RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°1275
N° RG 19/03873 – N° Portalis DBVH-V-B7D-HQJ3
LD/ID
CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE D’ORANGE ACTIVITÉS DIVERSES
12 septembre 2019 RG :18/00099
S.A.S. LES PARCS DU SUD
C/
[S]
Grosse délivrée
le
à
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5ème chambre sociale PH
ARRÊT DU 22 NOVEMBRE 2022
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’ORANGE ACTIVITÉS DIVERSES en date du 12 Septembre 2019, N°18/00099
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Leila DAFRE, Vice-présidente placée, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Leila DAFRE, Vice-présidente placée
M. Michel SORIANO, Conseiller
GREFFIER :
Madame Isabelle DELOR, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l’audience publique du 21 Septembre 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 22 Novembre 2022.
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.
APPELANTE :
SAS LES PARCS DU SUD
[Adresse 2]
du Ventoux
[Localité 4]
Représentée par Me Chantal ROUSSEL-BARRIER, avocat au barreau D’AVIGNON
Représentée par Me Georges POMIES RICHAUD, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉE :
Madame [Z] [S]
née le 05 Mai 1965 à [Localité 5] (68) (68)
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Catherine JAOUEN de la SELARL JAOUEN-HUC, avocat au barreau D’AVIGNON
ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 06 Septembre 2022
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 22 Novembre 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS
Mme [Z] [S] été engagée à compter du 15 avril 2016 en qualité d’employée polyvalent au service commercial par la SAS Les Parcs du Sud.
Mme [Z] [S] a été engagée d’abord par contrat à durée déterminée jusqu’au 14 octobre 2016 puis par le biais d’un contrat à durée indéterminée au poste de responsable grands comptes, son salaire brut passant de 1700 euros à 1900 euros au 1er février 2017.
Mme [Z] [S] était licenciée pour faute grave, par courrier du 23 octobre 2017 émanant de l’administrateur judiciaire aux motifs suivants:
‘Par courrier en date du 6 octobre 2017 nous vous avons convoquée à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement fixé au 19 octobre 2017.
Vous vous êtes présentée à ce rendez-vous accompagné de Mme [T] [M].
Nous vous avons alors exposé les faits qui vous sont reprochés afin de recueillir vos explications.
Nous vous avons informée au mois de septembre que le contrat avec notre fournisseur automobile prendrait fin à fin de septembre et qu’en conséquence le véhicule de marque Volkswagen mis à votre disposition dans le cadre de !’exercice de vos fonctions devrait être restitué au plus tard le 2 octobre 2017. Un autre véhicule, de marque Volkswagen ou HYUNDAI devait aussitôt être mis à votre disposition en remplacement. Une première visite du concessionnaire, pour l’expertise des véhicules, s’était tenue sur le lieux de l’entreprise le 29 juin 2017 et une deuxième visite le 4 septembre directement à la concession automobile, et ce toujours en votre présence.
Pourtant, le lundi 2 octobre 2017, en dépit de notre demande, vous avez catégoriquement refusé de remettre ce véhicule à notre fournisseur.
Le mardi 3 octobre au matin, vous ne vous êtes pas présentée à votre poste de travail. Après que le manager vous ait contactée pour connaître les raisons et la durée prévisible de votre absence, vous vous êtes présentée à l’entreprise à 14h, sans outil de travail {ni ordinateur, ni documents} et surtout sans votre véhicule de fonction.
En fin de journée, nous avons pris la peine de vous faire raccompagner à votre domicile par M. [B] [C], directeur administratif et financier, afin que votre véhicule de fonction puisse enfin être récupéré par M. [C].
Cependant, arrivé sur place, M. [C] a été pris à partie de façon très violente {« je vais le crever, puis quand il aura cicatrisé je le crèverai puis quand il aura cicatrisé je le crèverai encore »), il a été injurié, et son propre véhicule bloqué par vous et une tierce personne qu’il ne connaissait pas.
Vous avez ensuite disparue avec le véhicule de l’entreprise.
Devant la gravité de ces faits et face à votre comportement tout à fait inapproprié, nous vous avons signifié le jour-même à 17h, oralement, votre mise à pied à titre conservatoire. Cela vous a été confirmé par courrier RAR du 3 octobre réceptionné par vos soins le 6 octobre 2017.
