Responsabilité partagée et indemnisation des désordres liés à un revêtement asphalte

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Responsabilité partagée et indemnisation des désordres liés à un revêtement asphalte

La SAS Dislial, successeur de la SCI La Roudet, a entrepris des travaux d’extension et de restructuration d’un centre commercial à [Localité 9] entre 2008 et 2009, impliquant plusieurs entreprises. Les travaux ont été réceptionnés en mai 2009, mais des fissures et infiltrations sont apparues en 2012, entraînant une expertise judiciaire. Le tribunal judiciaire de Libourne a rendu un jugement le 12 mars 2021, condamnant plusieurs entreprises à indemniser la SAS Dislial pour divers désordres, en précisant les parts de responsabilité entre elles. La société Smac a interjeté appel, contestando certaines condamnations et demandant une répartition différente des responsabilités. D’autres parties, dont Dune Constructions et les assureurs, ont également formulé des demandes et conclusions en appel. L’ordonnance de clôture a été rendue le 4 juin 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

26 septembre 2024
Cour d’appel de Bordeaux
RG
21/01898
COUR D’APPEL DE BORDEAUX

2ème CHAMBRE CIVILE

————————–

ARRÊT DU : 26 SEPTEMBRE 2024

N° RG 21/01898 – N° Portalis DBVJ-V-B7F-MA5R

S.A. SMAC

c/

Compagnie d’assurance SMABTP

S.A. AXA FRANCE IARD

S.A.S. DISLIAL

S.A.S. DUNE CONSTRUCTIONS

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 12 mars 2021 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de LIBOURNE (RG : 17/00083) suivant déclaration d’appel du 31 mars 2021

APPELANTE :

S.A. SMAC

SA immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro B 682 040 837, dont le siège social est sis [Adresse 1] à [Localité 8], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me CHRISTOPHE substituant Me Xavier LAYDEKER de la SCP LAYDEKER – SAMMARCELLI – MOUSSEAU, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉES :

Compagnie d’assurance SMABTP

SOCIETE MUTUELLE D’ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS (société d’assurance mutuelle à cotisations variables) prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 4]

recherchée en qualité d’assureur de la société DUNE CONSTRUCTIONS

sur appel provoqué de la SAS DUNE CONSTRUCTIONS en date du 30.07.21

Représentée par Me Claire PELTIER, avocat au barreau de BORDEAUX

et assistée de Me Jean CORONAT de la SCP AVOCAGIR, avocat au barreau de BORDEAUX

S.A. AXA FRANCE IARD

Société anonyme au capital de 214.799.030 €, inscrite au RCS de NANTERRE sous le n° 722 057 460, dont le siège social est sis [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

prise en sa qualité d’assureur de la Société DUNE CONSTRUCTIONS

sur appel provoqué de la SAS DUNE CONSTRUCTIONS en date du 02.08.21

Représentée par Me Stéphanie JEAN substituant Me Marin RIVIERE, avocat au barreau de BORDEAUX

S.A.S. DISLIAL

Société par Actions Simplifiée immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LIBOURNE sous le numéro B 333 593 101, dont le siège social

est situé [Adresse 6], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualite audit siège

Représentée par Me Michel PUYBARAUD de la SELARL MATHIEU RAFFY – MICHEL PUYBARAUD, avocat au barreau de BORDEAUX

et assistée de Me Nicolas MARGUERIE de la SCP DOREL-LECOMTE-MARGUERIE, avocat au barreau de CAEN

S.A.S. DUNE CONSTRUCTIONS

Société par actions simplifiée au capital de 100 000,00 €, immatriculée au RCS de [Localité 7] sous le n° 385 082 391 dont le siège social est [Adresse 2] (France), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me PERETTI substituant Me Pierre-Olivier BALLADE de la SELARL BALLADE-LARROUY, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été examinée le 18 juin 2024 en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Jacques BOUDY, Président

Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller

Madame Christine DEFOY, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Chantal BUREAU

Greffier lors du prononcé : Mme Audrey COLLIN

Le rapport oral de l’affaire a été fait à l’audience avant les plaidoiries.

