SOC.
CA3
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 25 mai 2022
Cassation
Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 621 F-D
Pourvoi n° F 20-17.197
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 MAI 2022
1°/ M. [E] [V], domicilié [Adresse 1],
2°/ le syndicat SNRT – CGT France Télévisions, dont le siège est [Adresse 2],
ont formé le pourvoi n° F 20-17.197 contre l’arrêt rendu le 16 janvier 2020 par la cour d’appel de Versailles (11e chambre – renvoi après cassation), dans le litige les opposant à la société France Télévisions, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Capitaine, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [V], du syndicat SNRT – CGT France Télévisions, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société France Télévisions, après débats en l’audience publique du 29 mars 2022 où étaient présentes Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Capitaine, conseiller rapporteur, Mme Pecqueur, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Lavigne, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l’article L. 431-3, alinéa 2, du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Versailles, 16 janvier 2020) rendu en référé et sur renvoi après cassation (Soc., 24 mai 2018, pourvoi n° 17-10.230), M. [V] a été engagé en 2001 en qualité d’opérateur de prise de vue par la société France Télévisions.
2. Une mise à pied disciplinaire de quinze jours lui a été notifiée le 3 août 2015, pour avoir refusé le 29 juin précédent d’effectuer un duplex pour le journal national, en raison du dépassement de ses horaires qui en serait résulté.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. Le salarié fait grief à l’arrêt de dire que sa demande tendant au paiement d’une provision au titre de la retenue sur salaire correspondant à la mise à pied de quinze jours prononcée le 3 août 2015 se heurtait à une contestation sérieuse de sorte qu’il n’y avait pas lieu à référé, alors « qu’il résulte des dispositions de l’article R. 1455-6 du code du travail que la formation de référé peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire les mesures de remise en état qui s’imposent pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; que le salarié et le syndicat ont demandé à la cour d’appel, statuant en référé, de procéder au retrait de la mise à pied de quinze jours avec privation de salaire infligée au salarié pour faire cesser le trouble manifestement illicite constitué par une sanction prononcée en réponse à une activité syndicale de défense de l’accord collectif d’entreprise France télévisions ; que la cour d’appel, se fondant sur un motif inopérant, n’a pas donné suite à cette demande en se contentant de relever l’existence d’une contestation sérieuse et sans s’attacher à vérifier, comme elle l’était invitée à le faire, si la sanction litigieuse était constitutive ou non d’un trouble manifestement illicite ; qu’elle a ainsi privé sa décision de toute base légale au regard des dispositions de l’article R. 1455-6 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu l’article R. 1455-6 du code du travail :
4. Aux termes de ce texte, la formation de référé peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
5. Pour rejeter les demandes et dire n’y avoir lieu à référé, l’arrêt retient que, si la concertation exigée par la convention collective peut aboutir à l’accord invoqué par le salarié, elle n’a pas pour conséquence d’imposer à l’employeur l’obligation de recueillir l’adhésion de ce dernier, qu’en l’absence d’accord, l’employeur conserve toute latitude, dans l’exercice de son pouvoir de direction, d’ordonner au salarié d’assurer la prestation demandée, sans que ce dernier ne puisse s’y opposer, sauf en cas d’abus qui n’est pas caractérisé, ni même invoqué et que compte tenu du refus du salarié de prolonger sa vacation, ses demandes, tendant au retrait à titre provisoire de sa mise à pied sous astreinte et au paiement d’une provision au titre de la retenue sur salaire, se heurtent à une contestation sérieuse.
6. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si la sanction litigieuse était constitutive d’un trouble manifestement illicite, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision.
Et sur le second moyen
Enoncé du moyen
7. Le syndicat SNRT – CGT France Télévisions fait grief à l’arrêt de le renvoyer à mieux se pourvoir s’agissant de sa demande de versement d’une provision sur les dommages-intérêts en réparation du préjudice causé à l’intérêt collectif de la profession par une sanction constitutive d’une discrimination syndicale, alors « que la cassation qui ne manquera pas d’intervenir sur le premier moyen entraînera nécessairement, en application de l’article 624 du code de procédure civile, la cassation de l’arrêt en ce qu’il a renvoyé le syndicat à mieux se pourvoir s’agissant de sa demande de versement d’une provision sur les dommages et intérêts en réparation du préjudice causé à l’intérêt collectif de la profession par une sanction constitutive d’une discrimination syndicale. »