L’affaire concerne un litige entre Madame [C] [U] et Monsieur [V] [T] (demandeurs) et les sociétés DEMEURES RHONE ALPES et ERGO VERSICHERUNG AKTIENGESELLSCHAFT (défenderesses). Les demandeurs ont acquis un terrain et signé un contrat de construction avec DEMEURES RHONE ALPES, stipulant un délai d’exécution de 13 mois à partir de l’ouverture du chantier, le 16 juillet 2019. La réception des travaux a eu lieu le 22 mars 2021, mais avec des réserves et des désordres non résolus.
Face à l’absence de levée des réserves et au non-paiement des pénalités de retard, les demandeurs ont assigné les défenderesses en février et mars 2022. Ils réclament des sommes pour pénalités de retard, des engagements contractuels non respectés, des dommages et intérêts pour préjudices subis, ainsi que la libération d’une somme consignée. DEMEURES RHONE ALPES conteste les demandes des demandeurs et demande la restitution de la somme consignée, tandis qu’ERGO VERSICHERUNG demande également le rejet des demandes des demandeurs et la garantie de DEMEURES RHONE ALPES. Les parties ont présenté leurs conclusions respectives, et la clôture de la procédure a été prononcée pour le 27 novembre 2023. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
JUDICIAIRE
DE LYON
Chambre 3 cab 03 D
N° RG 22/02207 – N° Portalis DB2H-W-B7G-WTC2
Jugement du 05 Septembre 2024
Notifié le :
Grosse et copie à :
la SCP AXIOJURIS LEXIENS – 786
Me Laure-anne BARRAGAN – 1781
la SELARL VALORIA SOCIÉTÉ D’AVOCATS – 88
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Tribunal judiciaire de LYON, statuant publiquement et en premier ressort, a rendu, le 05 Septembre 2024, devant la Chambre 3 cab 03 D le jugement contradictoire suivant,
Après que l’instruction eut été clôturée le 27 Novembre 2023, et que la cause eut été débattue à l’audience publique du 23 Mai 2024 devant :
Julien CASTELBOU, Président,
siégeant en formation Juge Unique,
Assisté de Anne BIZOT, Greffier,
DEMANDEURS
Madame [C] [U]
née le 24 Janvier 1987 à [Localité 6],
demeurant [Adresse 2]
représentée par Maître Laure-Anne BARRAGAN, avocat au barreau de LYON
Monsieur [V] [T]
né le 12 Juin 1981 à [Localité 5],
demeurant [Adresse 2]
représenté par Maître Laure-Anne BARRAGAN, avocat au barreau de LYON
DEFENDERESSES
S.A.S. DEMEURES RHONE ALPES,
prise en la personne de son représentant légal en exercice
dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Maître Olivier COSTA de la SELARL VALORIA SOCIÉTÉ D’AVOCATS, avocats au barreau de LYON (avocat postulant) et par Maître José DO NASCIMENTO du Cabinet AVOXCA, avocats au barreau de AIX-EN-PROVENCE (avocat plaidant)
Société étrangère de droit allemand ERGO VERSICHERUNG AKTIENGESELLSCHAFT,
prise en la personne de son représentant légal en exercice
dont le siège social est sis [Adresse 1] (ALLEMAGNE)
représentée par Maître Mathieu ROQUEL de la SCP AXIOJURIS LEXIENS, avocats au barreau de LYON (avocat postulant) et par Maître Valérie DESFORGES de ADEMA AVOCATS, avocats au barreau de PARIS (avocat plaidant)
Par acte authentique du 12 novembre 2018, Monsieur [T] et Madame [U] ont acquis de la société SERV’PROMOTION un terrain situé au [Adresse 2] à [Localité 4], un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan étant par ailleurs conclu avec la société DEMEURES RHONE ALPES.
