Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 9 – A
ARRÊT DU 22 JUIN 2023
(n° , 2 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/19807 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B6I4V
Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 mars 2018 – Tribunal d’Instance de PARIS – RG n° 11-15-000721
APPELANTE
La société EUROTITRISATION, en qualité de représentant du fonds commun de titrisation CREDINVEST, Compartiment CREDINVEST 1 (venant aux droits de la société COFINOGA), société anonyme prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
N° SIRET : 352 458 368 00052
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 6]
représentée et assistée de Me Cédric KLEIN de la SELAS CREHANGE & KLEIN ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C1312
INTIMÉE
Madame [P] [D] épouse [I]
née le [Date naissance 3] 1654 à [Localité 8] (TUNISIE)
[Adresse 2]
[Localité 7]
représentée par Me Sandra OHANA de l’AARPI OHANA ZERHAT CABINET D’AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050
ayant pour avocat plaidant Me Gregory HANIA, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : 403
PARTIE INTERVENANTE
La société EOS FRANCE (venant aux droits de la société COFINOGA), société par actions simplifiée prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
N° SIRET : 488 825 217 00026
[Adresse 4]
[Localité 5]
représentée et assistée de Me Cédric KLEIN de la SELAS CREHANGE & KLEIN ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C1312
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 mai 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre
Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère
Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère
Greffière, lors des débats : Mme Ophanie KERLOC’H
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Le 18 mars 1996, une ordonnance d’injonction de payer a été rendue par le tribunal d’instance du 12ème arrondissement de Paris à l’encontre de Mme [P] [I], la condamnant à payer à la société Cofinoga la somme principale de 16 830,46 francs avec intérêts au taux de 18,96 % l’an à compter du 17 juin 1996 outre celle de 26,80 francs au titre des frais accessoires et les dépens.
L’ordonnance a été signifiée par acte remis à mairie le 26 mars 1996 puis l’ordonnance revêtue de la formule exécutoire suivant acte remis à mairie le 30 juillet 1996 valant également commandement aux fins de saisie-vente.
Par déclaration enregistrée au greffe du tribunal le 21 décembre 2015, Mme [I] a formé opposition à cette ordonnance.
Par jugement contradictoire du 22 mars 2018, le tribunal d’instance de Paris 12ème a déclaré recevable l’opposition formée par Mme [I] et jugé que la société Eurotitrisation avait bien qualité à agir mais l’a déboutée de l’intégralité de ses demandes en l’absence de production de l’offre préalable de crédit, d’un décompte de créance et d’un historique de compte.
Après avoir admis sa compétence territoriale, le tribunal a estimé que l’opposition formée le 21 décembre 2015 était recevable, constatant que le procès-verbal de non-conciliation intervenu le 25 février 1997 dans le cadre de la saisie des rémunérations de Mme [I] n’avait pu rendre ses biens indisponibles au sens de l’article 1416 du code de procédure civile, dans la mesure où la saisie n’avait jamais été mise en ‘uvre.
Le tribunal a constaté la qualité à agir de la société Eurotitrisation et l’a déboutée de sa demande en raison de l’absence de communication aux débats d’aucune pièce susceptible de fonder la demande.
Par déclaration en date du 7 août 2018 enrôlée sous le numéro RG 18/19807, la société Eurotitrisation en qualité de représentante de fonds communs de titrisation Credinvest 1 venant aux droits de la société Cofinoga a relevé appel de cette décision.
Par ordonnance du conseiller de la mise en état rendue le 22 juin 2021, Mme [I] qui avait constitué avocat, a été déclaré irrecevable à conclure faute pour elle d’avoir justifié de l’acquittement du droit de timbre.
Le 6 juillet 2021, Mme [I] a déféré devant la cour l’ordonnance du 22 juin 2021 puis, par mémoire distinct du 8 mars 2022, a soulevé une question prioritaire de constitutionnalité des articles fondant la décision du conseiller de la mise en état.
Suivant arrêt de cette cour rendu contradictoirement le 30 juin 2022, la question soulevée a été déclarée recevable mais non transmise en ce qu’elle ne présentait pas de caractère de nouveauté et l’affaire renvoyée au 20 septembre 2022.
Suivant arrêt de cette cour rendu contradictoirement le 10 novembre 2022, l’ordonnance rendue le 22 juin 2021 par le conseiller de la mise en état ayant déclaré Mme [I] irrecevable à conclure sur le fondement de l’article 963 du code de procédure civile, a été confirmée.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 14 mars 2023.
Aux termes des dernières conclusions remises le 15 février 2023, la société Eos France demande à la cour :
– de confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a déclaré la société Eurotitrisation ès qualités de représentante du fonds commun de titrisation Credinvenst 1 recevable à agir aux droits de la société Cofinoga,
– d’infirmer le jugement dont appel en ce qu’il a déclaré recevable l’opposition de Mme [I] et l’a condamnée aux dépens,
-de déclarer que la société Eos France vient aux droits de la société Cofinoga et est créancière de Mme [I],
– de déclarer l’opposition de Mme [I] irrecevable comme tardive,
-de déclarer que l’ordonnance d’injonction de payer rendue le 18 mars 1996 est définitive, passée en force de chose jugée et reprendra tous ses effets,
– de débouter Mme [I] de l’intégralité de ses demandes,
– de condamner Mme [I] à payer à la société Eos France la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– de condamner Mme [I] aux entiers dépens de première instance et d’appel, qui seront recouvrés par Me Klein, avocat constitué, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
L’appelante soutient que le délai d’un mois pour former opposition prévu à l’article 1416 du code de procédure civile a commencé à courir le 25 février 1997, date du procès-verbal ayant autorisé la saisie des rémunérations de Mme [I] et que l’opposition formée en 2015 est largement tardive.
Elle conteste avoir à communiquer des pièces touchant au fond du dossier dans la mesure où la cour n’est tenue que de se pencher sur la question de la recevabilité.
Elle rappelle que le fonds commun de titrisation Credinvest 1 est représenté par la société Eurotitrisation qui est sa société de gestion et son représentant légal en application des articles L. 214-181 et L. 214-183 du code monétaire et financier, que la société Credirec France, par la suite dénommée Eos Credirec et désormais Eos France a été mandatée afin de recouvrer amiablement la créance cédée et qu’en conséquence cette dernière a intérêt et qualité pour intervenir volontairement à l’instance.
Par acte remis le 9 mars 2023, le Ministère public représenté par M. le procureur général est d’avis de voir déclarer l’intervention volontaire de la société Eos France recevable, de voir confirmer le jugement et de voir rejeter l’ensemble des demandes des sociétés Eurotitrisation et Eos France.
Il indique que la saisie des rémunérations a été suspendue par suite de la survenance d’un avis à tiers détenteur, que le procès-verbal de non-conciliation ne constitue pas une mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponible en tout ou en partie les biens du débiteur au sens de l’article 1416 du code de procédure civile et que s’agissant de la saisie-attribution, c’est la dénonciation qui fait courir le délai d’opposition à injonction de payer et qu’en l’espèce la saisie-attribution n’a pas été dénoncée à Mme [I]. Il est d’avis que l’opposition formée le 21 décembre 2015 est recevable et que la société Eurotitrisation établit venir aux droits de la société Cofinoga puis avoir cédé sa créance à Eos France le 17 décembre 2021 et que les cessions de créances sont opposables à Mme [I].
Sur le fond, il constate que pas plus en première instance qu’en appel, l’appelante ne produit de pièce propre à fonder sa demande en paiement.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’affaire a été appelée à l’audience du 16 mai 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il résulte du dernier alinéa de l’article 954 du code de procédure civile, que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement, est réputée s’en approprier les motifs.
Sur la recevabilité de l’opposition
Aux termes de l’article 1411 du code de procédure civile, l’ordonnance portant injonction de payer est non avenue si elle n’a pas été signifiée dans les six mois de sa date.
Selon les dispositions de l’article 1416 du code de procédure civile, l’opposition est formée dans le mois qui suit la signification de l’ordonnance mais si la signification n’a pas été faite à personne, l’opposition est recevable jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois suivant le premier acte signifié à personne, ou, à défaut, suivant la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponibles en tout ou partie les biens du débiteur.
Mme [I] a formé opposition le 21 décembre 2015 auprès du tribunal d’instance du 12ème arrondissement de Paris alors qu’il est justifié que le fonds commun de titrisation Credinvest 1 représenté par la société Eurotitrisation comme venants aux droits de la société Cofinoga venait de déposer suivant requête du 23 novembre 2015, une nouvelle demande aux fins de saisie des rémunérations de Mme [I], portant sur les sommes dues en exécution de l’ordonnance du 18 mars 1996.
L’ordonnance portant injonction de payer revêtue de la formule exécutoire a été signifiée à Mme [I] suivant acte remis le 30 juillet 1996, selon les formes de l’article 658 du code de procédure civile, la destinataire de l’acte présente à domicile ayant refusé l’acte. L’acte valait également commandement aux fins de saisie-vente sans qu’il ne soit justifié de mise en ‘uvre de la procédure subséquente de saisie-vente au regard d’un procès-verbal de carence du 16 octobre 2016.
Mme [I] n’ayant pas été touchée à sa personne, l’opposition restait donc recevable dans le délai d’un mois suivant la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponibles en tout ou partie ses biens.
Il n’est pas justifié que la saisie-attribution initiée le 22 octobre 1996 ait été dénoncée à Mme [I].
Le 24 janvier 1997, l’huissier de justice mandaté par la société Cofinoga a sollicité du tribunal d’instance du 12ème arrondissement de Paris la saisie des rémunérations de Mme [I] et selon procès-verbal de non-conciliation en date du 25 février 1997 signé du juge et du représentant du créancier, le juge a constaté la non-comparution de Mme [I] malgré délivrance d’une convocation régulière et a autorisé la saisie des rémunérations pour une somme en principal, intérêts et frais de 20 835,42 francs.
