Le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé à [Adresse 5] a engagé des travaux de rénovation entre 2010 et 2011, impliquant plusieurs entreprises et sous-traitants, tous assurés par différentes compagnies. Les travaux ont été réceptionnés avec réserves, et M. [G], propriétaire d’un appartement adjacent, a signalé des infiltrations d’eau. Après une expertise amiable en 2016, M. [G] a assigné le syndicat des copropriétaires en 2018 pour obtenir une expertise judiciaire, qui a été ordonnée par le tribunal. Plusieurs ordonnances ont élargi le champ de l’expertise à divers assureurs et entreprises impliquées dans les travaux. Le rapport d’expertise a été déposé en mars 2022. M. [G] a ensuite assigné le syndicat pour obtenir des réparations et des indemnités. En réponse, le syndicat a assigné en garantie plusieurs entreprises et leurs assureurs. Les parties ont formulé diverses demandes et conclusions, notamment concernant les montants des réparations et les responsabilités respectives. L’affaire a été mise en délibéré pour décision en septembre 2024.
|
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
de BOBIGNY
JUGEMENT CONTENTIEUX DU 23 SEPTEMBRE 2024
Chambre 6/Section 3
AFFAIRE: N° RG 22/06917 – N° Portalis DB3S-W-B7G-WRR5
N° de MINUTE : 24/00502
Monsieur [U] [G]
[Adresse 4]
[Localité 15]
représenté par Me Virginie KLEIN, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : PN402
DEMANDEUR
C/
S.D.C. DE L’IMMEUBLE SIS [Adresse 5]
Représenté par son syndic coopératif Monsieur [U] [R]
[Adresse 5]
[Localité 15]
représentée par Maître Manuel RAISON de la SELARL Société d’exercice libéral RAISON-CARNEL, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : C2444
S.A.R.L. AGAPE ARCHITECTES ASSOCIES, venant aux droit de la SARL POSITIVE
[Adresse 2]
[Localité 8]
représentée par Maître Ladislas FRASSON-GORRET de la SELARL FRASSON – GORRET AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : D2009
S.A.R.L. ATELIER MONCHECOURT & CO
[Adresse 13]
[Adresse 13]
[Localité 9]
représentée par Maître Ladislas FRASSON-GORRET de la SELARL FRASSON – GORRET AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : D2009
Compagnie d’assurance MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (MAF), prise en sa qualité d’assureur des sociétés ATELIER MONCHECOURT & CO et AGAPE ARCHITECTES ASSOCIES
[Adresse 3]
[Localité 11]
représentée par Maître Ladislas FRASSON-GORRET de la SELARL FRASSON – GORRET AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : D2009
Compagnie d’assurance AXA FRANCE IARD, en qualité d’assureur dommages-ouvrage
[Adresse 6]
[Localité 14]
représentée par Maître Sophie BELLON de la SELARL GALDOS & BELLON, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : R056
Compagnie d’assurance AXA FRANCE IARD, en qualité d’assureur du SDC sis [Adresse 5]
[Adresse 6]
[Localité 14]
représentée par Maître Laurent LUCAS de la SELARL AVOX, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : J109
Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, enqualité d’assureur de la société A2B INGENIERIE
[Adresse 1]
[Localité 7]
représentée par Maître Olivier HODE de la SELARL RODIER ET HODE, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : C2027
S.A. MMA IARD, en qualité d’assureur de la société A2B INGENIERIE
[Adresse 1]
[Localité 7]
représentée par Maître Olivier HODE de la SELARL RODIER ET HODE, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : C2027
Compagnie d’assurance SMABTP, en qualité d’assureur de la société COREHA
[Adresse 12]
[Localité 10]
représentée par Maître Patrice D’HERBOMEZ de l’AARPI D’HERBOMEZ LAGRENADE & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : C0517
Société MMA IARD, en qualité d’assureur de la société COREHA
[Adresse 1]
[Localité 7]
défaillant
Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, en qualité d’assureur de la société COREHA
[Adresse 1]
[Localité 7]
défaillant
DEFENDEURS
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Monsieur François DEROUAULT, juge, statuant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l’article 812 du code de procédure civile, assisté aux débats de Madame Maud THOBOR, greffier.
DÉBATS
Audience publique du 27 Mai 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 23 Septembre 2024.
JUGEMENT
Rendu publiquement, par mise au disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort, par Monsieur François DEROUAULT, juge, assisté de Madame Maud THOBOR, greffier.
