Retenues sur salaire : 24 février 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/04543

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Retenues sur salaire : 24 février 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/04543

24/02/2023

ARRÊT N° 2023/98

N° RG 21/04543 – N° Portalis DBVI-V-B7F-OO3L

CP/KS

Décision déférée du 13 Octobre 2021

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’ALBI

( F 20/00066)

SECTION ACTIVITES DIVERSES

[F] – [E] [C] – [M]

[P] [T]

C/

Association ITINOVA

CONFIRMATION

Grosses délivrées

le 24/02/2023

à

Me Ophélie BENOIT-DAIEF

Me Hervé FOURNIE

ccc

Pôle Emploi

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT QUATRE FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

Madame [P] [T]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Hervé FOURNIE de la SCP FOURNIE HERVE, avocat au barreau D’ALBI

INTIMÉE

Association ITINOVA Venant aux droits de l’Association SANTE ET BIEN ETRE

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Ophélie BENOIT-DAIEF de la SELARL SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de TOULOUSE

Représentée par Me Frédéric RENAUD de la SELARL RENAUD AVOCATS, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 31 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant

C. PARANT, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

S. BLUME, présidente

M. DARIES, conseillère

C. PARANT, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier, lors des débats : C. DELVER

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par M.DARIES, conseillère, pour S. BLUME, présidente empêchée et par C. DELVER, greffière de chambre.

EXPOSE DU LITIGE

Mme [P] [T] a été embauchée le 29 mai 2013 par l’association Santé Bien Etre en qualité d’aide-soignante suivant contrat de travail à durée indéterminée régi par la convention collective nationale des établissements privés d’hospitalisation à but non lucratif du 31 octobre 1951.

Mme [T] a été placée en arrêt de travail pour maladie non-professionnelle

le 6 novembre 2018. Son salaire a été maintenu par l’association Santé Bien Etre dans le cadre d’une subrogation auprès de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie du Tarn.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 5 novembre 2019, l’association Santé Bien Etre a informé Mme [T] qu’elle cessait le versement du complément de salaire et lui demandait de lui rembourser les sommes qu’elle estimait indûment perçues du 8 février au 29 octobre 2019, soit la somme de 13 234,56 €.

Une mise en demeure lui a été adressée le 3 décembre 2019 aux fins de remboursement de cet indu.

Par courrier du 9 juillet 2020, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie du Tarn a informé l’association Santé Bien Etre avoir cessé de verser les indemnités journalières à Mme [T] depuis le 9 février 2019.

L’association Santé Bien-Etre a saisi le conseil de prud’hommes d’Albi le 8 juillet 2020 pour demander le remboursement des sommes indûment versées.

Par jugement du 13 octobre 2021, le conseil de prud’hommes d’Albi a :

– condamné Mme [T] à rembourser les sommes indûment perçues au titre de la subrogation à hauteur de 13 234,56 €,

– dit que les retenues successives à effectuer par l »association Bien Etre ne peuvent dépasser la somme de 1 323,45 € chacune

– condamné Mme [T] aux dépens.

Par déclaration du 10 novembre 2021, Mme [T] a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 23 octobre 2021, dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas contestées.

Par dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique

le 3 février 2022, auxquelles il est expressément fait référence, Mme [T] demande à la cour de :

– déclarer recevable et bien fondée sa déclaration d’appel

– infirmer le jugement en ce qu’il l’a :

* condamnée à rembourser les sommes indûment perçues au titre de la subrogation à hauteur de 13 234,56 €,

* dit que les retenues successives à effectuer par l’association Santé Bien-Etre ne peuvent dépasser la somme de 1 323,45 € chacune,

* dit qu’il n’y a pas lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

* condamné Mme [T] aux dépens,

A titre principal :

– constater la négligence et l’erreur inexcusable de l’association Itinova,

– rejeter la demande de l’association Itinova de remboursement de la somme

de 13 234,56 € au titre de la répétition de l’indu, majorée des intérêts légaux,

– condamner l’association Itinova à lui verser la somme de 3 000 € an titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner l’association Itinova aux dépens,

A titre subsidiaire :

– constater que Mme [T] ne conteste pas devoir la somme de 13 234.56 € au titre de l’indu,

– constater la négligence et l’erreur inexcusable de l’association Itinova, venant aux droits de la société Santé Bien Etre,

– condamner l’association Itinova, venant aux droits de la société Santé Bien Etre, au paiement de la somme de 13 234.56 € a titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice,

– ordonner la compensation entre les créances qui sont certaines, liquides et exigibles des parties en application de l’article 1347 du code civil,

– condamner l’association Itinova à lui verser la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner l’association Itinova aux entiers dépens.

Par dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 3 février 2022, auxquelles il est expressément fait référence, l’association Itinova demande à la cour de :

– confirmer le jugement,

statuant de nouveau,

– juger indues les sommes versées à Mme [T] au titre de la subrogation entre les mois de février et d’octobre 2019,

Par conséquent,

– condamner la salariée à rembourser la somme de 13 476,71 € au titre de la répétition de l’indu majorée des intérêts légaux qui seront actualisés au jour du jugement,

– condamner Mme [T] à lui verser la somme de 5 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Mme [T] aux entiers dépens de l’instance,

– débouter Mme [T] de l’intégralité ses demandes.

La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance du 20 janvier 2023.

MOTIFS

Sur la demande en répétition de l’indu formée par l’association Itinova

Il résulte des pièces versées aux débats que l’association Santé et Bien Etre a versé à Mme [T], en arrêt de travail pour maladie non professionnelle depuis

le 6 novembre 2018 et jusqu’au 29 octobre 2019, l’intégralité de son salaire en qualité de subrogée dans les droits de la salariée dans la perception des indemnités journalières de sécurité sociale de cette dernière.

L’association employeur a notifié à Mme [T] par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 5 novembre 2019 qu’elle ne percevait plus depuis le 9 février 2019 les indemnités journalières de Mme [T], sollicitant que cette dernière se rapproche, comme elle s’y était engagée, des services de la caisse pour régulariser la situation, l’informant qu’elle suspendait pour l’avenir le paiement de son salaire et lui indiquant que le montant versé à tort s’élevait à 13 234,56 €.

L’employeur a mandaté un service de recouvrement qui a mis en demeure, par lettre du 3 décembre 2019, Mme [T] de rembourser l’indu de 13 234,56 € en principal, outre les intérêts.

Les correspondances échangées courant juillet 2020 entre l’association Santé et Bien Etre et la Caisse Primaire d’Assurance Maladie du Tarn démontrent que, sur demande écrite de l’association employeur du 2 juillet 2020 qui rappelait ses démarches effectuées auprès de sa salariée pour connaître les raisons de l’interruption du versement des indemnités journalières et son contact téléphonique auprès des services de la caisse, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie du Tarn a répondu à l’association Santé et Bien Etre, par lettre du 9 juillet 2020, qu’elle ne pouvait continuer à verser directement les indemnités journalières relatives à l’arrêt de travail de Mme [T] à compter du 9 février 2020, la salariée étant informée par courrier du motif de ce refus d’indemnisation.

Sur interpellation de l’avocat de Mme [T] du 4 janvier 2022, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie du Tarn a expliqué par mail du 5 janvier suivant que l’interruption du paiement des indemnités journalières avait été décidée car l’échelon local du service médical d'[Localité 5] avait émis un avis défavorable à la poursuite de l’arrêt de travail du 6 novembre 2018 et qu’une reprise du travail avait été notifiée à Mme [T] le 9 février 2019 ; que seule la date avait été conservée par les services de la caisse, ce courrier n’étant plus identifiable dans la banque de données de la caisse ; que l’employeur avait reçu copie du document ‘à la date que vous indiquez car il en a fait la demande’.

Il est ainsi établi que l’association Santé et Bien Etre a poursuivi, du 9 février au 29 octobre 2019, le paiement du salaire de Mme [T], sa salariée en arrêt de travail pour maladie non-professionnelle, alors qu’elle ne percevait plus les indemnités journalières de sa salariée dans les droits de laquelle elle était subrogée.

La correspondance de la caisse de sécurité sociale du 5 janvier 2022 permet de déterminer qu’effectivement, la caisse avait cessé de verser les indemnités journalières dues à Mme [T] car son échelon local avait émis un avis défavorable à la poursuite de l’arrêt de travail ; que la caisse a informé la salariée de la cessation de ce paiement par courrier dont elle n’a pas conservé la copie et en a informé l’association employeur en octobre 2019, quand l’employeur a fait une demande d’information auprès de la caisse, cette date étant celle figurant sur le courrier de l’avocat de la salariée auquel la caisse renvoie expressément dans son mail du 5 janvier 2022.

