Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 10
ARRET DU 01 DECEMBRE 2022
(n° , 1 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/01962 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBR2M
Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Janvier 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° 19/05638
APPELANTE
S.A.R.L. EURO COLOR
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Bruno MOTILA, avocat au barreau de PARIS, toque : C1813
INTIME
Monsieur [Z] [E]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Paola PEREZ ZARUR, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 29 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Gwenaelle LEDOIGT, Présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Monsieur Nicolas TRUC, Président de la chambre
Madame Gwenaelle LEDOIGT, Présidente de la chambre
Madame Carine SONNOIS, Présidente de la chambre
Greffier, lors des débats : Mme Sonia BERKANE
ARRET :
– contradictoire
– mis à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Gwenaelle LEDOIGT, Présidente et par Sonia BERKANE, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE :
M. [Z] [E] a été engagé par la société à responsabilité limitée (SARL) Euro Color, suivant contrat à durée indéterminée en date du 17 décembre 2012, en qualité de « vendeur employé ».
Dans le dernier état des relations contractuelles régies par la convention collective du bâtiment, le salarié percevait une rémunération mensuelle brute de 2 452,40 euros (moyenne des 3 derniers mois).
Le 10 juillet 2018, le salarié s’est vu notifier un licenciement pour faute grave, libellé dans les termes suivants :
« Suite à l’entretien qui s’est tenu le jeudi 5 juillet en nos bureaux nous vous informons de notre décision de vous licencier pour faute grave et ce pour les motifs suivants :
– A plusieurs reprises et notamment le 18 mai, le 31 mai et le 8 juin vous avez remis à un client identifié de nombreux matériels sans effectuer ni bon de livraison, ni aucune facture.
– Compte tenu de votre ancienneté dans l’entreprise vous n’êtes pas sans savoir que cette pratique est totalement interdite au sein de l’entreprise. D’autre part et afin d’essayer de ne pas éveiller quelque soupçon que ce soit vous avez falsifié l’état du stock ce qui est un acte encore une fois totalement interdit.
Compte tenu de la gravité des faits reprochés nous vous dispensons d’effectuer votre préavis, votre maintien dans l’entreprise étant impossible ».
Le 26 juin 2019, M. [Z] [E] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris pour contester son licenciement et solliciter un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires.
Le 10 janvier 2020, le conseil de prud’hommes de Paris, dans sa section Commerce, a statué comme suit :
– fixe la moyenne du salaire à la somme de 2 452,40 euros
– requalifie le licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse
– condamne la SARL Euro Color au paiement des sommes suivantes :
* 10 448,90 euros à titre de rappel des heures supplémentaires
* 1 044,89 euros au titre des congés payés afférents
* 4 994,81 euros au titre de l’indemnité de préavis
* 499,48 euros au titre des congés payés afférents
* 3 411,21 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement
* 7 357,20 euros au titre de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse
* 402 euros au titre du remboursement de la retenue sur salaire
* 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– condamne la SARL Euro Color au paiement des entiers dépens.
Par déclaration du 2 mars 2020, la SARL Euro Color a relevé appel du jugement de première instance dont elle a reçu notification le 26 février 2020.
Vu les dernières conclusions remises et notifiées le 22 février 2022, aux termes desquelles la SARL Euro Color demande à la cour d’appel de :
A titre principal
– rejeter toutes demandes, fins et conclusions de Monsieur [E] à l’encontre de la société Euro Color
– débouter l’intimé de toute demande tendant à considérer que la cour n’est pas valablement saisie par l’appelant
– déclarer recevables les conclusions d’appelant de la société Euro Color
– infirmer l’ensemble des dispositions du jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Paris en date du 10 janvier 2020
En conséquence :
– requalifier le licenciement de Monsieur [Z] [E] en licenciement pour faute grave
– dire qu’il n’y a pas lieu à paiement au titre du rappel des heures supplémentaires
– dire qu’il n’y a pas lieu à paiement au titre des congés payés afférents
– dire qu’il n’y a pas lieu à paiement au titre de l’indemnité de préavis
– dire qu’il n’y a pas lieu à paiement au titre des congés payés afférents
– dire qu’il n’y a pas lieu à paiement au titre de l’indemnité légale de licenciement
– dire qu’il n’y a pas lieu à paiement au titre de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse
– dire qu’il n’y a pas lieu de condamner la société Euro Color aux dépens
– condamner Monsieur [Z] [E] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– ordonner l’exécution provisoire de l’arrêt à intervenir
A titre subsidiaire,
– confirmer la condamnation de la société Euro Color au paiement de la somme de 402 euros
– condamner Monsieur [E] à rembourser à la société Euro Color la somme de 402 euros au titre des frais de remplacement de serrure.
Vu les dernières conclusions remises et notifiées le 10 juin 2022, aux termes desquelles M. [Z] [E] demande à la cour d’appel de :
In limine litis et avant tout examen du fond :
– constater qu’elle n’est pas saisie et ne peut statuer sur l’appel
Sur le fond :
– confirmer en son intégralité le jugement dont appel en ce qu’il a :
« – fixé la moyenne du salaire à 2 452,40 euros
– requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse
– condamné la société Eurocolor à verser à Monsieur [E] :
* 10 448,90 euros au titre du rappel des heures supplémentaires
* 1 044,89 euros au titre des congés payés afférents
* 4 994,81 euros au titre de l’indemnité de préavis
* 499,48 euros au titre des congés payés afférents
* 3 411,21 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement
* 7 357,20 euros au titre de l’indemnité de licenciement sans cause réelle
et sérieuse (trois mois)
* 402 euros au titre du remboursement de la retenue de salaire
* 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile »
Et y ajoutant
– condamner la société Euro Color à verser à Monsieur [E] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Conclusions auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé des faits de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties.
L’instruction a été clôturée par ordonnance du 7 septembre 2022.
MOTIFS DE LA DECISION :
1/ Sur l’effet dévolutif de l’appel
En vertu de l’article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 et applicable au 1er septembre 2017, l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s’opérant pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.
En outre, seul l’acte d’appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement.
Il en résulte que lorsque la déclaration d’appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l’effet dévolutif n’opère pas.
Par ailleurs, l’obligation prévue par l’article 901 4° du code de procédure civile, de mentionner, dans la déclaration d’appel, les chefs de jugement critiqués, dépourvue d’ambiguïté, encadre les conditions d’exercice du droit d’appel dans le but légitime de garantir la bonne administration de la justice en assurant la sécurité juridique et l’efficacité de la procédure d’appel.
Enfin, la déclaration d’appel affectée de ce vice de forme peut être régularisée par une nouvelle déclaration d’appel, dans le délai imparti à l’appelant pour conclure au fond conformément à l’article 910-4, alinéa 1, du code de procédure civile.
M. [Z] [E] fait valoir, in limine litis, que la déclaration d’appel de la SARL Euro Color en date du 2 mars 2020 ne vise pas expressément les chefs du jugement attaqué, puisqu’elle se borne à mentionner en objet que l’appel est « total » et qu’aucune régularisation n’est intervenue dans le délai de trois mois de la déclaration d’appel.
La SARL Euro Color demande à ce que la demande tendant à voir constater l’absence d’effet dévolutif soit dite irrecevable faute d’avoir été adressée au conseiller de la mise en état, qui selon l’article 780 du code de procédure civile est seul compétent pour « statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l’article 47 et les incidents mettant fin à l’instance ».
Il relève, en outre, que la cour d’appel n’est pas saisie d’une demande de nullité de la déclaration d’appel et que le salarié n’a pas formé sa demande avant sa défense au fond.
Mais, la cour observe que dans ses écritures du 10 juin 2022, le salarié demande bien à ce qu’il soit constaté in limine litis que la cour n’est pas saisie. Contrairement à ce qui est avancé par la SARL Euro Color, le constat de l’absence d’effet dévolutif de l’appel ne s’appréhende pas comme une demande de nullité de la déclaration d’appel. Enfin, en application des articles L. 311-1 du code de l’organisation judiciaire et 542 du code de procédure civile, seule la cour d’appel, dans sa formation collégiale, a le pouvoir de statuer sur l’absence d’effet dévolutif de l’appel, à l’exclusion du conseiller de la mise en état dont les pouvoirs sont strictement définis à l’article 914 du code de procédure civile.
Il s’ensuit que les conclusions de M. [Z] [E] quand à l’absence dévolutif de l’appel de la SARL Euro Color seront déclarées recevables.
Toutefois, la déclaration d’appel de la SARL Euro Color se limitant à mentionner que son objet porte sur un appel total, sans énoncer les chefs du jugement critiqués, il sera considéré qu’aucun effet dévolutif n’est attaché à cette déclaration d’appel et que la cour n’est saisie de la connaissance d’aucun chef de ce jugement.
2/ Sur les autres demandes
Aucune considération d’équité ne justifie l’octroi d’une indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
La SARL Euro Color supportera les dépens d’appel, conformément aux dispositions des articles 696 et 699 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Dit recevable la demande tendant à voir constater l’absence d’effet dévolutif de l’appel,
Dit qu’en l’absence de mention des chefs du jugement expressément critiqués, elle n’est pas saisie de l’appel,
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SARL Euro Color aux dépens d’appel.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE