Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre sociale
ARRET DU 01 FEVRIER 2023
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 20/01791 – N° Portalis DBVK-V-B7E-OSHF
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 25 FEVRIER 2020
CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER N° RG F 19/00524
APPELANTE :
S.A.S. GAMADA MTP
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Margaux ALIMI MULLER, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIME :
Monsieur [R] [J]
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représenté par Me Charles SALIES, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 16 Novembre 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 07 DECEMBRE 2022,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Isabelle MARTINEZ, Conseillère, chargé du rapport.
Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Jean-Pierre MASIA, Président
Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère
Mme Isabelle MARTINEZ, Conseillère
Greffier lors des débats : M. Philippe CLUZEL
ARRET :
– contradictoire;
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par M. Jean-Pierre MASIA, Président, et par M. Philippe CLUZEL, Greffier.
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EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [R] [J] était embauché le 17 mai 2016 suivant contrat à durée déterminée poursuivi par un contrat à durée indéterminée en qualité de plombier par la Sas Gamada Mtp moyennant un salaire s’élevant en dernier lieu à la somme de 1 791,25 €.
Il vivait en concubinage avec la standardiste de la société et le 13 août 2018, alors que [R] [J] était en arrêt de travail, une dispute opposait les concubins.
Par courrier du 22 août 2018, le salarié était convoqué, avec mise à pied conservatoire, à un entretien préalable à son éventuel licenciement qui lui était notifié le 4 septembre 2018 en ces termes:’ (…/…)nous vous notifions notre décision de vous licencier pour faute grave pour les motifs suivants:
Le lundi 13 août 2018, vous avez harcelé non stop toute la matinée la secrétaire sur notre standard téléphonique ce qui a porté préjudice au fonctionnement de l’entreprise. En fin de matinée vous êtes venu à l’agence pour agresser verbalement la secrétaire alors que vous même ne vous étiez pas présenté au travail le 13 août pour des motifs de santé. Votre harcèlement a recommencé à 14 h à la réouverture de nos bureaux avec des appels téléphoniques incessants.
Madame [M] [T] responsable comptabilité a dû intervenir et vous demander d’arrêter de téléphoner de façon continue pour ne pas bloquer les appels de nos clients.
Ce comportement a été nuisible à l’entreprise et compte tenu de la gravité des faits votre maintien dans l’entreprise s’avère impossible(…/…)’.
Contestant notamment son licenciement, par requête du 7 mai 2019, le salarié saisissait le conseil de prud’hommes de Montpellier, lequel, par jugement du 25 février 2020, condamnait l’employeur à payer au salarié les sommes suivantes:
-1 074,06 € au titre de l’indemnité de licenciement,
-3 488,42 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 348,80 € pour les congés payés y afférents,
-1 744,21 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Par déclaration au greffe en date du 18 mars 2020, l’employeur relevait appel de ce jugement.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par conclusions régulièrement notifiées par voie électronique le 29 juillet 2021, l’employeur demande à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande de rappel de salaire, de l’infirmer pour le surplus, de dire le licenciement fondé sur une faute grave, de débouter le salarié de toutes ses demandes et de le condamner à payer une somme de 3000 € au titre de ses frais de procédure.
A titre subsidiaire, il sollicite que le montant des dommages et intérêts soient ramenés à de plus justes proportions
Il fait valoir essentiellement que le salarié avait déjà été sanctionné pour absence injustifiée et que ce seul grief justifie le licenciement pour faute grave.
Il ajoute que, dans le cadre de son obligation de sécurité, il était tenu de faire cesser les faits de harcèlement moral que subissait Madame [K].
Sur le rappel de salaire, il affirme qu’il a opéré compensation avec une dette locative qu’il a réglé en lieu et place du salarié.
Par conclusions régulièrement notifiées par voie électronique le 27 avril 2021, [R] [J] demande la confirmation du jugement en ce qu’il a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et son infirmation pour le surplus.
Il sollicite la condamnation de son employeur à lui payer les sommes suivantes:
-1 103 € à titre d’indemnité légale de licenciement,
-3 583 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 358,30 € pour les congés payés y afférents,
-6 269 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-910 € à titre de rappel de salaire pour la mise à pied conservatoire outre 91 € pour les congés payés y afférents,
-800 € à titre de rappel de salaire pour retenue illicite sur son salaire,
-2 500 € au titre de ses frais irrépétibles
et à lui remettre sous astreinte de 50 € par jour de retard les documents de fin de contrat rectifiés.