Il est ainsi démontré par l’association Itinova, venant aux droits de l’association Santé et Bien Etre, que Mme [T] a indûment perçu la somme de 13 234,56 € dont elle est en droit de solliciter la répétition par application de l’article 1302-1 du code civil.

Il résulte des explications qui précèdent, qu’effectivement, l’association Santé et Bien Etre a commis une erreur en payant pendant plusieurs mois le salaire de Mme [T] sans vérifier qu’elle percevait les indemnités journalières de la caisse de sécurité sociale et que c’est en novembre 2019 qu’elle a fait part à Mme [T] de la difficulté.

Pour autant, la cour estime que, contrairement à ce que soutient Mme [T] dans ses écritures, le comportement de l’association employeur ne constitue pas un manquement de l’employeur à son obligation de bonne foi et une erreur inexcusable constitutive d’une faute volontaire lui interdisant de réclamer les salaires indus ; en effet, d’une part, rien n’établit que l’employeur ait eu connaissance de la cessation du versement des indemnités journalières à compter de février 2019, ni la caisse de sécurité sociale, ni la salariée n’ayant informé l’employeur de cette interruption qu’il a découverte en novembre 2019, d’autre part, l’association continuait à recevoir les avis d’arrêt de travail de Mme [T], ce qui peut expliquer que son service de paie n’ait pas vérifié le paiement des indemnités journalières par la caisse. Etant précisé, au surplus, que la caisse a indiqué à l’avocat de Mme [T] avoir notifié à cette dernière sa reprise du travail au 9 février 2019 sans que la salariée ne prévienne son employeur.

La cour estime, en conséquence, que l’erreur commise par les services de paie de l’association Santé et Bien Etre ne revêt pas le caractère d’erreur inexcusable et qu’elle ne constitue pas plus un manquement à l’obligation d’exécuter de bonne foi le contrat de travail ou une faute volontaire.

Il en résulte que le jugement entrepris qui a condamné Mme [T] à rembourser à l’association Santé et Bien Etre la somme de 13 234,56 € sera confirmé, les modalités de retenue sur salaire fixées par le conseil de prud’hommes étant désormais sans objet, Mme [T] ayant été licenciée par l’association Santé et Bien Etre. Il sera ajouté au jugement que l’association Itinova vient aux droits de l’association Santé et Bien Etre.

Sur la demande de compensation formée par Mme [T]

Mme [T] demande, à titre subsidiaire, que sa dette d’indu se compense avec sa créance de dommages et intérêts résultant du préjudice subi du fait de la négligence et de l’erreur inexcusable de l’association Santé et Bien Etre.

La cour estime que, s’il est constant que la créance de salaire est une créance de nature alimentaire dont la privation entraîne un préjudice, pour autant, Mme [T] ne démontre pas que l’association Santé et Bien Etre ait commis une faute à l’origine de sa privation de salaire, cette privation ayant été la conséquence de la position prise par la caisse de la voir reprendre le travail au 9 février 2019, dont la caisse a indiqué avoir informé Mme [T].

L’association Santé et Bien Etre a commis une négligence à l’origine de l’indu dans des conditions qui ne caractérise pas une faute génératrice au profit de la salariée de dommages et intérêts de sorte que la cour rejettera la demande de compensation formée par Mme [T].

Sur le surplus des demandes

Mme [T] qui perd le procès sera condamnée aux dépens sans qu’il soit justifié de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

Le jugement dont appel sera confirmé sur les dépens et les frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris et précise que l’association Itinova vient aux droits de l’association Santé et Bien Etre,

Dit que la disposition selon laquelle le conseil de prud’hommes a ‘dit que les retenues successives à effectuer par l »association Bien Etre ne peuvent dépasser la somme de 1 323,45 € chacune’ est devenue sans objet,

y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à faire application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

Condamne Mme [P] [T] aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par M.DARIES, conseillère, pour S.BLUME, présidente empêchée et par C.DELVER, greffière.

La Greffière P/ La Présidente empêchée

La Conseillère

C.DELVER M.DARIES

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