Il résulte des pièces du dossier que la saisie des rémunérations de Mme [I] a été régulièrement ordonnée en conformité avec les règles alors applicables notamment celles des articles R. 145-9 à R. 145-39 du code du travail et en particulier les dispositions de l’article R. 145-15 qui prévoient que si le débiteur ne comparaît pas, il est procédé à la saisie, à moins que le juge n’estime nécessaire une nouvelle convocation. L’article R. 145-17 impose au greffe de procéder à la saisie dans les huit jours du procès-verbal de non-conciliation et l’article R. 145-33 du code du travail précise que la notification à l’employeur d’un avis à tiers détenteur conforme aux articles L. 262 et L. 263 du livre des procédures fiscales suspend le cours de la saisie jusqu’à l’extinction de l’obligation du redevable, sous réserve des procédures de paiement direct engagées pour le recouvrement des pensions alimentaires. L’employeur informe alors le comptable public de la saisie en cours. Le comptable indique au secrétariat-greffe du tribunal la date de l’avis à tiers détenteur et celle de sa notification au redevable. La suspension de la saisie est notifiée aux créanciers par le secrétariat-greffe. Après extinction de la dette du redevable, le comptable en informe le secrétariat-greffe qui avise les créanciers de la reprise des opérations de saisie.
En l’espèce, par courrier du 6 mars 1997, le secrétariat-greffe du tribunal d’instance du 12ème arrondissement de Paris a notifié à l’huissier mandaté par la société Cofinoga la suspension de la procédure de saisie des rémunérations en raison de la notification d’un avis à tiers détenteur émis par le Trésor public de Champigny-sur-Marne pour la somme de 61 368 francs, en rappelant au créancier qu’après extinction de la dette, il sera avisé de la reprise de la procédure de saisie.
Il s’en induit que le greffe ayant procédé aux notifications imposées par la procédure et notamment à celle de l’employeur de Mme [I], tiers-saisi, n’a pu mettre en ‘uvre la saisie et opérer une quelconque retenue sur salaire au profit du saisissant en raison de l’existence d’un avis à tiers détenteur, de sorte que c’est à juste titre que le premier juge a considéré que Mme [I] n’avait pu voir la disponibilité de ses biens réduite à la demande de la société Cofinoga.
La société appelante ne justifie de la délivrance d’aucun acte postérieur visant à rendre indisponibles les biens de la débitrice au sens de l’article 1416 du code de procédure civile ni aucune signification de l’ordonnance à la personne de Mme [I].
Mme [I] a formé opposition le 21 décembre 2015 par suite du dépôt par la société Credinvest le 23 novembre 2015, d’une nouvelle requête en saisie des rémunérations auprès du tribunal d’instance de Saint-Maur-les Fossés fondée sur l’ordonnance du 30 juillet 1996.
C’est à juste titre que le premier juge a considéré que l’opposition formée le 21 décembre 2015 devait être déclarée recevable. Le jugement est confirmé sur ce point sauf à préciser que l’opposition met à néant l’ordonnance rendue le 18 mars 1996.
Sur la qualité à agir de la société Eurotitrisation et la recevabilité de l’intervention volontaire de la société Eos France
Le premier juge a constaté la qualité pour agir de la société Eurotitrisation, point qui ne fait pas l’objet de discussion à hauteur d’appel de sorte que le jugement ayant admis cette société en qualité de représentante du fonds commun de titrisation Credinvest 1 à agir aux droits de la société Cofinoga doit être confirmé.
Il est justifié que, par acte du 19 décembre 2007, la société Eurotitrisation a mandaté la société Credirec France par la suite dénommée Eos Credirec puis Eos France afin de recouvrer amiablement la créance cédée.
La société Eos France est donc recevable comme venant aux droits de la société Cofinoga.
Sur la demande en paiement
La cour constate que la société Eos France n’a formulé devant le premier juge ni à hauteur d’appel aucune demande en paiement à l’encontre de Mme [I] par suite de l’opposition formée par elle et qu’elle ne produit aucune pièce susceptible de fonder une condamnation.
Il est rappelé que l’opposition régulièrement formée, à la suite d’une mesure d’exécution, contre une ordonnance portant injonction de payer rendue exécutoire, a pour effet de saisir le tribunal de la demande du créancier et de l’ensemble du litige et affecte ainsi la force exécutoire du titre sur le fondement duquel la mesure d’exécution a été pratiquée.
Mme [I] avait quant à elle sollicité du premier juge qu’il confirme le montant des sommes arbitrées dans l’ordonnance du 18 mars 1996 avec octroi d’un délai de paiement.
A défaut de toute demande en paiement, il n’y a donc pas lieu de débouter la société Eos France, le jugement étant confirmé sur ce point.
Les dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles sont confirmées.
La société Eos France supportera les dépens d’appel.
Le surplus des demandes est rejeté.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant en dernier ressort, après débats en audience publique, par arrêt contradictoire, par décision mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement sauf à préciser que l’opposition formée par Mme [P] [I] a pour effet de mettre à néant l’ordonnance portant injonction de payer du 18 mars 1996 ;
Y ajoutant,
Reçoit la société Eos France comme venant aux droits de la société Cofinoga en son intervention volontaire ;
Condamne la société Eos France venants aux droits de la société Cofinoga aux dépens d’appel.
La greffière La présidente