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSÉ DU LITIGE

La SAS Dislial, venant aux droits de la SCI La Roudet, propriétaire d’un ensemble immobilier sis [Adresse 5] à [Localité 9] exploité sous l’enseigne E. Leclerc par la société Libourne Distribution, a fait procéder, courant 2008-2009 à des travaux d’extension et de restructuration du centre commercial et à l’édification d’un parc de stationnement en silo. Sont notamment intervenus à l’opération:

– la société Fayat TP chargée du lot VRD ;

– la SAS Dune Constructions, chargée du lot gros ‘uvre ;

– la société Daney chargée du lot charpente métallique, couverture, bardage, sous-traitant de Dune Constructions ;

– la société Amaf, chargée du lot menuiserie PVC-aluminium ;

– la société Parvaud chargée du lot carrelage et faïence ;

– la société Egep chargée du lot panneaux photovoltaïques ;

– la société Action Architecture chargée du lot maîtrise d »uvre ;

– la société Bureau Veritas en tant que contrôleur technique.

La réception des travaux d’extension et de restructuration du centre commercial est intervenue selon procès-verbaux du 6 mai 2009, celle des travaux du parc de stationnement est intervenue avec réserves, levées suivant procès-verbal du 20 avril 2010.

Dans le courant du premier trimestre 2012, sont apparues des fissurations et infiltrations affectant le parc de stationnement et le maître de l’ouvrage a obtenu en référé du tribunal de grande instance de Nanterre la désignation de Monsieur [S] [K] en qualité d’expert le 9 octobre 2012 au contradictoire de la SAS Dune Constructions et de son assureur la Smabtp, de la SA Bureau Veritas et de son assureur la Smabtp.

Après extension des opérations d’expertise, l’exert judiciaire a déposé son rapport le 15 octobre 2015 et c’est à l’aune de ce dernier que le tribunal judiciaire de Libourne a été saisi des diverses demandes indemnitaires des parties.

Par jugement en date du 12 mars 2021, le tribunal judiciaire de Libourne a :

– déclaré recevables les demandes de la SAS Dislial ;

– condamné in solidum la SAS Dune Constructions et la compagnie Axa France Iard à payer à la SAS Dislial la somme de 3 000 € HT, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement, au titre des fissurations du béton à la jonction des poteaux-poutres ;

– condamné in solidum la SAS Dune Constructions, la Smabtp son assureur, la SAS Action Archi Arnaud Architectes Associés et son assureur la Maf au paiement de la somme de 128 127,97 € HT à la société Dislial, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement, au titre des infiltrations sur la poutre située au droit du joint de dilatation du parking ;

– dit que dans leurs rapports entre eux, la responsabilité de ce désordre sera partagée à hauteur de Dune Constructions pour 70% et à hauteur de 30% pour SAS Action Archi Arnaud Architectes Associés ;

– condamné dans leurs recours entre eux les constructeurs déclarés responsables et leurs assureurs respectifs, à se garantir des condamnations prononcées à leur encontre, à proportion de la part de responsabilité ci-dessus indiquée ;

– condamné in solidum la SAS Dune Constructions et la compagnie Axa France Iard à payer à la SAS Dislial la somme de 78 630,29 € HT avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement, au titre du défaut d’aspect et d’adhérence de la peinture en sous-face du plancher haut du parking ;

– condamné in solidum la SAS Dune Constructions et la société Smac à payer à la SAS Dislial la somme de 28 389 € avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement, au titre de la déformation de la protection asphalte avec fissuration ;

– dit que, dans leurs rapports entre eux, la responsabilité de ce désordre sera partagée à hauteur de 5% des réparations par Dune Constructions et à hauteur de 95% par la société Smac ;