Le syndicat des copropriétaires, du [Adresse 5] à [Localité 15] (Seine-Saint-Denis), assuré auprès de la société Axa France Iard, a confié courant les années 2010-2011 des travaux de rénovation à :
– la société Atelier Monchecourt & Co, assurée auprès de la MAF, en charge d’une mission de maîtrise d’œuvre de conception du projet de réhabilitation ;
– la société Positive, aux droits de laquelle vient la société Agape Architectes Associés, assurée auprès de la MAF, en charge d’une mission de suivi et d’exécution des travaux ;
– la société Coreha, aujourd’hui liquidée, assurée auprès de la SMABTP, en qualité d’entreprise générale ;
– la société A2B Ingénierie, aujourd’hui liquidée, assurée auprès des MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles, qui s’est vu confier une mission de rédaction des CCTP.
Une assurance dommages-ouvrage a été souscrite auprès de la société Axa France Iard.
Les travaux ont été réceptionnés le 25 février 2011 avec réserves.
M. [G] est propriétaire d’un appartement en rez-de-chaussée au sein du lot du bâtiment C de la copropriété sise [Adresse 4] lequel est adossé au mur pignon de l’immeuble du [Adresse 5] à [Localité 15] (Seine-Saint-Denis).
M. [G] s’est plaint d’infiltrations en provenance de l’immeuble du [Adresse 5] – ci-après désigné le syndicat des copropriétaires.
Une expertise amiable diligentée par le cabinet IXI à l’initiative de M. [G] a eu lieu en juin 2016.
Par acte d’huissier en date du 9 mars 2018, M. [G] a assigné le syndicat des copropriétaires devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Bobigny aux fins de voir ordonner une expertise judiciaire.
Par ordonnance du 6 juillet 2018, le juge des référés a fait droit à la demande d’expertise judiciaire et a désigné M. [B] en qualité d’expert pour y procéder.
Par ordonnance du 10 avril 2019, le juge des référés a rendu les opérations d’expertise communes à la société Axa France Iard en qualité d’assureur dommages-ouvrage et assureur responsabilité civile du syndicat des copropriétaires.
Par ordonnance du 9 octobre 2019, le juge des référés a rendu les opérations d’expertise communes à la société Atelier Monchecourt & Co, à la société Agape Architectes Associés, et à la MAF.
Par ordonnance du 8 juillet 2020, le juge des référés a rendu les opérations d’expertise communes à la SMABTP en qualité d’assureur de la société Coreha.
Par ordonnance du 16 avril 2021, le juge des référés a rendu les opérations d’expertise communes aux MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles en qualité d’assureurs de la société A2B Ingénierie.
Le rapport d’expertise a été déposé le 23 mars 2022.
Par acte d’huissier en date du 27 juin 2022, M. [G] a fait assigner le syndicat des copropriétaires aux fins de voir :
– condamner le syndicat des copropriétaires à procéder sous astreinte de 100 euros par jour de retard aux travaux d’étanchéité de la jardinière tels que préconisés par l’expert judiciaire ;
– condamner le syndicat des copropriétaires à payer la somme de 18 192, 85 euros au titre des travaux de reprise des désordres tels que validés par l’expert judiciaire augmentée des intérêts légaux à compter de chaque facture ou devis précité ;
– condamner le syndicat des copropriétaires à payer la somme de 43 200 euros au titre du préjudice de jouissance subi depuis 2015 ;
– condamner le syndicat des copropriétaires à payer la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner le syndicat des copropriétaires aux dépens, en ce compris les frais d’expertise et de constat d’huissier ;
– rappeler l’exécution provisoire.
Par acte d’huissier en date du 9 janvier 2023, le syndicat des copropriétaires a assigné en intervention forcée aux fins d’appel en garantie la société Atelier Monchecourt & Co, la société Agape Architectes Associés et leur assureur la MAF, la société Axa France Iard en qualité d’assureur dommages-ouvrage et responsabilité civile, les MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles en qualités d’assureur de la société Coreha.