Aux termes du contrat de CCMI avec fourniture de plan signé le 08 février 2019, les parties s’étaient accordées sur un délai d’exécution des travaux de 13 mois à compter de la déclaration d’ouverture du chantier, une garantie de livraison à prix et délais convenus étant souscrite auprès de la compagnie ERGO VERSICHERUNG et des pénalités de retard spécifiées.
Le chantier s’est ouvert le 16 juillet 2019.
Plusieurs avenants ont été signés au cours de l’avancement du chantier.
Le dernier appel de fonds a donné lieu à consignation par les consorts [T]-[U] auprès de la caisse des dépôts et consignations.
La réception du chantier a eu lieu le 22 mars 2021 avec réserves, outre de nouvelles réserves notifiées par courrier du 26 mars 2021.
En l’absence de levée des réserves et de paiement des indemnités de retard contractuellement dues, outre apparition de nouveaux désordres dénoncés par LRAR, les consorts [T]-[U] ont assigné, par exploit du 25 février 2022, la société DEMEURES RHONE ALPES devant la présente juridiction (procédure RG 22-2207) et, par exploit du 15 mars 2022, la société ERGO VERSICHERUNG AG, société de droit allemand, représentée par son mandataire la société AGEMI (procédure RG 22-2408).
Les procédures ont été jointes par ordonnance du 11 avril 2022.
*
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 10 octobre 2023, Monsieur [V] [T] et Madame [C] [U] sollicitent d’entendre le Tribunal, au visa des articles L232-2, L232-3 et L231-6 du Code de la construction et de l’habitation ; 1792-6 du Code civil ; 1231-1 et suivants du Code civil :
– Condamner la société DEMEURES RHONE ALPES, in solidum avec la société ERGO, débiteur de la garantie de livraison, à leur payer la somme de 9.539,79 euros au titre des pénalités de retard contractuellement dues,
– Condamner la société DEMEURES RHONE ALPES à leur payer la somme de 3.175 euros correspondant à l’engagement contractuel pris par la société DEMEURES RHONE ALPES résultant de l’avenant n°8,
– Condamner in solidum la société DEMEURES RHONE ALPES et la société ERGO à leur payer la somme de 8.729 euros, compte tenu de l’absence de levée des réserves restantes dans le cadre de la garantie de parfait achèvement et au préjudice du fait du délai excessif pour la levée des autres réserves (en octobre 2022), outre intérêts au taux légal à compter de la date de livraison et à tout le moins à compter de l’assignation,
– Condamner la société DEMEURES RHONE ALPES à leur payer la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour les préjudices financiers, de jouissance et moral subis par eux,
– Rejeter l’ensemble des demandes adverses.
En conséquence, après compensation des créances connexes et réciproques,
– Ordonner, en exécution des condamnation qui précèdent, que la Caisse des dépôts et consignations libère la somme consignée de 12.126,85 euros entre leurs mains sur présentation du jugement à intervenir, exécutoire par provision,
– Condamner in solidum la société DEMEURES RHONE ALPES et la société ERGO à leur payer les sommes de :
5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
Les entiers dépens de l’instance.
*
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 20 juin 2023, la société DEMEURES RHONE-ALPES, sollicite d’entendre le Tribunal, au visa des articles 1104 du Code civil et L231-6 du Code de la construction et de l’habitation :
A titre principal,
– Débouter les consorts [T]-[U] de leurs demandes,
– Juger que la somme de 12.126,85 € consignée à la Caisse des dépôts et consignations lui soit restituée à la suite du jugement à intervenir.
A titre subsidiaire,
– Réduire à la somme de 1.000 € la demande formée par les consorts [T]-[U] aux titres des dommages et intérêts.
En tout état de cause,
– Rejeter le surplus des demandes des consorts [T]-[U],
– Débouter la compagnie ERGO de sa demande de voir la société DEMEURES RHONES ALPES la garantir et la relever de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre,
– Condamner reconventionnellement la compagnie ERGO à relever et garantir la société DEMEURES RHONE ALPES, ès qualités de garant, de toute condamnation éventuellement prononcée à son encontre,
– Condamner les consorts [T]-[U] au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– Condamner les requis aux entiers dépens de l’instance.