– dit qu’Axa France Iard devra garantir la SAS Dune Constructions des condamnations prononcées contre elle, au titre de ce désordre ;

– condamné dans leurs recours entre eux les constructeurs déclarés responsables à se garantir des condamnations prononcées à leur encontre, à proportion de la part de responsabilité ci-dessus indiquée ;

– condamné in solidum la SAS Dune Constructions, la Smabtp son assureur, la société Daney et son assureur la SA SMA, la SAS Action Archi Arnaud Architectes Associés et son assureur la Maf à payer la somme de 46 869,55 € au titre des épaufrures de l’acrotère béton au niveau de certaines fixations du garde-corps périphérique du parking, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

– dit que, dans leurs rapports entre eux, la responsabilité de ce désordre sera partagée à hauteur de 20% par Dune Constructions et la Smabtp, à hauteur de 70% par Daney et la SA SMA, et à hauteur de 10% par SAS Action Archi Arnaud Architectes Associés et la Maf ;

– condamné dans leurs recours entre eux les constructeurs déclarés responsables et leurs assureurs respectifs, à se garantir des condamnations prononcées à leur encontre, à proportion de la part de responsabilité ci-dessus indiquée ;

– condamné in solidum la SAS Dune Constructions et la Smabtp son assureur à payer à la SAS Dislial la somme de 18 000 € HT avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement, au titre des fissurations des plots béton au niveau de la fixation des candélabres et des range-caddies ;

– condamné in solidum la SAS Dune Constructions et la Smabtp son assureur, Action Architecture et son assureur la Maf au paiement de la somme de 3 190 € à la société Dislial avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement, au titre des frais d’investigations et des mesures conservatoires ;

– rappelé que les mêmes règles de garanties seront applicables concernant cette somme que pour les infiltrations sur la poutre située au droit du joint de dilatation du parking ;

– déclaré opposables les franchises d’Axa France Iard indexées sur l’indice BT01 à compter du rapport d’expertise jusqu’au présent jugement ;

– déclaré opposable la franchise de la Maf ;

– dit que chacune des sommes allouées à la société Dislial sera majorée de la somme de 15 % du montant hors taxes des travaux de reprise au titre des frais de maîtrise d »uvre, de bureau de contrôle et de SPS ;

– dit que les sommes dues seront actualisées selon l’indice BT01 depuis la date du rapport d’expertise jusqu’au présent jugement ;

– dit qu’aux sommes précitées exprimées hors taxes, s’ajoutera la TVA au taux en vigueur au jour de l’exécution ;

– condamné in solidum la SAS Dune Constructions et la Smabtp, la SAS Action Archi Arnaud Architectes Associés et son assureur la Maf, la Smac, Daney et la SA SMA à payer à la SAS Dislial la somme de 5 000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– dit que la charge finale de cette indemnité au titre de l’article 700 du Code de procédure civile sera répartie au prorata des responsabilités retenues pour les dommages ;

– dit n’y avoir lieu à l’exécution provisoire ;

– rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties;

– condamné in solidum la SAS Dune Constructions et la Smabtp, la SAS Action Archi Arnaud Architectes Associés et son assureur la Maf, la Smac, Daney et la SA SMA et dit que la charge finale des dépens sera répartie au prorata des responsabilités retenues pour les dommages, les dépens comprenant les frais d’expertise, les frais de référé des ordonnances des 9 octobre 2012, 20 février 2014, 26 novembre 2014.