Le 6 octobre 2017 nous vous avons adressé une mise en demeure de restituer à l’entreprise l’ensemble des matériels restés en votre possession, dans l’attente de l’issue de la procédure disciplinaire ainsi que le véhicule devant être restitué au concessionnaire.
Ce n’est que le mardi 10 octobre après midi que vous vous êtes finalement présentée au siège de la société pour apporter la voiture et le matériel.
Votre refus de restitution du véhicule nous a mis dans une situation très délicate vis à-vis de notre fournisseur de véhicules qui attendait la restitution de ces derniers au plus tard le 2 octobre 2017.
Lors de notre entretien du 19 octobre vous n’avez pas été en mesure de nous expliquer les raisons de votre refus de restituer le véhicule mis à votre disposition sachant pourtant qu’un autre véhicule vous serait attribué.
Vous n’avez pas non plus su nous donner d’explication quant à votre comportement vis-à-vis de M. [C] le 3 octobre, à votre domicile et n’avez pas même pris la peine de vous excuser pour vos actes violents et inadaptés.
M. [C] se réserve d’ailleurs le droit d’aller porter plainte.
Nous soulignons par ailleurs que le relevé de votre boîte mail professionnelle fait apparaitre un niveau d’activité client très faible, tout particulièrement en cette période de clôture de comptes clients en fin de saison. (du 2/10/17 au 19/10/17, 23 emails dont 21 de publicité.)
Enfin, lors de cet entretien nous vous avons rappelé qu’à la date du 4 septembre 2017, nous vous avons signifié un avertissement de travail consécutif à une négligence générale sévère de l’entretien du véhicule confié et des frais de remise en état évalués par le concessionnaire.
Outre les conséquences de ces événements que nous avons à assumer et qui représentent des surcoûts très conséquents pour notre entreprise, nous déplorons le manque de confiance et les abus que cela a entraîné.
Nous vous informons que nous avons en conséquence décidé de vous licencier pour faute grave.
Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien dans vos fonctions s’avère impossible.
Le licenciement prend donc effet immédiatement à !a date du 23 octobre 2017 sans indemnité de préavis ni de licenciement. De même, la période de mise à pied conservatoire signifiée le 3 octobre ne sera pas rémunérée.
Votre solde de tout compte ainsi que les documents de fin de contrat seront mis à votre disposition à compter du 6 novembre 2017 au secrétariat de la société.
Dans le même temps, vous voudrez bien nous restituer les fichiers clients restés en votre possession.
Veuillez agréer Madame l’expression de nos salutations distinguées.’
Mme [Z] [S] a saisi le conseil de prud’hommes en contestation de son licenciement.
Le conseil de prud’hommes, par jugement contradictoire du 12 septembre 2019, a :
-fixe le salaire moyen de Mme [S] à la somme de 2472,91 euros.
– annule la procédure de mise à pied à titre conservatoire et la retenue de salaire faite à ce titre,
– condamne la SAS les parcs du sud à payer à Mme [S] les sommes suivantes :
– 1.421,51 euros à titre de retenue de salaire pour la mise a pied
– 2.596,00 euros à titre d’indemnité de préavis
– 259,60 euros à titre de congés payes y afférents
– 983,00 euros à titre dindemnite de licenciement
– 7.420,00 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail.
– 1.000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– déboute Mme [S] du surplus de ses demandes.
– déboute la SAS les parcs du sud de ses demandes reconventionnelles.
– condamne la SAS les parcs du sud aux entiers dépens de l’instance.
Par acte du 8 octobre 2019, la SAS Les Parcs du Sud a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 10 juin 2020, la SAS Les Parcs du Sud demande à la cour de :
– Accueillant l’appel de la société les parcs du sud,
– Le déclarant bien fondé,
– Infirmer le jugement rendu le 12 Septembre 2019 par le conseil de prud’hommes d’Orange en ce qu’il a :
-annulé la procédure de mise à pied à titre conservatoire et la retenue de salaire faite à ce titre,
-condamné la SAS les parcs du sud à payer à Mme [Z] [S] les sommes suivantes :
– 1.421,51 euros à titre de retenue de salaire pour la mise a pied
– 2.596,00 euros à titre d’indemnité de préavis
– 259,60 euros à titre de congés payes y afférents
– 983,00 euros à titre d’indemnité de licenciement
– 7.420,00 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail.
– 1.000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile -débouté la SAS les parcs du sud de ses demandes reconventionnelles,
-condamné la SAS les parcs du sud aux entiers dépens de l’instance.
– Dire et juger que le licenciement n’est pas fondé sur une cause économique.
– Dire et juger que la société les parcs du sud rapporte la preuve de la faute grave invoquée à l’encontre de Mme [Z] [S].
– Dire et juger que le licenciement de Mme [Z] [S] est fondé sur une faute grave
– Dire et juger en conséquence qu’il n’y avait pas lieu d’annuler la mise à pied à titre conservatoire et la retenue de salaire faite à ce titre.
– Dire et juger qu’il n’y avait pas lieu de condamner la société les parcs du sud au paiement de la retenue de salaire sur la mise à pied.
– Dire et juger qu’il n’y avait pas lieu de condamner la société les parcs du sud à payer à Mme [Z] [S] l’indemnité de préavis et les congés payés y afférents.
– Dire et juger qu’il n’y avait pas lieu de condamner la société les parcs du sud à payer à Mme [Z] [S] l’indemnité de licenciement.
– Dire et juger qu’il n’y avait pas lieu de condamner la société les parcs du sud au paiement de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail.
– Dire et juger qu’il n’y avait pas lieu de condamner la société les parcs du sud à payer à Mme [Z] [S] la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile .
– Dire et juger que Mme [Z] [S] était affiliée au titre de la prévoyance auprès de Malakoff Mederic.
– Dire et juger que Mme [S] a été remplie de ses droits au titre des heures supplémentaires.
– Débouter Mme [Z] [S] de toutes ses demandes fins et conclusions
– Condamner Mme [Z] [S] à régler à la société les parcs du sud les sommes qui lui ont été versées au titre de l’exécution provisoire de droit du jugement du conseil de prud’hommes d’Orange en date du 12 Septembre 2019, soit la somme de 3.896,27 euros net comprenant le rappel de salaire mise à pied, l’indemnité compensatrice de préavis, l’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis et l’indemnité de licenciement.
– Dire et juger qu’il n’y avait pas lieu de débouter la société les parcs du sud de ses demandes reconventionnelles.
– Condamner Mme [Z] [S] à payer à la société les parcs du sud la somme de 3.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
– Condamner Mme [Z] [S] en tous les dépens, tant de première instance que d’appel
Subsidiairement,
Si par extraordinaire la Cour d’Appel de Nîmes considérait que les faits reprochés à Mme [Z] [S] ne sont pas constitutifs d’une faute grave,
– Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Orange le 12 septembre 2019 en ce qu’il a considéré que le licenciement de Mme [Z] [S] n’avait aucune cause réelle et sérieuse.
– Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Orange le 12 septembre 2019 en ce qu’il a condamné la société les parcs du sud à payer à Mme [Z] [S] la somme de 7.420 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail.
– Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Orange le 12 septembre 2019 en ce qu’il a condamné la société les parcs du sud à payer à Mme [Z] [S] la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Orange le 12 septembre 2019 en ce qu’il a condamné la société les parcs du sud aux entiers dépens de l’instance.
– Dire et juger que le licenciement de Mme [Z] [S] à une cause réelle et sérieuse.
– Débouter Mme [Z] [S] de toutes ses demandes fins et conclusions
– Condamner Mme [Z] [S] à payer à la société les parcs du sud la somme de 3.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
– Condamner Mme [Z] [S] aux entiers dépens de première instance et d’appel.
La SAS Les Parcs du Sud soutient que :
– elle était en redressement judiciaire. Elle ajoute que le plan de redressement ne faisait pas état de réduire la masse salariale. Les licenciements des trois salariées sont dus à une faute grave de leur part du fait de la non-restitution de leurs véhicules de fonction.
– le véhicule de fonction devait être remplacé et non supprimé, ce qui n’engendrait pas une modification du contrat de travail.
– elle a licencié Mme [Z] [S] pour faute grave en raison de la non-restitution de son véhicule de fonction, pour ne s’être pas présentée sur son lieu de travail le lendemain, pour être arrivée sur son lieu de travail sans ses outils de travail et sans le véhicule de fonction ainsi que pour avoir pris à parti M. [C] et pour un manquement dans le suivi de la clientèle.
En l’état de ses dernières écritures en date du 20 mars 2020 contenant appel Mme [Z] [S] a sollicité:
Au titre de l’appel incident:
– dire et juger que la mesure de licenciement est dénuée de toute cause réelle et sérieuse, mais fondée sur une cause économique,
– confirmer l’annulation de la mise à pied à titre conservatoire en date du 3 octobre 2017,
– confirmer la condamnation de la société les parcs du sud au paiement de la retenue de salaire à ce titre pour un montant de 1421,51 euros.
– confirmer la fixation de la moyenne des trois de derniers mois de salaire à la somme de de 2.472,91 euros,
– confirmer la condamnation de la société les parcs du sud à payer le montant du préavis et des congés payés y afférents soit une somme de 2.596,00 euros et 259,60 euros.
– confirmer la condamnation de la société les parcs du sud au paiement de l’indemnité de licenciement pour une somme d’un montant de 983,00 euros.
Statuant a nouveau,
– condamner la société les parcs du sud à payer à titre de dommages et intérêts d’une somme de 14.837,46 euros .
– condamner la société les parcs du sud à payer une somme de 29.674,92 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la privation de droits subis par la salariée tenant l’absence de reclassement, de consultation des délégués du personnel et l’impossibilité de bénéficier des mesures d’accompagnement légales prévu en cas de licenciement pour motif économique, comme l’adhésion au CSP ainsi que de l’indemnisation prévue par l’UNEDIC.
– condamner la société les parcs du sud à payer la somme de 402,51 € au titre des heures supplémentaires,
– condamner la société les parcs du sud à payer la somme de 3.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour non affiliation au régime de prévoyance,
– condamner la société les parcs du sud à payer la somme de 3.500,00 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.
Mme [Z] [S] fait valoir que son refus de remettre son véhicule est dû au fait que cette restitution représentait une modification d’un élément essentiel du contrat de travail qui, selon elle, laissait présager d’une volonté de licenciement par l’employeur.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.
Par ordonnance en date du 26 avril 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 6 septembre 2022.
MOTIFS
Sur le licenciement :
Selon l’article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige et à défaut d’accord entre les parties, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
La faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle empêche le maintien de l’intéressé dans l’entreprise même pendant la durée du préavis. Il incombe à l’employeur qui l’invoque d’en apporter la preuve et il appartient au juge du contrat de travail d’apprécier au vu des éléments de preuve figurant au dossier si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont établis, imputables au salarié et s’ils ont revêtu un caractère de gravité suffisant pour justifier l’éviction immédiate de l’entreprise.
En l’espèce, il ressort des termes de la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, que les trois griefs retenus à l’encontre de la salariée pour caractériser la faute grave qui lui est reprochée, sont les suivants:
1)° ‘Nous vous avons informée au mois de septembre que le contrat avec notre fournisseur automobile prendrait fin à fin de septembre et qu’en conséquence le véhicule de marque Volkswagen mis à votre disposition dans le cadre de l’exercice de vos fonctions devrait être restitué au plus tard le 2 octobre 2017. Un autre véhicule, de marque Volkswagen ou HYUNDAI devait aussitôt être mis à votre disposition en remplacement. Une première visite du concessionnaire, pour l’expertise des véhicules, s’était tenue sur le lieux de l’entreprise le 29 juin 2017 et une deuxième visite le 4 septembre directement à la concession automobile, et ce toujours en votre présence.
Pourtant, le lundi 2 octobre 2017, en dépit de notre demande, vous avez catégoriquement refusé de remettre ce véhicule à notre fournisseur.’.
‘Votre refus de restitution du véhicule nous a mis dans une situation très délicate vis à-vis de notre fournisseur de véhicules qui attendait la restitution de ces derniers au plus tard le 2 octobre 2017.
Lors de notre entretien du 19 octobre vous n’avez pas été en mesure de nous expliquer les raisons de votre refus de restituer le véhicule mis à votre disposition sachant pourtant qu’un autre véhicule vous serait attribué.’
