En juin 2009, BNP Paribas a accordé un prêt de 220 408 euros à M. [C] pour l’achat d’un bien immobilier, garanti par la société Crédit logement. M. [C] a manqué à ses obligations de remboursement, entraînant la déchéance du terme et une mise en demeure de paiement. BNP Paribas a alors actionné la caution, qui a réglé la somme due et a poursuivi M. [C] en justice, le condamnant à rembourser 220 674,16 euros. Cette décision a été confirmée en appel.
Crédit logement a inscrit une hypothèque sur le bien de M. [C], qui a également été condamné à payer 59 920 euros à la Banque populaire Lorraine Champagne, entraînant une autre hypothèque sur le même bien. M. [C] a été autorisé à vendre le bien, mais lors de la distribution du prix, une erreur a conduit à ne pas désintéresser Crédit logement. Ce dernier a été indemnisé par ses assureurs pour 128 000 euros, avec subrogation dans ses droits contre M. [C]. Après une mise en demeure restée sans réponse, les assureurs ont assigné M. [C] en justice, qui a été condamné à payer 128 000 euros, avec intérêts, et a vu plusieurs de ses demandes rejetées. M. [C] a interjeté appel de ce jugement. Les parties ont formulé diverses demandes et conclusions, notamment concernant des dommages et intérêts et des frais de justice. La cour d’appel a confirmé le jugement initial, sauf en ce qui concerne une condamnation pour préjudice matériel, qu’elle a rejetée. M. [C] a été condamné à payer des frais d’appel et aux dépens. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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COUR D’APPEL DE NANCY
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT N° /24 DU 17 OCTOBRE 2024
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 24/00122 – N° Portalis DBVR-V-B7I-FJTL
Décision déférée à la Cour :
jugement du tribunal judiciaire de NANCY, R.G. n° 22/01363, en date du 19 décembre 2023,
APPELANT :
Monsieur [I] [C]
né le [Date naissance 3] 1985 à [Localité 6], demeurant [Adresse 4]
Représenté par Me Thomas CUNY, avocat au barreau de NANCY
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2024/1428 du 11/03/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de NANCY)
INTIMÉES :
S.A. MMA IARD,
société anonyme ayant son siège social sis [Adresse 1] immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LE MANS sous le n° 440 048 882, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège
Représentée par Me Frédéric BARBAUT de la SELARL MAITRE FREDERIC BARBAUT, avocat au barreau de NANCY
Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES,
société d’assurance mutuelle à cotisations fixes ayant son siège social sis [Adresse 1] immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LE MANS sous le numéro 775 652 126 agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Frédéric BARBAUT de la SELARL MAITRE FREDERIC BARBAUT, avocat au barreau de NANCY
SCP Pascal PETITJEAN et Elvire PETITDEMANGE, notaires associés
ayant son siège social [Adresse 2], immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de NANCY sous le n° 400 437 927 agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège
Représentée par Me Frédéric BARBAUT de la SELARL MAITRE FREDERIC BARBAUT, avocat au barreau de NANCY
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 26 Septembre 2024, en audience publique devant la Cour composée de :
Monsieur Francis MARTIN, président de chambre,
Madame Nathalie ABEL, conseillère, chargée du rapport
Madame Fabienne GIRARDOT, conseillère,
qui en ont délibéré ;
Greffier, lors des débats : Madame Christelle CLABAUX- DUWIQUET ;
A l’issue des débats, le président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 17 Octobre 2024, en application du deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
ARRÊT : contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 17 Octobre 2024, par Madame Christelle CLABAUX- DUWIQUET, greffier, conformément à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
signé par Monsieur Francis MARTIN, président de chambre, et par Madame Christelle CLABAUX- DUWIQUET, greffier ;
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Copie exécutoire délivrée le à
Copie délivrée le à
EXPOSE DU LITIGE
Par acte du 1er juin 2009, la banque BNP Paribas a consenti à M. [I] [C] un prêt d’un montant de 220 408 euros, afin de financer l’acquisition d’un bien immobilier situé [Adresse 5].
