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Contexte de l’affaireUne perquisition a été réalisée au domicile de M. [U] [Z] dans le cadre d’une enquête préliminaire sur un trafic de stupéfiants. Cette perquisition a permis de découvrir des clés d’un véhicule Mercedes, immatriculé au nom de la société [2], dont M. [Z] est le gérant. Le véhicule a été saisi et placé sous scellé le 7 mars 2022. Mise en examen de M. [Z]M. [Z] a été mis en examen le 10 mars 2022 pour des infractions liées aux législations sur les stupéfiants, les armes et le blanchiment d’argent. Demande de restitution du véhiculeLe 31 mars 2022, l’avocat de la société [2] a demandé la restitution du véhicule saisi. En l’absence de réponse, cette demande a été portée devant le président de la chambre de l’instruction, qui l’a transmise à la chambre de l’instruction. Arguments du moyenLe moyen critique l’arrêt qui a rejeté la requête en restitution du véhicule. Il soutient que les droits des tiers propriétaires de bonne foi doivent être respectés et que la bonne foi de la société [2] n’a pas été correctement appréciée. Il est également argumenté que la décision de la chambre de l’instruction a privé la société de ses droits propres. Réponse de la CourLa Cour a rappelé que, selon l’article 99 du code de procédure pénale, il n’y a pas lieu à restitution lorsque le bien saisi est l’instrument ou le produit de l’infraction. Cependant, les droits des tiers de bonne foi doivent être réservés, même si le bien est lié à une infraction. Analyse de la décision de la cour d’appelLa cour d’appel a rejeté la demande de restitution en affirmant que M. [Z] était l’utilisateur exclusif du véhicule et qu’il l’utilisait à des fins personnelles. Elle a également conclu que la société [2] ne pouvait pas être considérée comme de bonne foi, n’ayant pas d’existence autonome par rapport à son gérant. Conclusion de la CourLa Cour a estimé que la cour d’appel n’avait pas suffisamment examiné si M. [Z] était le propriétaire économique réel du véhicule et n’avait pas établi que la société [2] n’était pas de bonne foi. Par conséquent, la cassation a été encourue. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° 01337
GM
6 NOVEMBRE 2024
CASSATION
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 6 NOVEMBRE 2024
La société [2] a formé un pourvoi contre l’arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, en date du 4 juillet 2023, qui, dans l’information suivie des chefs d’infractions aux législations sur les stupéfiants et sur les armes, a rejeté sa demande de restitution.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de Mme Jaillon, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société [2], et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l’audience publique du 2 octobre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Jaillon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Une perquisition effectuée en enquête préliminaire portant sur un trafic de stupéfiants, au domicile de M. [U] [Z], mis en cause, a permis de découvrir, notamment, les clefs d’un véhicule Mercedes, immatriculé au nom de la société [2] dont il est le gérant, véhicule qui a été saisi et placé sous scellé le 7 mars 2022.
3. M. [Z] a été mis en examen le 10 mars suivant des chefs d’infractions aux législations sur les stupéfiants, sur les armes et blanchiment.
4. Par requête du 31 mars 2022, reçue au greffe du juge d’instruction le 6 avril suivant, l’avocat de la société précitée a demandé la restitution du véhicule, puis en l’absence de réponse, a saisi de cette demande le président de la chambre de l’instruction qui l’a transmise à la chambre de l’instruction.
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a rejeté la requête en restitution du véhicule Mercedes [Immatriculation 1] saisi, alors :
« 1°/ que les mesures de saisie et de confiscation prises en application du code de procédure pénale sont mises en uvre sous réserve des droits des tiers propriétaires de bonne foi ; que la bonne foi d’une société tiers à la procédure dont les biens font l’objet d’une saisie pénale doit faire l’objet d’une appréciation propre, sans pouvoir être confondue avec celle de son gérant ; qu’en excluant toute appréciation des droits de la société [2] au motif qu’elle « ne [pouvait] se présenter comme un tiers de bonne foi ( ) dans la mesure où elle n’a aucune existence autonome par rapport à son gérant [U] [Z] », la chambre de l’instruction, qui a statué par des motifs ayant pour effet de le priver la société de ses droits propres, a violé les articles 6, § 2, de la directive 2014/42/UE du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014, 131-21 du code pénal, 99, 121-2 et 593 du code de procédure pénale ;
2°/ que les mesures de saisie et de confiscation prises en application du code de procédure pénale sont mises en uvre sous réserve des droits des tiers propriétaires de bonne foi ; qu’en rejetant la requête en restitution de la société [2] sans établir que son gérant, mis en examen dans la procédure, était le propriétaire économique rée du véhicule saisie – ce qui ne saurait résulter du seul fait que ce dernier en avait fait un usage exclusif et contraire à l’intérêt et à l’objet social de la société -, la chambre de l’instruction a privé sa décision de base légale au regard des articles 99 et 131-21 du code pénal et a violé l’article 593 du code de procédure pénale. »
Vu l’article 99, alinéa 4, du code de procédure pénale :
6. Selon ce texte, il n’y a pas lieu à restitution par la juridiction d’instruction notamment lorsque le bien saisi est l’instrument ou le produit direct ou indirect de l’infraction.
7. Cependant, ce texte doit être interprété à la lumière des dispositions de l’article 6, § 2, de la directive 2014/42/UE du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014, ce dont il résulte que les droits des tiers de bonne foi doivent être réservés, que le bien soit l’instrument ou le produit direct ou indirect de l’infraction.
8. Pour rejeter la requête en restitution du véhicule saisi, l’arrêt attaqué, après avoir précisé que ce véhicule a servi à commettre les infractions reprochées, relève que M. [Z] était non seulement l’utilisateur exclusif du véhicule dont il est demandé la restitution, mais qu’il l’utilisait à des fins personnelles.
9. Les juges ajoutent que la bonne foi de la société [2] ne peut être retenue dès lors qu’elle n’a aucune existence autonome par rapport à son gérant M. [Z], utilisateur exclusif, et à des fins étrangères à son objet social, du véhicule dont elle demande la restitution.
10. En statuant ainsi, la cour d’appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.
11. En effet, d’une part, elle n’a pas recherché si M. [Z] était le propriétaire économique réel du véhicule saisi, seule circonstance de nature à caractériser la libre disposition du bien qui ne peut résulter de la seule circonstance que la personne mise en examen use librement d’un véhicule appartenant à la société qu’il dirige, d’autre part, elle n’a pas établi que la société [2] n’était pas de bonne foi.
12. La cassation est par conséquent encourue.