Le contrat de travail à durée indéterminée conclu le 1er octobre 2016 prévoit notamment dans son article 5 intitulé : ‘Durée du travail et rémunération’ : ‘En rémunération de ses services, la salariée percevra un salaire mensuel brut de 2,200.00 (Deux Mille Deux Cent euros). Ce salaire lui sera versé au plus tard le 10 du mois suivant.
En complément, la Salariée bénéficiera d’un véhicule de fonction, dans le cas où elle serait amenée à effectuer des déplacements professionnels.’
Il ressort du document ‘listing voitures’ produit par la SAS Les Parcs du Sud que Mme [Z] [S] bénéficiait d’un véhicule de fonction immatriculé DS 377 RN, constituant un avantage en nature apparaissant sur ses bulletins de salaire.
Constitue une rémunération au sens du présent chapitre, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum et tous les autres avantages et accessoires payés, directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l’employeur au salarié en raison de l’emploi de ce dernier.
L’élément de rémunération, dès lors qu’il appartient à la sphère contractuelle, ne peut pas être unilatéralement modifié par l’employeur et la suppression ou la révision d’un avantage en nature prévu par le contrat de travail affecte la structure de la rémunération et constitue ainsi une modification du contrat de travail qui doit donner lieu à l’accord du salarié.
La SAS Les Parcs du Sud soutient que le véhicule Volkswagen mis à la disposition de Mme [Z] [S] devait être restitué au plus tard le 2 octobre 2017 par un véhicule ‘de marque Volkswagen ou HYUNDAI’ et produit à l’appui de ses affirmations plusieurs échanges de courriels entre Mme [G] [Y], directrice marketing & commercial SPLASHWORD et différents interlocuteurs entre les mois de mai et juillet 2017, outre des pièces comptables justifiant du paiement de loyers à ‘By My CarVW’ ainsi qu’un courrier du 11 octobre 2017 émanant de ‘Bymy CAR Avignon’, attestant :’depuis le 30 septembre 2017 nous avons à disposition 4 véhicules de modèle POLO Essence destinés à la location pour la Ste SPLASHWORD.’
Il résulte tout d’abord de l’examen de ces courriels qu’une grande partie d’entre eux est relative à des échanges entre la directrice marketing de l’employeur et la société proposant la location des véhicules sans qu’il soit démontré que les salariées concernées auraient été destinataires de ces transmissions ni qu’elles en auraient eu connaissance, les raisons financières pour lesquelles ces véhicules devaient être restitués ou échangés par la SAS Les Parcs du Sud étant indifférentes à la solution du litige et étrangères aux stipulations contractuelles.
Par ailleurs, il ressort de la teneur de ces échanges une extrême imprécision tant en ce qui concerne les dates auxquelles les véhicules auraient dû être restitués que sur les véhicules susceptibles de les remplacer.
Ainsi le seul document écrit concernant la restitution des véhicules mis à disposition des salariés et leur remplacement est constitué par un courriel informel du 31 août 2017 émanant de [F] [I], Responsable Grands Comptes de la société SPLASWORLD qui invitait les salariées concernées à se présenter le 4 septembre 2017 chez le prestataire pour une restitution et un ‘remplacement’ des véhicules sans aucune indication ni précision sur les véhicules susceptibles d’être alors mis à leur disposition.
Ce rendez vous aurait finalement été reporté au 2 octobre 2017 sans que la SAS Les Parcs du Sud ne justifie de ce qu’elle avait officiellement avisé sa salariée de ce report, le fait que d’autres salariées aient accepté de restituer leur propre véhicule ce jour là étant sans incidence à cet égard.
De plus il résulte de ses écritures que : ‘plusieurs réunions informelles entre les salariées du service commerciale disposant d’un véhicule et Monsieur [R], Président de la SAS LES PARCS DU SUD, avaient lieu au mois de Septembre 2017, pour tenir ces salariés informées des négociations avec BY MY CAR pour la restitution des véhicules de fonction et leur remplacement’. Outre le fait que la tenue de ces rencontres n’est pas objectivée par le moindre élément, cette indication témoigne indubitablement de ce qu’aucune proposition concernant les véhicules de remplacement n’avait pu, à ce stade, être donnée aux salariées concernées puisque les négociations étaient toujours en cours avec le prestataire.
Enfin, concernant l’attestation de BymyCAR Avignon produite aux débats, il est constant que ce document a été émis le 11 octobre 2017, soit consécutivement aux faits, sans que rien ne permette de démontrer que Mme [Z] [S] avait eu connaissance de cette ‘mise à disposition’ le 2 octobre 2017. D’autre part aucun élément ne permet d’établir que l’un de ces véhicules était destiné à Mme [Z] [S] puisqu’il est fait référence à quatre véhicules quand le document intitulé ‘LISTING VOITURE’ fait mention de cinq véhicules attribués respectivement à ‘[X] [Y], [F] [I], [Z] [S], [T] [L] et [E] [A]’.
En l’état de ces approximations et imprécisions, la SAS Les Parcs du Sud, qui se borne à affirmer que Mme [Z] [S] avait refusé de restituer son véhicule de fonction, lequel constituait un élément contractuel de sa rémunération et ne pouvait lui être retiré sans son accord, ne justifie nullement de ce qu’elle était en mesure de mettre à la disposition de sa salariée un véhicule de remplacement. Elle échoue, en conséquence, à démontrer la faute qu’elle reproche à sa salariée.
Ce grief sera donc écarté.
2°) La lettre de licenciement énonce : ‘Le mardi 3 octobre au matin, vous ne vous êtes pas présentée à votre poste de travail. Après que le manager vous ait contactée pour connaître les raisons et la durée prévisible de votre absence, vous vous êtes présentée à l’entreprise à 14h, sans outil de travail (ni ordinateur, ni documents) et surtout sans votre véhicule de fonction.’
Dans ses écritures la SAS Les Parcs du Sud se borne à indiquer sur ce point : ‘La faute grave en l’espèce est le refus par la salariée de restituer son véhicule, alors que celui-ci devait être remplacée, en organisant cette obstruction systématique avec deux de ses collègues, Mesdames [L] et [A] et en réitérant ce refus en ne se présentant pas sur son lieu de travail avec son véhicule de fonction et son ordinateur portable, et autres outils de travail.’
La faute résultant du défaut de restitution par Mme [Z] [S] n’étant pas établie, la SAS Les Parcs du Sud ne produit par ailleurs aucun élément de nature à démontrer en quoi le fait pour Mme [Z] [S], qui exerçait une activité de ‘responsable grands comptes’ rattachée au service commercial, dont le contrat prévoyait formellement l’hypothèse de ‘déplacements professionnels’ qui ne sont pas contestés en fait, et qui bénéficiait d’un véhicule de fonction lui permettant de les effectuer, de ne pas se présenter au siège de l’entreprise le 3 octobre au matin serait fautif. Il ressort d’ailleurs de la lettre de licenciement et des propres écritures de la SAS Les Parcs du Sud que Mme [Z] [S] bénéficiait également d’un ‘ordinateur portable’ ce qui tend à démontrer qu’elle était amenée à transporter avec elle les ‘outils de travail’ dont elle avait besoin lors de ses déplacements éventuels.
Au surplus, il est constant que Mme [Z] [S], contactée par téléphone par sa responsable à 11h00, s’est présentée au siège dès 14h00.
Ces éléments ne démontrent donc aucune faute, a fortiori de nature à entraîner la rupture du contrat de travail.
3°) S’agissant du troisième grief énoncé par la lettre de licenciement, celui-ci est rédigé dans les termes suivants : ‘En fin de journée, nous avons pris la peine de vous faire raccompagner à votre domicile par M. [B] [C], directeur administratif et financier, afin que votre véhicule de fonction puisse enfin être récupéré par M. [C].
Cependant, arrivé sur place, M. [C] a été pris à partie de façon très violente {« je vais le crever, puis quand il aura cicatrisé je le crèverai puis quand il aura cicatrisé je le crèverai encore »), il a été injurié, et son propre véhicule bloqué par vous et une tierce personne qu’il ne connaissait pas.
Vous avez ensuite disparue avec le véhicule de l’entreprise.
Devant la gravité de ces faits et face à votre comportement tout à fait inapproprié, nous vous avons signifié le jour-même à 17h, oralement, votre mise à pied à titre conservatoire. Cela vous a été confirmé par courrier RAR du 3 octobre réceptionné par vos soins le 6 octobre 2017.’