Il soutient en substance qu’aucune absence injustifiée ne lui a été reprochée dans la lettre de licenciement qui fixe les termes du litige, que pour le surplus, il a eu une dispute avec sa concubine qui relève de sa vie privée et s’est déroulée pendant la pause déjeuner, que s’il a tenté à plusieurs reprises de joindre sa concubine par téléphone, son comportement ne relève pas du harcèlement moral et n’a pas nui à l’entreprise.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions respectives des parties, la cour se réfère aux conclusions notifiées par les parties.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l’exécution du contrat de travail
Sur la retenue sur salaire de 800 €
Le salarié ne conteste pas que la retenue sur salaire de 800 € a servi à payer une dette locative qu’il avait à l’endroit de son bailleur. Cette retenue est donc justifiée et le jugement doit être confirmé de ce chef.
Sur le licenciement
Sur le bien fondé du licenciement
La lettre de licenciement fixe les limites du litige.
La faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. Il appartient à l’employeur d’en rapporter la preuve.
En l’espèce, l’employeur reproche au salarié d’avoir été en absence injustifiée le 18 août 2018. Or ce grief n’est pas repris dans la lettre de licenciement et ne peut donc être utilement évoqué à l’appui du licenciement.
Il lui reproche également de s’être livré à un véritable harcèlement moral sur la personne de Madame [K].
Or, il résulte de l’attestation de cette dernière qu’elle a refusé de répondre à ses appels téléphoniques sur son téléphone personnel, qu’une dispute s’en est suivie durant la pause déjeuner en dehors des locaux de l’entreprise et que monsieur [J] a cessé d’appeler sur le téléphone de l’entreprise dès que Madame [M] lui en a fait la demande.
L’employeur ne démontre pas que ces événements qui relèvent de la vie privée du salarié ont perturbé le bon fonctionnement de l’entreprise.
Il n’y a donc ni faute grave ni cause réelle et sérieuse de licenciement.
Le jugement doit être confirmé sur ce point.
Sur les conséquences du licenciement
Sur la mise à pied conservatoire
Le licenciement étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, l’employeur doit être condamné à payer le salaire sur la période de mise à pied conservatoire du 22 août au 3 septembre 2018 soit la somme de 910 € outre la somme de 91 € pour les congés payés y afférents.
Sur l’indemnité de licenciement
Monsieur [J] a droit, au titre de son indemnité de licenciement, compte tenu de son salaire et de son ancienneté, à la somme de 1 103 €.
Sur l’indemnité de préavis
Eu égard à son ancienneté de plus de deux ans, le salarié a droit à une indemnité de préavis équivalente à deux mois de salaire soit la somme de 3 583 € outre la somme de 358, 30 € pour les congés payés y afférents
Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
L’intimé avait une ancienneté de deux ans et cinq mois. Il percevait un salaire de 1 791,25 € et était âgé de 38 ans. Il ne fournit aucun élément sur sa situation actuelle. La cour est en mesure d’évaluer son préjudice à la somme de 5 000 €
Sur la remise sous astreinte des documents de fin de contrat
Il convient d’ordonner la remise des documents sociaux rectifiés conformément au présent arrêt sans qu’il y ait lieu de prononcer une astreinte.
Sur l’article 700 du code de procédure civile
L’équité commande d’allouer à [R] [J] la somme de 1 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Montpellier le 25 février 2020 en ce qu’il a rejeté la demande de rappel de salaire et a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse;
L’infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau,
Condamne la Sas Gamada Mtp à payer à [R] [J] les sommes suivantes:
-910 € outre la somme de 91 € pour les congés payés y afférents au titre de la mise à pied conservatoire,
-1 103 € au titre de l’indemnité de licenciement,
-3 583 € outre la somme de 358, 30 € pour les congés payés y afférents au titre de l’indemnité compensatrice de préavis
-5 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Ordonne la remise des documents de fin de contrat rectifiés conformément au présent arrêt;
Condamne la Sas Gamada Mtp à payer à [R] [J] la somme de 1 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile;
Condamne la Sas Gamada Mtp aux dépens d’appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT