13/05/2022
ARRÊT N°2022/208
N° RG 20/02637 – N° Portalis DBVI-V-B7E-NXUT
FCC/AR
Décision déférée du 20 Août 2020 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MONTAUBAN ( 18/00211)
[F]
[V] [H]
C/
SASU FIDUCIE CONSULTANTS TARN ETGARONNE ENOMEE CABINET [L]
CONFIRMATION PARTIELLE
Grosse délivrée
le 13 MAI 2022
à Me Catherine PLAINECASSAGNE VENTIMILA Me Gilles SOREL
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
4eme Chambre Section 2
***
ARRÊT DU TREIZE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX
***
APPELANT
Monsieur [V] [H]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Catherine PLAINECASSAGNE VENTIMILA, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE
INTIMEE
SASU FIDUCIE CONSULTANTS TARN ETGARONNE (anciennement dénommée Cabinet [L])
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Gilles SOREL, avocat (postulant) au barreau de TOULOUSE et par Me Cécile NAUSE, avocat (plaidant) au barreau D’AGEN
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant F. CROISILLE-CABROL, Conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
C. BRISSET, présidente
A. PIERRE-BLANCHARD, conseillère
F. CROISILLE-CABROL, conseillère
Greffier, lors des débats : A. RAVEANE
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par C. BRISSET, présidente, et par A. RAVEANE, greffière de chambre
EXPOSE DU LITIGE
M. [V] [H] a été embauché à compter du 22 juillet 2005 par la SARL cabinet [L] en qualité d’assistant comptable suivant contrat de travail à durée indéterminée à temps complet (35 heures par semaine) régi par la convention collective nationale des cabinets d’expertise comptable et des commissaires aux comptes.
A compter du 1er décembre 2016, M. [H] a bénéficié d’un congé parental à temps partiel, prévu jusqu’au 31décembre 2018 ; son temps de travail était ainsi de 28 heures hebdomadaires, il ne travaillait pas le mercredi.
En juillet 2017, la SARL cabinet [L] a rejoint le réseau de cabinets d’experts-comptables du groupe Fiducie Consultants.
En avril 2018, M. [H] a sollicité une rupture conventionnelle de son contrat de travail. Les parties n’étant pas parvenues à un accord, la procédure de rupture n’a pas abouti.
Par LRAR du 28 avril 2018, M. [H] a démissionné de ses fonctions, à effet au 1er juin suivant, en faisant état d’une dégradation de ses conditions de travail depuis le rachat du cabinet et du non paiement de ses heures supplémentaires et des congés payés. Par LRAR en réponse du 29 mai 2018, l’employeur a contesté les propos de M. [H], lui rappelant que sa charge de travail n’avait pas été augmentée et qu’aucun travail supplémentaire ne lui avait été demandé ; il a en outre considéré comme infondées les demandes en paiement du salarié.
L’employeur a établi les documents de fin de contrat au 1er juin 2018, mentionnant une retenue de 9.967,82 € au titre de la prime sur chiffre d’affaires et une retenue de 1.064,38 € au titre de frais.
M. [H] a saisi le conseil de prud’hommes de Montauban le 1er octobre 2018 aux fins notamment de paiement de la retenue sur chiffre d’affaires, de la prime sur chiffre d’affaires, de dommages et intérêts au titre de la retenue, d’une retenue sur indemnités kilométriques, de frais, de régularisations de congés payés, d’heures supplémentaires et de l’indemnité pour travail dissimulé.
En cours de procédure, la SASU Fiducie Consultants Tarn et Garonne est venue aux droits de la SARL cabinet [L].
Par jugement du 20 août 2020, le conseil de prud’hommes de Montauban a :
– dit et jugé que :
* la retenue effectuée sur le solde de tout compte au titre de la prime sur chiffre d’affaires était illégale et injustifiée,
* le montant de la retenue effectuée au titre des indemnités kilométriques était injustifié,
* les frais professionnels n’ont pas été remboursés dans la totalité par la société Fiducie Consultants Tarn et Garonne,
en conséquence,
– condamné la SASU Fiducie Consultants Tarn et Garonne à régler à M. [H] les sommes suivantes :
* 9.967,82 € brut à titre de retenue sur salaire injustifiée,
* 1.276,81 € brut à titre de prime sur chiffre d’affaires pour mai 2018,
* 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour retenue sur salaire illégale et injustifiée,
* 295,04 € au titre de la retenue injustifiée sur frais kilométriques,
* 1.094,21 € au titre de remboursements de frais professionnels,
* 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la SASU Fiducie Consultants Tarn et Garonne à délivrer à M. [H] les bulletins de salaire et les documents de fin de contrat rectifiés,
– débouté les parties de leurs autres demandes,
– condamné la SASU Fiducie Consultants Tarn et Garonne aux dépens de l’instance.
Le 29 septembre 2020, M. [H] a régulièrement relevé appel de ce jugement, énonçant dans sa déclaration les chefs critiqués du jugement.
Par conclusions responsives notifiées par voie électronique le 14 avril 2021, auxquelles il est expressément fait référence, M. [H] demande à la cour de :
– réformer partiellement le jugement,
– condamner la SASU Fiducie Consultants Tarn et Garonne à verser à M. [H] les sommes suivantes :
* 127,68 € de congés payés sur prime sur chiffre d’affaires de mai 2018,
* 3.078,28 € à titre de régularisation de congés payés 2016,
* 1.830,12 € à titre de régularisation de congés payés 2017,
* 992,86 € à titre d’heures supplémentaires 2015,
* 3.973,55 € à titre d’heures supplémentaires de janvier à novembre 2016,
* 780,93 € à titre d’heures supplémentaires de décembre 2016,
* 21.420,13 € à titre d’heures supplémentaires 2017,
* 18.169,02 € à titre d’heures supplémentaires 2018,
* 4.533,64 € de congés payés y afférents,
* 29.177,01 € à titre d’indemnité pour travail dissimulé,
Subsidiairement, à titre de régularisation de congés payés, l’entendre condamner au paiement des sommes suivantes :
* 2.948,28 € sur les congés payés du 1er juin 2015 au 31 mai 2016,
* 1.650,12 € sur les congés payés du 1er juin 2016 au 31 mai 2017,
– confirmer le jugement rendu en ce qu’il a condamné la SASU Fiducie Consultants Tarn et Garonne à payer à M. [H] les sommes suivantes :
* 9.967,82 € à titre de remboursement de retenue injustifiée,
* 1.276,81 € à titre de prime sur chiffre d’affaires pour mai 2018,
* 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour retenue sur salaire illégale et injustifiée,
* 295,04 € à titre de retenue injustifiée sur indemnités kilométriques 2016-2017,
* 1.094,21 € à titre d’indemnité kilométriques de 2018 et remboursement de frais professionnels,
* 1.000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Subsidiairement :
* 936,13 € à titre d’indemnités kilométriques de 2018 et remboursement de frais professionnels,
– l’entendre enfin condamner à lui payer la somme de 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers frais et dépens.
Par conclusions n° 1 notifiées par voie électronique le 22 février 2021, auxquelles il est expressément fait référence, la SASU Fiducie Consultants Tarn et Garonne demande à la cour de :
– débouter M. [H] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [H] de ses demandes d’indemnité compensatrice de congés payés sur prime sur chiffre d’affaires pour mai 2018, d’indemnité de congés payés pour les années 2016 et 2017, de rappels d’heures supplémentaires réalisées sur les années 2015 à 2018, d’indemnité de congés payés sur les heures supplémentaires, et d’indemnité pour travail dissimulé,
– infirmer le jugement pour le reste de ses dispositions,
et statuant à nouveau :
– condamner M. [H] au paiement d’une indemnité de 3.000 € net au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens et frais de l’instance y compris les frais d’exécution.
MOTIFS
1 – Sur la retenue de la prime :
M. [H] considère que, d’une part, la retenue de cette prime est illégale et que, d’autre part, elle ne repose sur aucun fondement.
Sur le caractère illégal, il se prévaut des dispositions des articles L. 3251-1 et L. 3251-3 du code du travail, pour soutenir que lorsque le principe de la retenue est autorisé, il est nécessairement limité à la fraction saisissable du salaire, alors que l’employeur a retenu l’équivalent de plus de 6 fois son salaire brut.