Ce grief ne repose sur aucun élément objectif :
– Il n’est produit aucun élément de nature à caractériser l’organisation du ‘guet apens’ reproché à Mme [Z] [S] et il résulte des propres écritures de la SAS Les Parcs du Sud que la plainte de M. [C] a été classée sans suite
– Aucun élément ne démontre, pas même l’énoncé de la lettre de licenciement, que Mme [Z] [S] soit l’auteur des paroles injurieuses ou menaçantes prononcées à l’encontre de M. [C],
– Il résulte au contraire du dépôt de plainte de M. [C] que celui-ci, s’il impute l’organisation d’un ‘guet apens’, lequel n’est pas démontré, aux salariées, ne met en cause que M. [A], père de Mme [A] concernant les menaces et obstruction qu’il affirme avoir subies, les trois salariées étant descendues de son véhicule à son arrivée sur les lieux pour ne plus revenir selon ses déclarations.
Ce grief sera donc également écarté.
4°) Il est par ailleurs reproché à Mme [Z] [S] : ‘Le 6 octobre 2017 nous vous avons adressé une mise en demeure de restituer à l’entreprise l’ensemble des matériels restés en votre possession, dans l’attente de l’issue de la procédure disciplinaire ainsi que le véhicule devant être restitué au concessionnaire.
Ce n’est que le mardi 10 octobre après midi que vous vous êtes finalement présentée au siège de la société pour apporter la voiture et le matériel.’
Il résulte des pièces versées aux débats que le courrier de mise en demeure intitulé ‘Objet : Retour de matériel’ est daté du 6 octobre 2017 et qu’il a été présenté le 9 octobre 2017 à Mme [Z] [S]. Il n’est donc ni expliqué ni démontré en quoi le fait pour cette dernière d’avoir restitué son matériel le 12 octobre 2017 est constitutif d’une faute.
Ce grief sera également écarté.
5°) Ce grief est énoncé en ces termes : ‘Nous soulignons par ailleurs que le relevé de votre boîte mail professionnelle fait apparaitre un niveau d’activité client très faible, tout particulièrement en cette période de clôture de comptes clients en fin de saison. (du 2/10/17 au 19/10/17, 23 emails dont 21 de publicité.)’
Ainsi que le relève très justement Mme [Z] [S], il ne saurait lui être valablement reproché un niveau d’activité client très faible alors qu’elle faisait l’objet d’une mise à pied. Dans ses écritures, la SAS Les Parcs du Sud précise en réponse aux arguments adverses sur ce point : ‘Il est bien évident que ne disposant plus de sa boite mail professionnelle, et étant mise à pied à titre conservatoire, Madame [S] ne pouvait adresser des mails à ses clients mais il est extrêmement surprenant qu’aucun client n’ait cherché à la contacter pendant la période du 2 Octobre au 19 Octobre 2017, qui est une période de clôture de comptes clients à la fin de la saison et donc avec une intense activité.’.
D’une part ces deux affirmations sont contradictoires puisque la lettre de licenciement évoque un ‘niveau d’activité client très faible’ et non inexistant. De plus, il n’est apporté aucun élément ne nature à démontrer la réalité de cette affirmation et son imputabilité à Mme [Z] [S] qui ne saurait être tenue responsable de ce que ces clients ne lui auraient envoyé aucun courriel durant cette période.
De ce fait, ce grief devra également être écarté.
6°) ‘Enfin, lors de cet entretien nous vous avons rappelé qu’à la date du 4 septembre 2017, nous vous avons signifié un avertissement de travail consécutif à une négligence générale sévère de l’entretien du véhicule confié et des frais de remise en état évalués par le concessionnaire.
Outre les conséquences de ces événements que nous avons à assumer et qui représentent des surcoûts très conséquents pour notre entreprise, nous déplorons le manque de confiance et les abus que cela a entraîné.’
A supposer ceux-ci établis, il ressort des écritures de la SAS Les Parcs du Sud que Mme [Z] [S] aurait été sanctionnée par un avertissement pour ces faits qui n’est pas produit aux débats.
Au demeurant la ‘perte de confiance’ alléguée ne saurait constituer à elle seule une cause de licenciement.
Faute pour la SAS Les Parcs du Sud de démontrer les fautes qu’elle allègue, le jugement attaqué sera donc confirmé en ce qu’il a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse, sauf à compléter la décision sur ce point, a prononcé l’annulation de la mise à pied conservatoire, fixé le salaire moyen de Mme [Z] [S] à 2.472,91 euros et condamné la SAS Les Parcs du Sud à payer à Mme [Z] [S] les sommes de 1.421,51 euros à titre de retenue sur salaire, 2.596 euros à titre d’indemnité de préavis et 259,60 euros au titre des congés payés y afférents et 983 euros à titre d’indemnité de licenciement dont les montants ne sont pas contestés par la SAS Les Parcs du Sud, ne serait-ce qu’à titre subsidiaire.
Sur la demande au titre de la rupture abusive du contrat :
Mme [Z] [S] sollicite la somme de 14.837,46 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail du fait de son âge et de ce qu’elle serait toujours au chômage.
Si Mme [Z] [S] ne produit aucun élément de nature à démontrer l’étendue du préjudice qu’elle invoque, en application des dispositions de l’article L.1235-3 telles qu’issues de l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, tenant compte du montant de sa rémunération (2.472,91euros en moyenne) et de son ancienneté en années complètes (une année), la cour retient que l’indemnité à même de réparer intégralement le préjudice a été justement évaluée par le premier juge à la somme de 7.420 euros correspondant à l’équivalent de 3mois de salaire brut.
Compte tenu du sens de la décision, il n’y a pas lieu de statuer sur les demandes relatives au défaut de reclassement et à la privation de droits invoqués par Mme [Z] [S].
Par ailleurs, le licenciement étant sans cause réelle et sérieuse et l’entreprise comptant plus de dix salariés, il y a lieu, en application des dispositions de l’article L 1235-4 du code du travail, d’ordonner à l’employeur de rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage versées au salarié, dans la limite de six mois et le jugement sera complété sur ce point.
Sur les demandes relatives à l’exécution du contrat :
Sur les heures supplémentaires :
Mme [Z] [S] sollicite le paiement de la somme de 402,51 euros au titre de 18,5 heures supplémentaires.
L’article 954 précise, en son alinéa 1, que les conclusions doivent » formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. »
Au soutien de sa prétention, l’intimée n’a visé aucune pièce, en contradiction avec les dispositions de l’article 954 du code de procédure civile sus-cité, ne permettant pas à la cour de vérifier le bien fondé de ses prétentions et faisant obstacle à la nécessité d’un débat loyal.
Le jugement attaqué sera confirmé sur ce point.
Sur la mutuelle :
Mme [Z] [S] soutient qu’alors qu’une retenue sur salaire était appliquée tous les mois sur son salaire par la SAS Les Parcs du Sud à ce titre, aucune déclaration n’aurait été faite par la SAS Les Parcs du Sud et qu’aucune cotisation n’a donc été acquittée à son bénéfice. Elle sollicite la somme de 3.000 euros à tire de dommages et intéréts car n’étant pas assurée, elle n’a pu être remboursée et ne bénéficie pas de la portabilité.
L’article 954 précise, en son alinéa 1, que les conclusions doivent » formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. »
Au soutien de sa prétention, l’intimée n’a visé aucune pièce, en contradiction avec les dispositions de l’article 954 du code de procédure civile sus-cité, ne permettant pas à la cour de vérifier le bien fondé de ses prétentions et faisant obstacle à la nécessité d’un débat loyal.
Le jugement attaqué sera donc également confirmé sur ce point.
Sur les demandes accessoires :
L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Mme [Z] [S] en condamnant la SAS Les Parcs du Sud à lui payer la somme de 1.000 euros.
Les dépens seront mis à la charge de la SAS Les Parcs du Sud.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort
Confirme le jugement attaqué en toutes ses dispositions, sauf à préciser que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,
Y ajoutant,
Ordonne le remboursement par l’employeur aux organismes concernés de tout ou partie des indemnités de chômage payées au salarié licencié du jour de son licenciement au jour du prononcé de la présente décision, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage, et dit qu’une copie certifiée conforme de la présente sera adressée à ces organismes conformément aux dispositions de l’article L 1235-4 du code du travail,
Condamne la SAS Les Parcs du Sud à payer à Mme [Z] [S] la somme de 1.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SAS Les Parcs du Sud aux dépens.
Arrêt signé par le président et par la greffière.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,