*
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 21 novembre 2023, la société ERGO VERSICHERUNG AKTIENGESELLSCHAFT, société de droit allemand, sollicite d’entendre le Tribunal, au visa des articles L231-2, L231-6 et L231-7 du Code de la construction et de l’habitation ; de l’article 4 de l’ordonnance n°20203-306 du 25 mars 2020 ; de l’article L443-1 du Code des assurances :
A titre principal,
– Débouter les consorts [T]-[U] de leurs demandes.
A titre subsidiaire,
– Fixer le quantum de la demande formée par les consorts [T]-[U] à la somme de 1.122,99 € au titre des pénalités de retard.
En tout état de cause,
– Condamner la société DEMEURES RHONE ALPES à la garantir et relever de toute condamnation,
– Déduire du quantum des éventuelles condamnations prononcées à son encontre au titre des dépassements du prix convenu la franchise légale équivalent à 5% du prix convenu soit 12.220 €,
– Débouter la société DEMEURES RHONE-ALPES de sa demande de garantie formée à son encontre,
– Condamner les consorts [T]-[U], ou tout succombant, à lui payer la somme de 5.000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.
*
En application des dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour l’exposé exhaustif de leurs prétentions et moyens.
La clôture de la procédure a été prononcée au 27 novembre 2023.
MOTIFS
I. Sur les pénalités de retard
. Au soutien de leur demande, les consorts [U]-[T] font valoir, au regard des termes du contrat et des conditions générales qui lui sont attachées, qu’un délai de 13 mois à compter de l’ouverture de chantier a été fixé pour la livraison, que l’ouverture du chantier a été réalisée le 16 juillet 2019, que la réception des travaux initialement prévue au 22 mars 2021 mais reportée aux termes de l’avenant n°7 à la date du 31 octobre 2020, a été réalisée avec 118 jours ouvrables de retard auxquels la société DEMEURES RHONE-ALPES ne saurait déduire une quelconque période.
Enfin, au titre de leur demande de condamnation in solidum de la société ERGO, les consorts [U]-[T] font valoir que la notion de défaillance ne devant pas s’entendre de la seule situation financière de la société DEMEURES RHONE-ALPES, la garantie de la société ERGO lui est due, cette dernière devant couvrir la totalité des pénalités forfaitaires sans pouvoir déduire celles dues pour les trente premiers jours.
. En réponse, la société DEMEURES RHONE-ALPES fait valoir que le retard constaté ne lui est nullement imputable mais résulte, d’une part, de la crise sanitaire et des difficultés d’approvisionnement et, d’autre part, de la signature de plusieurs avenants ayant pour effet automatique de proroger la date de livraison.
Elle soutient dès lors que ce n’est plus le délai convenu qui s’applique mais un délai dit « raisonnable ». Subsidiairement, la société DEMEURES RHONE-ALPES soutient que le nombre de jours de retard qui pourrait être retenu n’est que de 118-104 = 14 jours et que le montant à partir duquel les pénalités doivent être calculées doit tenir compte des avenants pour s’établir à 240.641 € et non 244.400 €.
. La société ERGO fait valoir qu’en l’absence de défaillance de la société DEMEURES RHONE-ALPES, la garantie de livraison à prix et délais convenus délivrée par la compagnie ERGO n’est pas mobilisable, les consorts [U]-[T] ne démontrant pas ce point, alors que ladite société est in bonis et en mesure d’exécuter les travaux nécessaires à l’achèvement de l’ouvrage. Subsidiairement, la société ERGO relève qu’il convient de tenir compte des réductions de prix du marché initial pour le calcul des indemnités de retard et de la période d’épidémie de COVID.
