Responsabilité et Preuve : L’Importance de Justifier les Désordres dans les Relations Contractuelles

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Responsabilité et Preuve : L’Importance de Justifier les Désordres dans les Relations Contractuelles

Madame [F] [N] a assigné la SA ENEDIS devant le tribunal judiciaire de Lille, réclamant 1 250 euros pour des travaux et 3 000 euros en dommages et intérêts en raison d’un préjudice moral. Elle accuse ENEDIS d’avoir livré une installation électrique inachevée en 2016, laissant un trou dans le mur et des câbles non gainés, et de ne pas avoir effectué les réparations nécessaires pendant cinq ans. ENEDIS, de son côté, conteste les demandes de Madame [N], affirmant que les travaux de 2016 ont été réalisés correctement et que les désordres sont dus à des interventions de tiers. L’affaire a été plaidée le 4 juin 2024 et mise en délibéré pour décision le 24 septembre 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

24 septembre 2024
Tribunal judiciaire de Lille
RG
23/07014
TRIBUNAL JUDICIAIRE
de LILLE
[Localité 3]

☎ :[XXXXXXXX01]

N° RG 23/07014 – N° Portalis DBZS-W-B7H-XNHM

N° de Minute : 24/00241

JUGEMENT

DU : 24 Septembre 2024

[F] [N]

C/

S.A. ENEDIS

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT DU 24 Septembre 2024

DANS LE LITIGE ENTRE :

DEMANDEUR

Madame [F] [N], demeurant [Adresse 4] – [Localité 6]
représentée par Maître Farid MAACHI, avocat au barreau de LILLE

Aide juridictionnelle totale n°59350/001/2022/002241 en date du 9 mars 2022

ET :

DÉFENDEUR

S.A. ENEDIS, dont le siège social est sis [Adresse 2] – [Localité 5]
représentée par Maître Renaud JUN, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS À L’AUDIENCE PUBLIQUE DU 04 Juin 2024

Julie THOREZ, Juge, assisté de Sylvie DEHAUDT, Greffier

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DU DÉLIBÉRÉ

Par mise à disposition au Greffe le 24 Septembre 2024, date indiquée à l’issue des débats par Julie THOREZ, Juge, assistée de Sylvie DEHAUDT, Greffier

RG n°7014/23 – Page KB

EXPOSE DU LITIGE

Madame [F] [N] réside dans un immeuble situé [Adresse 4] à [Localité 6].

La SA ENEDIS a posé un compteur Linky au domicile de Madame [N].

Par acte signifié le 17 juillet 2023, Madame [F] [N] a fait assigner la SA ENEDIS devant la 10ème chambre du tribunal judiciaire de Lille à laquelle elle demande, aux visas des articles 1231-1 et suivants du code civil, de la condamner au paiement des sommes suivantes, outre les dépens :
1 250 euros au titre du coût des travaux,3 000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du trouble dans les conditions d’existence et du préjudice moral.
Après renvois ordonnés les 31 octobre 2023, 23 janvier 2024 et 26 mars 2024, l’affaire a été utilement plaidée à l’audience du 4 juin 2024.

Par conclusions écrites développées oralement par son conseil, Madame [F] [N] a demandé au tribunal de :
débouter la SA ENEDIS de ses demandes, fins et conclusions,condamner la SA ENEDIS à lui payer la somme de 1 250 euros au titre du coût des travaux,condamner la SA ENEDIS à lui payer la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du trouble dans les conditions d’existence et du préjudice moral,condamner la SA ENEDIS au paiement des dépens.
Elle soutient que la SA ENEDIS a commis une faute contractuelle en ce qu’elle a livré une installation électrique en 2016 non achevée en raison du trou dans le mur et des câbles non gainés ; qu’elle n’a dépêché aucune équipe afin de terminer l’installation électrique ; que le coût des travaux à réaliser afin de mettre fin à cette situation s’élève suivant devis à la somme de 1250 euros ; qu’en raison de la carence de la SA ENEDIS la laissant dans un environnement dégradé voire dangereux durant 5 années elle sollicite l’allocation de dommages et intérêts en réparation.

Sur les conclusions adverses, elle indique que les désordres constatés ne sont pas antérieurs à 2021 puisqu’elle a opéré, en raison de son âge, une confusion de dates avec l’année 2016 ; que la SA ENEDIS ne produit aucun élément au soutien de l’origine des désagréments en une intervention de dépannage dans sa rue en février 2021 ; qu’aucune intervention à son domicile n’a été effectuée en juin 2021 ou par la suite.

Par conclusions écrites développées à l’audience par son conseil, la SA ENEDIS a demandé au tribunal, de :
rejeter les demandes de Madame [N],condamner Madame [N] aux dépens.
Elle soutient que le chantier de 2016 avait pour but la réfection du branchement aérien et qu’il a été effectué selon les règles de l’art ; que l’état de la façade et des câbles résultent de l’intervention de tiers entre le mois d’août 2017 et le mois de février 2021 ; qu’aucune faute ne peut lui être reprochée pas plus qu’aux entreprises intervenant sous ses ordres ; qu’aucun lien de causalité n’est démontré entre ses interventions et les désordres constatés ; que sa responsabilité ne peut être engagée.

L’affaire a été mise en délibéré au 24 septembre 2024.

MOTIFS

Sur la demande en paiement au titre des travaux

Aux termes de l’article 9 du code de procédure civile « il incombe à chacune des parties de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. »

L’article 1231-1 du même code ajoute « Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure. »

Madame [N] produit un procès-verbal de constat d’huissier établi le 18 novembre 2021 relevant l’absence de gaine en pourtour des deux câbles électriques issus du compteur Linky et la présence d’un trou, non rebouché, opéré de l’intérieur vers l’extérieur. Il indique qu’en extérieur de l’habitation, le trou situé au niveau du passage des câbles est visible.

Elle verse également la note sociale rédigée le 12 janvier 2022 par le responsable espace seniors de la mairie d'[Localité 6] lequel indique s’être rendu au domicile de Madame [N] le 6 juillet 2021, relevant à cette occasion la présence de ces mêmes désordres. Après contact auprès de la SA ENEDIS, il précise qu’une intervention est programmée au domicile et que ces désagréments sont la conséquence d’une intervention technique dans la rue effectuée en février 2021.

Elle justifie donc de la présence de désordres au 6 juillet 2021.

Il ressort des pièces versées aux débats que la SA ENEDIS est intervenue le 19 juillet 2016 au [Adresse 4] aux fins de déposer le branchement aérien dans sa totalité et de procéder à la confection d’un nouveau branchement aérien.

La SA ENEDIS produit une prise de vue extraite de google street vieuw d’août 2017, non contestée par Madame [N], montrant qu’à cette date, la façade était intacte, exempte de trou.

Aucun élément ne permet de démontrer l’absence de gaine à l’intérieur du domicile découlant de cette intervention.

Le 1er février 2021, la SA ENEDIS est intervenue aux fins de pose du compteur Linky et a constaté à cette occasion « câbles avant compteur dénudés = poseur LNK sur place informe Mme que c’est très dangereux et a dit qu’il le signalerait… » le compte rendu de l’intervention du jour indique « suite réfection branchement il y a 5 ans la cliente devais poser une PC pour l’esthétique du câble sans que la gpc étais trop petite donc la cliente a découper notre gaine pour mettre le câble directement dans sa goulotte ».

Ainsi, la SA ENEDIS a constaté au 1er février 2021 la présence de désordres avant son intervention du jour.

Madame [N] ne produit aucun autre élément permettant d’imputer ces désordres à l’intervention de la SA ENEDIS.

Par suite, Madame [N] ne démontre pas que la SA ENEDIS a commis une faute à l’origine des désordres dont elle justifie pourtant de l’existence, pas plus que de la réalité d’un lien de causalité entre les deux.

Madame [N] ne justifiant pas de la faute commise par la SA ENEDIS engageant sa responsabilité, elle sera déboutée de sa demande en paiement des travaux de réfection.

Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive

La demande de dommages et intérêts de Mme [N], qui est subordonnée au succès de sa demande principale, n’est pas susceptible de prospérer.

Madame [F] [N] sera donc déboutée de cette demande.

Sur les dépens

L’article 696 du code de procédure civile énonce que « La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. »

En application de ces dispositions, il convient de mettre les dépens à la charge de Madame [N], partie perdante.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal judiciaire, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en dernier ressort, prononcé par mise à disposition au greffe :

Déboute Madame [F] [N] de l’ensemble de ses prétentions,

Condamne Madame [F] [N] au paiement des dépens.

Ainsi jugé et prononcé le 24 septembre 2024.

Le greffier La présidente


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