COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80C
17e chambre
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 12 AVRIL 2023
N° RG 21/01378
N° Portalis DBV3-V-B7F-UPVT
AFFAIRE :
Société PCC.IDF
C/
[N] [P]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 mars 2021 par le Conseil de Prud’hommes Formation paritaire de MONTMORENCY
Section : I
N° RG : F17/00707
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Sami LANDOULSI
Me Valérie LANES
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DOUZE AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Société PCC.IDF
N° SIRET : 507 828 010
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Sami LANDOULSI, Constitué, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 136 et Me Aïcha NADER LARBI, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0450
APPELANTE
****************
Monsieur [N] [P]
né le 11 juillet 1967 à [Localité 5] (Maroc)
de nationalité française
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Valérie LANES de l’AARPI Cabinet Lanes & CITTADINI, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire: C2185
INTIME
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 10 février 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Laurent BABY, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Aurélie PRACHE, Président,
Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller,
Monsieur Laurent BABY, Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Dorothée MARCINEK
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
M. [P] a été engagé en qualité de chauffagiste, par contrat de travail à durée indéterminée à temps complet, à compter du 9 mars 2015, par la société PCC.IDF.
Cette société, spécialisée dans les travaux d’installation d’eau et de gaz en tous locaux, applique la convention collective nationale du bâtiment. Son effectif était, au jour de la rupture, de plus de 10 salariés.
Le salarié, qui n’a pas été convoqué à un entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement a été licencié par courriel du 30 novembre 2015 dans les termes suivants (sic) :
« Vous êtes embauché auprès de notre société, en qualité de chauffagiste depuis le 09/03/2015 mais vous n’êtes pas chauffagiste vous êtes soudeur.
Cependant, nous avons eu un chantier, sur lequel vous avez travaillé en qualité de soudeur, mais depuis fin septembre nous n’avons eu aucun autre chantier afin de vous fournir le poste de soudeur.
J’ai vous ai donné pour faire des trous avec marteau piqueur vous avez fait maladie.
Nous vous avons proposé plusieurs postes de travail et vous les avez tous refusés.
Nous vous avons également indiqué à plusieurs reprises que nous ne pourrions pas avoir un chantier qui pourrait assurer votre poste de travail.
Nous n’avons toujours pas la possibilité de vous fournir le travail de soudeur.
En conséquence, nous sommes dans l’obligation de vous licencier, car votre qualification ne concerne pas l’activité de notre société.
Veuillez-vous présenter au siège de la société, le 2 décembre 2015, à 18 heures, afin de récupérer votre certificat de travail, votre paye et le solde de tout compte ».
Le 13 juin 2016, M. [P] a saisi le conseil de prud’hommes de Montmorency aux fins de requalification de son licenciement en licenciement nul, en tout état de cause, dépourvu de cause réelle et sérieuse, et en paiement d’un rappel de salaire du mois de novembre 2015 ainsi que de diverses sommes de nature indemnitaire.
Une ordonnance de radiation a été prononcée le 12 septembre 2017 pour défaut de diligences des parties et l’affaire a été réinscrite au rôle le 22 septembre 2017.
Par jugement du 30 mars 2021, le conseil de prud’hommes de Montmorency (section industrie) a :
– dit que le licenciement de M. [P] est nul,
– condamné la société PCC.IDF à payer à M. [P] les sommes suivantes :
. 380,94 euros à titre de rappel de salaire pour la retenue opérée sur le bulletin de salaire de novembre 2017,
. 38,09 euros au titre des congés payés afférents,
. 1 650 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,
. 165 euros au titre des congés payés afférents,
. 9 900 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,
. 1 650 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions légales en matière de visites médicales,
. 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non remise d’une attestation Pôle emploi conforme,
. 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– ordonné à la société PCC.IDF de remettre à M. [P] un certificat de travail, une attestation Pôle Emploi et un bulletin de salaire récapitulatif, conformes, sous astreinte de 50 euros par jour de retard pour l’ensemble des documents à compter de la notification du jugement,
– ordonné l’exécution provisoire sur le fondement de l’article 515 du code de procédure civile,
– dit que les sommes dues porteront intérêt au taux légal à compter de la date de réception par la société PCC.IDF de sa première convocation devant le Conseil de prud’hommes pour les créances salariales et à compter de la date de mise à disposition au greffe du jugement pour les créances indemnitaires,
– ordonné la capitalisation des intérêts,
– débouté M. [P] du surplus de ses demandes,
– condamné la société PCC.IDF aux entiers dépens.
Par déclaration adressée au greffe le 9 mai 2021, la société PCC.IDF a interjeté appel de ce jugement.
Une ordonnance de clôture a été prononcée le 31 janvier 2023.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 25 janvier 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles la société PCC.IDF demande à la cour de :
– dire et juger la société PCC IDF bien fondée en son appel,
– infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
– débouter M. [P] de l’intégralité de ses demandes,
– condamner M. [P] aux entiers dépens.
Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 27 janvier 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles M. [P] demande à la cour de :
– dire et juger la société PCC.IDF mal-fondée en son appel et l’en débouter intégralement,
– dire et juger M. [P] bien fondé en son appel incident,
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit nul le licenciement sur le fondement de l’article L. 1132-4 du code du travail,
et, y ajoutant,
– dire et juger le licenciement, intervenu en violation des dispositions de la convention n° 158 de l’OIT et des droits de la défense du salarié, principe fondamental, nul,
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société PCC.IDF à payer à M. [P] les sommes suivantes :
. 380,94 euros à titre de rappel de salaire correspondant à la retenue injustifiée opérée sur le bulletin de salaire du mois de novembre 2015 (et non novembre 2017),
. 38,09 euros au titre des congés payés afférents,
. 1 650 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,
. 165 euros au titre des congés payés afférents,
. 1 650 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions légales en matière de visites médicales,
. 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non remise d’une attestation Pôle Emploi conforme,
. 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– confirmer, dans son principe, le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société PCC.IDF à lui payer des dommages et intérêts pour licenciement nul, sauf à porter le montant des dommages et intérêts pour licenciement nul à la somme de 20 000 euros,
subsidiairement sur ce chef de demande, dans l’hypothèse où la cour ne devait pas retenir la nullité de son licenciement,
– dire et juger le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
– condamner la société PCC.IDF à lui payer la somme de 20 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a débouté de ses demandes d’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement et de dommages et intérêts pour paiement tardif des congés payés,
et, statuant à nouveau de ces chefs,
– condamner la société PCC.IDF à lui payer la somme de 1 650 euros à titre d’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement.
– condamner la société PCC.IDF à lui payer la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour paiement tardif des congés payés,
et, y ajoutant,
– ordonner la remise d’un certificat de travail, d’une attestation Pôle Emploi et d’un bulletin de salaire récapitulatif conformes à l’arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter de la signification de l’arrêt à intervenir, la cour se réservant le droit de liquider l’astreinte,
– condamner la société PCC.IDF à lui payer la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,
– condamner la société PCC.IDF aux entiers dépens, lesquels comprendront, outre le droit de plaidoirie, l’intégralité des éventuels frais de signification et d’exécution qu’il pourrait avoir à engager,
– dire que les intérêts courront à compter du 13 juin 2016, date de saisine du conseil de prud’hommes,
– ordonner la capitalisation des intérêts par application de l’article 1343-2 du code civil.
MOTIFS
Sur la demande de rappel de salaire
L’employeur expose que la retenue sur salaire opérée sur le bulletin de salaire du salarié du mois de novembre 2015 résulte de ses absences injustifiées.
En réplique, le salarié conteste cette version et explique qu’il a été privé d’une partie de son salaire du mois de novembre 2015 en raison de ce qu’aux termes de l’attestation Pôle emploi, il lui est imputé un préavis du 21 au 30 novembre 2015 alors qu’il a été licencié le 30 novembre 2015.
***
Il revient à l’employeur, débiteur de l’obligation de payer le salaire, d’établir les raisons qui ont produit l’extinction de son obligation.
En l’espèce, le bulletin de paie du salarié du mois de novembre 2015 montre que lui ont été retenues 35 heures de travail valorisées à 380,94 euros pour une « absence ».
L’absence du salarié n’est toutefois pas établie par l’employeur qui se contente de procéder par voie d’affirmation sans produire aucun élément sur ce point.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a condamné l’employeur à payer au salarié un rappel de salaire de 380,94 euros outre 38,09 euros au titre des congés payés afférents.
Sur la nullité du licenciement et ses conséquences
L’employeur affirme que le salarié n’a pas été licencié en raison de son état de santé, mais en raison d’absences injustifiées et de son refus d’accepter les postes de travail qui lui ont été proposés, ce qui a désorganisé l’entreprise.
Le salarié invoque deux moyens au soutien de sa demande de nullité de son licenciement : celui selon lequel il a été licencié en raison de son arrêt maladie, ce qui est discriminatoire, et celui selon lequel il a été licencié en violation des dispositions de la convention n°158 de l’OIT dès lors qu’il a fait l’objet d’un licenciement sans être convoqué à un entretien préalable.
***
Il ressort de l’article L. 1132-1 du code du travail qu’aucun salarié ne peut être licencié en raison de son état de santé.
L’article L. 1132-4 dispose que toute disposition ou tout acte pris à l’égard d’un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre est nul.
En l’état du droit positif à la date du licenciement litigieux – 30 novembre 2015 – date à laquelle n’était pas encore entré en vigueur l’article L. 1235-3-1 du code du travail, le salarié dont le licenciement est nul qui ne demande pas sa réintégration a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure à six mois de salaire.
En l’espèce, la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige mentionne : « J’ai vous ai donné pour faire des trous avec marteau piqueur vous avez fait maladie. ».
Bien qu’aucun avis d’arrêt de travail pour maladie ne soit produit, le salarié établit qu’il a bien été placé en arrêt de travail entre le 10 octobre 2015 et le 1er novembre 2015 comme le montre l’attestation de paiement des indemnités journalières de l’assurance maladie qu’il produit en pièce 17. Il établit aussi que la caisse primaire d’assurance maladie lui a adressé, le 27 octobre 2015, une lettre ayant pour objet « accident du 9 octobre 2015 » par laquelle elle lui écrit « j’ai eu connaissance de l’accident dont vous avez été victime et qui pourrait être considéré comme un accident du travail. Il appartenait à l’employeur de procéder à la déclaration de tout accident dont il a eu connaissance dans les 48 heures. Or, à ce jour, la déclaration n’est toujours pas parvenue à notre organisme (‘) ». En dépit de trois relances de la caisse primaire des 5, 20 et 23 novembre 2015, le dossier du salarié n’avait toujours pas été mis à jour. Par ses pièces 11 et 13, le salarié montre aussi qu’il avait été victime d’un accident antérieur qu’il situe au 21 septembre 2015.
La phrase litigieuse (« J’ai vous ai donné pour faire des trous avec marteau piqueur vous avez fait maladie. ») sur l’interprétation de laquelle les parties sont en discussion, s’inscrit dans le contexte précité, c’est-à-dire un contexte marqué par deux arrêts de travail. Bien que cette phrase montre que l’employeur n’est pas à l’aise avec la langue française, le reste de la lettre établit qu’il avait les connaissances suffisantes pour exprimer ses griefs avec clarté. Dès lors, si l’employeur avait ‘ ainsi qu’il le prétend dans ses écritures ‘ voulu reprocher au salarié un manquement à l’obligation de justifier de ses absences, il était en mesure de l’écrire. Or, il ne ressort pas de cette phrase que l’employeur aurait simplement reproché au salarié de ne pas avoir justifié de ses arrêts de travail. Dès lors, le seul sens qui peut être prêté à cette phrase consiste dans le reproche adressé au salarié d’avoir fait l’objet d’un arrêt maladie parce que l’employeur lui demandait de « faire des trous avec (un) marteau piqueur ». Or, les arrêts de travail pour maladie du salarié sont établis.
Dès lors le lien entre l’état de santé du salarié et son licenciement est caractérisé.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a dit nul le licenciement du salarié.
Le salarié peut prétendre à une indemnité compensatrice de préavis, aux congés payés afférents ainsi qu’à une indemnité pour licenciement nul, qui ne peut être inférieure à six mois de salaire, contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges en allouant au salarié la somme de 9 900 euros.
En effet, le salarié percevait un salaire mensuel brut de 1 650,76 euros.
Statuant dans les limites de la demande, il conviendra de confirmer le jugement qui a condamné l’employeur à payer au salarié les sommes de :
. 1 650 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,
. 165 euros au titre des congés payés afférents.
En revanche, compte tenu de l’ancienneté du salarié (huit mois), de son niveau de rémunération précédemment retenu, de son âge lors du licenciement (48 ans), de ce qu’il est reconnu travailleur handicapé ce qui rend plus difficile pour lui la recherche d’un emploi, et de ce qu’au mois de septembre 2022, il n’avait toujours pas retrouvé de travail pérenne et percevait l’allocation de solidarité spécifique, le préjudice qui résulte, pour le salarié, de la perte injustifiée de son emploi sera réparé par une somme de 10 000 euros, au paiement de laquelle, par voie d’infirmation, l’employeur sera condamné.
Sur la demande de dommages-intérêts pour non respect de la procédure
L’article L.1232-2 du code du travail dispose que l’employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable. La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge.
Cette lettre indique l’objet de la convocation. L’entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation.
En l’espèce le salarié n’a pas été convoqué à un entretien préalable à son licenciement.
Toutefois, l’article L. 1235-2 du code du travail, dans sa version applicable au présent litige, dispose que si le licenciement d’un salarié survient sans que la procédure requise ait été observée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge impose à l’employeur d’accomplir la procédure prévue et accorde au salarié, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.
En l’espèce, la procédure requise n’a pas été observée. Toutefois, le juge ne peut sanctionner les irrégularités de procédure que s’il considère le licenciement motivé par une cause réelle et sérieuse. Or au cas présent, le licenciement n’est pas fondé sur une cause réelle et sérieuse puisqu’il est nul. Par conséquent, le salarié ne peut prétendre à une indemnité pour irrégularité de procédure ainsi qu’en a jugé le conseil de prud’hommes dont le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur la demande de dommages-intérêts pour manquement de l’employeur à son obligation de sécurité
Le salarié se fonde sur l’article L. 4121-1 du code du travail et analyse l’obligation de sécurité de l’employeur en une obligation de résultat. Il reproche à l’employeur de ne pas lui avoir fait passer de visites médicales auprès de la médecine du travail.
L’employeur conteste la réalité du préjudice subi par le salarié.
***
En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l’employeur est tenu envers celui-ci d’une obligation de sécurité qui n’est pas une obligation de résultat mais une obligation de moyen renforcée, l’employeur pouvant s’exonérer de sa responsabilité s’il justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.
Selon l’article L. 4121-1 : « L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ;
2° Des actions d’information et de formation ;
3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés. (‘) »
En l’espèce, il n’est pas discuté que le salarié n’a passé auprès de la médecine du travail aucune visite médicale, pas même une visite médicale d’embauche. Le manquement de l’employeur est en conséquence établi.
En revanche, le salarié n’établit pas la matérialité du préjudice qui en résulte pour lui. Il ne produit en effet à ce titre aucune pièce médicale pour en justifier et si, par la production de sa pièce 42, il établit que la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées a reconnu sa qualité de travailleur handicapé du 1er juin 2018 au 31 mai 2023, les raisons médicales de cette reconnaissance sont cependant inconnues de la cour, de telle sorte que le lien entre cette reconnaissance de ce statut et ses conditions de travail au sein de la société PCC.IDF, dont il avait quitté les effectifs deux ans et demi plus tôt, et pour laquelle il n’a travaillé que quelques mois, n’est pas démontré.
Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu’il a condamné l’employeur à payer au salarié une indemnité à ce titre. Statuant à nouveau, le salarié sera débouté de ce chef de demande.
Sur la demande de dommages-intérêts pour paiement tardif des congés payés
Le salarié explique que la société ne lui a réglé ses congés payés qu’un an après la rupture, et après de nombreuses relances de sa part.
L’employeur ne conclut pas sur ce point de sorte qu’en application de l’article 954 du code de procédure civile, il est réputé s’approprier les motifs du jugement qui a débouté le salarié de ce chef de demande, en raison de ce que la société PCC.IDF relevait de la convention collective du bâtiment et de ce qu’à ce titre, il revenait au salarié de faire la demande de paiement de ses congés payés à la caisse des congés payés du bâtiment, et non à la société, en produisant directement les justificatifs de ses congés auprès de l’organisme approprié.
Le salarié ne verse sur ce point aux débats que sa pièce 25 qui est une attestation de paiement établie par la caisse des congés et intempéries Île-de-France du BTP. Il ne produit aucune des « nombreuses relances » qu’il invoque. En outre, à juste titre le conseil de prud’hommes a relevé que la demande de paiement des congés payés du salarié devait être sollicité auprès de la caisse de congés payés.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a débouté le salarié de ce chef de demande.
Sur la demande de dommages-intérêts pour remise tardive d’une attestation Pôle emploi conformes
Au soutien de ses prétentions, le salarié fait valoir que le 1er décembre 2015, l’employeur lui a remis une attestation Pôle emploi comportant plusieurs anomalies, ce qui a retardé sa prise en charge pour bénéficier d’un revenu de remplacement.
En réplique, l’employeur objecte que le salarié a pu s’inscrire à Pôle emploi, ce qui montre que sa situation a pu être régularisée et que l’attestation Pôle emploi, qui a été modifiée à la demande du salarié, lui a été remise.
***
L’article R. 1234-9 du code du travail, dans sa version applicable au présent litige, prescrit que l’employeur délivre au salarié, au moment de l’expiration ou de la rupture du contrat de travail, les attestations et justifications qui lui permettent d’exercer ses droits aux prestations mentionnées à l’article L. 5421-2 et transmet sans délai ces mêmes attestations à Pôle emploi (‘).
En l’espèce, il n’est pas discuté que l’attestation Pôle emploi remise au salarié comportait des indications erronées ou manquantes.
En revanche, il ressort des débats que l’employeur a remis au salarié, à sa demande, une attestation Pôle emploi qui lui a permis de percevoir l’allocation d’aide au retour à l’emploi. D’ailleurs, la pièce 28 du salarié montre que, par lettre du 11 juillet 2016, Pôle emploi certifiait que « par notification du 31 décembre 2015, vous avez été admis au bénéfice de l’allocation d’aide au retour à l’emploi consécutive à la fin de votre contrat de travail du 30 novembre 2015. »
Dès lors, il n’est pas établi que le manquement de l’employeur ait causé au salarié un quelconque préjudice. Par conséquent, le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné l’employeur au paiement de dommages-intérêts à ce titre et, statuant à nouveau, le salarié sera débouté de ce chef de demande.
Sur les intérêts
Les condamnations au paiement de sommes ayant une vocation indemnitaire seront assorties des intérêts au taux légal à compter du jugement du conseil de prud’hommes.
Les condamnations au paiement des indemnités de rupture et des rappels de salaire produiront quant à elles intérêts au taux légal à compter de la réception, par l’employeur, de sa première convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes.
Sur la demande tendant à la capitalisation des intérêts
L’article 1343-2 du code civil (dans sa nouvelle rédaction) dispose que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l’a prévu ou si une décision de justice le précise. La demande ayant été formée par le salarié et la loi n’imposant aucune condition pour l’accueillir, il y a lieu, en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil, d’ordonner la capitalisation des intérêts.
Celle-ci portera sur des intérêts dus au moins pour une année entière.
Sur la remise des documents
Il conviendra de donner injonction à l’employeur de remettre au salarié un certificat de travail, une attestation Pôle emploi et un bulletin de salaire récapitulatif conformes à la présente décision, sans qu’il soit nécessaire d’assortir cette mesure d’une astreinte.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Succombant également en appel, l’employeur sera condamné aux dépens de la procédure d’appel, le jugement étant confirmé en ce qu’il l’a condamné aux dépens de première instance ainsi qu’en ce qu’il a condamné l’employeur à payer au salarié une indemnité de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Il conviendra en outre de condamner l’employeur à payer au salarié une indemnité de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés en cause d’appel.
PAR CES MOTIFS:
Statuant publiquement et par arrêt contradictoire, la cour :
INFIRME le jugement, mais seulement en ce qu’il a condamné la société PCC.IDF à payer à M. [P] les sommes de 9 900 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, 1 650 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions légales en matière de visites médicales, et 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non remise d’une attestation Pôle emploi conforme,
CONFIRME le jugement pour le surplus,
Statuant à nouveau des seuls chefs infirmés et y ajoutant,
CONDAMNE la société PCC.IDF à payer à M. [P] la somme de 10 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement nul, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement sur la somme de 9 900 euros et à compter du présent arrêt pour le surplus,
DÉBOUTE M. [P] de sa demande de dommages-intérêts pour non-respect des dispositions légales en matière de visites médicales,
DÉBOUTE M. [P] de sa demande de dommages-intérêts pour non remise d’une attestation Pôle emploi conforme,
DONNE injonction à la société PCC.IDF de remettre à M. [P] un certificat de travail, une attestation Pôle emploi et un bulletin de salaire récapitulatif conformes à la présente décision
REJETTE la demande d’astreinte,
ORDONNE la capitalisation des intérêts dus pour une année entière,
DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples, ou contraires,
CONDAMNE la société PCC.IDF à payer à M. [P] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais de première instance et en cause d’appel,
CONDAMNE la société PCC.IDF aux dépens.
. prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
. signé par Madame Aurélie Prache, président et par Madame Dorothée Marcinek, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier Le président