Réponse du Tribunal,
Vu les articles 1231-1 et suivants du Code civil ;
Vu les articles L 231-2 et L231-6 du Code de la construction et de l’habitation ;
En l’espèce, il résulte des éléments produits aux débats que les travaux ont débuté le 16 juillet 2019 et que les parties s’étaient accordées sur un délai d’exécution des travaux de 13 mois aux termes du CCMI.
Pour autant, il apparait aux termes de l’avenant n°7 signé le 22 septembre 2020, soit postérieurement à la levée des restrictions administratives dues à l’épidémie de COVID 19 qui ne sauraient dès lors être retenue comme élément justifiant une suspension des pénalités de retard, que les parties ont accepté un report de la réception au plus tard au 31 octobre 2020.
Or, la réception de l’ouvrage a été réalisée le 22 mars 2021, ce dont il se déduit un retard de 118 jours ouvrables concernant lequel la société DEMEURES RHONE-ALPES n’apporte aucun élément justifiant qu’il soit réduit, les difficultés d’approvisionnement ne pouvant être considérées comme un cas de force majeure.
Dès lors, en considération de l’article 22 des conditions générales de vente et au regard du prix convenu au CCMI auquel elles se rattachent, excluant ainsi la prise en compte des avenants ne portant nulle mention à ce titre, il y a lieu de condamner la société DEMEURES RHONE-ALPES, in solidum avec la société ERGO, dont la garantie n’est pas contestable au titre des pénalités de retard, à payer aux consorts [U]-[T] la somme de (244.400/3.000) x 118 = 9.613 € réduite à 9.539,79 € plafond de leur demande aux termes du dispositif de leurs conclusions, sous réserve pour la société ERGO d’opposer sa franchise d’un montant de (243.816/100) x 4 = 9.752,64 €.
II. Sur la demande au titre de l’avenant n°8
Les consorts [U]-[T] sollicitent la condamnation de la société DEMEURES RHONE-ALPES à leur payer une somme de 3.175 € au regard de l’avenant n°8 portant sur une moins-value et donc une déduction non prise en compte sur la facturation du solde par la société DEMEURES RHONE-ALPES.
En réponse, la société DEMEURES RHONE-ALPES soutient que l’opportunité d’une restitution de cette somme ne se justifie pas.
Réponse du Tribunal,
Vu l’article 1103 du Code civil,
A titre liminaire, il convient de rappeler que la consignation vaut paiement et que les consorts [U]-[T] ont assuré la consignation de la retenue de garantie pour un montant de 12.128,85 €.
Partant, il doit être relevé que l’avenant n°8 dispose expressément que la somme de 3.175 € doit venir en déduction « du déblocage de l’appel de fond de réception (5%) consigné à la Caisse de Consignation et Dépôts, en faveur de Mme [U] et M. [T] ».
Il s’en déduit que la société DEMEURES RHONE-ALPES est redevable de ladite somme au paiement de laquelle elle sera condamnée au profit des consorts [U]-[T].
III. Sur la demande au titre de l’absence de levée des réserves
. Au soutien de leur demande, les consorts [U]-[T] font valoir que l’obligation de lever les réserves dans le délai d’un an à compter de la réception des travaux n’a pas été respectée. Ils relèvent ainsi que de nombreuses réserves ont été faites lors de la réception du 22 mars 2021 et par courrier LRAR du 26 mars 2021. Ils reconnaissent que certaines réserves ont été levées ou ont fait l’objet d’un accord financier avec la société DEMEURES RHONE-ALPES, mais soulignent que d’autres persistent ou que de nouveaux désordres sont apparus du fait même des travaux de reprise réalisés.
Ils soulignent que certains ouvrages étant difficilement remplaçables, il en découle un préjudice esthétique et que l’intervention tardive de la société DEMEURES RHONE-ALPES pour lever les réserves justifie que leur soient alloués des dommages et intérêts au titre de leurs préjudices de jouissance et moral consécutifs à ce délai excessif.
