Retenues sur salaire : 13 avril 2022 Cour de cassation Pourvoi n° 19-24.920

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Retenues sur salaire : 13 avril 2022 Cour de cassation Pourvoi n° 19-24.920

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 avril 2022

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 491 F-D

Pourvois n°
E 19-24.920
Y 20-16.224 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 13 AVRIL 2022

1°/ La société Holding mondial protection, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ la société Mondial protection France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de la société Holding mondial protection,

ont formé respectivement les pourvois n° E 19-24.920 et Y 20-16.224 contre deux arrêts rendus les 27 mars et 25 septembre 2019 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 4), dans les litiges les opposant à M. [D] [Z], domicilié [Adresse 3], défendeur à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation identiques annexés au présent arrêt.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat des sociétés Mondial protection France et Holding mondial protection, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [Z], après débats en l’audience publique du 2 mars 2022 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, Mme Monge, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° E 19-24.920 et Y 20-16.224 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les attaqués (Paris, 27 mars 2019 et 25 septembre 2019), M. [Z] a été engagé le 23 juillet 2002 par la société SNGST en qualité d’agent de sécurité cynophile. Il était affecté à la surveillance de locaux.

3. Le 2 novembre 2011, à la suite de la perte du marché par la société SNGST, le contrat de travail a été transféré à la société Groupe Mondial protection, aux droits de laquelle est venue la société Holding mondial protection, aux droits de laquelle vient la société Mondial protection France, en raison d’un apport partiel d’actifs soumis au régime des scissions intervenu postérieurement à l’arrêt rendu le 25 septembre 2019.

4. Le 25 juillet 2013, le salarié a saisi la juridiction prud’homale afin d’obtenir le remboursement des sommes retenues par l’employeur sur son salaire et a réclamé le paiement d’heures supplémentaires effectuées depuis le 2 novembre 2011.

5. Par courrier du 28 novembre 2014, le salarié a informé l’employeur de sa décision de prendre sa retraite.

6. Dans un nouveau courrier daté du 3 mars 2015, adressé après son départ de l’entreprise le 31 janvier 2015, le salarié a indiqué que sa décision de partir en retraite était en lien avec plusieurs manquements de l’employeur.

7. Il a ajouté à ses prétentions des demandes tendant à ce que son départ en retraite soit requalifié en une prise d’acte de rupture du contrat de travail produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, que lui soient allouées différentes sommes afférentes à la rupture, des dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ainsi qu’une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

8. Les sociétés Holding mondial protection et Mondial protection France (les sociétés) se sont pourvues en cassation.

Recevabilité des pourvois, en ce qu’ils sont dirigés contre l’arrêt rendu le 27 mars 2019, examinée d’office après avis donné aux parties en application de l’article 1015 du code de procédure civile

9. En application de l’article 537 du code de procédure civile, la décision par laquelle une juridiction ordonne la réouverture des débats est une mesure d’administration judiciaire non susceptible de recours.

10. Par arrêt du 27 mars 2019, la cour d’appel de Paris s’est bornée à ordonner la réouverture des débats en invitant le salarié à régulariser la procédure à l’égard de la société intimée ainsi qu’à procéder à une révision de ses écritures et pièces puis a ordonné le renvoi de l’affaire à une audience ultérieure.

11. Les pourvois, en ce qu’ils sont dirigés contre cet arrêt sont donc irrecevables.

Examen des moyens en ce qu’ils sont dirigés contre l’arrêt rendu le 25 septembre 2019

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

12. Les sociétés font grief à l’arrêt de condamner la société Holding mondial protection à verser au salarié la somme de 443,52 euros en remboursement de la retenue sur salaire pratiquée aux mois de janvier et février 2012, alors « que le juge ne peut modifier les termes du litige tels qu’ils résultent des prétentions des parties ; qu’en l’espèce, dans ses conclusions d’appel dont l’arrêt constate qu’elles ont été oralement soutenues, M. [Z] sollicitait, à titre de remboursement de la somme avancée au titre de la formation effectuée pour bénéficier de la carte professionnelle d’agent cynophile, la somme de 291,46 euros ; qu’en affirmant qu’il sollicitait à ce titre la somme de 443,52 euros et en lui allouant cette somme, la cour d’appel a modifié les termes du litige en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 5 du code de procédure civile :

13. Aux termes de ce texte, le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.

14. Pour condamner l’employeur à verser au salarié une somme de 443,52 euros en remboursement d’une retenue sur salaire pratiquée aux mois de janvier et février 2012, l’arrêt retient que l’employeur a procédé à deux retenues sur salaire en indiquant « remboursement VAE 1180,80 » « 1ère échéance/5 » (en janvier 2012) puis « 2ème échéance/5 » (en février 2012) avant de régler une somme supplémentaire de 152,06 euros sous l’intitulé « remboursement VAE de la DIFF : 347,47 euros – 500 euros » (en mars 2012).

15. En statuant ainsi, alors qu’il ressortait de ses constatations que le salarié réclamait une somme de 291,46 euros et qu’il soutenait que l’employeur avait pratiqué deux retenues sur salaire en janvier et février 2012, pour un total de 443,52 euros puis qu’il lui avait ensuite remboursé une somme de 152,06 euros au mois de mars 2012, la cour d’appel, qui a alloué plus qu’il n’était demandé, a violé le texte susvisé.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

16. Les sociétés font grief à l’arrêt de condamner la société Holding mondial protection à verser au salarié une certaine somme à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires outre congés payés afférents, une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’à supporter les dépens, alors « que l’article L. 3122-2 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, n’exige pas de l’accord organisant la répartition de la durée du travail sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l’année qu’il fixe un programme indicatif ; qu’en l’espèce, l’employeur soulignait que l’accord collectif modificatif conclu le 4 juillet 2011 -applicable lors du transfert de M. [Z] dans l’entreprise intervenu le 2 novembre 2011-, prévoyait un découpage de l’année en 4 trimestres civils avec des périodes de travail pouvant fluctuer entre une limite inférieure (24 h) et une limite haute (48 h par semaine) (articles 4.1 à 4.4) et précisait en son article 4.7 que les heures supplémentaires étaient les heures de travail effectif effectuées au-delà de 456,75 h par trimestre et celles dépassant les limites hautes hebdomadaires fixées par l’accord ; qu’en se bornant, pour accorder au salarié un rappel d’heures supplémentaires sur la période du 3 novembre 2011 au 31 janvier 2015 sur la base d’un décompte du temps de travail sur la semaine, que l’accord d’entreprise sur l’aménagement et la réduction du temps de travail du 30 mars 2001 prévoyant la mise en oeuvre d’une modulation du temps de travail dans le cadre de l’année civile, indiquait qu’au jour de l’accord, la période de forte activité était située l’été et en fin d’année, sans fixer de programme indicatif, qu’il fixait des règles d’élaboration d’un tel programme, et que la société Holding Mondial protection ne justifiait d’aucun programme indicatif de la répartition de la durée du travail établi et communiqué aux salariés de l’entreprise, sans statuer au regard de l’accord du 4 juillet 2011 qui ne comportait pas une telle exigence, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé. »

Recevabilité du moyen

17. Le salarié conteste la recevabilité du moyen. Il soutient qu’il est contraire à la position adoptée par l’employeur devant les juges du fond.

18. Cependant l’employeur se prévalait également de l’accord d’établissement sur l’organisation et l’aménagement du temps de travail du 4 juillet 2011 en soutenant qu’il s’appliquait à la relation de travail.

19. Le moyen, qui n’est pas contraire à la position soutenue devant les juges du fond, est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

 


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