Sur le caractère injustifié, il invoque le paiement de cette prime mensuelle depuis juillet 2006 et expose que les éléments de calcul et les conditions de versement sont déterminés et précis.
La société Fiducie Consultants Tarn et Garonne rétorque qu’elle ignorait les conditions de rémunération des collaborateurs dans la mesure où Mme [I], ancienne gérante du cabinet, a continué à intervenir dans la gestion du personnel dans le cadre de son accompagnement. Elle invoque l’absence de contractualisation de cette prime, des éléments de calculs et des conditions de versement, de sorte qu’il revient au salarié de démontrer que le versement de cette prime résulte d’un usage.
Sur ce,
Le cabinet Fiducie Consultants Tarn et Garonne a pratiqué une retenue sur le dernier bulletin de salaire de M. [H] de 9.967,82 € motif pris du fait qu’il avait perçu des avances indues sur la rémunération variable de février à mai 2018.
Il est constant que la prime litigieuse n’a pas de fondement contractuel.
Il ressort de l’attestation établie par M. [L], ancien gérant du cabinet [L], qu’il a instauré une prime mensuelle au bénéfice des collaborateurs comptables depuis 1990. Sur le mode de calcul de cette prime, il explique que, sur le chiffre d’affaires HT du mois en cours facturé aux clients, déclaré chaque mois sur le cahier de facturation auquel était joint le tableau de facturation, était appliqué le coefficient 3,30 pour calculer la prime du mois suivant, sans qu’il ne soit tenu compte de l’encaissement réalisé, ni de l’état d’avancement des dossiers. Le fait que M. [L] ait rédigé son attestation en 2018 dans le cadre du présent litige, 6 ans après avoir cessé d’intervenir dans la gestion du cabinet, n’est pas de nature à priver cette attestation de sa valeur probante.
M. [H] indique qu’à compter du mois d’octobre 2013, suite à l’embauche de Mme [O], attachée de manière exclusive à M. [H], il a été décidé que la charge salariale de celle-ci serait déduite de la prime sur chiffre d’affaires payée à l’appelant. Ce nouveau calcul a été décidé après le départ de M. [L].
Il ressort des bulletins de paie de janvier 2017 à mai 2018 produits que cette prime sur chiffre d’affaires était payée mensuellement à M. [H].
Cette prime sur chiffre d’affaires était générale (versée aux collaborateurs comptables), fixe (dans son mode de calcul) et constante (versée mensuellement) ; il s’agit donc d’un usage.
Contrairement à ses dires, la société Fiducie Consultants Tarn et Garonne, lors du rachat du cabinet comptable, avait connaissance des conditions dans lesquelles était rémunéré M. [H]. En effet, à compter du 1er juillet 2017, l’ensemble des bulletins de salaire des collaborateurs étaient établis par le groupe Fiducie et, aux termes d’un courrier adressé à M. [H] le 29 mai 2018, la société lui a indiqué que ‘depuis le rachat du cabinet [L], nous avons constaté un mode de rémunération basé sur un fixe et des variables calculées sur le chiffre d’affaires’. Dans ces conditions, et nonobstant l’intervention de Mme [I] dans la gestion du cabinet après le 1er juillet 2017, la société Fiducie Consultants Tarn et Garonne était informée de l’existence de cette prime sur chiffre d’affaires. Cet usage n’a fait l’objet d’aucune dénonciation par la société Fiducie Consultants Tarn et Garonne.
La société s’oppose encore au paiement de cette prime car le chiffre d’affaires facturé (le client est facturé pour les réalisations à venir) ne correspondrait pas immédiatement à un travail effectif, mais à un travail réalisé progressivement au cours de l’année. Or, les modalités de calcul et les conditions de versement de cette prime, telles que définies par M. [L], ne prennent pas en compte l’encaissement réalisé, ni l’état d’avancement des dossiers, et la société Fiducie Consultants Tarn et Garonne ne démontre pas d’autres conditions que celle liée au chiffre d’affaires HT du mois en cours facturé aux clients.
En conséquence, cette prime d’un montant de 9.967,82 € , retenue de façon injustifiée, est due à M. [H] et la société Fiducie Consultants Tarn et Garonne, par confirmation du jugement déféré, sera condamnée au paiement de cette somme.
La société Fiducie Consultants Tarn et Garonne a pratiqué une retenue d’un montant de 9.967,82 € qui correspond à plus de 6 fois le salaire de base de M. [H] qui est de 1.882,19 € brut. Le dernier bulletin de paie du mois de juin 2018 fait apparaître cette retenue et révèle un solde négatif de 2.023,74 €. La société a opéré cette retenue au mépris des règles applicables en matière de compensation, le montant ne respectant pas les limites fixées par l’article L.3251-3 du code du travail.
Contrairement à ce qu’affirme la société, le salarié a subi un préjudice financier du fait de cette retenue injustifiée puisqu’il a été contraint de retirer son épargne salariale de manière anticipée le 18 juin 2018 à hauteur de 9.665,78 € nets, la société ne démontrant pas qu’il aurait débloqué cette épargne en tout état de cause, indépendamment de cette retenue. Il lui sera alloué la somme de 2.000 € à titre de dommages et intérêts, par confirmation du jugement entrepris.
2 – Sur la demande de rappel de salaires au titre de la prime du mois de mai 2018 :
Il ressort du bulletin de paie du mois de juin 2018 que M. [H] n’a pas perçu la prime sur chiffre d’affaires, étant rappelé que cette prime est calculée sur le mois en cours, en l’espèce le mois de mai, et versée le mois suivant.
La cour a jugé que M. [H] était bien fondé à solliciter le paiement d’une prime sur chiffre d’affaires.
Au mois de mai 2018, le chiffre d’affaires HT facturé par M. [H] à son portefeuille clients s’élevait à 18.675 €. Conformément aux modalités de calcul précitées, soit après avoir divisé ce montant par le coefficient 3,30 et soustrait les salaires de base de Mme [O] et de M. [H], il lui est dû la somme de 1.276,81 € au titre de la prime de mai 2018.
Le jugement déféré sera par conséquent confirmé en ce qu’il a condamné la société Fiducie Consultants Tarn et Garonne à payer à M. [H] la somme de 1.276,81 € au titre de la prime du mois de mai 2018.
3 – Sur la demande de rappel de salaires au titre des congés payés :
Aux termes de l’article L. 3141-24 I du code du travail : ‘Le congé payé annuel ouvre droit à une indemnité égale au dixième de la rémunération totale brute perçue par le salarié au cours de l’année de référence’.
L’article L. 3141-24 II du même code ajoute que cette indemnité de congés payés ne peut toutefois être inférieure au montant de la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler (méthode dite de maintien de salaire).
Il est constant que, pour être comprises dans l’assiette de rémunération servant au calcul de l’indemnité de congés payés, les primes et la rémunération variable :
– ne doivent pas faire double emploi avec les congés payés et doivent être impactées par la prise du congé annuel,
– ne doivent pas être allouées globalement pour l’année entière, périodes de travail et de congés confondues,
– doivent être liées directement au travail exécuté personnellement par le salarié.
Sur les congés payés afférents à la prime du mois de mai 2018 :
Le salarié sollicite le paiement des congés payés afférents à la prime sur chiffre d’affaires du mois de mai 2018 au motif qu’elle constitue un élément variable de la rémunération qui a par conséquent le caractère de salaire.
Cette prime est calculée, tel que précédemment rappelé, sur le chiffre d’affaires HT du mois en cours facturé par M. [H] aux clients de son portefeuille. Ainsi, cette prime est liée directement au travail exécuté personnellement par le salarié.
En revanche, il ressort des bulletins de paie produits que cette prime était payée à M. [H] chaque mois, tout au long de l’année, y compris durant les périodes de congés payés de sorte qu’elle n’était pas affectée par les absences du salarié. Il n’allègue pas, par ailleurs, que le montant payé de cette prime était moindre lorsqu’il n’était pas présent dans l’entreprise.
Par conséquent, cette prime, qui n’était pas affectée par la prise des congés, n’avait pas à être intégrée à l’assiette de calcul de l’indemnité de congés payés au titre de la période sollicitée.
Dans ces conditions, par confirmation du jugement déféré, M. [H] sera débouté de sa demande de ce chef.
Sur les congés payés 2016 et 2017 :
M. [H] sollicite à titre principal le paiement d’un reliquat au titre de ses congés payés pour les années 2016 et 2017 motif pris que ces derniers ont été calculés sur la base de sa seule rémunération fixe, les primes perçues ayant été exclues de l’assiette de calcul des congés payés, et que la méthode du 1/10e lui est plus favorable que la méthode du maintien de salaire.
Il renvoie à son tableau en pièce n° 8, relatif aux congés payés sur les salaires payés du 1er juin 2014 au 31 mai 2015 et aux congés payés relatifs aux salaires payés du 1er juin 2015 au 31 mai 2016. Il réclame à ce titre des rappels de congés payés de 3.078,28 € et 1.830,12 €. Néanmoins, dans l’assiette de son calcul M. [H] intègre non seulement son salaire de base mais aussi toutes ses primes (primes sur chiffre d’affaires et primes exceptionnelles).
Néanmoins, M. [H] ne s’explique pas sur les modalités de calcul et les conditions de versement des primes dites exceptionnelles dont les montants diffèrent en fonction des mois de sorte que la cour ne peut pas caractériser en quoi elles étaient affectées par la prise de congés. Les primes exceptionnelles sont donc exclues de l’assiette de calcul des congés payés.
Sur la prime calculée sur le chiffre d’affaires, la cour a jugé qu’elle était exclue de l’assiette de calcul des congés payés ; M. [H] la percevait chaque mois, tout au long de l’année, y compris durant les périodes de congés.
Ainsi, le tableau produit par M. [H] n’est pas pertinent car il inclut la totalité des rémunérations qu’il a perçues sans distinguer celles qui ne sont pas affectées par la prise de congés payés.
Or, M. [H] ne produisant pas ses bulletins de paie de juin 2014 à mai 2016 – les bulletins de paie produits ne l’étant qu’à compter de janvier 2017 – la cour n’est pas en mesure de vérifier le montant des primes à déduire, et de comparer les deux méthodes de calcul.
Enfin, la circonstance tirée du fait que l’employeur a régularisé le montant des indemnités de congés payés de M. [H], pour la période du 1er juin 2017 au 31 mai 2018, et de Mme [O], pour la période du 1er juin 2015 au 31 mai 2016, est inopérante en ce que la cour ignore les motifs et les circonstances de ces régularisations.
Sur les congés payés du 1er juin 2015 au 31 mai 2017 :
M. [H] sollicite à titre subsidiaire un rappel de congés payés en disant exclure de l’assiette de calcul les primes exceptionnelles, sur la base de la méthode du 1/10e.
Il renvoie à son tableau en pièce n° 23, relatif aux congés payés sur les salaires payés du 1er juin 2014 au 31 mai 2015 et aux congés payés relatifs aux salaires payés du 1er juin 2015 au 31 mai 2016. Il réclame à ce titre des rappels de congés payés de 2.948,28 € et 1.650,12 €. Néanmoins, dans l’assiette de son calcul M. [H] ne retire que les primes exceptionnelles et il maintient ses primes sur chiffre d’affaires, or la cour a jugé qu’elles devaient être exclues, et, en l’absence de bulletins de paie, elle ne peut pas procéder à une vérification de calcul.
En conséquence, par confirmation du jugement déféré, M. [H] sera débouté de ses demandes de ce chef.
4 – Sur les frais et indemnités kilométriques :
Il ressort du bulletin de paie de juin 2018 que la société a retenu la somme de 1.064,38 € au titre d’une régularisation des frais kilométriques des années 2016, 2017 et 2018.
Sur les indemnités kilométriques au titre des années 2016 et 2017, si M. [H] reconnaît un solde en faveur de la société, il conteste toutefois le montant retenu. M. [H] produit un tableau récapitulatif, lequel indique le nombre de kilomètres parcourus et l’indemnité perçue. Il ressort de ce tableau que M. [H] était redevable à l’égard de la société de la somme de 769,32 €. Il sollicite à ce titre le paiement de la somme de 295,04 €, soit la différence entre la somme retenue au titre de la régularisation et celle qu’il doit à la société Fiducie Consultants Tarn et Garonne (1.064,38 – 769,32). La société ne s’explique pas sur ce point. La somme de 295,04 € retenue par le conseil de prud’hommes sera confirmée.
Sur les indemnités kilométriques au titre de l’année 2018, M. [H] réclame le paiement de la somme de 1.032,31 € correspondant à la différence entre les indemnités kilométriques dues et celles qu’il a perçues.
La société conteste le chiffrage effectué par le salarié au motif que le décompte de frais de M. [H] présente une double facturation d’un seul et même déplacement, à savoir celui à destination de St Lary.
Il ressort en effet des frais de mission déclarés par M. [H] qu’il a comptabilisé à deux reprises, les 30 avril et 1er mai 2018, les kilomètres parcourus pour son déplacement à St Lary (2 x 494 km).
M. [H] a déclaré au titre du mois de mai 2018, 1.482 kilomètres parcourus. Suite à la double déclaration effectuée par M. [H] pour le même déplacement, il doit être déduit de ces kilomètres, 494 kilomètres. Si la société reconnaît être redevable, une fois cette double facturation déduite, de la somme de 419,83 €, elle reste également redevable des frais kilométriques pour la période de janvier à avril 2018. M. [H] a parcouru 8.964 kilomètres de janvier à mai 2018 et a perçu une indemnité kilométrique de 3.238,25 € alors qu’il aurait dû percevoir la somme de 4.112,48 € (calculée ainsi selon le barème 8.964 x 0,2 +1.244), soit un solde dû de 874,23 €.
A titre subsidiaire, au cas où la cour ne retiendrait que 988 km au mois de mai 2018 au lieu de 1.482, ce qui est le cas, M. [H] demande en sus le remboursement de ses frais de parking et de péage de 61,90 €, somme dont la société se reconnaît redevable.
La société reste donc redevable à l’égard de M. [H] de la somme de 874,23 € + 61,90 € = 936,13 €, le jugement étant infirmé sur le quantum retenu de 1.094,21 €.
5 – Sur la demande en paiement au titre des heures supplémentaires et l’indemnité pour travail dissimulé :
Aux termes de l’article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
En l’espèce, M. [H] soutient avoir effectué sur la période du 1er juin 2015 au 31 mai 2018, des heures supplémentaires dont il sollicite le paiement. Tel que rappelé dans l’exposé du litige, M. [H] a bénéficié à compter du 1er décembre 2016 d’un congé parental, il travaillait donc 28 heures par semaine, le lundi, mardi, jeudi et vendredi. A ce titre, les heures revendiquées à compter du 1er décembre 2016 constituent des heures complémentaires et non, tel que mentionné par le salarié dans son dispositif, des heures supplémentaires.
Au soutien de sa demande, M. [H] produit :
– ses agendas de juin 2015 à mai 2018, détaillant pour chaque jour de la semaine les tâches effectuées et le nombre d’heures de travail réalisées,
– un décompte hebdomadaire du 1er juin 2015 au 31 mai 2018, lequel indique le nombre d’heures de travail effectuées chaque semaine et les heures au-delà de 39 heures par semaine jusqu’en novembre 2016 (les 4 heures comprises entre la 36e et la 39e heure étant récupérées en RTT) et les heures au-delà de 28 heures par semaine à compter de décembre 2016, tenant compte des périodes d’absence dans l’entreprise (congés payés, RTT, jours fériés…),
– des courriels et récapitulatifs d’envoi de mails, notamment envoyés par M. [H] le mercredi,
– des récépissés de dépôt de déclarations fiscales et sociales, lesquelles ont été effectuées un mercredi au cours de l’année 2017,
– des témoignages de gérants d’entreprise qui listent les jours précis travaillés par le salarié dans leurs sociétés.
La cour considère que M. [H] fournit des éléments suffisamment précis ce qui met en mesure l’employeur d’y répondre, et il appartient à ce dernier de justifier par des éléments objectifs des horaires accomplis par son salarié, étant observé que les bulletins de paie produits ne mentionnent le paiement d’aucune heure supplémentaire.
L’employeur produit les fiches mensuelles de saisie des temps de travail du salarié pour les mois de mars, mai, juillet, septembre et décembre 2017, et de janvier à avril 2018. Ces fiches ont été complétées par le salarié et indiquent notamment les missions effectuées et le temps de travail journalier réalisé.
M. [H] critique la pertinence de ces fiches mensuelles de saisie en ce que, conformément à une note de service, il ne pouvait saisir plus de 7 heures de travail journalier. Il produit la note de service en question ainsi que les témoignages de Mesdames [X], [P] et [T].
Cette note de service est datée de 2012 et mentionne ‘le temps (maximum 8h)’, sans autre précision. Cette note ne permet pas de corroborer les dires du salarié en l’absence d’indications supplémentaires sur ce point et la date mentionnée sur celle-ci concerne l’organisation du cabinet lorsque celui-ci était dirigé par Mme [I], et non par la société Fiducie Consultants Tarn et Garonne. Les attestations produites ne permettent pas davantage de corroborer les dires de M. [H] puisqu’aucune date n’y est mentionnée.
En tout état de cause, aux termes des fiches mensuelles de saisie produites par la société, M. [H] déclarait sur certains jours, un horaire journalier supérieur à 7 heures, de sorte que les critiques émises par le salarié sur la pertinence de ces pièces sont inopérantes.
La cour considère donc que la société Fiducie Consultants Tarn et Garonne justifie des heures effectivement travaillées par M. [H] qu’il a lui-même déclarées aux termes des fiches mensuelles de saisie. Toutefois, les fiches de saisie produites ne couvrent pas la totalité de la période visée par M. [H] aux termes de sa demande en paiement d’heures supplémentaires et complémentaires.
Dans ces conditions, la cour fera partiellement droit à la demande de M. [H] en paiement d’heures supplémentaires et complémentaires pour les périodes dont la société Fiducie Consultants Tarn et Garonne ne justifie pas, par la production de pièces pertinentes, du temps de travail réalisé par le salarié.
M. [H] peut prétendre au paiement des sommes suivantes, calculées en fonction du taux horaire de base et des majorations (10%, 25%, 50%) à appliquer compte tenu des heures effectuées :
– 2.591,12 € correspondant aux heures supplémentaires effectuées du 1er juin 2015 au 30 novembre 2016 outre 259,11 € au titre des congés payés afférents,
– 6.838,50 € correspondant aux heures complémentaires effectuées de décembre 2016 à février 2017, avril, juin, août, octobre et novembre 2017 et mai 2018 outre 683,85 € au titre des congés payés afférents.
Par conséquent, la société Fiducie Consultants Tarn et Garonne sera condamnée au paiement de ces sommes, le jugement déféré est infirmé.
En revanche, M. [H] sera débouté, par confirmation du jugement déféré, de sa demande en paiement de l’indemnité pour travail dissimulé dans la mesure où il n’est pas démontré que l’omission du paiement des heures supplémentaires ou complémentaires revendiquées par le salarié revêt un caractère intentionnel.
6 – Sur le surplus des demandes :
La disposition du jugement relative à la délivrance des bulletins de paie et documents de fin de contrat rectifiés sera confirmée.
La société Fiducie Consultants Tarn et Garonne, qui succombe principalement, supportera les entiers dépens de première instance et d’appel, ses frais irrépétibles et ceux exposés par le salarié soit 1.000 € en première instance et 2.000 € en cause d’appel.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement déféré excepté sur le quantum des frais professionnels de 1.094,21 € allouées à M. [H] au titre de l’année 2018 et en ce qu’il l’a débouté de sa demande en paiement de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires et complémentaires,
L’infirme sur ces points,
Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées et y ajoutant,
Condamne la SASU Fiducie Consultants Tarn et Garonne à payer à M. [V] [H] les sommes suivantes :
– 936,13 € au titre des frais professionnels (indemnités kilométriques) 2018,
– 2.591,12 € brut correspondant aux heures supplémentaires effectuées du 1er juin 2015 au 30 novembre 2016 outre 259,11 € brut au titre des congés payés afférents,
– 6.838,50 € brut correspondant aux heures complémentaires effectuées de décembre 2016 à février 2017, avril, juin, août, octobre et novembre 2017 et mai 2018 outre 683,85 € brut au titre des congés payés afférents,
– 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en appel,
Condamne la SASU Fiducie Consultants Tarn et Garonne aux dépens d’appel.
Le présent arrêt a été signé par Catherine BRISSET, présidente, et par Arielle RAVEANE, greffière.
LA GREFFIÈRE,LA PRÉSIDENTE,
Arielle RAVEANECatherine BRISSET
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