. En réponse, la société DEMEURES RHONE-ALPES fait valoir que la majorité des réserves ont fait l’objet de reprises et que les dernières sont en cours de traitement. En outre, elle souligne que les demandeurs ne démontrent nullement l’existence d’un préjudice esthétique. Enfin, elle relève que sa responsabilité ne saurait être engagée en l’absence de faute de sa part en lien avec les préjudices allégués.
. La société ERGO soutient qu’en sa qualité de garant de livraison, elle n’est pas tenue à garantie au titre de la garantie de parfait achèvement.
Réponse du Tribunal,
Vu l’article 1792-6 du Code civil ;
En l’espèce, il ressort des pièces versées aux débats que de nombreuses réserves ont été formulées lors de la réception du 22 mars 2021 et par courriers LRAR des 30 mars et 22 juin 2021, puis reprises dans un courrier électronique du 25 juillet 2021.
A ce titre, la société DEMEURES RHONE-ALPES, à qui il appartenait de rapporter la preuve de ce que les réserves ont été levées, produit un quitus aux termes duquel seules quelques une d’entre elles ont été dûment traitées.
Partant, il est établi que la société DEMEURES RHONE-ALPES a manqué à son obligation d’assurer la parfaite levée des réserves, toutes formulées postérieurement aux différents avenants conclus entre les parties.
Les consorts [U]-[T] n’ayant sollicité aucune expertise judiciaire, ni même estimé qu’il était pertinent d’en faire réaliser une de manière amiable et contradictoire dont la valeur aurait été identique en application des dispositions de l’article 1554 du Code de procédure civile, aucun élément précis ne permet au tribunal d’apprécier le coût exact des travaux de reprise, leur seule pièce n°36 (devis pour les travaux de reprise) ne saurait y suffire.
Pour autant, il convient de rappeler que le Juge ayant constaté l’existence d’un préjudice ne peut rejeter les demandes indemnitaires s’y rapportant au seul motif qu’elles ne seraient pas justifiées dans leur quantum.
Dès lors, la société DEMEURES RHONE-ALPES n’ayant nullement démontré la parfaite levée des réserves, il y a lieu de la condamner à payer aux consorts [U]-[T] la somme de 3.729 € au regard du seul devis produit se rapportant à des réserves expressément formulées et après déduction du coût de fourniture de la trappe de visite.
A l’inverse, les préjudices esthétiques allégués par les consorts [U]-[T] ne sont pas suffisamment démontrés, de même que les préjudices de jouissance et moral ne faisant l’objet que d’une simple affirmation de principe, justifiant que leurs demandes à ce titre soient rejetées.
En conséquence, la société DEMEURES RHONE-ALPES sera condamnée, in solidum avec la société ERGO, à payer aux consorts [U]-[T] la somme de 3.729 € au titre des travaux de reprise, sous réserve pour la société ERGO d’opposer sa franchise d’un montant de (243.816/100) x 4 = 9.752,64 €.
IV. Sur la demande de dommages et intérêts au titre des « préjudices financiers, de jouissance et moral »
. Au soutien de leur demande, les consorts [U]-[T] font valoir que l’attitude de la société DEMEURES RHONE-ALPES au cours du chantier les a obligés à une particulière vigilance pendant toute sa durée, les pénalisant tant financièrement que professionnellement.
Ainsi, ils rappellent que les pénalités de retard ne sont pas exclusives de l’attribution de dommages et intérêts et relèvent notamment à ce titre la nécessité pour eux d’avoir dû prolonger leur bail jusqu’au 22 mars 2021, outre la prise en charge d’un abonnement d’électricité entre la mi-août 2020 et mars 2021.
. En réponse, la société DEMEURES RHONE-ALPES fait valoir que les difficultés du chantier se sont traduites par de nombreuses remises et travaux offerts aux consorts [U]-[T]. Elle souligne que l’attention portée par les consorts [U]-[T] ne diffère en rien de celle de tout maître d’ouvrage diligent. En outre, elle relève qu’aucune faute de sa part n’est démontrée, ni d’ailleurs un quelconque préjudice.
Réponse du Tribunal,
Vu l’article 1231-1 du Code civil ;
Il résulte des éléments du dossier que le déroulement du chantier a, dès son commencement, nécessité d’importantes reprises mises en avant du seul fait de la vigilance des consorts [U]-[T] qui, par suite, n’ont pu s’en remettre en toute confiance à la société DEMEURES RHONE-ALPES leur causant un préjudice moral certain qu’il conviendra d’indemniser à hauteur d’une somme qu’il est équitable de fixer à 2.000 €.
En outre, il n’est pas contestable que le retard dans la réception des travaux a obligé les consorts [U]-[T] à poursuivre leur bail d’habitation durant plusieurs mois et à supporter la double souscription d’un abonnement aux services d’électricité, justifiant que leur soit attribuée une indemnisation à raison, d’une part, des loyers entre le mois de novembre 2020 et la date de réception d’un montant de (1.500 x 5) = 7.500 € et, d’autre part, de la double souscription d’un abonnement aux services d’électricité sur la même période pour un montant de 60,05 €, le surplus ne pouvant être rattaché à une période de temps particulière.
A l’inverse, la perte de chance d’obtenir un avancement n’est nullement démontrée et le coût de souscription d’une ligne internet n’apparait pas anormal, même si celle-ci a dû être anticipée, ce qui n’est en toute hypothèse démontré par aucune pièce.
Enfin, les frais relatif à l’avis d’un expert ne relèvent pas d’une demande de dommages et intérêts mais des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.
En conséquence, la société DEMEURES RHONE-ALPES sera condamnée à payer aux consorts [U]-[T] la somme de 2.000 + 7.500 + 60,05 = 9.560,05 €.
V. Sur les demandes en garantie
. Au soutien de sa demande, la société DEMEURES RHONE-ALPES fait valoir qu’en sa qualité de garant, la société ERGO doit la garantir de toutes condamnations en application des dispositions de l’article L231-6 du Code de la construction et de l’habitation.
. En réponse, la société ERGO soutient qu’en application de l’article L 443-1 du Code des assurances, le garant de livraison n’a pas vocation à supporter in fine le coût des dépassements du prix convenu, des suppléments de prix, des pénalités de retard et des travaux nécessaires à l’achèvement de l’ouvrage, mais qu’à l’inverse la société DEMEURES RHONE-ALPES doit la garantir des condamnations prononcées à son encontre.
Réponse du Tribunal,
Aux termes de l’article L 443-1 du Code des assurances, les entreprises d’assurances habilitées à pratiquer les opérations de caution ayant fourni un cautionnement, un aval ou une garantie, que ces derniers soient d’origine légale, réglementaire ou conventionnelle, disposent de plein droit et dans tous les cas d’un recours contre le client donneur d’ordre de l’engagement, ses coobligés et les personnes qui se sont portées caution et, pour les paiements effectués au titre de leur engagement, de la subrogation dans les droits du créancier prévue à l’article 1346 du Code civil.
En l’espèce, il résulte des dispositions de l’article L 443-1 du Code des assurances, ainsi que de l’acte de cautionnement disposant que « le garant sera subrogé de plein droit et sans qu’aucune formalité ne soit nécessaire dans tous les droits et actions du maître d’ouvrage bénéficiaire à l’encontre du constructeur cautionné et des assureurs tant de responsabilités que de dommages », que la société ERGO n’est tenue à aucune garantie vis-à-vis de la société DEMEURES RHONE-ALPES et ne saurait supporter à titre définitif une quelconque des condamnations prononcées à l’encontre de cette dernière.
En conséquence, la demande en garantie formée par la société DEMEURES RHONE-ALPES sera rejetée.
A l’inverse, la société DEMEURES RHONE-ALPES sera condamnée à garantir la société ERGO de toutes condamnations prononcées à son encontre, dans la limite des sommes auxquelles celle-ci est effectivement tenues après déduction de sa franchise, et dans la mesure de ce dont elle se sera effectivement acquittée.
VI. Sur la libération de la consignation
Au regard du montant total des sommes dues par la société DEMEURES RHONE-ALPES aux termes de la présente décision, il y a lieu d’ordonner, au profit des consorts [U]-[T], la levée de la consignation de la retenue de garantie d’un montant de 12.128,85 € réalisée auprès de la Caisse des dépôts et consignations, la société DEMEURES RHONE-ALPES restant tenue à les indemniser pour le surplus.
VII. Sur les demandes de fin de jugement
Aux termes de l’article 696 du Code de procédure civile, les parties perdantes sont condamnées aux dépens, à moins que le Juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
En l’espèce, la société DEMEURES RHONE-ALPES sera condamnée aux entiers dépens de l’instance.
Aux termes de l’article 700 du Code de procédure civile, le Juge condamne les parties tenues aux dépens ou qui perdent leur procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le Juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a lieu à ces condamnations.
En l’espèce, la société DEMEURES RHONE-ALPES sera condamnée à payer aux consorts [U]-[T] une somme qu’il est équitable de fixer à 2.500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, en l’absence de production de facturation ou de tout autre élément chiffré, et à la société ERGO, une somme qu’il est équitable de fixer à 1.500 €, en l’absence de production des mêmes éléments.
En l’espèce, il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire de la présente décision.
Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort ;
CONDAMNE la société DEMEURES RHONE-ALPES, in solidum avec la société ERGO VERSICHERUNG AKTIENGESELLSCHAFT, à payer à Monsieur [V] [T] et Madame [C] [U] les sommes de :
– 9.539, 79 € au titre des pénalités de retard,
– 9.560,05 € au titre de dommages et intérêts s’agissant du préjudice moral et financier,
– 3.729 € au titre des travaux de reprise,
DIT que la société ERGO VERSICHERUNG AKTIENGESELLSCHAFT peut opposer à Monsieur [V] [T] et Madame [C] [U] la franchise de 5% du montant du contrat de construction prévue à « l’acte de cautionnement », soit : (243.816/100) x 4 = 9.752,64 € ;
CONDAMNE la société DEMEURES RHONE-ALPES à garantir la société ERGO VERSICHERUNG AKTIENGESELLSCHAFT des condamnations prononcées à son encontre dans la limite des sommes auxquelles celle-ci est effectivement tenue après déduction de sa franchise, et dans la mesure de ce dont elle se sera effectivement acquittée ;
CONDAMNE la société DEMEURES RHONE-ALPES à payer à Monsieur [V] [T] et Madame [C] [U] la somme de 3.175 € au titre des remises prévues à l’avenant n°8 ;
ORDONNE au profit de Monsieur [V] [T] et Madame [C] [U], la levée de la consignation de la retenue de garantie d’un montant de 12.128,85 € réalisée auprès de la Caisse des dépôts et consignations, ladite somme venant en déduction des condamnations mises à la charge de la société DEMEURES RHONE-ALPES qui reste tenue à indemnisation du surplus ;
CONDAMNE la société DEMEURES RHONE-ALPES à payer à Monsieur [V] [T] et Madame [C] [U] une somme 2.500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, et à la société ERGO VERSICHERUNG AKTIENGESELLSCHAFT une somme de 1.500 € au titre des mêmes dispositions ;
CONDAMNE la société DEMEURES RHONE-ALPES aux entiers dépens de l’instance ;
DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
RAPPELLE que l’exécution provisoire de la présente décision est de droit.
En foi de quoi le Président et le Greffier ont signé la présente décision.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Anne BIZOT Julien CASTELBOU