Retenues sur salaire : 28 avril 2022 Cour d’appel de Nancy RG n° 21/00066

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Retenues sur salaire : 28 avril 2022 Cour d’appel de Nancy RG n° 21/00066

ARRÊT N° /2022

PH

DU 28 AVRIL 2022

N° RG 21/00066 – N° Portalis DBVR-V-B7F-EWF6

Conseil de prud’hommes de Colmar – jugement du 17 avril 2018

COUR D’APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE – SECTION 2

Saisine sur renvoi après cassation

DEMANDERESSE A LA SAISINE:

S.A.R.L. SCHNOELLER agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié audit siège

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Clarisse MOUTON de la SELARL LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY substituée par Me SOUMSA, avocat au barreau de COLMAR

DEFENDEUR A LA SAISINE:

Monsieur [J] [W]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me David EBEL de la SELAS ALSACE OMNIJURIS, avocat au barreau de COLMAR substitué par Me GERARD, avocate au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président :WEISSMANN Raphaël,

Conseillers : STANEK Stéphane,

WILLM Anne-Sophie,

Greffier lors des débats :RIVORY Laurène

DÉBATS :

En audience publique du 10 Février 2022 ;

L’affaire a été mise en délibéré pour l’arrêt être rendu le 07 Avril 2022 ; puis à cette date le délibéré a été prorogé au 28 avril 2022 ; par mise à disposition au greffe conformément à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

Le 28 Avril 2022, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l’arrêt dont la teneur suit

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

Monsieur [J] [W] a été engagé par la société SCHNOELLER, exploitant sous l’enseigne AMBULANCES DU RIED, sous contrat de travail à durée déterminée du 27 août 2012 au 26 mars 2013, en qualité d’employé polyvalent.

La relation de travail s’est poursuivie sous contrat de travail à durée indéterminée à compter du 27 mars 2013.

Le 21 juin 2013, Monsieur [J] [W] a été victime d’un accident du travail à la suite duquel il a été placé en arrêt de travail.

Le 11 mars 2014, il s’est vu reconnaître la qualité de travailleur handicapé.

Le 3 février 2015, il a été déclaré par la médecine du travail inapte à la conduite des véhicules de transport et apte à un travail de bureau.

Par courrier du 12 mars 2015, la société SCHNOELLER a fait une proposition de reclassement à Monsieur [J] [W] sur un poste de bureau, qu’il a refusé.

Par courrier du 7 avril 2015, Monsieur [J] [W] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement, fixé au 15 avril 2015.

Par courrier du 18 avril 2015, il a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Par requête du 5 février 2016, Monsieur [K] [W] a saisi le conseil de prud’hommes de Colmar en sa formation de référés, aux fins d’obtenir la remise sous astreinte de ses feuilles de route journalières et les plannings de permanence.

Par ordonnance du 16 mars 2016, la formation de référés du conseil de prud’hommes de Colmar a ordonné, sous astreinte de 10 euros par jour et par document, la communication des tableaux hebdomadaires et des plannings de permanences à Monsieur [K] [W].

Par requête du 8 juin 2017, il a saisi le conseil de prud’hommes de Colmar aux fins de voir dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir, en conséquence, le paiement des indemnités afférentes.

Par jugement du 17 avril 2018, le conseil de prud’hommes de Colmar a :

dit que le licenciement de Monsieur [K] [W] était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

condamné la société SCHNOELLER à payer à Monsieur [K] [W] les montants suivants :

– 25 884,36 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif par manquement à l’obligation de reclassement,

– 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l’exécution de bonne foi du contrat de travail,

– 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat concernant les soins à apporter à la victime d’un accident du travail,

– 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour remise d’une attestation destinée au pôle emploi non-conforme,

– 4 314,06 euros au titre de l’indemnité compensatrice de preavis,

– 1 441,58 euros au titre du solde d’indemnité spéciale de licenciement,

– 3 079,25 euros brut au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés,

– 823,63 euros brut a titre de rappel d’heures supplémentaires de février à juin 2013 inclus,

– 82,26 euros brut au titre des conges payes sur rappel d’heures supplémentaires de février a juin 2013 inclus,

– 1 167,15 euros brut a titre de rappel de salaire au titre des permanences de février à juin 2013 inclus,

– 116,71 euros brut au titre des conges payes sur rappel de salaire au titre des permanences de février a juin 2013 inclus,

– 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers frais et dépens,

donné acte à la société SCHNOELLER de ce qu’elle reconnait devoir à Monsieur [K] [W] les sommes de 823,63 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires et 82,36 euros à titre de congés payés y afférents,

condamné la société SCHNOELLER à remettre à Monsieur [K] [W] un bulletin de paye récapitulatif des rappels de salaires et indemnités fixés par le jugement et une attestation destinée à pôle emploi, sous peine d’astreinte et avec réserve du droit de liquider l’astreinte,

confirmé 1’ordonnance de référé du 16 mars 2016 en ce qu’e1le a fait droit aux demandes de Monsieur [K] [W] portant sur les montants suivants :

– 36,41 euros brut à titre de rappel de salaire horaire de septembre 2012 à juillet 2013 inclus en application de l’article 11 de l’accord-cadre du 4 mai 2000,

– 3,64 euros brut au titre des congés payés sur rappel de salaire horaire de septembre 2012 à juillet 2013 inclus en application de l’article 11 de l’accord-cadre du 4 mai 2000,

– 104,20 euros brut à titre de rappel de salaire minimum conventionnel de janvier à avril 2015,

– 10,42 euros brut au titre des congés payés sur rappel de salaire minimum conventionnel de janvier à avril 2015,

– 45 euros net au titre de la retenue sur salaire d’avril 2015 pour amende routière de 2013,

pris acte de ce que la société SCHNOELLER a d’ores et déjà procédé à l’exécution de ces montants au titre de l’exécution provisoire de l’ordonnance de référé du 16 mars 2016,

condamné la société SCHNOELLER à payer à Monsieur [K] [W] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

rejeté toute autre prétention des parties,

rappelé que l’exécution provisoire est de droit pour le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l’article R. 1454-14 du code du travail, dans la limite de la somme de 19 413,27 euros brut, et l’a ordonné pour le surplus conformément à l’article 515 du code de procédure civile,

condamné la société SCHNOELLER aux entiers frais et dépens.

La société SCHNOELLER a interjeté appel du jugement le 11 mai 2018 devant la cour d’appel de Colmar.

Par ordonnance du 23 octobre 2018, le conseiller de la mise en état a constaté la caducité de la déclaration d’appel.

Sur déféré de la société SCHNOELLER, la cour d’appel de Colmar, statuant par arrêt du 29 janvier 2019, a confirmé l’ordonnance.

La société SCHNOELLER a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt.

Par arrêt du 19 novembre 2020 (pourvoi n°19-14.308), la deuxième chambre civile de la cour de cassation a annulé, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 29 janvier 2019 par la cour d’appel de Colmar et remis l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt, les renvoyant devant la cour d’appel de Nancy.

Vu la saisine de la cour d’appel de Nancy par la société SCHNOELLER le 7 janvier 2021,

Vu l’article 455 du code de procédure civile,

Vu l’arrêt du 2 décembre 2021 de la cour d’appel de Nancy laquelle a :

infirmé l’ordonnance rendue le 23 octobre 2018 par le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Colmar ;

dit que la déclaration d’appel de la société SCHNOELLER n’est pas caduque

renvoyé l’affaire à l’audience de mise en état du 26 janvier 2022.

Vu les conclusions de Monsieur [J] [W] déposées sur le RPVA le 10 janvier 2022, et celles de la société SCHNOELLER reçues au greffe le 03 février 2022,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 26 janvier 2022,

La société SCHNOELLER demande :

de dire l’appel interjeté contre le jugement du conseil de prud’hommes de Colmar du 17 avril 2018 recevable et bien fondé,

d’infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, hormis en ce qu’il a :

– confirmé les dispositions de l’ordonnance de référé du 16 mars 2016 relatives à la retenue sur salaire d’avril 2015, au rappel de salaire minimum conventionnel de janvier à avril 2015 et au rappel de salaire horaire de septembre 2012 juillet 2013,

– donné acte à la société SCHNOELLER de ce qu’elle reconnaissait devoir les sommes de 823,63 euros et de 82,36 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires et de congés payés afférents,

de dire la demande de Monsieur [J] [W] irrecevable, subsidiairement, mal fondée,

de débouter en conséquence Monsieur [J] [W] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions.

Monsieur [K] [W] demande :

de confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Colmar en date du 17 avril 2018 en toutes ses dispositions,

de débouter la société SCHNOELLER de son appel,

de condamner la société SCHNOELLER à lui payer la somme de 3 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

de condamner la société SCHNOELLER aux entiers frais et dépens de première instance comme d’appel.

SUR CE, LA COUR

Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il sera expressément renvoyé aux dernières écritures de Monsieur [J] [W] déposées sur le RPVA le 10 janvier 2022, et aux dernières écritures de la société SCHNOELLER déposées au greffe de la chambre sociale le 03 février 2022.

Sur la prescription des demandes de Monsieur [J] [W]  :

La société SCHNOELLER indique qu’aux termes de l’article L. 1471-1 du code du travail «  Toute action portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit ».

Elle fait valoir que Monsieur [J] [W] ayant été licencié le 18 avril 2015, ses demandes relatives à l’exécution ou la rupture du contrat de travail étaient couvertes par la prescription à la date de la saisine du conseil de prud’hommes, le 8 juin 2017.

La société SCHNOELLER indique que la saisine par Monsieur [J] [W] du conseil de prud’hommes en sa formation des référés le 5 février 2016 dans l’éventualité d’une future demande de rappel de salaire n’a pu interrompre le délai de prescription applicable à son action en contestation de licenciement, les deux actions tendant à des buts différents.

Elle rappelle que les articles R. 1452-6 et R. 1452-7 du code du travail posant le principe d’unicité de l’instance, auquel se réfère le jugement attaqué, ont été abrogés par le décret n°2016-660 du 20 mai 2016.

Monsieur [J] [W] indique qu’il résulte de l’article 2241 du code civil que la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription.

Il fait valoir que si l’interruption de la prescription ne peut en principe s’étendre d’une action à une autre, ce n’est pas le cas lorsque les deux actions tendent à un seul et même but, ou ont un même objet. En l’espèce il rappelle que la chambre sociale de la Cour de cassation juge qu’il y a lieu d’étendre la portée interruptive d’une action sur une autre action lorsque les actions procèdent toutes du même contrat de travail.

Motivation :

L’interruption de la prescription résultant d’une demande en justice ne produit en principe un effet que sur l’action alors engagée. Cependant, cet effet interruptif s’étend, au cours d’une même instance, à toutes les demandes qui concernent la même relation contractuelle.

Dès lors, la saisine par Monsieur [J] [W] du conseil de prud’hommes en sa formation des référés le 5 février 2016 a interrompu la prescription de toute autre action portant sur le même contrat de travail.

En conséquence Monsieur [J] [W] a pu valablement saisir le conseil de prud’hommes le 8 juin 2017, ses demandes étant relative la même relation contractuelle. Le jugement attaqué du conseil de prud’hommes sera confirmé sur ce point.

Sur le licenciement pour inaptitude :

Monsieur [J] [W] fait valoir que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse en ce que son employeur n’a pas respecté son obligation de reclassement.

Il indique que ce dernier lui a remis un courrier le 12 mars 2015 lui proposant un reclassement sur un poste « présentant les caractéristiques suivantes : travail de bureau », sans autre précision, notamment quant à la nature des fonctions et la rémunération (annexe n° 23 de l’intimé) ; que compte-tenu de ces lacunes, il a refusé le poste proposé par courrier du 25 mars 2015.

Monsieur [J] [W] fait valoir que l’employeur ne justifie pas, avant la mise en oeuvre de la procédure de licenciement, avoir recherché d’autres possibilités de reclassement éventuel, conformes aux préconisations du médecin du travail.

Il fait également valoir que, faute d’avoir fait mention dans la lettre de licenciement de l’impossibilité de reclassement (annexe n° 24 de l’intimé), le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

La société SCHNOELLER fait valoir qu’elle a soumis à Monsieur [J] [W] la seule proposition de reclassement compatible avec les contre-indications du médecin du travail, à savoir un reclassement sur un poste de bureau.

Elle indique que les précisions souhaitées par le salarié lui ont été fournies à sa première demande (annexe n° 9 de l’appelant), ce qui a permis à ce dernier de refuser la proposition en connaissance de cause, la preuve en état qu’il a justifié son refus par la baisse de sa rémunération et l’insuffisance de la formation interne qui lui était proposée (annexe 10 de l’appelant).

Le poste administratif étant le seul disponible et le salarié reconnaissant n’avoir pas la formation nécessaire pour l’occuper, le reclassement de Monsieur [J] [W] était impossible.

Motivation :

La lettre de licenciement est ainsi rédigée :

« A la suite de l’accident du travail dont vous avez été victime le 21 juin 2013 et à l’issue de l’arrêt de travail qui en est résulté, vous avez été déclaré inapte aux fonctions d’ambulancier, manutentions manuelles, conduite de véhicule de transport que vous avez exerciez précédemment par le docteur [X] [Y], médecin de travail.

Le certificat d’inaptitude établi par ce dernier proposait que vous soyez reclassé dans un poste présentant les caractéristiques suivantes : travail de bureau.

Après examens de ces préconisations, nous vous avons proposé un poste d’employé de bureau. Comme précisé dans notre courrier du 12 mars dernier, nous vous rappelons que votre rémunération horaire serait restée identique ; vous n’auriez plus touchés les indemnités et heures supplémentaires spécifiques attachées à la fonction que vous occupiez précédemment, soit employé polyvalent dont ambulancier. Concernant la formation, vous auriez bien évidemment disposés d’une formation en interne afin de vous adapter au poste proposé avec les différents outils de travail. Vous avez refusé ce poste le 25 mars 2015 en raison de la baisse de salaire et le manque de formation qualifiante.

Après convocation et suite à l’entretien préalable au licenciement pour inaptitude qui s’est déroulé le 15 avril 2015 de 17h à 17h45, nous nous voyons dans l’obligation de vous licencier. » 

L’article L.1232-6 du code du travail dispose que l’employeur est tenu d’énoncer le ou les motifs du licenciement dans la lettre de licenciement. A défaut, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

L’article L. 1226-2 du code du travail dispose que lorsque le salarié victime d’une maladie ou d’un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l’article L. 4624-4, à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l’entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Il résulte de la combinaison de ces deux articles que ne constitue pas l’énoncé d’un motif précis de licenciement la seule inaptitude physique du salarié, sans mention de l’impossibilité de reclassement.

En l’espèce, la cour constate que la lettre de licenciement vise l’inaptitude du salarié et le refus par celui-ci d’une proposition de poste, mais ne mentionne pas l’impossibilité de son reclassement.

En conséquence, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, le jugement du conseil de prud’hommes étant confirmé sur ce point.

Sur les dommages et intérêt pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Monsieur [J] [W] réclame la somme de 25 884,36 euros.

La société SCHNOELLER ne contestant pas à titre subsidiaire le quantum de l’indemnisation demandé, elle devra verser à Monsieur [J] [W] la somme de 25 884,36 euros, le jugement du conseil de prud’hommes étant confirmé sur ce point.

Sur les indemnités spéciales de rupture :

Monsieur [J] [W] fait valoir qu’en application de l’article L. 1226-14 du code du travail, le salarié licencié pour cause d’inaptitude en lien avec un accident du travail est en droit de prétendre au paiement d’une indemnité compensatrice d’un montant égal à celui de l’indemnité compensatrice de préavis prévue à l’article L. 1234-5 du Code du travail, ainsi qu’à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l’indemnité prévue par l’article L. 1234-9 du code du travail.

Il réclame en conséquence la somme de 4314,06 au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et 1441,58 euros au titre de l’indemnité spéciale de licenciement.

L’employeur fait valoir que le refus par Monsieur [J] [W] de la proposition de reclassement qui lui a été faite étant abusive, il doit être débouté de ses demandes de paiement de l’indemnité spéciale de licenciement et de l’indemnité de préavis.

Motivation :

L’article L. 1226-14 du code du travail dispose :

« La rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l’article L. 1226-12 ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d’un montant égal à celui de l’indemnité compensatrice de préavis prévue à l’article L. 1234-5 ainsi qu’à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l’indemnité prévue par l’article L. 1234-9.

Toutefois, ces indemnités ne sont pas dues par l’employeur qui établit que le refus par le salarié du reclassement qui lui est proposé est abusif. »

Il résulte du courrier du 12 mars 2015 que l’employeur a adressé au salarié, qu’il lui a proposé « un poste du bureau », sans autre précision et qu’il n’a donné aucune indication sur les recherches qu’il a pu effectuer pour trouver un poste adapté.

Pour être valable, la recherche de reclassement doit être loyale et complète et la proposition de reclassement faite au salarié précise et sérieuse.

En l’espèce, l’employeur ne démontre pas avoir spécifié au salarié le type de poste proposé, la seule mention d’un poste de bureau étant à cet égard insuffisante, étant relevé que la mention au cours de l’entretien préalable au licenciement du remplacement d’une salariée partant à la retraite ne saurait suppléer cette insuffisance. L’employeur ne produit en outre aucune pièce démontrant qu’il a procédé à une recherche complète des postes disponibles dans l’entreprise.

Dès lors, la société SCHNOELLER n’ayant pas établi que le refus par Monsieur [J] [W] du poste qui lui a été proposé a été abusif, elle lui est redevable des indemnités prévues par l’article L. 1226-14 du code du travail.

L’employeur ne contestant pas à titre subsidiaire le quantum des sommes demandées, il devra verser à Monsieur [J] [W] les sommes de 4314,06 au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et de 1441,58 euros au titre de l’indemnité spéciale de licenciement.

Le jugement du conseil de prud’hommes sera confirmé sur ces points.

Sur la demande de dommages et intérêts pour manquement de la SARL SCHNOELLER à son obligation de sécurité :

Monsieur [J] [W] indique avoir été victime d’un accident du travail le 21 juin 2013 : alors qu’il transportait un patient dans le cadre de son travail, il a chuté dans des escaliers et a immédiatement ressenti une importante douleur au dos. Il s’est avéré qu’il s’était fracturé une vertèbre, ce qui a nécessité une intervention chirurgicale.

Monsieur [J] [W] fait valoir que son employeur a manqué à son obligation de sécurité en ne prenant pas les mesures adéquates pour le secourir.

Il indique que selon l’article R. 4224-16 du code du travail, l’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer les premiers secours aux accidentés et aux malades. Or, après qu’il a été averti par le collègue qui l’accompagnait, Monsieur [F], l’employeur a envoyé une autre équipe sur place pour prendre en charge le patient et lui a ordonnée, ainsi qu’à Monsieur [F], de partir en le laissant seul jusqu’à l’arrivée des secours. Monsieur [J] [W] précise en outre que c’est son collègue qui a dû prévenir le SAMU.

Il produit à l’appui de ses dires l’attestation de Monsieur [F] qui indique qu’après l’accident il a appelé la régulation qui a envoyé un autre chauffeur ambulancier et leur a ordonné de prendre en charge la patiente sans attendre l’arrivée du SAMU et sans s’enquérir de l’état de santé de Monsieur [J] [W] ; Monsieur [F] indique avoir tout de même mis ce dernier sous oxygène en raison de sa pâleur et de sa difficulté à respirer (annexe 67 de l’intimé).

Le salarié demande 1000 euros de dommages et intérêts.

La société SCHNOELLER indique que Monsieur [J] [W] n’a aucunement été abandonné en état de détresse.

Elle fait valoir qu’à l’arrivée du nouveau chauffeur infirmier, Monsieur [S], Monsieur [J] [W] n’a pas semblé nécessiter de soins immédiats autres que ceux que Monsieur [T] et Monsieur [F] lui ont prodigué avant de poursuivre la prise en charge de la patiente, après avoir dument avisé le SAMU

Elle fait également valoir qu’en tout état de cause la demande de dommages et intérêts relèverait de la compétence du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale, dans le cadre d’une éventuelle demande de reconnaissance de faute inexcusable.

L’employeur produit l’attestation de Monsieur [S] (annexe 7 de l’appelant). Ce dernier indique avoir interrogé Monsieur [J] [W] sur son état de santé, lui avoir installé un masque à oxygène et lui avoir demandé s’il voulait qu’il attende avec lui l’arrivée du SAMU. Monsieur [J] [W] lui alors dit de prendre en charge la patiente et qu’il pouvait attendre les secours tout seul. Il précise que Monsieur [J] [W] a pu se relever pour trouver un endroit où s’allonger en attendant les secours (annexe n° 7 de l’appelant).

Motivation :

Ne méconnaît pas l’obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, l’employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures prévues par le code du travail.

En l’espèce, il ne résulte ni de ses conclusions, ni de l’attestation qu’il produit, que l’employeur se soit enquis de l’état de santé de Monsieur [J] [W] après sa chute et se soit donc mis en mesure de prendre les mesures appropriées pour lui porter secours ; le fait que ses salariés aient tenté, de leur propre initiative, de suppléer à cette carence ne saurait l’exonérer de son obligation vis-à-vis de Monsieur [J] [W].

La société SCHNOELLER sera en conséquence condamnée à verser à Monsieur [J] [W] la somme de 1000 euros, le jugement du conseil de prud’hommes étant confirmé sur ce point.

Sur la demande d’indemnité compensatrice de congés payés :

Monsieur [J] [W] fait valoir que son employeur lui a imposé de solder ses congés payés en le plaçant d’office en congés payés du 2 au 27 février 2015 et du 1er au 31 mars 2015, postérieurement à l’avis d’inaptitude du médecin du travail et avant son licenciement.

Il demande en conséquence le paiement de 1522,77 euros brut au titre des congés imposés en février 2015 et de ·1556,48 euros brut au titre des congés imposés en mars 2015, soit un total de 3079,25 euros brut.

L’employeur fait valoir qu’il n’a pas imposé à Monsieur [J] [W] la prise de ses congés ; que ce dernier avait donné son accord.

Motivation :

C’est par une juste appréciation des faits et du droit que le conseil de prud’hommes, dont la cour s’approprie les motifs, a condamné la société SCHNOELLER à verser à Monsieur [J] [W] la somme de 3079,25 euros. Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

Sur la demande de dommages et intérêts pour manquement à l’exécution de bonne foi du contrat de travail :

Monsieur [J] [W] fait valoir qu’en ne l’ayant ni reclassé ni licencié dans le délai d’un mois prévu par la loi après l’avis d’inaptitude, l’employeur aurait dû reprendre le paiement de son salaire ; en le forçant à prendre ses congés payés au lieu de lui verser son salaire, la société SCHNOELLER l’a volontairement privé de l’indemnité compensatrice de congés payés à laquelle il pouvait prétendre au titre des congés payés acquis et non pris.

La société SCHNOELLER fait valoir que Monsieur [J] [W] n’a subi aucun préjudice.

Motivation :

C’est par une juste appréciation des faits et du droit que le conseil de prud’hommes, dont la cour s’approprie les motifs, a condamné la société SCHNOELLER à verser à Monsieur [J] [W] la somme de 3079,25 euros. Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

Sur la demande de rappels de salaire horaire de septembre 2012 à juillet 2013 :

Monsieur [J] [W] indique que la formation des référés du conseil de prud’hommes dans son ordonnance aujourd’hui définitive du 16 mars 2016 a fait droit à cette demande en condamnant la SARL SCHNOELLER à lui payer une somme de 36,41 euros brut à titre de provision sur rappel de salaire horaire de septembre 2012 à juillet 2013, outre une somme de 3,64 euros brut à titre de provision sur les congés payés afférents ; que le jugement attaqué a confirmé cette décision ; que l’employeur ne la conteste pas. Il demande donc la confirmation du jugement.

Dans ses conclusions, l’employeur indique ne pas contester sur ce point le jugement du conseil de prud’hommes, qui sera en conséquence confirmé.

Sur la demande de rappel de salaire minimum conventionnel :

Monsieur [J] [W] indique que la formation des référés du conseil de prud’hommes dans son ordonnance aujourd’hui définitive du 16 mars 2016 a fait droit à cette demande condamnant la SARL SCHNOELLER à lui payer une somme de 104,20 euros brut à titre de provision sur rappel de salaire horaire, outre une somme de 10,42 euros brut à titre de provision sur les congés payés afférents ; que le jugement attaqué a confirmé cette décision ; que l’employeur ne la conteste pas. Il demande donc la confirmation du jugement.

Dans ses conclusions, l’employeur indique ne pas contester sur ce point le jugement du conseil de prud’hommes, qui sera en conséquence confirmé.

