORTEX a reconnu être débitrice d’un rappel de salaire, et Me [T] et Me [O] ès-qualités reconnaissent dans leurs écritures que la SAS VORTEX était redevable au salarié de la somme de 2 966,72 euros bruts, à titre de rappel de salaire sur la durée contractuelle, les conclusions contenant un détail du calcul de cette somme sous forme de tableau, duquel il ressort que cette somme comprend également la prime d’ancienneté, la prime de 13e mois, et les congés payés calculés sur l’ensemble de ces sommes.

Il doit être constaté que ce rappel de salaire a été calculé sur la base de la différence entre le nombre d’heures effectués par le salarié durant cette période, soit 786,24 heures, et le nombre d’heures prévu par le contrat, soit 1 030 heures.

Dès lors, il y a lieu de retenir que Me [T] et Me [O] ès-qualités justifient du montant du rappel de salaire dû au salarié au titre de la période 2017/2018.

Me [T] et Me [O] ès-qualités produisent un bulletin de salaire au nom du salarié portant sur un rappel de salaire de 2 966,72 euros bruts, soit 2 398,76 euros nets.

Toutefois, ceux-ci ne versent aux débats aucun élément démontrant que M. [F] aurait bien perçu cette somme.

En conséquence, il y a lieu d’inscrire au passif de la SAS VORTEX la somme de 2 966,72 euros bruts à titre de rappel de salaire dû à M. [F].

Le salarié, qui ne justifie pas des raisons pour lesquelles un rappel de salaire d’un montant supérieur lui serait dû, est débouté du surplus de sa demande.

Le jugement entrepris est infirmé de ce chef.

Sur la demande au titre du paiement des heures complémentaires :

Selon les dispositions de l’article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.

Le salarié qui conteste le décompte des heures complémentaires dans ses écritures, ne formule aucune demande de rappel de salaire à ce titre dans ses conclusions. En outre, aucune demande de rappel de salaire n’est formulée à ce titre dans le dispositif de ses conclusions.

Dès lors, la cour d’appel n’est saisie d’aucune demande à ce titre.

Sur la demande de salaire au titre des travaux annexes :

Moyens des parties,

Le salarié fait valoir que dans le cadre de l’exécution de son contrat de travail, il a dû accomplir des travaux annexes à raison d’une heure par semaine minimum afin notamment de nettoyer et effectuer les mises à niveau de son véhicule et que ces heures de travail ne lui ont pas été rémunérées.

Me [T] et Me [O] ès qualités font valoir pour leur part que :

Le règlement des travaux annexes est encadré par l’article 4.2 de l’ARTT du 18 avril 2002,

Sans apporter aucune preuve au soutien de ses prétentions, le salarié soutient que la société VORTEX ne lui aurait pas rémunéré les temps de travaux annexes,

Il ne produit d’ailleurs aucun décompte des temps de travaux annexes pour lesquels il prétend qu’il n’aurait pas été rémunérés et n’apporte absolument aucun justificatif au soutien des sommes qu’il réclame,

Il ressort précisément de la lecture des bulletins de paie qu’il produit lui-même aux débats que des heures de temps de travaux annexes dit « temps annexe » lui ont été réglés dès qu’ils étaient déclarés,

Les temps de travaux annexes consistent, pour les conducteurs, à entretenir leur véhicule (lavage, nettoyage, vidange, plein d’essence’) et ces temps annexes sont bien entendu rémunérés, tout en étant encadrés.

L’UNEDIC AGS-CGEA de [Localité 8] fait valoir que :

Le temps des travaux annexes prévu par l’accord du 18 avril 2002 lui a bien été rémunéré comme cela ressort des bulletins de paie,

Le salarié ne produit aucun décompte des travaux annexes pour lesquels il prétend ne pas avoir été rémunéré.

Réponse de la cour,

Selon l’article 2.A.4 de l’accord du 7 juillet 2009 relatif à l’emploi de conducteur accompagnateur, le conducteur accompagnateur devra effectuer les contrôles de base du véhicule : plein, niveaux, pneumatiques, fonctionnement de l’élévateur, organes intérieurs de sécurité des passagers, nettoyage du véhicule’

L’article 3.C de ce même accord, précise que l’activité de conducteur accompagnateur est régie par la convention collective nationale des transports routiers et des activités auxiliaires du transport (CCNTR) et notamment par les dispositions des accords du 18 avril 2002 et du 24 septembre 2004. Il est rappelé à cet égard que, conformément à l’accord du 18 avril 2002, le temps de travail effectif des conducteurs comprend les temps de conduite, les temps de travaux annexes ainsi que les temps à disposition.

Selon l’article 4.2 de l’accord du 18 avril 2002 relatif à l’ARTT, les temps de travaux annexes comprennent, notamment, les temps de prise et de fin de service consacrés à la mise en place du disque, à la préparation du véhicule, à la feuille de route, au nettoyage du véhicule, à l’entretien mécanique de premier niveau compatible avec celui du personnel de conduite, ainsi que, pour le conducteur-receveur, les temps consacrés à la remise de la recette.

La durée et le détail de ces travaux annexes sont décomptés pour chaque entreprise au regard des temps réellement constatés, sans que leur durée puisse être inférieure à 1 heure par semaine entière de travail.

Il ressort de ces dispositions que l’employeur est tenu de rémunérer au minimum une heure par semaine au titre des travaux annexes.

Il ne ressort pas des bulletins de salaire produits que la SAS VORTEX aurait versé à M. [F] le salaire dû au titre des travaux annexes, à raison d’une heure par semaine.

En conséquence, il y a lieu d’inscrire au passif de la liquidation de la SAS VORTEX la somme de 1 083,24 euros à titre de rappel de salaire à ce titre, correspondant à la somme due à raison d’une heure par semaine au cours des trois dernières années d’emploi, outre 108,32 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents.

Il est de principe que doit être prise en compte dans la rémunération pour déterminer l’assiette de calcul de l’indemnité de congés payés, conformément aux dispositions de l’article L. 3141-24 du code du travail, la prime de treizième mois dont le mode de calcul tient compte de la présence effective du salarié au travail.

Il ressort des bulletins de salaire versés aux débats que le salarié percevait une prime de 13e mois au cours du mois de décembre de chaque année.

Me [T] et Me [O], ès qualités, ne produisent aucune explication sur le mode de calcul de cette prime, ne peremttent pas à la cour de déterminer si son mode de calcul tient compte de la présence effective du salarié au travail.

En conséquence, il y a lieu de faire droit, d’une part à la demande de rappel de prime de 13e mois demandé par le salarié, et à l’indemnité compensatrice de congés payés au titre de ce rappel, et d’inscrire au passif de la SAS VORTEX les sommes de 90,25 euros à titre de rappel sur prime de 13e mois y afférents et de 9,02 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents.

Le jugement entrepris est infirmé de ce chef.

Sur la demande au titre du travail dissimulé :

Moyens des parties,

Le salarié fait valoir que le travail dissimulé est caractérisé par plusieurs violations de la part de la société VORTEX :

Absence de décompte et non-paiement des heures complémentaires et ce de façon systématique,

Absence de paiement des majorations des heures complémentaires,

Déduction à tort de 30 minutes de travail, non mentionnées dans les bulletins de salaire,

Non-paiement des heures de travail notamment sur les travaux annexes,

Incohérences entre le temps de travail effectué et les bulletins de salaire,

L’employeur a donc intentionnellement mentionné sur les bulletins de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli tout comme il s’est exonéré du paiement des majorations des heures supplémentaires / complémentaires.

Me [T] et Me [O] es-qualités font valoir pour leur part que :

Le salarié ne précise pas quelles heures de travail n’auraient pas été déclarées,

L’indemnité pour travail dissimulé n’est due qu’en cas de rupture du contrat de travail,

Or, le salarié est sorti des effectifs de la société à la suite de la reprise du marché sur lequel il était affecté par la société JLI, laquelle a donc repris son contrat de travail,

Aucune rupture du contrat de travail n’étant intervenue, aucune indemnité pour travail dissimulé ne peut donc être allouée.

L’UNEDIC AGS-CGEA de [Localité 8] fait valoir que :

Le salarié ne précise pas quelles sont les heures travaillées qui auraient été dissimulées,

Les heures travaillées ont toutes été rémunérées par l’employeur,

Le salarié ne fait dans tous les cas pas la démonstration de l’élément intentionnel de dissimulation d’emploi salarié.

Réponse de la cour,

Il résulte des dispositions de l’article L. 8221-5 du code du travail qu’est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 3243-2, relatif à la délivrance d’un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales.

L’article L. 8223-1 du code du travail dispose qu’en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire. Pour allouer une indemnité pour travail dissimulé, les juges du fond doivent rechercher le caractère intentionnel de la dissimulation. Mais ce caractère intentionnel ne peut résulter du seul défaut de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie.

Cette indemnité forfaitaire n’est exigible qu’en cas de rupture de la relation de travail. Elle est due quelle que soit la qualification de la rupture, y compris en cas de rupture d’un commun accord

Cette indemnité est cumulable avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié a droit en cas de rupture du contrat de travail, y compris l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ou l’indemnité de mise à la retraite.

Il ne peut se déduire de l’omission de la SAS VORTEX de rémunérer M. [F] au titre des travaux annexes, et de l’absence de paiement de la totalité des heures dues au titre de la durée minimum annuelle conventionnelle l’intention de dissimulation d’emploi salarié, le salarié ne produisant aucun élément en ce sens.

Au surplus, le contrat de travail de M. [F] n’ayant pas été rompu mais transféré à la SAS JLI, les conditions d’application des dispositions de l’article L. 8223-1 du code du travail ne sont pas remplies, de sorte que le salarié n’est pas fondé à prétendre à l’indemnité au titre du travail dissimulé.

La demande d’indemnité au titre du travail dissimulé doit être rejetée, par confirmation du jugement déféré de ce chef.

Sur la demande au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail :

Moyens des parties,

M. [F] fait valoir que l’exécution déloyale de son contrat de travail ressort :

– De l’application injustifiée de l’accord du 7 juillet 2009 et la retenue d’une demi-heure par jour sur le temps de travail effectif,

– Du non-respect de la durée minimum annuelle de travail,

– Du non-paiement du temps de travail résultant des travaux annexes.

Me [T] et Me [O] es-qualités font valoir que :

Le prétendu préjudice financier est inexistant, la société VORTEX ayant réglé en intégralité les salaires,

Le salarié ne produit aucun élément de nature à établir l’existence d’un préjudice, et son étendue.

L’UNEDIC AGS-CGEA de [Localité 8] fait valoir que :

Il est de principe que la bonne foi est présumée et qu’il appartient au salarié qui se prétend victime d’une exécution déloyale du contrat de travail de rapporter la preuve de la mauvaise foi de l’employeur,

En outre, le salarié ne démontre pas le préjudice qu’il prétend avoir subi.

Réponse de la cour,

Selon les dispositions de l’article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi. Comme le salarié, l’employeur est tenu d’exécuter le contrat travail de bonne foi. Il doit en respecter les dispositions et fournir au salarié le travail prévu et les moyens nécessaires à son exécution en le payant le salaire convenu.

Il a été précédemment retenu que la SAS VORTEX était bien fondée à faire application des dispositions de l’accord du 7 juillet 2009.

M. [F] ne caractérise aucune mauvaise foi de la SAS VORTEX dans l’absence de rémunération des heures dues au titre des travaux annexes et dans l’omission de respecter la durée minimale annuelle conventionnelle.

Au surplus, M. [F] ne fait la démonstration d’aucun préjudice résultant de ces omissions.

La demande de M. [F] de dommages et intérêts à ce titre est rejetée, par confirmation du jugement entrepris de ce chef.

Sur la demande de requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet à l’encontre de la société JL INTERNATIONAL :

Moyens des parties,

Le salarié fait valoir que :

La société JLI étant désormais son employeur, la requalification du contrat de travail à temps partiel avec la société VORTEX en contrat de travail à temps complet s’impose à la société JL INTERNATIONAL dans le cadre du transfert de son contrat de travail,

L’avenant au contrat de travail ne comporte pas les périodes travaillées et non travaillées, ce qui entraîne automatiquement la requalification du contrat de travail,

Le fait d’indiquer la zone (A, B ou C) ne répond pas aux mentions obligatoires,

Aucun élément n’est versé aux débats indiquant que la feuille de route mentionnant pour chaque jour de la semaine le trajet aller et le trajet retour avec le nom des enfants transportés a bien été portée à la connaissance du salarié,

Il est simplement indiqué l’heure à laquelle le salarié doit déposer les enfants : le salarié ne connait pas l’heure de début de sa vacation,

L’employeur ne transmet pas le temps de travail du salarié : il se contente de mentionner dans l’avenant la durée minimale conventionnelle ‘ temps de travail obligatoire ‘ et n’indique pas au salarié la répartition de son temps de travail au cours des périodes travaillées.

La société JL INTERNATIONAL fait valoir que :

Le contrat de travail du salarié a fait l’objet d’un transfert conventionnel, en vertu de l’accord du 7 juillet 2009, et non en vertu des dispositions de l’article L. 1224-2 du code du travail,

En cas de transfert en vertu de ces dispositions, il n’y a pas transmission automatique des caractéristiques du contrat conclu avec l’ancien employeur,

Elle a respecté les obligations légales et conventionnelles en matière de contrat intermittent.

Le salarié ne démontre pas s’être tenu à sa disposition permanente à partir du transfert de son contrat,

Le salarié avait connaissance de ses jours et des horaires de travail,

Elle a fourni à le salarié l’ensemble des documents lui permettant de déterminer sa durée de travail, la répartition de celle-ci sur la semaine, ses horaires de travail et ses périodes travaillées, et qu’il pouvait ainsi prévoir à l’avance son rythme de travail,

Le salarié ne démontre pas s’être tenue à sa disposition,

A chaque rentrée scolaire, chaque CAPS, recevait une nouvelle annexe à son contrat de travail, appelée « mission contractuelle » ou « planning hebdomadaire », conformément aux dispositions de l’accord du 15 juin 1992,

C’est au CAPS à organiser son circuit, à partir de la feuille de route qui lui est remise, en début d’année scolaire, ou en cas de changement de circuit,

La feuille de route mentionne la liste d’enfants à transporter, leur adresse, les coordonnées des parents et l’heure de dépose à leur école. Pour le retour, la feuille de route mentionne l’heure de sortie des cours. Seul le salarié concerné est à même d’estimer l’heure à laquelle il doit partir de chez lui, car lui-seul connaît son quartier, la circulation, etc.,

Ainsi, cette feuille de route permet donc précisément au CAPS de prévoir son rythme de travail.

La société JLI demande à la cour d’appel de faire sommation au salarié de communiquer ses avis d’imposition sur ses revenus 2018, 2019, 2020 et 2021, afin de vérifier si l’appelante percevait ou non d’autres revenus que ceux en provenance de JLI. Si tel devait être le cas, ce serait la preuve indiscutable qu’il ne se tenait pas à la disposition de son employeur.

Réponse de la cour,

Selon les dispositions de l’article L. 3123-33 du code du travail, des contrats de travail intermittent peuvent être conclus dans les entreprises couvertes par une convention ou par un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche étendu qui le prévoit.

Selon les dispositions de l’article L. 3123-34 du code du travail, le contrat intermittent est un contrat à durée indéterminée. Il peut être conclu afin de pourvoir un emploi permanent qui, par nature, comporte une alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées.

Ce contrat est écrit. Il mentionne notamment :

1° La qualification du salarié ;

2° Les éléments de la rémunération ;

3° La durée annuelle minimale de travail du salarié ;

4° Les périodes de travail ;

5° La répartition des heures de travail à l’intérieur de ces périodes.

En l’absence de définition des périodes travaillées et non travaillées dans le contrat de travail, ce dernier doit être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée de droit commun à temps plein.

En l’absence de la mention de la durée annuelle minimale de travail du salarié ou de la répartition des heures de travail à l’intérieur des périodes travaillées, le contrat est présumé à temps plein ; il appartient alors à l’employeur qui soutient que le contrat n’est pas à temps plein d’établir la durée annuelle minimale convenue et que le salarié connaissait les jours auxquels il devait travailler et selon quels horaires, et qu’il n’était pas obligé de se tenir constamment à la disposition de l’employeur.

La convention collective applicable est déterminée par l’activité principale de l’entreprise. La mention sur le contrat de travail d’une convention collective autre que celle dont relève l’entreprise a pour effet de rendre applicables les dispositions plus favorables de cette convention à laquelle l’employeur a entendu soumettre la relation.

Selon les dispositions de l’article 1 de l’accord du 15 juin 1992 relatif au contrat de travail intermittent des conducteurs scolaires, l’accord s’applique exclusivement aux conducteurs engagés pour effectuer des transports liés à l’activité scolaire : ramassage et desserte des établissements scolaires, cantines, piscines, centres aérés, classes vertes, classes de neige, tiers temps pédagogique.

En conséquence, le contrat de travail intermittent conclu avec pour objet l’exercice d’activités liées aux transports scolaires n’est proposé que dans les cas où ces activités conduisent, au sein de l’entreprise, à devoir y pourvoir par des emplois de conduite, comportant une alternance de périodes travaillées et non travaillées, pour lesquelles les autres formes de contrat de travail à durée indéterminée sont inadaptées.

Il ressort de l’avenant de transfert du contrat de travail intermittent à temps partiel à durée indéterminée que le contrat de M. [F] avec la SAS VORTEX a été transféré à la SAS JLI à compter du 1er août 2018, cet avenant indiquant que le salarié conserve son coefficient 137V et son ancienneté à la date du 30 août 2014.

Par ailleurs, il doit être constaté que l’avenant précise que le contrat est régi par la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport.

M. [F], qui soutient que la SAS JLI ne pouvait pas faire application des dispositions susvisées de l’accord du 15 juin 1992 relatif au contrat de travail intermittent des conducteurs scolaires, et ainsi conclure un contrat de travail intermittent en application des dispositions des articles L. 3123-33 et L. 3123-34 du code du travail, ne démontre pas, comme conclu, qu’il n’était pas amené à exercer uniquement des transports liés à l’activité scolaire, tel que ceux-ci sont définis par l’article 1 de cet accord, à savoir, ramassage et desserte des établissements scolaires, cantines, piscines, centres aérés, classes vertes, classes de neige, tiers temps pédagogique.

La cour d’appel relève ainsi que l’avenant prévoit dans son article 2 que les attributions du salarié consistent à conduire les personnes handicapées de leur domicile à leur établissement scolaire, et de les ramener le soir de leur établissement scolaire à leur domicile.

Dès lors, il y a lieu de retenir que la SAS JLI était bien fondée à faire application des dispositions susvisées de l’accord du 15 juin 1992 autorisant la conclusion de contrats de travail intermittent pour les fonctions de transports d’enfants porteurs d’un handicap et/ou à mobilité réduite, celles-ci impliquant une alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées.

Les conditions posées par les dispositions susvisées de l’article L. 3123-34 du code du travail sont reprises par l’article 2 de l’accord du 15 juin 1992 et, l’article 4 de l’accord 24 septembre 2004 relatif à la définition, au contenu et aux conditions d’exercice de l’activité des conducteurs en périodes scolaires des entreprises de transport routier de voyageurs ajoute les conditions suivantes :

La durée annuelle minimale contractuelle de travail en périodes scolaires, ne peut être inférieure à 550 heures pour une année pleine comptant au moins 180 jours de travail,

Le volume d’heures complémentaires dans la limite du quart de la durée annuelle minimale de travail est fixé au contrat de travail,

Le contrat doit comporter la référence, lorsqu’il existe, à l’accord d’entreprise ou d’établissement institution la modulation du temps de travail,

Le contrat doit préciser le lieu habituel de prise de service.

Ce même accord prévoit également que le contrat de travail doit préciser ou renvoyer à une annexe mentionnant les périodes scolaires travaillées mise à jour à chaque rentrée scolaire lorsque l’évolution du calendrier scolaire le nécessite.

S’agissant de la qualification du contrat, il est sans incidence que le contrat soit désigné par les termes « contrat à temps partiel à durée indéterminée » et non par l’appellation « contrat de travail intermittent », la désignation du contrat par les parties n’étant pas une condition de validité posée par l’article susvisé.

Il ressort en outre de plusieurs dispositions du contrat de travail objet du litige que le salarié devait exercer exclusivement ses fonctions durant les périodes scolaires :

L’article préliminaire prévoit que « le salarié est informé du fait que sa mission annuelle pourra être modifiée en cours d’année scolaire, le nombre de passagers à transporter variant lui-même dans le cadre de cette période (‘) »,

L’article 2 prévoit que le salarié a pour mission de « conduire le matin les personnes handicapées (‘) de leur domicile à leur établissement scolaire » et de « ramener les personnes précitées, le soir, de leur établissement scolaire à leur domicile »,

L’article 7 prévoit que « les périodes de travail s’établissent selon le calendrier scolaire des personnes que le salarié aura à transporter en corrélation avec les caractéristiques particulières du circuit figurant sur l’avenant de mission, qui fait partie du contrat. Le calendrier des périodes travaillées est déterminé pour l’avenir à chaque rentrée et est prévu à l’avenant de mission »,

L’article 8 prévoit que « la réparation des horaires de travail pendant les périodes de travail, et en particulier le nombre d’heures hebdomadaires, figure l’avenant de mission, qui fait partie du contrat de travail. Cette répartition est valable pour l’année scolaire à venir, sous réserve des heures complémentaires et des éventuelles modifications prévues à l’article préliminaire »,

L’article 9 prévoit que « les périodes de vacances scolaires sont des périodes non-travaillées déterminées dans l’avenant de mission, qui fait partie du présent contrat ».

Il résulte de ces dispositions dénuées d’ambiguïté que les parties ont bien entendu conclure un contrat de travail intermittent, en application des dispositions combinées des articles L. 3123-33, L. 3123-34 et de l’accord du 15 juin 1992 qui autorisaient l’employeur à recourir à ce type de contrat pour le transport scolaire.

S’agissant des mentions devant figurer dans le contrat, il doit être relevé que l’avenant du 23 août 2018 mentionne :

Les fonctions dévolues au salarié à l’article 2,

Les éléments de la rémunération à l’article 4, par renvoi au contrat de travail conclu avec la SAS VORTEX, cet article indiquant que « le salarié bénéficie du maintien des éléments composants sa rémunération brute mensuelle : taux horaire conventionnelle en vigueur, ancienneté et versement annuelle d’une prime de 13e mois »,

La durée annuelle minimale de travail à l’article 5 : « Le salarié exercera son activité : soit pendant une durée minimale de 550 heures pour une année pleine comportant au moins 180 jours de travail, soit sur la demande écrite du salarié, la durée annuelle minimale de travail pourra être inférieure à 550 heures pour une année pleine comportant moins de 180 jours de travail » ;

Les périodes de travail, dès lors qu’il ressort explicitement du contrat que le salarié n’exerce son activité que durant les périodes scolaires, ce que précise l’article 9 : « Les périodes dites vacances scolaires sont des périodes non-travaillées déterminées dans l’avenant de mission, qui fait partie du présent contrat ».

S’agissant de la définition des périodes travaillées et non travaillées dans le contrat de travail, la SAS JLI soutient dans ses écritures que le salarié se voyait remettre, conformément au contrat de travail susvisé, à chaque rentrée scolaire des annexes précisant notamment :

La durée journalière minimale contractuelle de travail en périodes scolaires ;

La durée minimale contractuelle de travail en périodes scolaires : durée hebdomadaire minimale, multipliée par le nombre de semaines ouvrées de l’année scolaire considérée,

Le calendrier scolaire de la zone A, B ou C dont dépend le CAPS (zone A dans le cas du salarié),

La répartition des heures de travail, entre les jours de la semaine,

Le nom des enfants transportés,

Le salaire brut, correspondant à la durée journalière minimale contractuelle de travail en périodes scolaires payée au SMIC horaire.

Toutefois, la SAS JLI échoue à produire ces annexes au contrat de travail, et se limite à produire un planning hebdomadaire signé par le salarié le 28 août 2018, ce planning valant manifestement avenant de mission.

Il doit être constaté que ce planning indique le nom des enfants à prendre en charge pour chaque jour de la semaine à l’aller et au retour, le nombre d’heures payées par jour, ainsi que la zone de calendrier scolaire (zone A).

En outre, la SAS JLI produit des feuilles de route hebdomadaires au nom du salarié comportant le nom des enfants à prendre en charge, leur adresse, les lieux auxquels ils doivent être déposés, l’heure de départ de son domicile, et l’heure à laquelle cette dépose doit avoir lieu.

Le salarié ne peut valablement soutenir que ces feuilles de route ne lui étaient pas communiquées, les informations contenues dans ces feuilles étant indispensables à la réalisation de ses missions.

Eu égard à l’ensemble de ces éléments, il y a lieu de retenir que l’employeur a bien défini les périodes travaillées et les périodes non travaillées, conformément aux dispositions de l’article L. 3123-34 du code du travail, le salarié étant informé de la zone académique dont il relève, la partition géographique du territoire national en zones ne variant pas d’une année sur l’autre, et les périodes de vacances pour chacune des trois zones étant mises à la disposition du public par le Ministère de l’éducation nationale officiellement une année en avance.

En outre, par la production d’un planning signé par le salarié et des feuilles de route, la SAS JLI démontre que le salarié travaillait bien à temps partiel, et qu’il existait bien une répartition constante de ses heures de travail au sein des périodes travaillées, celles-ci étant situées en tout début de journée et en fin de journée, et les horaires étant réguliers d’un jour sur l’autre.

S’il n’est pas contestable que les horaires de travail du salarié pouvaient être amenés à varier en fonction du nombre d’enfants présents, ou d’aléas liés à la circulation, il doit être constaté que :

M. [F] ne produit aucun élément permettant de convaincre la cour que la SAS JLI ne respectait pas le délai de prévenance prévu par le contrat de travail en cas de modification des horaires de travail prévus par le contrat de travail et les avenants successifs,

Outre le fait que le contrat de travail prévoit explicitement que le nombre de passagers à transporter pourra varier en cours d’année, M. [F] ne démontre pas que la SAS JLI aurait régulièrement fait varier le nombre d’enfants dont il avait la charge sans respecter aucun délai de prévenance,

Les variations de ses horaires de travail, justifiées par les aléas propres au transport scolaire (difficultés de circulation, retard des enfants lors de leur prise en charge ou lors de leur récupération à leur établissement scolaire), n’étaient pas telles qu’il s’en déduise que le salarié se tenait en permanence à la disposition de son employeur.

Au surplus, s’agissant de la variation de la durée de travail d’une semaine sur l’autre, la cour d’appel relève que la SAS JLI verse aux débats les feuilles de route remplies chaque mois par le salarié, permettant à l’employeur de prendre en compte les variations de durée dues aux aléas inhérents à ses fonctions. Le salarié ne démontre pas que la SAS JLI n’aurait pas tenu compte de ces feuilles de route pour calculer le nombre d’heures de travail effectuées par mois, et le rémunérer en conséquence.

Eu égard à l’ensemble de ces constatations, l’employeur ayant bien défini les périodes travaillées, et le salarié échouant à démontrer qu’il se tenait en permanence à la disposition de son employeur, il y a lieu de rejeter sa demande de requalification de son contrat de travail intermittent en contrat de travail à temps complet, et les demandes de rappel de salaire afférentes.

Le jugement entrepris est confirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions conventionnelles à l’encontre de la société JLI :

Moyens des parties,

Le salarié fait valoir que la société JLI n’a pas respecté les dispositions conventionnelles relatives à la reprise.

L’avenant devait obligatoirement reprendre les éléments suivants du contrat de travail liant les salariés à la société VORTEX : le temps de travail contractuel, le coefficient, l’ancienneté au moment du transfert, la rémunération mensuelle brute de base.

Le contrat de travail ne mentionne ainsi pas expressément les fonctions du salarié et la durée annuelle minimale du temps de travail n’était pas reprise.

La société JLI fait valoir pour sa part que le salarié s’est vu remettre un avenant à son contrat de travail intermittent à temps partiel, dans lequel étaient mentionnés :

-La date de prise de fonction,

– La date de reprise d’ancienneté,

– Les fonctions confiées, à savoir conduire le matin et le soir des personnes handicapées entre leur domicile et leur établissement scolaire,

– Le coefficient attribué, soit 137 V,

– Les éléments de la rémunération, à savoir : un salaire, calculé selon le taux horaire conventionnel en vigueur et payé au plus tard le 15 du mois suivant, une prime de 13e mois et éventuellement des heures complémentaires,

– Une durée minimale de 550 heures pour une année pleine, d’au moins 180 jours, avec des périodes de travail s’établissant selon le calendrier scolaire des personnes à transporter, des périodes non travaillées (les périodes de vacances scolaires) et une répartition des horaires de travail, pour l’année scolaire à venir, figurant en annexe,

Elle ajoute que les annexes au contrat de travail précisaient :

– La durée journalière minimale contractuelle de travail en périodes scolaires,

– La durée annuelle minimale contractuelle de travail en périodes scolaires : durée hebdomadaire minimale, multipliée par le nombre de semaines ouvrées de l’année scolaire considérée,

– Le calendrier scolaire de la zone A, B ou C, dont dépend le CAPS,

– La répartition des heures de travail, entre les jours de la semaine,

– Le nom des enfants transportés,

– Le salaire brut, correspondant à la durée journalière minimale contractuelle de travail en périodes scolaires payée au SMIC horaire.

Enfin, elle allègue que le salarié ne justifie pas du préjudice subi du fait de la violation alléguée des dispositions conventionnelles relatives à la reprise du contrat de travail.

Réponse de la cour,

Selon l’article 2.4.B de l’accord du 7 juillet 2009 relatif à la garantie de l’emploi et à la poursuite des relations de travail en cas de changement de prestataire dans le transport interurbain de voyageurs, le nouveau prestataire établira un avenant au contrat de travail dans lequel il reprendra les éléments suivants attachés au contrat avec l’ancien employeur : le temps de travail contractuel, le coefficient et l’ancienneté au moment du transfert et les éléments en termes de rémunération ainsi qu’exposé au point C « Modalités de maintien de la rémunération » ci-dessous.

Il ressort de l’avenant du 23 août 2018 que celui-ci définit :

Le temps de travail, celui-ci étant fixé à 550 heures pour une année de 180 jours, soit le minimum conventionnel garanti (article 5),

Le coefficient du salarié, celui-ci étant maintenu, soit 137V (article 1),

L’ancienneté au moment du transfert, celle-ci ayant été fixée au 2 septembre 2010 (article1),

La rémunération mensuelle brute de base, celle-ci étant fixée par référence au contrat conclu avec la SAS VORTEX : « Le salarié bénéficie du maintien des éléments composants sa rémunération brute mensuelle : taux horaire conventionnel en vigueur, ancienneté et versement annuel d’une prime de 13e mois » (article 4),

Les fonctions du salarié, celui-ci étant chargée de conduire le matin des personnes handicapées de leur domicile à leur établissement scolaire, et le soir de ramener les mêmes personnes de leur établissement scolaire jusqu’à leur domicile (article 2).

Dès lors, il y a lieu de retenir que la SAS JLI a respecté les dispositions susvisées de l’article 2.4.B de l’accord du 7 juillet 2009 relatif à la garantie de l’emploi et à la poursuite des relations de travail en cas de changement de prestataire dans le transport interurbain de voyageurs.

Au surplus, il doit être constaté que M. [F], qui sollicite la condamnation de la SAS JLI à lui payer une somme à titre de dommages et intérêts, ne fait pas la démonstration du préjudice qu’il prétend avoir subi.

Dès lors, il y a lieu de le débouter de sa demande formée à ce titre, par confirmation du jugement déféré de ce chef.

Sur la demande de rappel de salaire au titre de la retenue de 30 minutes par jour du temps de travail effectif à l’encontre de la société JL INTERNATIONAL :

Moyens des parties,

Le salarié fait valoir que la société JLI n’était pas fondée à retrancher trente minutes par jour de son temps de travail effectif, et qu’il lui doit en conséquence un rappel de salaire à ce titre.

La société JLI fait valoir que :

Les « conducteurs accompagnateurs » peuvent être employés à temps plein, ou à temps partiel, ou être en contrat intermittent,

Pour recourir au contrat intermittent, il faut un conducteur travaillant uniquement en périodes scolaires. En effet, le contrat intermittent est propre aux secteurs connaissant des périodes d’activité et de suspension. En raison des rythmes scolaires notamment. Le contrat intermittent est ainsi suspendu durant les vacances scolaires,

En l’état actuel des textes, dès lors qu’ils transportent des personnes handicapées et/ou à mobilité réduite, les conducteurs, quel que soit leur temps de travail (temps partiel, temps complet ou intermittent), sont tous accompagnateurs,

Elle a toujours considéré que le salarié était conducteur accompagnateur en périodes scolaires (CAPS), comme la société VORTEX avant elle,

Cette fonction est mentionnée sur tous ses bulletins de salaire,

Le salarié s’est vu remettre par JLI, en août 2018, un avenant à son contrat de travail intermittent à temps partiel. C’est lui-même qui le verse aux débats.

Elle ajoute que :

Le retrait de 30 minutes par jour travaillé, au-delà de trois heures de circuit par jour, est prévu par l’accord du 7 juillet 2009, relatif à l’emploi de conducteur accompagnateur,

Cet accord s’appliquait aux salariés de JLI, à défaut d’accord d’entreprise, soit jusqu’en mai 2017,

Le 24 mai 2017, JLI a conclu un accord collectif d’entreprise, visant le retrait du quart d’heure. Cet accord rendait la pratique du retrait des 30 minutes de travail quotidien, en application des dispositions conventionnelles, opposable à tous les salariés,

Cet accord d’entreprise est toujours en vigueur ; il a été régulièrement déposé auprès de la DIRECCTE ; il est donc opposable au salarié,

Le salarié ne précise d’ailleurs pas les mois, les jours, au cours desquels des irrégularités auraient pu être commises,

Elle n’en tire aucune conséquence chiffrée.

Réponse de la cour,

La qualification professionnelle d’un salarié s’apprécie en considération des fonctions qu’il remplit effectivement au sein de l’entreprise, cette appréciation devant se faire par ailleurs au regard de la classification conventionnelle applicable à la relation contractuelle de travail entre les parties.

Il ressort des dispositions de l’article 1 de l’accord du 7 juillet 2009 relatif à l’emploi de conducteur accompagnateur que cet accord s’applique aux activités de transport de personnes à mobilité réduite (TPMR) exercées par une entreprise à titre exclusif ou accessoire et que le transport de personnes à mobilité réduite se caractérise par quatre conditions cumulatives : l’activité, le client utilisateur, le matériel de transport et la prestation de transport.

La notion d’activité visée désigne tout transport exclusivement dédié aux personnes handicapées et/ou à mobilité réduite pour lequel le conducteur est amené à apporter un accompagnement au voyageur dépassant l’utilisation des équipements du véhicule (élévateur, palette, etc.). Il peut être régulier, occasionnel ou à la demande. Ne sont donc pas concernés par le présent accord tous autres transports même occasionnellement ou partiellement fréquentés par des personnes handicapées ou à mobilité réduite.

S’agissant du matériel de transport, ce même article précise qu’il s’agit pour l’essentiel d’un véhicule de moins de dix places, spécialement équipé ou non, ne nécessitant pas la possession du permis D.

Il est également prévu que la prestation de transport est définie par le cahier des charges établi par l’autorité organisatrice qui en détermine les modalités, conditions et limites. Les particularités de la prise en charge du client (affections physiques ou psychologiques du client, conditions d’accès au lieu de prise en charge, accompagnement, sécurisation du client) sont, le cas échéant, précisées et indiquées sur la feuille de liaison dont un modèle est joint en annexe.

En outre, l’article 2 de l’accord définit précisément les spécificités de l’emploi de conducteur accompagnateur comme suit :

Au-delà de la seule conduite, le conducteur est aussi accompagnateur de la personne qu’il transporte, et à ce titre, il doit être formé pour réagir face aux différentes situations et toujours laisser la personne en position sécurisée ; en outre, le conducteur doit être équipé d’un moyen de communication rapide fourni par l’entreprise (un téléphone portable, par exemple) ;

S’agissant de l’aide qui doit être apportée à la personne handicapée ou à mobilité réduite, à l’exclusion de toute autre prestation et notamment du portage, une aide à la personne handicapée et/ou à mobilité réduite sera apportée par le conducteur accompagnateur, si besoin, entre le véhicule de transport et le lieu de prise en charge et/ou la destination de manière à toujours laisser la personne en position sécurisée ;

Dans les cas d’accès difficile au domicile de la personne handicapée et/ou à mobilité réduite, et lorsque le conducteur ne peut pas accompagner seul cette personne ou laisser une ou des personnes dans le véhicule avec une sécurité optimale, il devra être aidé soit : par l’organisation mise en place par l’autorité organisatrice ; par une personne valide et autonome de l’entourage de la personne handicapée et/ou à mobilité réduite, l’accord précisant que ces éléments doivent être identifiés avec précision dans la feuille de liaison.

Ce même article 2 indique par ailleurs, s’agissant de la formation, qu’au-delà de la possession d’un permis de conduire B, ou d’un permis D, le conducteur accompagnateur de transport spécialisé de personnes handicapées et/ou à mobilité réduite doit obligatoirement avoir suivi une formation complémentaire et spécifique dans les domaines suivants :

PSC1 ou équivalent ;

Connaissance de la clientèle : accueil personnalisé, enfants handicapés, précautions gériatriques, troubles spécifiques ;

Gestes et posture.

Enfin, aux termes de l’article 3.A de l’accord susvisé, l’emploi de conducteur de véhicule de moins de dix places est défini comme celui d’un ouvrier chargé de la conduite d’un véhicule ne nécessitant la possession du permis B, qui doit être capable d’effectuer les contrôles de base du véhicule (plein, niveaux, pneumatiques, fonctionnement de l’élévateur, organes intérieurs de sécurité des passagers, nettoyage du véhicule’), d’apporter une aide à la personne en situation de handicap et/ou mobilité réduite, dans la limite de la formation reçue, le cas échéant, entre le véhicule de transport et le lieu de prise en charge et/ou la destination de manière à toujours laisser la personne transportée en position sécurisée, à l’exclusion de toute autre prestation à caractère médical et ou paramédical et de portage.

Il résulte de l’ensemble de ces dispositions que l’aide de la personne handicapée et/ou à mobilité réduite par le conducteur ne doit être apportée que dans les cas où elle est nécessaire, et non de manière systématique, que l’activité de conducteur accompagnateur n’implique pas nécessairement qu’une autre personne soit présente à bord afin d’assurer la surveillance et la sécurité des autres passagers lorsque le conducteur accompagnateur apporte son aide à un passager, et que l’entourage de la personne handicapée et/ou à mobilité réduite peut être amené à intervenir pour accompagner ladite personne au plus près du passage du véhicule.

Enfin, aux termes de l’article 3.D de cet accord, il est rappelé que lorsqu’un conducteur accompagnateur de transport spécialisé de personnes handicapée et/ou à mobilité réduite ne travaille que pendant les périodes scolaires, en application de l’accord du 24 septembre 2004, l’ensemble des dispositions de cet accord et notamment du coefficient 137 V, de la garantie d’horaire annuel de 550 heures pour 180 jours de travail, de la garantie d’horaire journalier, selon le nombre de vacations, de l’indemnisation de l’amplitude et des coupures, s’applique.

Il ressort de l’avenant du 23 août 2018 que celui-ci a prévu le transfert du contrat de travail du salarié conclu avec la SAS VORTEX, le salarié conservant son coefficient et son ancienneté.

Il a été constaté précédemment que l’emploi du salarié dans le contrat de travail conclu avec la SAS VORTEX était désigné par l’expression « conducteur accompagnateur ».

Par ailleurs, il ressort des bulletins de salaire de la SAS JLI que l’emploi indiqué est celui de « conducteur accompagnateur », coefficient 137V, qualification groupe 7bis.

Il ressort des dispositions susvisées de l’accord du 7 juillet 2009 que celui-ci fait la distinction entre les transports permettant, occasionnellement, leur utilisation par des personnes handicapées et/ou à mobilité réduite, et la mise en place de transports dédiés uniquement au transport de ce type de personnes, pouvant impliquer un accompagnement de la personne handicapée ou/à mobilité réduite de la part du conducteur.

Eu égard à la définition de l’accompagnement telle qu’elle ressort des dispositions susvisées, il ne peut valablement être soutenu par M. [F] que cet accord implique, pour que la qualification de conducteur accompagnateur puisse être retenue, que le conducteur réalise pour chaque personne transportée un acte d’accompagnement, l’accord faisant plusieurs fois mention d’un accompagnement en cas de nécessité, ou lorsque celui-ci s’avère nécessaire, cet accompagnement ne devant pas nécessairement s’entendre, comme le conclut le salarié, en ce sens que le conducteur doit aller chercher lui-même la personne handicapée et/ou en situation de mobilité réduite jusqu’à son domicile, et l’accompagner jusqu’au sein de son établissement scolaire, et en faire de même lors du retour, l’accompagnement pouvant se limiter à une aide du conducteur permettant à la personne handicapée et/ou à mobilité réduite de prendre place dans le véhicule et d’en descendre.

Ainsi, c’est à tort que M. [F] soutient qu’il n’exerçait pas les fonctions de conducteur accompagnateur au motif que la SAS JLI, dans le livret d’instructions de « conducteur accompagnateur » qui lui a été remis, lui interdit de soulever ou de porter un élève, ou de s’éloigner du véhicule, ces deux interdictions n’excluant pas que le conducteur puisse être amené à apporter son aide au passager lors de l’embarquement et du débarquement du véhicule, fonction qui relève bien de la qualification de conducteur accompagnateur.

Enfin, il ne peut être valablement soutenu que le fait d’avoir à disposition un moyen de communication ou d’avoir suivi les formations sont des conditions déterminant l’application de l’accord, son champ d’application dépendant uniquement de l’activité effectivement exercée par le salarié. Le fait pour l’employeur de ne pas mettre à disposition un moyen de communication ou d’omettre de faire suivre au salarié les formations nécessaires constitue un manquement de celui-ci à ses obligations susceptibles d’engager sa responsabilité.

M. [F] ne conteste pas qu’il était chargé uniquement du transport d’enfants en situation de handicap et/ou à mobilité réduite.

En conséquence, il y a lieu de retenir qu’eu égard aux fonctions réellement exercées par M. [F], qui correspondaient à celles de « conducteur accompagnateur », la SAS JLI était tenue d’appliquer l’ensemble des dispositions de l’accord du 7 juillet 2009 relatif à l’emploi de conducteur accompagnateur.

Selon les dispositions de l’article 3C de cet accord, l’activité est régie par la convention collective nationale des transports routiers et des activités auxiliaires du transport (CCNTR) et notamment par les dispositions des accords du 18 avril 2002 et du 24 septembre 2002. Il est rappelé à cet égard que, conformément à l’accord du 18 avril 2002, le temps de travail effectif des conducteurs comprend les temps de conduite, les temps de travaux annexes ainsi que les temps à disposition, et que le salarié doit être informé mensuellement de la situation de son compteur « durée du travail » au moyen d’un document annexé à son bulletin de paie. De même, conformément à la CCNTR, les salariés bénéficient de la garantie d’horaire annuel de 550 heures pour 180 jours de travail, de la garantie d’horaire journalier selon les nombre de vacations (‘).

Par exception et selon les usages ou accords d’entreprise, la mise à disposition du véhicule de moins de 10 places utilisé pour l’activité de TPMR peut permettre de joindre le domicile du salarié au lieu de prise en charge du client et inversement.

A défaut d’accord d’entreprise existant ou à conclure, ou encore d’usage préexistant et avec l’accord exprès du salarié, le temps à bord d’un véhicule de moins de 10 places utilisé pour l’activité de TPMR et mis à disposition par l’entreprise entre le domicile du salarié et le lieu de prise en charge du client lors de la première et de la dernière prise de service de la journée pourra ne pas être considéré comme du temps de travail, et ce dans la limite d’un temps forfaitaire estimé à 15 minutes (soit ¿ heure au total dans la journée) et correspondant à un temps moyen nécessaire au trajet entre le domicile du conducteur et le dépôt de l’entreprise le plus proche.

M. [F] ne conteste pas qu’il utilisait le véhicule de service qui lui avait été confié pour rentrer à son domicile après le service, et qu’il commençait son service de son domicile, n’ayant pas, de ce fait, à se rendre par ses propres moyens jusqu’au lieu de prise de service défini dans le contrat de travail.

En conséquence, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur l’opposabilité de l’accord d’entreprise du 24 mai 2017, la SAS JLI était bien fondée, conformément aux dispositions susvisées de l’accord du 7 juillet 2009 relatif à l’emploi de conducteur accompagnateur à retenir une demi-heure forfaitaire par jour correspondant au temps de trajet domicile ‘ lieu de prise en charge, contrepartie de la conservation du véhicule en fin de service, par confirmation du jugement entrepris de ce chef.

Sur la demande au titre du travail dissimulé :

Moyens des parties,

Le salarié ne conclut pas sur cette demande.

La SAS JLI INTERNATIONAL fait valoir que :

Le salarié ne développe aucun moyen au soutien de sa demande,

Il s’agit d’une demande nouvelle en cause d’appel (article 564 du code de procédure civile).

Réponse de la cour,

Aux termes de l’article 954, alinéa 3, du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.

M. [F] ne développe aucun moyen de fait au soutien de sa demande, échouant ainsi à établir l’existence d’une intention de dissimulation d’emploi salarié de la SAS JLI.

Dès lors, il y a lieu de débouter M. [F] de sa demande d’indemnité au titre du travail dissimulé formulée à l’encontre de la SAS JLI, par confirmation du jugement déféré de ce chef.

Sur la demande d’annulation de la mise à pied conservatoire :

Moyens des parties,

M. [F] fait valoir que :

– L’employeur ne démontre pas avoir notifié sa décision de le mettre à pied à titre conservatoire auprès de l’inspection du travail dans le délai de 48 heures à compter de sa prise d’effet,

– En omettant de notifier sa décision à l’inspection du travail, elle a porté atteinte à sa qualité de salarié protégé,

– Il a été informé de sa mise à pied postérieurement au début de sa tournée,

– Ni le bulletin de salaire du mois de février, ni celui de juin qui régulariserait ce rappel de salaire ne permettent de vérifier que l’employeur lui a bien versé le rappel de salaire dû au titre de la mise à pied,

– La mise à pied étant abusive, il sollicite la réparation de son préjudice.

La SAS JLI fait valoir que :

Elle a été informée des faits fautifs du salarié (comportement à l’égard d’une élève porteuse d’un handicap) le 23 janvier 2020 au soir, et elle a mis verbalement à pied le salarié le 27 janvier 2020 vers midi,

Le salarié était informé de sa mise à pied lorsqu’il a adressé à la direction son courriel du 27 janvier à 14h24, dans lequel il demande s’il doit effectuer sa tournée de l’après-midi et les tournées des jours suivants,

Le salarié a réceptionné son courrier de mise à pied le 29 janvier 2020,

Les faits reprochés au salarié paraissaient d’une gravité telle que sa mise à l’écart immédiate de l’entreprise était impérative,

Le salarié n’a été sanctionné que d’un blâme pour lui laisser une seconde chance, et il a été affecté sur un autre circuit,

Il a été payé durant le temps de sa mise à pied à titre conservatoire, de sorte que l’annulation de sa mise à pied et sa demande de paiement d’une somme à titre de rappel de salaire à ce titre sont sans objet,

Les circonstances dans lesquelles il a été mis à pied à titre conservatoire n’étaient ni abusives ni vexatoires,

La mise à pied conservatoire n’étant pas abusive, sa demande de dommages et intérêts devra être rejetée, le salarié ne démontrant par ailleurs aucun préjudice.

Sur ce,

Selon les dispositions des article L. 1332-2 et suivants du code du travail, l’employeur peut prononcer une mise à pied conservatoire dans l’attente de prononcer une sanction disciplinaire si les faits reprochés au salarié sont d’une gravité telle, qu’ils justifient sa mise à l’écart immédiate de l’entreprise. Cette mesure doit être suivie immédiatement de l’ouverture de la procédure disciplinaire et interrompt la prescription des faits fautifs. Seul le licenciement fondé sur une faute grave ou lourde dispense l’employeur de payer au salarié concerné le salaire afférent à cette période au cours de laquelle le salarié est dispensé d’exécution de son travail.

En outre, aux termes de l’article L. 2421-1 du code du travail, la demande d’autorisation de licenciement d’un délégué syndical, d’un salarié mandaté ou d’un conseiller du salarié ou d’un membre de la délégation du personnel au comité social et économique interentreprise est adressée à l’inspecteur du travail.

En cas de faute grave, l’employeur peut prononcer la mise à pied immédiate de l’intéressé dans l’attente de la décision définitive.

Cette décision est, à peine de nullité, motivée et notifiée à l’inspecteur du travail dans le délai de quarante-huit heures à compter de sa prise d’effet.

Si le licenciement est refusé, la mise à pied est annulée et ses effets supprimés de plein droit.

Selon les dispositions de l’article R. 2421-6 du même code, en cas de faute grave, l’employeur peut prononcer la mise à pied immédiate de l’intéressé jusqu’à la décision de l’inspecteur du travail.

(‘)

La mesure de mise à pied est privée d’effet lorsque le licenciement est refusé par l’inspecteur du travail ou, en cas de recours hiérarchique, par le ministre.

Il ressort des pièces versées aux débats et des moyens échangés que :

La SAS JLI a été informée le 23 janvier 2020 au soir d’un incident survenu le jour-même avec M. [F] et l’une des élèves dont il avait la charge, ainsi que l’enseignante de cette dernière,

M. [F] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement par un courrier daté du 27 janvier 2020 envoyé par lettre recommandée avec avis de réception,

M. [F] a été mis à pied à titre conservatoire par un courrier daté du même jour envoyé par lettre recommandée avec avis de réception,

M. [F] s’est vu sanctionner par un blâme porté à son dossier par un courrier daté du 26 février 2020.

Il n’est pas contestable que M. [F] a été désigné le 2 octobre 2019 en qualité de représentant de section syndicale. S’il relevait des droits de la SAS JLI de contester cette désignation sur le fondement des dispositions de l’article L. 2143-8 du code du travail, cette contestation n’a pas eu pour effet de la dispenser de respecter les dispositions du code du travail ayant vocation à s’appliquer au salarié exerçant des fonctions de représentation du personnel ou de représentation d’un syndicat, et notamment les dispositions susvisées de l’article L. 2421-1 du code du travail.

La SAS JLI ne verse aux débats aucun élément permettant de démontrer qu’elle aurait motivé sa décision de mettre à pied à titre conservatoire M. [F] le 27 janvier 2020 et qu’elle aurait notifié cette décision à l’inspecteur du travail dans le délai de quarante-huit heures à compter de sa prise d’effet.

Dès lors, il y a lieu d’annuler la décision de mettre à pied à titre conservatoire M. [F], par infirmation du jugement entrepris de ce chef.

S’agissant des circonstances dans lesquelles la décision a été prise, la SAS JLI démontre que M. [F] a été informé qu’il était mis à pied à titre conservatoire verbalement le 27 janvier 2020 aux alentours de midi par la production d’un courriel de M. [N] [R], directeur d’agence, en date du 27 janvier 2020 à 12h15, adressé à la directrice des ressources humaines, dans lequel M. [R] écrit : « Je viens d’avoir M. [F] au téléphone pour lui signifier la mise à pied conservatoire à effet immédiat. M. [F] m’a demandé un écrit et les raisons. Je lui ai indiqué qu’un courrier partait aujourd’hui sans lui donner aucun motif », ainsi qu’une attestation de M. [R] du 16 décembre 2020 dans lequel celui-ci confirme de manière précise les circonstances dans lesquelles il a été décidé de mettre à pied à titre conservatoire M. [F], ces deux éléments étant suffisamment probants.

Dès lors, M. [F] ne peut valablement reprocher à la SAS JLI de ne pas avoir répondu à son courriel du 27 janvier 2020 à 14h24, dans lequel il demandait à son employeur s’il devait effectuer sa tournée de l’après-midi et celle des prochains jours, et à son courriel du 28 janvier 2020 à 7h42, dans lequel le salarié se plaignait de ne pas avoir pu effectuer sa tournée ce matin, l’un des parents ayant refusé de lui confier son fils, dès lors que M. [F] savait depuis le 27 janvier vers midi que son contrat de travail était suspendu et qu’il n’avait pas à assurer sa tournée de l’après-midi du 27 janvier 2020 et les tournées des jours suivants.

En revanche, il n’est pas contestable que, M. [F] ayant été mis à pied à titre conservatoire verbalement le 27 janvier 2020 à midi, l’employeur était tenu de lui fournir du travail le 27 janvier 2020 au matin.

M. [F] verse aux débats un courriel adressé à son employeur en date du 27 janvier 2020 à 8h54, dans lequel celui-ci indique qu’il s’est présenté à 6h55 pour récupérer un enfant, tel que cela avait été convenu la veille avec les parents, mais qu’à son arrivée, l’enfant était déjà parti avec une autre personne, et qu’ayant informé sa mère de l’absence de l’enfant, celle-ci a cru à un enlèvement et n’a été rassurée qu’après avoir réussi à joindre le collège de son fils ; qu’ayant poursuivi sa tournée, il a appris auprès de la mère d’un autre enfant qu’un autre chauffeur JLI était passé le chercher, sans que celle-ci n’ait été informée par JLI de cette modification.

M. [F] verse également aux débats un courriel de la mère du premier enfant datée du 27 janvier à 9h18, dans lequel celle-ci indique que le matin un homme s’est présenté à son domicile en disant remplacer M. [F] dans sa tournée, qu’elle a laissé partir son fils avec cet homme, mais que quelques minutes plus tard, M. [F] s’est présenté chez elle pour venir chercher son enfant, la mère de l’enfant faisant état de son mécontentement à l’encontre de la société JLI pour ne pas avoir été informée de ce changement de chauffeur.

La SAS JLI, qui allègue qu’elle n’a pas réussi à joindre le salarié le week-end, ne peut exciper du fait que, compte tenu de l’incident survenu avec l’élève, [Z] [J], le 23 janvier 2020, elle ne pouvait pas laisser M. [F] assurer sa tournée le 27 janvier 2020, dès lors qu’elle n’a pas pris la décision de le mettre à pied à titre conservatoire dès qu’elle a eu connaissance de cet incident, soit le 23 janvier au soir, mais qu’elle a attendu le 27 janvier au midi pour le faire.

Par ailleurs, la SAS JLI ne justifie pas de la durée de la mise à pied à titre conservatoire, laquelle n’a pris fin qu’avec la notification de la décision de l’employeur de le sanctionner par un blâme par un courrier du 26 février 2020, cette durée de près d’un mois se révélant disproportionnée, l’employeur ne démontrant pas qu’il aurait mené une enquête durant cette période, les pièces versées au dossier démontrant au contraire qu’il a été informé de manière précise des faits reprochés au salarié au plus tard le 27 janvier 2020, tel que cela ressort des différents courriels produits par la société JLI (courriel du père de l’enfant, courriel de l’enseignante de l’enfant).

En conséquence, eu égard à l’ensemble de ces éléments, il y a lieu de retenir que les circonstances dans lesquelles M. [F] a été informé de sa mise à pied et la durée de la mise à pied revêtent un caractère vexatoire, ayant causé un préjudice de nature moral au salarié, dont il sera fait une juste réparation par la condamnation de la SAS JLI à lui payer la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Le jugement entrepris est infirmé de ce chef.

S’agissant du paiement du salaire dû au titre de la période de mise à pied, soit du 27 janvier au 26 février 2020, la SAS JLI, qui soutient qu’elle a bien versé au salarié la rémunération due au salarié, produit aux débats un bulletin de salaire pour le mois de février 2020, duquel il ressort que M. [F] n’a perçu aucune somme au titre du mois de février 2020, le bulletin indiquant un montant négatif de 4,32 euros.

La SAS JLI ne produit aucun élément permettant à la cour de se convaincre qu’elle aurait bien versé au salarié sa rémunération due au titre de sa période de mise à pied, soit un mois.

La SAS JLI ne peut valablement soutenir que le salarié reconnaît dans ses conclusions qu’il a bien été payé au titre de la période de sa mise à pied à titre conservatoire, alors que celui-ci demande dans le dispositif de ses conclusions à ce que la SAS JLI soit condamnée à lui payer la somme de 959 euros à titre de rappel de salaire au titre de la mise à pied, M. [F] reconnaissant uniquement que l’employeur lui a, après plusieurs demandes de sa part, communiqué son bulletin de salaire pour le mois de février 2020 dans le courant du mois d’avril 2020.

Eu égard aux trois derniers salaires bruts perçus par M. [F], le salaire moyen s’élève à 815,69 euros bruts.

Dès lors, il y a lieu de condamner la SAS JLI à lui payer la somme de 815,69 euros bruts à titre de rappel de salaire sur mise à pied, outre 81,56 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents, par infirmation du jugement déféré de ce chef.

Sur la demande d’annulation du blâme :

Moyens des parties,

M. [F] fait valoir que :

– Il conteste les faits qui lui sont reprochés : avoir adopté, le 23 janvier 2020, un comportement et des propos inadmissibles envers un enfant fragile psychologiquement ce qui aurait nécessité l’intervention d’une enseignante,

– L’enfant, qui présente un handicap, avait poussé de nombreux cris inattendus durant le trajet, ce qui l’a fortement perturbé dans sa conduite. Il lui a donc demandé d’arrêter de crier, ce qui relève de ses prérogatives,

– Lors du retour, un professeur a estimé devoir entrer dans le véhicule pour prendre en charge cet enfant et l’attacher, ce qu’il a effectivement refusé car cela relève de sa responsabilité,

– Le livret du conducteur transmis par l’employeur indique d’ailleurs qu’aucun passager ne doit monter à bord du véhicule,

– La durée de la mise à pied conservatoire et le non-paiement des salaires sur cette période démontrent en réalité que le salarié a été sanctionné par la mise à pied mais également pas le blâme.

La SAS JLI INTERNATIONAL fait valoir que :

Les faits reprochés au salarié ont été relatés très précisément par l’enseignante en charge de l’enfant,

La version de M. [F] dans ses écritures ne correspond pas à ses déclarations durant l’entretien préalable,

Elle a opté pour la sanction la plus légère, alors qu’elle aurait pu le licencier pour faute grave, ce qu’elle n’a pas fait afin de lui laisser une seconde chance.

Réponse de la cour,

En application des articles L. 1331-1 et suivants du code du travail, constitue une sanction disciplinaire toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.

Un même fait ne saurait justifier successivement deux mesures disciplinaires. Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur a eu connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits reprochés au salarié. De nouveaux griefs autorisent l’employeur à retenir des fautes antérieures déjà sanctionnées pour apprécier la gravité des faits reprochés au salarié.

Selon l’article L. 1333-1 du code du travail, en cas de litige en matière de sanction disciplinaire, la juridiction apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L’employeur fournit à la juridiction les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l’appui de ses allégations, la juridiction forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’elle estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Il ressort d’un courrier du 26 février 2020 de l’employeur adressé au salarié que celui-ci a été sanctionné d’un blâme pour avoir le 23 janvier 2020 adopté un comportement et des propos inadmissibles envers un enfant fragile psychologiquement, cette situation nécessitant l’intervention de l’enseignante de l’enfant le soir au retour, l’employeur précisant dans son courrier que M. [F] s’est énervé lorsque l’enseignante lui a demandé de modérer ses propos.

Pour établir la matérialité des faits reprochés au salarié, la SAS JLI verse aux débats :

Un courriel de Mme [B], enseignante Ulis de [Z] [J], du 23 janvier 2020, adressé à des destinataires du département de la Drôme, dans lequel celle-ci rend compte des faits de manière précise et circonstanciée comme suit :

L’élève [Z] [J] rencontre des difficultés d’expression orale et se laisse « submerger par ses émotions »,

[Z] est arrivée à l’établissement scolaire le 23 janvier 2020 « très énervée et angoissée », car, selon les dires de l’élèves, M. [F] lui aurait reproché durant le transport de ne pas être informé de ses absences, et [Z] aurait par ailleurs indiqué qu’il était contrarié du fait que les élèves n’aient pas cours le lendemain en raison d’une grève des enseignants ;

[Z] a demandé à son enseignante de la raccompagner au transport le soir car elle craignait que M. [F] soit encore en colère,

Elle a essayé d’avoir une discussion avec M. [F] le soir, et elle indique que la discussion a été « compliquée », M. [F] ne voulant pas entendre qu’il était difficile pour les parents de prévoir les absences des professeurs et les maladies de leurs enfants,

M. [F] a dit devant [Z] « qu’il ne la prendrait plus dans son véhicule » et « ça suffit comme ça »,

Elle a demandé à M. [F] d’éviter de tenir ce genre de propos devant les enfants, qui n’y sont pour rien, et il est remonté dans voiture très énervé,

Elle a conseillé à [Z] de ne pas monter devant mais derrière, et M. [F] l’a mal pris, et aurait tenu des propos déplacés, la menaçant de poursuites judiciaires,

Elle a ressenti de l’inquiétude au départ des enfants et contacté les parents de l’élève pour les informer de la situation,

Un courriel de l’enseignante adressé à la SAS JLI (M. [R]) le 27 janvier 2020, dans lequel celle-ci reprend l’intégralité de ses déclarations,

Un courriel de l’enseignante adressé à la SAS JLI (M. [R]) le 28 janvier 2020, dans lequel celle-ci dit avoir été la plus juste possible dans la description de la discussion du 23 janvier 2020 avec M. [F], l’enseignante insistant sur le fait que M. [F] s’est avant tout plaint des absences des élèves, et du fait qu’il n’était pas payé dans ces cas-là, et qu’elle a réagi et demandé de ne pas tenir certains propos devant les enfants lorsque celui-ci a dit à [Z] en la pointant du doigt « Je ne te prendrai plus », l’enseignante indiquant que M. [F] a fait planer une menace sur l’enfant à même de provoquer des angoisses chez les enfants, ce qu’elle qualifie d’inacceptable,

Un courriel du père de l’enfant, [Z] [J], du 24 janvier 2020 adressé au Département de la Drôme, dans lequel celui-ci indique qu’à la suite de l’incident survenu la veille avec M. [F], il ne souhaite plus que ce chauffeur prenne en charge sa fille, celle-ci étant « marquée » et ayant « peur de le croiser à nouveau », et demandant que le Département fasse le nécessaire auprès de la SAS JLI,

Un courriel du père de l’enfant du 27 janvier 2020 adressé à la SAS JLI (M. [R]), dans lequel celui-ci indique que M. [F] lui aurait dit le 23 janvier au soir qu’il ne « voulait plus prendre [Z] », et qu’il se serait plaint des absences de [Z] qui avaient une incidence sur son salaire ; M. [J] indique également que [Z] se sentait mal à l’aise depuis quelque temps, parce que M. [F] avait décidé qu’il était interdit de parler dans la voiture, et que M. [F] était insistant par SMS pour connaître les raisons des absences de [Z], et qu’il souhaitait obtenir des confirmations écrites de ses absences ; enfin, M. [J] indique que [Z] ne souhaite plus rencontrer M. [F], qu’elle est stressée, et que lui-même n’a plus confiance en M. [F] et doute de ses facultés pour exercer ce métier.

Ces éléments concordants, précis et circonstanciés, sont suffisants pour retenir que M. [F] a tenu des propos inadaptés à l’encontre d’un enfant souffrant d’un handicap, et dont il était chargé d’assurer le transport, au moins le 23 janvier 2020 au soir devant l’enseignante de cette enfant, M. [F] n’apportant aucun élément permettant de contredire les propos précis de celle-ci rapportés dans son courriel susvisé.

M. [F] ne conteste par ailleurs pas les allégations du père de l’enfant, selon lesquelles il lui aurait dit qu’il ne souhaitait plus prendre en charge [Z].

Ces différents courriels sont également suffisants pour retenir que M. [F] se serait plaint, aussi bien auprès de l’enseignante de [Z] que devant le père de cette dernière, des absences de celle-ci, et que M. [F] aurait adopté en outre un ton inadapté pour tenir ces propos, sous forme de reproches adressés à l’enseignante et au père de [Z].

M. [F] ne peut exciper du fait que l’enseignante serait montée dans le véhicule pour attacher [Z], ce que celle-ci ne confirme pas dans ses courriels, dès lors que les faits qui lui sont reprochés sont antérieurs à cet événement.

Enfin, il ne peut valablement être soutenu par M. [F], comme il le laisse sous-entendre dans ses écritures, qu’il n’aurait adopté aucun comportement inapproprié à l’égard de l’enfant lors du transport du 23 janvier 2020 le matin, au seul motif que les dires de l’enfant seraient des propos rapportés par l’enseignante, dès lors que celle-ci indique que [Z] est arrivée très énervée et angoissée le 23 janvier 2020 au matin, et que le père indique de son côté que [Z] a refusé d’entrer à nouveau en contact avec M. [F] à la suite de la journée du 23 janvier 2020.

Le fait que les autres enfants n’aient manifesté aucun mécontentement à l’encontre de M. [F] ne peut valablement servir à démontrer que l’enfant, [Z] [J], aurait construit ses propos de toutes pièces, ce que sous-entend M. [F] dans ses écritures sans apporter aucun élément en ce sens.

La SAS JLI établit ainsi la matérialité des faits reprochés au salarié, à savoir l’adoption d’un comportement inadapté à l’encontre d’une enfant en situation de handicap, et de propos déplacés à l’encontre de son enseignante, ces faits étant incontestablement de nature fautive au regard des missions incombant au salarié, et justifiant la décision de l’employeur de le sanctionner disciplinairement.

Toutefois, il a été retenu précédemment que la mise à pied conservatoire compte tenu de sa durée disproportionnée, avait un caractère vexatoire.

En outre, il a été relevé que la SAS JLI ne justifiait pas du paiement du salaire dû au titre de cette période, après qu’elle eut finalement décidé de ne pas licencier le salarié pour faute grave, mais de lui notifier un blâme, de sorte qu’il y a lieu de requalifier la mise à pied conservatoire en mise à pied disciplinaire.

Il en résulte que la SAS JLI n’était pas fondée à sanctionner le salarié par une nouvelle sanction disciplinaire à l’issue de sa mise à pied le 26 février 2020, en application du principe non bis in idem.

Dès lors, il y a lieu d’annuler le blâme, par infirmation du jugement déféré de ce chef.

Sur la demande au titre de la discrimination syndicale :

Moyens des parties,

M. [F] fait valoir que :

– Le fait que l’employeur conteste sa qualité de représentant syndical ne suspend pas sa désignation,

– Ses conditions de travail se sont détériorées depuis qu’il est représentant syndical,

– Elle n’a pas respecté la procédure de licenciement inhérente à sa qualité de salarié protégé,

– La procédure disciplinaire à son encontre est une mesure de discrimination syndicale.

La SAS JLI INTERNATIONAL soutient que :

Elle a contesté sa qualité de représentant syndical devant les juridictions,

Le salarié ne présente aucun fait laissant supposer que sa mise à pied conservatoire et son blâme seraient des faits de nature discriminatoire en raison de ses activités syndicales,

Il ne démontre pas qu’elle l’aurait empêché d’exercer de nombreuses prérogatives comme il le soutient dans ses écritures,

Il ne démontre pas non plus en quoi la dégradation de ses conditions de travail résulterait de sa nomination en tant que représentant d’une section syndicale,

Le salarié ne fait la démonstration d’aucun préjudice résultant de la discrimination alléguée.

Réponse de la cour,

Aux termes de l’article L. 1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’action, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de ses activités syndicales.

En outre, l’article L. 2141-5 du code du travail interdit à l’employeur de prendre en considération l’appartenance à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d’avancement, de rémunération et d’octroi d’avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail.

L’article L. 1134-1 du code du travail prévoit qu’en cas de litige relatif à l’application des dispositions susvisées de l’article L. 1132-1, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte telle que définie, au vu desquels il incombe à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

La SAS JLI ne conteste pas qu’elle a cherché à contester par la voie judiciaire la désignation de M. [F] en qualité de délégué syndical au sein de l’entreprise.

Ce fait est établi.

M. [F] ne verse aux débats aucun élément permettant de démontrer que ses conditions de travail se seraient détériorées à compter de sa nomination en qualité de délégué syndical au sein de la SAS JLI.

Ce fait n’est pas établi.

Il a été retenu précédemment que la SAS JLI avait initié la procédure de licenciement et mis à pied M. [F] à titre conservatoire sans informer l’inspecteur du travail, conformément aux dispositions de l’article L. 2421-1 du code du travail.

Ce fait est établi.

M. [F] a été mis à pied à titre conservatoire pendant une durée d’un mois et il lui a été notifié un blâme.

Ce fait est établi.

Pris ensemble, les faits matériellement établis par le salarié sont de nature à laisser supposer une discrimination syndicale à son encontre.

Dès lors, il incombe à l’employeur de démontrer que ces faits matériellement établis sont justifiés par des raisons objectives étrangères à toute discrimination syndicale.

Il n’est pas contestable que M. [F] a été désigné le 2 octobre 2019 en qualité de représentant de section syndicale.

Il ne peut être valablement reproché à la SAS JLI d’avoir cherché à contester cette désignation, dès lors qu’elle n’a fait ainsi qu’exercer l’un des droits qu’elle tire des dispositions de l’article L. 2143-8 du code du travail.Cette action ne peut donc caractériser un comportement constitutif d’une discrimination syndicale.

La SAS JLI justifie ainsi par des raisons objectives étrangères à toute discrimination syndicale sa décision de contester par la voie judiciaire la désignation de M. [F] en qualité de délégué syndical.

La SAS JLI n’apporte en revanche aucune explication permettant de justifier par des raisons objectives étrangères à toute discrimination syndicale sa décision de mettre à pied M. [F] à titre conservatoire sans notifier sa décision à l’inspecteur du travail, conformément aux dispositions susvisées de l’article L. 2421-1 du code du travail, sa décision de contester la désignation du salarié en qualité de délégué syndical n’ayant pas eu pour effet de la dispenser d’appliquer les dispositions protectrices des salariés exerçant un mandat ou des délégués syndicaux.

Il a été retenu précédemment que la SAS JLI échouait à justifier la durée de près d’un mois de la mise à pied à titre conservatoire, celle-ci n’ayant manifestement mené aucune enquête, les faits litigieux étant connus de manière précise par l’employeur le 27 janvier 2020 au plus tard.

En outre, la SAS JLI ne justifie pas non plus de l’absence de paiement de la rémunération due au titre de la mise à pied à titre conservatoire après avoir décidé de lui infliger un blâme.

Enfin, il a été retenu que, compte tenu de la durée de la mise à pied à titre conservatoire et de l’absence de paiement, celle-ci devait être requalifiée en sanction disciplinaire, et qu’ainsi, la SAS JLI n’était pas fondée à sanctionner le salarié une nouvelle fois pour les faits fautifs qu’il avait commis.

L’employeur échoue ainsi à justifier par des raisons objectives étrangères à toute discrimination syndicale la durée de la mise à pied à titre conservatoire et l’absence de paiement de la rémunération due au titre de cette mise à pied.

Dès lors, M. [F] a subi une discrimination syndicale, lui ayant causé un préjudice, qui sera justement réparé par la condamnation de la SAS JLI à lui payer la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts, par infirmation du jugement entrepris de ce chef.

Sur la demande au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail :

Moyens des parties,

M. [F] fait valoir que :

– La SAS JLI a tardé à lui payer son salaire du mois de février 2020,

– Ses bulletins de paie lui sont envoyés tardivement,

-L’employeur lui a attribué selon mail du 5 mars 2020 une nouvelle tournée, cette nouvelle affectation ayant eu pour effet de modifier les éléments essentiels du contrat de travail,

– Il ne conteste pas que l’employeur peut modifier la tournée sur laquelle est affecté un salarié, mais à condition que cette nouvelle affectation ne modifie pas éléments essentiels du contrat ; en effet, il devait prendre en charge 5 enfants au lieu de 4 ; il a été planifié 15 heures par semaine alors qu’il effectuait 24 heures par semaine habituellement ; le temps de travail étant modifié, sa rémunération a été également modifiée, ce qui démontre qu’il s’agit bien d’une modification du contrat de travail et non pas un simple changement des conditions de travail,

– Ses courriers et courriels sont restés sans réponse : sa demande de transmission du bulletin de salaire du mois de février, la contestation de sa sanction, différents mails adressés le 27 et 28 janvier lorsque sa tournée a été supprimée.

La SAS JLI INTERNATIONAL fait valoir que :

Elle a proposé au salarié un nouveau circuit après l’incident ayant justifié le blâme ; il avait déjà été très difficile de ramener la jeune enfant, traumatisée, à l’école ; il était impensable de lui proposer le même circuit,

Elle était contractuellement autorisée à modifier le circuit du salarié ; le changement de mission contractuelle en cours d’année scolaire, et plus particulièrement du nombre d’enfants à transporter, est prévu dans le contrat de travail (article préliminaire),

Le changement du nombre d’enfants à prendre en charge est aussi prévu par l’accord du 7 juillet 2009, à la condition qu’un délai de prévenance de 3 jours soit respecté, ce qui a été le cas en l’espèce,

Le salarié ne démontre pas qu’elle aurait omis de répondre à ses courriels et à ses courriers,

Le salarié ne démontre aucun préjudice, et ne justifie pas de la dégradation alléguée de son état de santé.

Réponse de la cour,

Selon les dispositions de l’article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi. Comme le salarié, l’employeur est tenu d’exécuter le contrat travail de bonne foi. Il doit en respecter les dispositions et fournir au salarié le travail prévu et les moyens nécessaires à son exécution en le payant le salaire convenu.

Selon l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

En droit du travail, il incombe à l’employeur de démontrer, notamment par la production de pièces comptables que le salaire dû afférent au travail effectivement effectué a été payé.

En outre, le salarié doit pouvoir vérifier que le calcul de sa rémunération a été effectué conformément aux modalités prévues par le contrat de travail, ce qui implique que l’employeur est tenu de lui communiquer l’ensemble des bases de calcul nécessaires à la vérification.

S’agissant du paiement de la rémunération due au titre de la mise à pied à titre conservatoire, il a été retenu précédemment que la SAS JLI échouait à faire la démonstration de son paiement, et ne produisait aucun bulletin de salaire au titre de ce mois, le bulletin de salaire du mois de février 2020 versé aux débats faisant mention d’une somme négative.

Ce manquement de l’employeur est établi.

M. [F] verse aux débats plusieurs courriels par lesquels il demande à ce que lui soit transmis son bulletin de paie du mois de février :

Un courriel du 12 mars 2020, dans lequel il indique ne pas avoir reçu son bulletin de salaire, alors que ses collègues l’ont reçu la veille,

Un courriel du 14 avril 2020, dans lequel il indique ne pas avoir reçu son solde de tout compte, ainsi que son bulletin de paie du mois de février 2020,

Un courriel du 17 avril 2020, dans lequel le salarié réitère sa demande de transmission de son bulletin de salaire du mois de février 2020.

Il doit être constaté que la SAS JLI a transmis à M. [F] son bulletin de salaire du mois de février 2020 présentant un solde négatif de -4,32 euros le 20 avril 2020.

La cour d’appel constate que dans son courriel du 12 mars 2020 le salarié indique que des collègues ont reçu leur bulletin de salaire la veille.

La SAS JLI, qui allègue que ce retard serait dû à un problème informatique, n’en fait pas la démonstration.

En outre, l’employeur échoue à démontrer que d’autres salariés que M. [F] auraient également été concernés par ce retard.

La SAS JLI ne peut non plus exciper que ce retard serait dû au confinement dû à la pandémie COVID ayant débuté en mars 2020, sans, dans le même temps, justifier que d’autres salariés auraient dans les mêmes conditions que M. [F], reçu avec retard leur bulletin de salaire.

Le fait que les salaires seraient effectivement versés le 15 du mois, ce que la SAS JLI ne démontre pas au demeurant, et la cour d’appel constatant que les bulletins de salaire versés aux débats font mention d’une date de versement au 5 de chaque mois, ne peut également, dans tous les cas, justifier l’absence de transmission tardive du bulletin de février 2020.

Enfin, la SAS JLI n’apporte aucune explication à l’absence de réponse aux courriels des 12 mars et 14 avril 2020, la SAS JLI ayant attendu le 20 avril 2020 pour répondre au dernier courriel du salarié en date du 17 avril 2020.

Le manquement de l’employeur est établi.

Il est de principe que le changement des conditions de travail relève du pouvoir de direction de l’employeur. La modification du contrat de travail est celle qui porte sur les éléments essentiels du contrat, et ne peut intervenir que d’un commun accord entre les parties.

Il ressort d’un courriel de l’employeur en date du 5 mars 2020 adressé à M. [F] que le salarié s’est vu confier une nouvelle mission contractuelle comprenant le transport de cinq élèves pour un total de 3 heures quotidiennes de travail, la mission contractuelle contenant un encart dans lequel le salarié devait accepter ou refuser la mission en cochant une case, en renseignant la date, et en signant le document.

Par ailleurs, il ressort de l’avenant de transfert de contrat de travail du 23 août 2018 qu’il devrait être conclu pour chaque année scolaire un avenant de mission indiquant le nom des élèves à transporter, le nombre d’heures de travail par jour, et les périodes travaillées et non-travaillées, lesquelles variaient d’une année sur l’autre en fonction des périodes de vacances scolaires.

Il est en outre prévu à l’article 6 de cet avenant que « le salarié est informé du fait que sa mission annuelle pourra être modifiée en cours d’année, le nombre de personnes à transporter variant lui-même dans le cadre de cette période. L’entreprise se réserve la possibilité de demander au salarié d’effectuer des heures excédant la durée fixée ci-dessus dans la limite du quart de la durée annuelle minimale de travail ».

Il ressort du contrat de mission signé par le salarié le 28 août 2018 une durée quotidienne de travail de 3h20 prévue.

Le salarié, qui soutient qu’il effectuait pour la période 2019-2020, 24 heures par semaine, ne produit par le contrat de mission pour cette période, et la SAS JLI omet également de verser ce contrat aux débats.

Toutefois, il ressort des bulletins de salaire versés aux débats que le salarié avait effectué 62 heures de travail en janvier 2020, 56,75 heures en décembre 2019, cette durée s’expliquant manifestement par les vacances de fin d’année, 72,75 heures en novembre 2019, 56 heures en octobre 2019 où ont généralement lieu les vacances d’automne, et 86,25 heures en septembre 2019.

Il résulte de ces éléments que le contrat de mission proposé au salarié en cours d’année comprenait un nombre d’heures de travail significativement inférieur à celui effectué par M. [F] depuis la rentrée de septembre 2019, ce que la SAS JLI reconnaît d’ailleurs elle-même dans ses conclusions.

La SAS JLI ne soutient ni ne démontre qu’en proposant au salarié d’effectuer 15 heures par semaine, elle respectait le minimum conventionnel de 550 heures par an.

Eu égard à l’ensemble de ces constatations, il y a lieu de retenir que la modification de la tournée décidée par la SAS JLI ne constituait pas une simple modification des conditions de travail, mais bien un d’un élément essentiel du contrat de travail, nécessitant le consentement du salarié, et ne pouvant lui être imposé sans son accord.

Dès lors, la SAS JLI a commis un manquement à l’exécution du contrat de travail en lui retirant son ancienne tournée sans lui proposer une tournée comprenant un nombre d’heures de travail équivalent à son ancienne tournée.

Il a déjà été retenu précédemment que M. [F] avait été informé de sa mise à pied à titre conservatoire le 27 janvier 2020 à midi, et qu’il n’avait donc pas à effectuer sa tournée de la journée du 27 janvier 2020 et des jours suivants, de sorte qu’il ne peut valablement être reproché à l’employeur de ne pas avoir répondu à ses courriels des 27 et des 28 janvier 2020, par lesquels M. [F] demandait s’il devait effectuer ses tournées.

Il ne peut non plus être reproché à l’employeur de ne pas avoir répondu à son courrier de contestation de sa sanction, l’employeur n’ayant aucune obligation de le faire, l’absence de réponse valant décision de maintenir la sanction qui lui a été notifiée le 26 février 2020.

En revanche, il a été constaté précédemment que l’employeur n’apportait aucune explication à sa réponse tardive aux différents courriels du salarié portant sur l’absence de transmission de son bulletin de paie du mois de février 2020.

Ces différents manquements établis, caractérisent une inexécution déloyale du contrat de travail, ayant causé un préjudice moral au salarié qu’il y a lieu de réparer par la condamnation de la SAS JLI à lui payer la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Le jugement entrepris est infirmé de ce chef.

Sur la demande de rappel de salaire :

Moyens des parties,

M. [F] ne conclut pas sur cette demande.

La SAS JLI fait valoir que le salarié ne chiffre pas sa demande de rappel de salaire, se limitant à soutenir, sans apporter aucun élément pour le démontrer, qu’elle n’aurait pas rémunéré l’ensemble des heures de travail qu’il a effectuées.

Réponse de la cour,

Aux termes de l’article 954, alinéa 3, du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.

M. [F] demande dans le dispositif de ses conclusions la condamnation de la société JLI au paiement d’un rappel de salaire outre les congés payés afférents (à parfaire), mais ne chiffre pas sa demande, et n’explicite pas son fondement dans ses conclusions.

En effet, il doit être constaté que M. [F], qui allègue à plusieurs reprises, que la SAS JLI ne lui aurait pas rémunéré l’intégralité des heures de travail qu’il a effectuées, ne développe aucun moyen de fait permettant à la cour d’identifier les heures effectuées qui ne lui auraient pas été payées, et ne produit aucun élément au soutien de sa demande.

Dès lors, il y a lieu de rejeter la demande du salarié, par confirmation du jugement déféré de ce chef.

Sur la prise d’acte de la rupture du contrat de travail :

Moyens des parties,

M. [F] fait valoir que :

– La relation contractuelle s’était fortement dégradée notamment depuis sa désignation en qualité de délégué contractuel,

-Il a fait l’objet d’une mise à pied et d’un blâme abusifs,

– Il a rencontré des difficultés sur le paiement des salaires et décompte du temps de travail,

– L’employeur n’a pas répondu à ses demandes, notamment sur la transmission des bulletins de salaire,

– Son contrat de travail a été modifié unilatéralement,

– La prise d’acte de la rupture du contrat de travail justifiée par un salarié protégé s’analyse en un licenciement nul.

La SAS JLI INTERNATIONAL fait valoir que :

Le salarié ne cite aucun élément caractérisant une dégradation des relations contractuelles en raison de l’exercice de son mandat syndical,

Sa mise à pied conservatoire et le blâme étaient parfaitement justifiés,

L’absence de réponse à ses demandes sur sa paye de février 2020 trouvent leur origine dans le premier confinement,

La modification de sa feuille de route ne constitue pas une modification unilatérale de son contrat de travail,

Le salarié ne démontre pas avoir été empêché d’exercer ses fonctions syndicales,

Le salarié n’explique pas quelles sont les irrégularités quant au décompte des heures travaillées visées dans son courrier de prise d’acte.

Réponse de la cour,

Le salarié qui reproche à l’employeur des manquements à ses obligations peut prendre acte de la rupture de son contrat.

La prise d’acte ne nécessite aucun formalisme particulier mais doit être transmise directement à l’employeur.

Lorsque le salarié justifie de manquements suffisamment graves de la part de l’employeur empêchant la poursuite du contrat de travail, la prise d’acte produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et, dans le cas contraire, d’une démission.

Les juges du fond doivent examiner l’ensemble des manquements de l’employeur invoqués par le salarié sans se limiter aux seuls griefs énoncés dans la lettre de prise d’acte.

Il est de jurisprudence constante que lorsque la prise d’acte produit les effets d’une démission, le salarié est redevable de l’indemnité compensatrice de préavis, même en l’absence de préjudice pour l’employeur.

Selon les dispositions de l’article L. 2411-3 du code du travail, le licenciement d’un délégué syndical ne peut intervenir qu’après autorisation de l’inspecteur du travail.

Cette autorisation est également requise pour le licenciement de l’ancien délégué syndical, durant les douze mois suivant la date de cessation de ses fonctions, s’il a exercé ces dernières pendant au moins un an.

Elle est également requise lorsque la lettre du syndicat notifiant à l’employeur la désignation du délégué syndical a été reçue par l’employeur ou lorsque le salarié a fait la preuve que l’employeur a eu connaissance de l’imminence de sa désignation comme délégué syndical, avant que le salarié ait été convoqué à l’entretien préalable au licenciement.

Selon les dispositions de l’article L. 2421-1 du même code, la demande d’autorisation de licenciement d’un délégué syndical, d’un salarié mandaté ou d’un conseillé du salarié ou d’un membre de la délégation du personnel au comité social et économique interentreprise est adressée à l’inspecteur du travail.

En cas de faute grave, l’employeur peut prononcer la mise à pied immédiate de l’intéressé dans l’attente de la décision définitive.

Cette décision est, à peine de nullité, motivée et notifiée à l’inspecteur du travail dans le délai de quarante-huit heures à compter de sa prise d’effet.

Si le licenciement est refusé, la mise à pied est annulée et ses effets supprimés de plein droit.

Selon les dispositions de l’article L. 1235-3-1 du code du travail, l’article L. 1235-3 n’est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d’une des nullités prévues au deuxième alinéa du présent article. Dans ce cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l’exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l’employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Les nullités mentionnées au premier alinéa sont celles qui sont afférentes :

5 ° Un licenciement d’un salarié protégé mentionné aux articles L. 2411-1 et L. 2412-1 en raison de l’exercice de son mandat.

L’indemnité est due sans préjudice du paiement du salaire, lorsqu’il est dû en application des dispositions de l’article L. 1225-71 et du statut protecteur dont bénéficient certains salariés en application du chapitre Ier et du titre Ier du livre IV de la deuxième partie du code du travail, qui aurait été perçu pendant la période couverte par la nullité et, le cas échéant, sans préjudice de l’indemnité de licenciement légale, conventionnelle ou contractuelle ».

Il ressort des pièces versées aux débats que M. [F] a pris acte de la rupture de son contrat de travail par courrier du 13 mars 2020 envoyé par lettre recommandée avec avis de réception, le salarié invoquant dans sa lettre les manquements suivants :

La SAS JLI a refusé de tenir compte de sa désignation en tant que délégué syndical,

Il a été mis à pied à titre conservatoire de manière injustifiée et dans des conditions vexatoires,

Il a été sanctionné par un blâme également injustifié,

La SAS JLI n’a pas respecté la procédure disciplinaire s’appliquant à un salarié protégé,

La SAS JLI lui a attribué une nouvelle tournée emportant modification du contrat de travail,

La SAS JLI ne lui rémunère pas l’intégralité des heures travaillées.

Il a été retenu précédemment que la SAS JLI avait mis à pied à titre conservatoire M. [F] sans notifier sa décision à l’inspecteur du travail conformément aux dispositions de l’article L. 2421-1 du code du travail.

Il a également été jugé que les circonstances dans lesquelles cette mise à pied était intervenue, et sa durée disproportionnée, revêtaient un caractère vexatoire.

En outre, il a été décidé que: eu égard à l’absence de paiement de la période de mise à pied, et de sa durée, celle-ci revêtait le caractère d’une sanction disciplinaire, de sorte que la JLI n’était plus fondée à le sanctionner à nouveau pour les mêmes faits, et que le blâme qui lui avait été notifié par courrier du 26 février 2020 devait être annulé.

Par ailleurs, il a été jugé que M. [F] avait fait l’objet d’une discrimination syndicale, en raison notamment du refus de la part de la SAS JLI de tenir compte de sa désignation en tant que délégué syndical, peu important qu’elle ait décidé d’exercer son droit de contester la validité de cette désignation.

Enfin, il a été jugé que la décision de la SAS JLI de supprimer sa tournée depuis la rentrée de septembre 2019 et de lui proposer une nouvelle tournée réduisant sa durée hebdomadaire de travail emportait modification du contrat de travail.

M. [F] établit ainsi des manquements suffisamment graves de son employeur empêchant la poursuite de la relation de travail.

Dès lors, il y a lieu de juger que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d’un licenciement nul, la rupture de la relation de travail trouvant notamment son origine dans l’exercice du mandat de délégué syndical par le salarié.

M. [F] est ainsi fondé à prétendre à l’indemnité prévue par les dispositions susvisées de l’article L. 1235-3-1 du code du travail, à l’indemnité légale de licenciement, et à l’indemnité compensatrice de préavis, outre l’indemnité compensatrice de congés payés y afférents.

Eu égard aux trois derniers salaires bruts perçus par M. [F], le salaire moyen s’élève à 815,69 euros bruts.

M. [F], dont l’ancienneté est fixée à la date du 30 août 2014 aux termes de l’article 1 de l’avenant du 23 août 2018, a pris acte de la rupture de son contrat de travail par courrier le 13 mars 2020. Il avait donc 5 ans et 6 mois révolus d’ancienneté au jour de la rupture de la relation de travail.

Dès lors, il y a lieu de condamner la SAS JLI à lui payer la somme de 1 121,57 euros à titre d’indemnité légale de licenciement.

La SAS JLI doit être également condamnée à payer à M. [F] la somme de 1 631,38 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 163,13 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents.

Enfin, la SAS JLI doit être condamnée à payer à M. [F] la somme de 6 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul en réparation du préjudice résultant de la perte de son emploi.

Le jugement entrepris est réformé sur le quantum de ces condamnations.

Le salarié protégé, illégalement licencié, a droit, s’il ne réclame pas sa réintégration, à une indemnité réparant l’atteinte portée au statut protecteur, qui est égale au montant des salaires qu’il aurait perçus depuis la date de son éviction jusqu’à la fin de la période de protection. L’éviction du salarié protégé hors de l’entreprise, résultant du licenciement illégal, fait obstacle à l’exercice du mandat. Il en résulte que, lorsqu’il ne demande pas sa réintégration, le délégué syndical, licencié sans autorisation de l’inspecteur du travail, a droit, peu important l’ancienneté du mandat dont l’exercice a été entravé, à une indemnité correspondant à la période de protection prévue par l’article L. 2411-3 du code du travail, soit égale à douze mois de salaires à compter de son éviction de l’entreprise.

La SAS JLI doit être en conséquence condamnée à payer à M. [F] la somme de 9 788,28 euros à titre d’indemnité pour atteinte au statut protecteur, par réformation du jugement déféré sur le quantum de la condamnation.

Sur les demandes accessoires :

Il y a lieu, conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil, d’ordonner la capitalisation des intérêts, à compter du jour de la saisine du conseil de prud’hommes, cette demande étant formulée dans la requête introductive d’instance de M. [F].

Il convient de confirmer le jugement entrepris sur les frais irrépétibles et de l’infirmer sur les dépens.

Me [T] et Me [O], ès qualités de co-mandataires judiciaires de la SAS VORTEX, partie perdante, et la SAS JLI, sont condamnés aux dépens de première instance et d’appel, chacune pour moitié.

Me [T] et Me [O], ès-qualités, partie perdante, sont condamnés à payer à M. [F] la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

La SAS JLI est condamnée à payer à Mme [F] la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement entrepris excepté en ce qu’il a :

Débouté M. [F] de ses demandes de rappel de salaire au titre de la durée minimum annuelle et au titre des travaux annexes,

Débouté la SAS VORTEX, représentée par Me [T] et Me [O] ès-qualités de co-mandataires liquidateurs, de sa demande d’indemnité fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejeté la demande de condamnation relative aux sommes retenues par l’huissier instrumentaire en application du décret du 12 décembre 1996 devant être supportées par la SAS JLI,

Rejeté la demande relative à la transmission de la décision à Pôle emploi et de condamnation de la SAS JLI au remboursement des allocations versées,

Condamné la SAS JLI à payer à M. [F] la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamné la SAS JLI aux entiers dépens,

Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées et y ajoutant,

FIXE au passif de la liquidation judiciaire de la SAS VORTEX les sommes suivantes :

2 966,72 euros à titre de rappel de salaire pour non-respect de la durée minimale annuelle,

1 083,24 euros à titre de rappel de salaire au titre des travaux annexes,

108,32 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

90,25 euros à titre de rappel sur prime de 13e mois y afférents,

11,87 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

ANNULE la mise à pied à titre conservatoire du 27 janvier au 26 février 2020,

CONDAMNE en conséquence la SAS JLI à payer à M. [F] les sommes suivantes :

1 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral découlant des circonstances vexatoires entourant la mise à pied à titre conservatoire,

815,69 euros à titre de rappel de salaire au titre de la mise à pied à titre conservatoire,

81,56 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

ANNULE le blâme du 26 février 2020,

JUGE que M. [F] a subi une situation de discrimination syndicale sur son lieu de travail,

CONDAMNE en conséquence la SAS JLI à lui payer la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts à ce titre,

CONDAMNE la SAS JLI à payer à M. [F] la somme de 2 000 euros au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail,

DIT que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail a produit les effets d’un licenciement nul,

CONDAMNE la SAS JLI à payer à M. [F] les sommes suivantes :

1 121,57 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,

1 631,38 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

163,13 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

6 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

9 788,28 euros à titre d’indemnité pour atteinte au statut protecteur,

ORDONNE la capitalisation des intérêts à compter du jour de la saisine du conseil de prud’hommes,

REJETTE le surplus des demandes des parties,

DIT que le présent arrêt est opposable à l’AGS représentée par l’AGS-CGEA de [Localité 8] et qu’elle doit sa garantie dans les conditions définies par l’article L. 3253-8 du code du travail dans la limite des plafonds légaux,

DIT que l’obligation de l’AGS de faire l’avance des sommes allouées à M. [F] devra couvrir la totalité des sommes allouées à M. [F] à l’exception de la condamnation prononcée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

DIT que son obligation de faire l’avance des sommes allouées à M. [F] ne pourra s’exécuter que sur justification par le mandataire judiciaire de l’absence de fonds disponibles pour procéder à leur paiement,

CONDAMNE Me [T] et Me [O], ès-qualités de co-mandataires judiciaires de la SAS VORTEX, à payer à M. [F] la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

CONDAMNE la SAS JLI à payer à M. [F] la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

CONDAMNE Me [T] et Me [O], ès-qualités de co-mandataires judiciaires de la SAS VORTEX, et la SAS JLI, aux dépens de première instance et d’appel, chacune pour moitié.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Valéry Charbonnier, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Mériem Caste-Belkadi, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

La Greffière, La Conseillère

faisant fonction de Présidente,

 


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