Ce prêt était garanti par le cautionnement de la société Crédit logement. M. [C] s’étant montré défaillant dans le remboursement de ce prêt, BNP Paribas a prononcé la déchéance du terme et a mis M. [C] en demeure de lui régler la somme de 120 093,70 euros par courrier recommandé avec accusé de réception du 29 décembre 2014.
La société BNP Paribas a actionné la caution, la société Crédit logement, qui lui a réglé la somme due par l’emprunteur à savoir 220 674,16 euros. La société Crédit logement a ensuite mis en demeure M. [C] de procéder au remboursement de cette somme, par courrier recommandé du 7 mai 2015. En l’absence de règlement, la société Crédit logement a assigné M. [C] devant le tribunal de grande instance de Nancy qui l’a condamné à lui payer la somme de 220 674,16 euros par jugement du 22 août 2018. Sur appel de M. [C], ce jugement a été confirmé par un arrêt du 24 octobre 2019 de la cour d’appel de Nancy.
La société Crédit logement a inscrit, le 30 juillet 2015, une hypothèque judiciaire provisoire au service de la publicité foncière de [Localité 7] sur le bien immobilier acquis par M. [C], devenue définitive le 2 décembre 2019.
Parallèlement à cette procédure, M. [C] a été condamné à payer à la Banque populaire Lorraine Champagne la somme de 59 920 euros avec intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2021. En vertu de cette décision, la Banque populaire Lorraine Champagne a inscrit une hypothèque judiciaire sur ce même bien immobilier.
Dans le cadre d’une procédure de saisie immobilière engagée à l’initiative de la Banque populaire Lorraine Champagne, M. [C] a été autorisé, par décision du 25 février 2016 du juge de l’exécution de [Localité 7], à vendre à l’amiable ledit bien immobilier.
En vertu de son inscription d’hypothèque judiciaire, le Crédit logement a déclaré sa créance pour un montant de 221 185,82 euros. Par jugement du 30 août 2018, le juge de l’exécution de Nancy a constaté la vente amiable intervenue le 12 août 2016 entre M. [C] et la SCI Mylaudre des mortes terres, moyennant le prix de 190 000 euros.
Lors de la distribution du prix de vente, la SCP Pascal Petitjean et Elvire Petitdemange, étude notariale, a omis par erreur de désintéresser le Crédit logement, en versant à la Banque populaire Lorraine Champagne le montant de sa créance, et le solde du prix de vente à M. [C].
Après réclamation du Crédit logement auprès de l’étude notariale, cette dernière a déclaré son sinistre auprès de ses assureurs, les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, qui ont indemnisé le Crédit logement à hauteur de 128 000 euros. Ce règlement était accompagné d’une quittance subrogative du 13 juillet 2021 par laquelle le Crédit logement a déclaré subroger les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles dans tous ses droits et actions contre M. [C].
Après mise en demeure des sociétés d’assurance, adressée par courrier recommandé avec accusé de réception du 12 novembre 2021, M. [C] n’a pas procédé au règlement.
Par acte d’huissier délivré le 2 mai 2022, les sociétés MMA Iard, MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire Petitdemange ont fait assigner M. [C] devant le tribunal judiciaire de Nancy qui a, par jugement du 19 décembre 2023 :
– condamné M. [C] à payer à la société MMA Iard et à la sociéte MMA Iard assurances mutuelles la somme de 128 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 12 novembre 2021,
– rejeté la demande de capitalisation des intérêts,
– condamné in solidum la société MMA Iard, la société MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire à payer à M. [C] la somme de 14 958,87 euros de dommages et intérêts au titre d’un préjudice matériel,
– débouté M. [C] de sa demande tendant à voir condamner la société MMA Iard, la société MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire à lui verser des dommages et intérêts au titre d’un préjudice moral,
– ordonné la compensation des créances réciproques,
– condamné M. [C] à payer à la société MMA Iard, la société MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeté la demande de M. [C] au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [C] aux dépens de l’instance,
– rejeté la demande tendant à écarter l’exécution provisoire.
Par déclaration enregistrée le 19 janvier 2024, M. [C] a interjeté appel du jugement précité, en ce qu’il l’a condamné à payer à la SA MMA Iard et à la société MMA Iard assurances mutuelles la somme de 128 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 12 novembre 2021, l’a débouté de sa demande tendant à voir condamner la SA MMA Iard, la société MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire à lui verser des dommages et intérêts au titre d’un préjudice moral, en ce qu’il l’a condamné à leur payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, a rejeté sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et l’a condamné aux dépens de l’instance.
Par conclusions déposées le 6 août 2024, M. [C] demande à la cour de :
– à titre principal, infirmer le jugement en toutes ses dispositions.
– statuant à nouveau, débouter MMA Iard, MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire Petitdemange de leurs demandes.
Subsidiairement,
– condamner in solidum, MMA Iard, MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire Petitdemange à payer à [C] les sommes suivantes:
– 16 074,25 euros au titre du surplus d’intérêts à la date du 26 décembre 2022, outre le surplus d’intérêts payés jusqu’à extinction de la dette,
– 50 000 euros au titre du préjudice lié à l’impossibilité de négocier avec le Crédit logement et du préjudice moral,
– ordonner la compensation des créances réciproques.
En toute hypothèse,
– débouter MMA Iard, MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire Petitdemange de leurs demandes plus amples et contraires,
– débouter MMA Iard, MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire Petitdemange de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner MMA Iard, MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire Petitdemange à régler la somme de 3 000 euros à M. [C] en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner MMA Iard, MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire Petitdemange aux dépens.
Par conclusions déposées le 3 juillet 2024, la société MMA Iard, la société MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire Petitdemange demandent à la cour de :
– confirmer le jugement en ce qu’il a :
– condamné M. [C] à payer à la SA MMA Iard et à la société MMA Iard assurances mutuelles la somme de 128 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 12 novembre 2021,
– débouté M. [C] de sa demande tendant à voir condamner la SA Mma Iard, la société MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire à lui verser des dommages et intérêts au titre d’un préjudice moral,
– condamné M. [C] à payer à la SA MMA Iard, la société MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeté la demande de M. [C] au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné M. [C] aux dépens de l’instance,
– rejeté la demande tendant à écarter l’exécution provisoire,
– infirmer le jugement en ce qu’il a :
– rejeté la demande de capitalisation des intérêts,
– condamné, in solidum, la SA MMA Iard, la société MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire Petitdemange à payer à M. [C] la somme de 14 958,87 euros de dommages et intérêts au titre d’un préjudice matériel,
– ordonné la compensation des créances réciproques.
Statuant de nouveau,
– ordonner la capitalisation des intérêts dus pour une année entière, conformément à l’article 1343-2 du code civil,
– débouter M. [C] de l’intégralité de ses demandes,
– débouter M. [C] de sa demande tendant à voir condamner in solidum MMA Iard, MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire Petitdemange à lui payer les sommes suivantes :
– 16 074,25 euros au titre du surplus d’intérêts à la date du 26 décembre 2022, outre le surplus d’intérêts payés jusqu’à extinction de la dette,
– 50 000 euros au titre du préjudice lié à l’impossibilité de négocier avec le Crédit Logement et du préjudice moral,
– débouter M. [C] de sa demande tendant à voir ordonner la compensation des créances réciproques,
En tout état de cause et y ajoutant,
– condamner M. [C] à payer aux sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles et à la SCP Pascal Petitjean et Elvire Petitdemange la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [C] aux entiers dépens d’appel.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à leurs conclusions visées ci-dessus, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 4 septembre 2024.
Sur la demande principale des sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles
Le premier juge a fait droit à la demande des sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles tendant à voir M. [C] condamné à leur payer la somme de 128’000 euros en leur qualité de subrogées dans les droits de la société Crédit logement.
M. [C] sollicite l’infirmation du jugement notamment de ce chef. A hauteur d’appel, il fait uniquement valoir que la solidarité ne se présume pas et qu’il lui serait «impossible de déterminer qui est subrogé et à hauteur de quel montant ».
Les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles sollicitent la confirmation du jugement de ce chef sur le fondement de la subrogation tant conventionnelle que légale.
L’article 2308 du code civil prévoit que la caution qui a payé tout ou partie de la dette a un recours personnel contre le débiteur principal tant pour le principal que pour les intérêts et les frais.
Par ailleurs, aux termes de l’article 1346’1 du code civil, la subrogation conventionnelle s’opère à l’initiative du créancier lorsque celui-ci, recevant son paiement d’une tierce personne, la subroge dans ses droits contre le débiteur. Cette subrogation doit être expresse. Elle doit être consentie en même temps que le paiement à moins que, dans un acte antérieur, le subrogeant n’ait manifesté la volonté que son cocontractant lui soit subrogé lors du paiement. La concomitance de la subrogation et du paiement peut être prouvée par tout moyen.
En l’espèce, il est constant que la société Crédit logement :
– était créancière de M. [C] de la somme de 220’674,16 euros, en sa qualité de caution, selon arrêt définitif de la cour d’appel de Nancy du 24 octobre 2019 ;
– avait ainsi un droit de recours personnel contre M. [C] ;
– a déclaré sa créance dans le cadre de la procédure de saisie immobilière initiée à l’encontre de M. [C] relativement au bien immobilier sur lequel elle bénéficiait d’une hypothèque judiciaire et que M. [C] a été autorisé à vendre amiablement (pour un prix de 190’000 euros) ;
– n’a cependant, par suite d’une erreur de l’office notarial lors de la distribution du prix de vente (de 190’000 euros), pas été désintéressée du solde d’un montant de 168 489,15 euros qui aurait dû lui revenir et qui a été versé à M. [C] ;
– a, à la suite de la déclaration de sinistre des notaires, reçu de leurs assureurs (les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles), à titre d’indemnisation de son préjudice, une somme de 128’000 euros selon quittance subrogative en date du 13 juillet 2021 selon laquelle la société Crédit logement « confirme subroger les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles dans tous les droits et actions qu’elle détient à l’encontre de M. [C] (…) à l’instant même du paiement de la somme de 128’000 euros et dans la limite de cette somme qui ne représente pas l’intégralité de la créancequ’elle détient de M. [C] ».
Il est également constant que M. [C] n’a donné aucune suite au courrier recommandé avec accusé de réception courrier du 12 novembre 2021 dans lequel les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles l’ont mis en demeure de rembourser cette somme de 128’000 euros.
Il en résulte que les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles sont bien subrogées dans les droits et actions de la société Crédit logement qui avait elle-même un recours personnel contre son débiteur M. [C].
C’est dès lors à bon droit que le premier juge a condamné M. [C] à payer aux sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles la somme de 128 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 12 novembre 2021, date de la mise en demeure.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement de ce chef.
Sur les demandes reconventionnelles formées par M. [C]
M. [C] sollicite reconventionnellement la condamnation des sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles à l’indemniser du préjudice matériel et moral qu’il prétend avoir subi par suite de la faute de l’étude notariale lors de la distribution du prix de vente. Les intimés s’opposent à cette demande en soulignant que M. [C] n’a subi aucun préjudice mais que l’erreur des notaires lui a au contraire permis de réaliser un gain.
Il est constant que, par suite d’une erreur lors de la distribution du prix de la vente amiable constatée le 12 août 2016, l’office notarial a versé la somme de 168’489,15 euros à M. [C] alors que cette somme aurait dû revenir à la société Crédit logement, en sa qualité de créancière inscrite dans le cadre de la procédure de saisie immobilière.
Si la faute de l’office notarial est ainsi établie, force est toutefois de constater que M. [C] ne rapporte pas la preuve d’un lien de causalité directe entre cette faute et le préjudice qu’il prétend avoir subi tant matériellement, en raison d’un surplus d’intérêts, de l’impossibilité d’avoir pu négocier avec la société Crédit logement, que moralement.
Il est de surcroît constant que M. [C] n’a, au jour du présent arrêt, toujours pas réglé à la société Crédit logement la somme de 40’489,15 euros correspondant à la différence entre ce qui lui a été versé par erreur à la place de la société Crédit logement lors de la distribution du prix (168’489,15 euros) et la somme de 128’000 euros qu’il est, dans le cadre de la présente procédure, condamné à rembourser aux sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles en leur qualité de subrogées dans les droits de Crédit logement, somme qu’il ne justifie pas davantage avoir d’ores et déjà réglée, de telle sorte que M. [C] a pu disposer à son gré, notamment en la plaçant, depuis maintenant près de quatre années, de cette somme de 168’489,15 euros dont il n’était en réalité pas créancier mais débiteur.
M. [C] apparaît en outre mal fondé à se prévaloir de sa propre turpitude, ayant consisté ne pas reverser cette somme de 168’489,15 euros à la société Crédit logement qu’il savait pourtant créancière à son égard de la somme totale de 221’185,82 euros.
Les demandes reconventionnelles en dommages et intérêts formés par M. [C] ne pourront dès lors qu’être rejetées.
Le jugement sera en conséquence :
– infirmé en ce qu’il a condamné la société MMA Iard, la société MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire à payer à M. [C] la somme de 14 958,87 euros au titre d’un préjudice matériel ;
– et confirmé en ce qu’il a débouté M. [C] de sa demande tendant à voir condamner la société MMA Iard, la société MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire à l’indemniser d’un préjudice moral.
La demande de compensation des créances réciproques sera dès lors déclarée sans objet.
Sur la capitalisation des intérêts
Les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles sollicitent l’infirmation du jugement en ce qu’il a rejeté leur demande de capitalisation des intérêts.
M. [C] sollicite la confirmation du jugement de ce chef.
L’article 1154 du code civil, dans sa rédaction applicable en l’espèce, antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, prévoit que les intérêts échus dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l’a prévu ou si une décision de justice le précise.
Par ailleurs la règle édictée par l’article L. 312-23 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable en l’espèce, antérieure à celle issue de la loi du 1er juillet 2010 selon laquelle aucune indemnité ni aucun coût autres que ceux qui sont mentionnés aux articles L. 312-21 et L. 312-22 du code de la consommation ne peuvent être mis à la charge de l’emprunteur dans les cas de remboursement par anticipation d’un prêt immobilier ou de défaillance prévus par ces articles, fait obstacle à l’application de la capitalisation des intérêts prévue par l’article 1154 susmentionné. Cette interdiction concerne tant l’action du prêteur contre l’emprunteur que les recours exercés par la caution.
Les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, subrogées dans les droits de la société Crédit logement ne disposent pas de plus de droit que cette dernière et ne sont dès lors pas fondées à solliciter la capitalisation des intérêts.
C’est dès lors à bon droit que le premier juge a rejeté cette demande et le jugement sera en conséquence confirmé de ce chef.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
M. [C] qui succombe sera condamné aux entiers dépens. Concernant l’application de l’article 700 du code de procédure civile, l’équité commande de confirmer le jugement en ce qu’il l’a condamné au paiement d’une somme de 2 000 euros et de le condamner à ce titre à hauteur d’appel à payer à une somme supplémentaire de 2 000 euros.
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a condamné la société MMA Iard, la société MMA Iard assurances mutuelles et la SCP Pascal Petitjean et Elvire à payer à M. [C] la somme de 14 958,87 euros au titre d’un préjudice matériel ;
Statuant à nouveau du seul chef infirmé et ajoutant ;
Rejette la demande de dommages et intérêts formée par M. [C] au titre d’un préjudice moral et d’un préjudice matériel ;
Constate qu’est sans objet la demande de compensation de créances réciproques ;
Rejette la demande formée par M. [C] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [C] à payer aux sociétés MMA Iard, MMA Iard assurances mutuelles et à la SCP Pascal Petitjean et Elvire Petitdemange une somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d’appel ;
Condamne M. [C] aux entiers dépens ;
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Francis MARTIN, président de chambre à la cour d’appel de NANCY, et par Madame Christelle CLABAUX- DUWIQUET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Minute en dix pages.