Sur la demande de rappel de salaire au titre d’une retenue pour amende routière :

Monsieur [J] [W] indique que la formation des référés du conseil de prud’hommes dans son ordonnance aujourd’hui définitive du 16 mars 2016 a fait droit à cette demande condamnant la SARL SCHNOELLER à lui payer une somme de 45 euros à titre de provisions sur la retenue sur salaire d’avril 2015 pour amende routière de 2013; que le jugement attaqué a confirmé cette décision ; que l’employeur ne la conteste pas. Il demande donc la confirmation du jugement.

Dans ses conclusions, l’employeur indique ne pas contester sur ce point le jugement du conseil de prud’hommes, qui sera en conséquence confirmé.

Sur la demande de rappel d’heures supplémentaires :

Monsieur [J] [W] demande la confirmation du jugement du conseil de prud’hommes ayant condamné la société SCHNOELLER à lui verser ses sommes de 823,63 euro brut à titre de rappel d’heures supplémentaires, outre 82,26 euros brut au titre des congés payés afférents.

Dans ses conclusions, l’employeur indique ne pas contester sur ce point le jugement du conseil de prud’hommes, qui sera en conséquence confirmé.

Sur la demande de rappels de salaires au titre des permanences :

Monsieur [J] [W] fait valoir qu’il était amené à accomplir des services de permanence de jour les week-ends et jours fériés, mais également de nuit, selon des plannings établis par l’employeur et précisant les horaires de permanence ; qu’il a donc été, pendant ces heures de permanence, à la disposition permanente et immédiate de l’entreprise ; qu’elles doivent dès lors lui être payées comme étant du temps de travail effectif.

L’employeur fait valoir qu’il n’assurait plus de permanence de week-end et de jours fériés dès avant l’embauche de Monsieur [J] [W] et produit un document en ce sens (annexe n° 1).

Motivation :

C’est par une juste appréciation des faits et du droit que le conseil de prud’hommes, dont la cour s’approprie les motifs, a condamné la société SCHNOELLER à verser à Monsieur [J] [W] les sommes de 1.167,15 euros brut outre 116,71 euros brut. Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

Sur la demande de remise d’un bulletin de paie récapitulatif des rappels de salaires et indemnités, ainsi qu’une attestation destinée à Pôle Emploi rectifiée :

Monsieur [J] [W] indique que la société SCHNOELLER ne remet pas en cause le jugement attaqué en ce qu’il a fait droit à cette demande.

La société SCHNOELLER ne concluant pas sur cette demande, le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la demande de dommages et intérêts pour remise d’une attestation destinée à Pôle Emploi non-conforme :

Monsieur [J] [W] fait valoir qu’ayant dû saisir la justice pour obtenir attestation conforme destinée à Pôle Emploi, il a nécessairement subi un préjudice et réclame à ce titre la somme de 1500 euros.

La société SCHNOELLER fait valoir que Monsieur [J] [W] ne démontre aucun préjudice.

Motivation :

Monsieur [J] [W] n’alléguant aucun préjudice matériel résultant de la remise d’une attestation non conforme, il sera débouté de sa demande, le jugement du conseil de prud’hommes étant infirmé sur ce point.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et sur les dépens :

La société SCHNOELLER devra verser à Monsieur [J] [W] la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles et sera déboutée de sa propre demande.

La société SCHNOELLER sera condamnée aux entiers dépens de l’instance.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

INFIRME le jugement du 17 avril 2018 du conseil de prud’hommes de Colmar en ce qu’il a condamné la société SCHNOELLER à verser à Monsieur [J] [W] la somme de 1500 euros (mille cinq cents euros) au titre de dommages et intérêts pour remise d’une attestation non conforme destinée à Pôle Emploi,

CONFIRME le jugement du 17 avril 2018 du conseil de prud’hommes de Colmar pour le surplus ;

STATUANT A NOUVEAU

Déboute Monsieur [J] [W] de sa demande de 1500 euros (mille cinq cents euros) au titre de dommages et intérêts pour remise d’une attestation non conforme destinée à Pôle Emploi,

Condamne la société SCHNOELLER à verser à Monsieur [J] [W] la somme de 2000 euros (deux mille euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute la société SCHNOELLER de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société SCHNOELLER aux dépens d’appel.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIERLE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en quatorze pages

 


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