Par déclaration électronique en date du 31 mars 2021, la société Smac a interjeté appel de la décision en ce qu’elle a :

– condamné in solidum la SAS Dune Constructions et la société Smac à payer à la SAS Dislial la somme de 28 389 € avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement, au titre de la déformation de la protection asphalte avec fissuration ;

– dit que, dans leurs rapports entre eux, la responsabilité de ce désordre sera partagée à hauteur de 5% des réparations par Dune Constructions et à hauteur de 95% par la société Smac ;

– dit que chacune des sommes allouées à la société Dislial sera majorée de la somme de 15 % du montant hors taxes des travaux de reprise au titre des frais de maîtrise d »uvre, de bureau de contrôle et de SPS ;

– dit que les sommes dues seront actualisées selon l’indice BT01 depuis la date du rapport d’expertise jusqu’au présent jugement ;

– dit qu’aux sommes précitées exprimées hors taxes, s’ajoutera la TVA au taux en vigueur au jour de l’exécution ;

– condamné in solidum la SAS Dune Constructions et la Smabtp, la SAS Action Archi Arnaud Architectes Associés et son assureur la Maf, la Smac, Daney et la SA SMA à payer à la SAS Dislial la somme de 5 000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– dit que la charge finale de cette indemnité au titre de l’article 700 du Code de procédure civile sera répartie au prorata des responsabilités retenues pour les dommages ;

– dit n’y avoir lieu à l’exécution provisoire ;

– rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties;

– condamné in solidum la SAS Dune Constructions et la Smabtp, la SAS Action Archi Arnaud Architectes Associés et son assureur la Maf, la Smac, Daney et la SA SMA et dit que la charge finale des dépens sera répartie au prorata des responsabilités retenues pour les dommages, les dépens comprenant les frais d’expertise, les frais de référé des ordonnances des 9 octobre 2012, 20 février 2014, 26 novembre 2014.

Dans ses dernières conclusions en date du 29 novembre 2023, la société Smac demande à la cour de :

À titre principal,

– réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Libourne le 12 mars 2021 en ce qu’il l’a condamnée à régler à la société Dislial la somme de 28 389 € HT au titre des travaux propres à remédier à la déformation de la protection asphalte, la somme de 5.000 € au titre des frais irrépétibles, les dépens ;

– débouter la société Dislial de l’ensemble de ses demandes dirigées à son encontre au titre de la déformation de la protection asphalte, des frais irrépétibles et des dépens;

À titre subsidiaire,

– réformer le jugement en ce qu’il a dit que la responsabilité de la déformation de la protection asphalte serait partagée à hauteur de 5% des réparations par Dune Constructions et à hauteur de 95 % par elle-même ;

– condamner la société Dune Constructions à la relever indemne de l’intégralité des condamnations susceptibles d’être prononcées à son encontre au profit de la société Dislial ;

– condamner la société Dislial à lui régler une somme de 3 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions en date du 29 novembre 2023, la société Dislial demande à la cour de :

– confirmer, en ses dispositions soumises à la cour, le jugement prononcé le 12 mars 2021 par le tribunal judiciaire de Libourne ;

– débouter la société Smac de l’intégralité de ses demandes ;

– condamner la société Smac au paiement d’une indemnité de 3.000 euros, sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, en cause d’appel ;

– condamner la société Smac aux entiers dépens et en accorder distraction au bénéfice de la SCP Michel Puybaraud, avocat, par application des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile,

Dans ses dernières conclusions du 1er septembre 2021, la société Dune Constructions demande à la cour de :

– la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes ;

– confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

– débouter la société Smac et la SAS Dislial de leurs entières prétentions ;

– condamner la SA Smac à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions du 29 octobre 2021, la Société Mutuelle d’Assurance du Bâtiment et des Travaux Publics (Smabtp) demande à la cour de:

– juger qu’aucune demande n’est formulée à son égard ;

– confirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions ;

– condamner la société Dune à lui verser une somme de 4 000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Luc Boyreau sur le fondement de l’article 699 du Code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions du 30 novembre 2021, la compagnie Axa France Iard demande à la cour de :

– confirmer le jugement rendu dans toutes ses dispositions ;

– débouter toutes parties de ses demandes, fins et conclusions à son encontre ;

– condamner la société Smac à lui verser la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– condamner ces mêmes parties aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 4 juin 2024.

Pour une plus ample connaissance du litige et des prétentions et moyens des parties, il est fait expressément référence aux dernières conclusions et pièces régulièrement communiquées par les parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’indemnisation du désordre concernant la déformation de la protection asphalte avec fissuration,

Dans le cadre du présent appel limité à ce désordre, la société Smac, sous-traitante de la société Dune Constructions, critique le jugement déféré qui l’a condamnée in solidum avec la SAS Dune Constructions à payer à la SAS Dislial la somme de 28 389 € avec les intérêts au taux légal à compter du présent jugement, au titre de la déformation de la protection asphalte avec fissuration.

Elle conteste pour sa part toute responsabilité dans la survenance du dommage, considérant qu’aucune faute ne peut lui être imputée de ce chef et que la déformation du revêtement consiste en un phénomène normal et inexorable, le défaut d’entretien de l’ouvrage n’étant pas la cause des désordres, mais ayant seulement contribué à son aggravation.

La société Smac ajoute qu’à supposer même que puisse lui être reproché un manquement à son devoir de conseil, en n’ayant pas fourni une notice d’entretien du parking, cette faute ne présente en tout état de cause aucun lien de causalité avec le dommage constaté, puisque c’est l’usage même du parking qui a entraîné sa déformation, phénomène qui ne peut lui être imputé.

La société Dune Constructions rappelle pour sa part que la société Smac, en sa qualité de sous-traitante, est tenue à son égard d’une obligation de résultat et qu’elle a commis un manquement contractuel dans la mesure où elle n’a pas fourni les documents d’entretien indispensables à la conservation de l’ouvrage. Elle conclut par conséquent à la confirmation du jugement entrepris.

La compagnie Axa France Iard, prise en sa qualité d’assureur de la société Dunes Constructions, conclut également à la confirmation de la décision attaquée et à la responsabilité de la société Smac dans la survenance du dommage.

La Smabtp, assureur décennal de la société Dune Construction, considère qu’elle doit être mise hors de cause et que le jugement entrepris doit être confirmé su ce point.

La SAS Dislial estime pour sa part qu’aucune notice d’entretien du parking ne lui a été communiquée et que par conséquent la société Dune Constructions a engagé sa responsabilité contractuelle à son égard et la société Smac sa responsabilité délictuelle sur le fondement de l’ancien article 1382 du code civil.

A titre liminaire, il convient d’indiquer que l’expert judiciaire confirme la matérialité des désordres allégués par la société Dislial. Il indique dans son rapport qu’a été constatée la présence de flaches d’une profondeur variable, mais inférieure ou égale à 5 millimètres, situés au milieu des emplacements de parking dans les zones les plus fréquentées, ainsi que des marques d’empreintes de pneumatiques et de roues de caddies. La réparation de ces désordres se fait par apport de matière sous forme de galettes d’asphaltes de même nature que l’existant, réchauffées ou refondues avec un appareil radiant au gaz portatif et lissage à la spatule.

Selon l’expert ce dommage, bien que caractérisé, ne présente pas un caractère décennal car il ne porte pas atteinte à la solidité de l’ouvrage ou ne le rend pas impropre à sa destination. Il est, selon lui, la résultante du passage des véhicules sur la surface asphaltée. Il ajoute que la formation de flaches a été favorisée par l’absence d’entretien du parking qui ne peut être reprochée au maître de l’ouvrage qui a balayé quotidiennement le parking et auquel aucune notice d’entretien n’a été remise.

Il ressort des constatations de l’expert que l’apparition de flaches sur le parking est la résultante d’un double phénomène :tout d’abord le passage régulier des véhicules, qui s’avère inéluctable s’agissant du parking d’un centre commercial et le déficit d’entretien de l’ouvrage qui a nécessairement concouru à l’aggravation du dommage et dont le lien causal avec ce dernier est indéniable.

A ce titre, l’expert judiciaire précise que ce déficit d’entretien ne peut être imputé au maître de l’ouvrage, dès lors qu’il a procédé à un balayage régulier du parking, mais aux constructeurs qui ne lui ont pas remis une notice d’entretien et qui par conséquent ont failli à leur devoir de conseil.

Tel est le cas s’agissant de la société Dune Constructions qui a commis de ce chef un manquement à ses obligations contractuelles à l’égard du maître de l’ouvrage et également de la société Smac, qui a exécuté l’ouvrage et qui a donc failli à l’obligation de résultat lui incombant envers l’entrepreneur principal.

Dans ces conditions, la cour ne pourra que confirmer le jugement déféré a condamné in solidum la SAS Dune Constructions et la société Smac à payer à la SAS Dislial la somme de 28 389 €, conforme à l’évaluation de l’expert suivant devis du 7 juillet 2015 de la société Smac, avec les intérêts au taux légal à compter du jugement entrepris, au titre de ce désordre.

En outre, il convient de préciser que ladite indemnité sera actualisée selon l’indice BT01 depuis la date du rapport d’expertise jusqu’à la présente décision et qu’il conviendra d’y ajouter la TVA au taux en vigueur au jour de l’exécution. De plus, ladite somme allouée à la société Dislial sera majorée de la somme de 15 % du montant hors taxes des travaux de reprise, au titre des frais de maîtrise d »uvre, de bureau de contrôle et de SPS.

La réparation de ce dommage sera prise en charge par la Compagnie Axa France Iard qui ne conteste pas sa garantie de ce chef. La Smabtp, assureur décennal de la société Dune sera pour sa part mise hors de cause.

Sur le partage des responsabilités,

La société Smac critique également le jugement déféré qui a dit que, dans les rapports existant entre les parties, la responsabilité de ce désordre serait partagée à hauteur de 5% des réparations par Dune Constructions et à hauteur de 95% par la société Smac.

Cette dernière estime à ce titre qu’elle doit être intégralement relevée indemne de la condamnation mise à sa charge de ce chef par la société Dune Constructions, dès lors que cette dernière ne lui a jamais demandé de remettre au maître de l’ouvrage une notice d’entretien.

La société Dune Construction conclut pour sa part à la confirmation du jugement entrepris sur ce point.

S’il est exact que la société Dune Construction aurait pu demander à la société Smac de lui remettre une notice d’entretien du parking, la faute de cette dernière reste néanmoins prépondérante dans la survenance du dommage. En effet, nonobstant sa qualité de sous-traitante, elle demeure une entreprise à part entière à laquelle incombe un devoir d’information susceptible notamment d’être exécuté par la remise d’une notice d’entretien.

Par conséquent, le jugement déféré sera confirmé s’agissant de la part de responsabilité incombant au final à chaque entreprise.

Sur les autres demandes,

Les dispositions prises en application de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens en première instance seront confirmées.

La société Smac, qui succombe en cause d’appel, sera condamnée à payer à la société Dune Constructions et à la société Dislial la somme de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre 2000 euros, à la Compagnie Axa France Iard au même titre.

La société Dune Constructions devra régler à la Smabtp la somme de 1500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Smac sera également condamnée aux entiers dépens de la procédure, avec distraction au profit de la SCP Luc Boyreau et de la SCP Michel Puybaraud, en application de l’article 699 du code de procédure civile. Elle sera aussi déboutée de ses demandes au titre de l’article 700 du code de procédure cvile et des dépens.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire, mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

Dans les limites de l’appel,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la société Smac à payer tant à la société Dune Constructions qu’à la société Dislial la somme de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que celle de 2000 euros à la Compagnie Axa France Iard au même titre.

Condamne la société Dune Constructions à régler à la Smabtp la somme de 1500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Smac aux entiers dépens d’appel, avec distraction au profit de la SCP Luc Boyreau et de la SCP Michel Puybaraud, en application de l’article 699 du code de procédure civile,

Déboute la société Smac de ses demandes au titre de l’article 700 du code de procédure cvile et des dépens.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jacques BOUDY, président, et par Madame Audrey COLLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


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