Par acte d’huissier en date du 9 juin 2023, la société Atelier Monchecourt & Co, la société Agape Architecte Associés et leur assureur la MAF ont assigné en intervention forcée et aux fins d’appel en garantie la SMABTP en qualité d’assureur de la société Coreha et les MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles ès qualités d’assureur de la société A2B Ingénierie.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 5 décembre 2023, le syndicat des copropriétaires demande au tribunal de :
– débouter M. [G] de ses demandes ;
– condamner in solidum la société Agape Architectes Associés et son assureur la MAF, les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles ès qualités d’assureur de la société A2B Ingénierie, la société SMABTP en qualité d’assureur de la société Coreha, la société Atelier Monchecourt & Co et son assureur la MAF, et la société Axa France Iard en qualité d’assureur
dommages-ouvrage à payer la somme de 10 479,81 euros au titre du coût de la réalisation d’une étanchéité dans la jardinière ;
– à titre subsidiaire, condamner in solidum la société Agape Architectes Associés et son assureur la MAF, les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles en leur qualité d’assureur de la société A2B Ingénierie, la société SMABTP en qualité d’assureur de la société Coreha, la société Atelier Monchecourt & Co et son assureur la MAF, et la société Axa France Iard en qualité d’assureur dommages-ouvrage à garantir le syndicat des copropriétaires de toute condamnation prononcée à son encontre au titre du préjudice de jouissance, des travaux de reprise, de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens ;
– débouter la société Agape Architectes Associés et son assureur la MAF, les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles en leur qualité d’assureurs de la société A2B Ingénierie, la société SMABTP en qualité d’assureur de la société Coreha, la société Atelier Monchecourt & Co et son assureur la MAF, et la société Axa France Iard en qualité d’assureur dommages-ouvrage de leurs demandes ;
– condamner toute partie succombante, in solidum le cas échéant, à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 15 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 22 novembre 2023, la société Atelier Monchecourt & Co, la société Agape Architectes Associés et leur assureur la MAF demandent au tribunal de :
– débouter toute partie de ses demandes dirigées contre elles ;
– à titre subsidiaire, fixer la part de responsabilité de la société Agape Architectes Associés entre 5 % et 10 % ;
– à titre subsidiaire, limiter le montant des travaux réparatoires à la somme de 12 914 euros TTC ;
– à titre subsidiaire, réduire le préjudice de jouissance à la somme de 10 000 euros ;
– à titre subsidiaire, condamner in solidum les MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles ès qualités d’assureurs de la société A2B Ingénierie et la SMABTP en qualité d’assureur de la société Coreha à garantir la société Atelier Monchecourt & Co, la société Agape Architectes Associés et leur assureur la MAF de toute condamnation prononcée à leur encontre ;
– faire application des plafonds et des franchises contractuellement prévus au contrat d’assurance MAF ;
– condamner tout succombant à payer la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens, avec application de l’article 699 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 6 novembre 2023, la SMABTP en qualité d’assureur de la société Coreha demande au tribunal de :
– débouter toute partie de ses demandes contre elle ;
– à titre subsidiaire, limiter à 15 % la part des condamnations mises à la charge de la SMABTP ;
– à titre subsidiaire, faire application des franchises et plafonds contractuellement prévus ;
– à titre subsidiaire, condamner in solidum toutes les parties condamnées à ses côtés à la garantir dans les proportions déterminées par le tribunal ;
– condamner toute partie à payer la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.
Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 7 novembre 2023, les MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles ès qualités d’assureurs de la société A2B Ingénierie demandent au tribunal de :
– débouter le syndicat des copropriétaires ;
– à titre subsidiaire, limiter le montant du préjudice matériel à 12 914 euros TTC ;
– à titre subsidiaire, limiter le montant du préjudice de jouissance à 10 000 euros ;
– à titre subsidiaire, condamner in solidum la société Agape Architectes Associés et son assureur la MAF, et la SMABTP en qualité d’assureur de la société Coreha, à garantir les MMA de toute condamnation prononcée à leur encontre ;
– à titre subsidiaire, limiter la part de la société A2B Ingénierie à 50 % ;
– à titre subsidiaire, faire application des limites du contrat d’assurance en termes de franchises et de plafonds ;
– condamner tout succombant à payer la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens, avec application de l’article 699 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 4 décembre 2023, la société Axa France Iard en qualité d’assureur dommages-ouvrage demande au tribunal de :
– condamner in solidum la société la société Atelier Monchecourt & Co, la société Agape Architectes Associés et leur assureur la MAF, les MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles ès qualités d’assureur de la société Coreha, à garantir la société Axa France Iard de toute condamnation prononcée à son encontre ;
– condamner le syndicat des copropriétaires, et à défaut, tout succombant in solidum à payer la somme de 6 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens, avec application de l’article 699 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 25 mai 2023, la société Axa France Iard en qualité d’assureur responsabilité civile du syndicat des copropriétaires, demande au tribunal de :
– débouter M. [G] de ses demandes ;
– condamner les sociétés A2B Ingénierie, Agape Architectes Associés et Coreha et leurs assureurs respectifs à indemniser les préjudices subis par M. [G] ;
– à titre subsidiaire, condamner les sociétés A2B Ingénierie, Agape Architectes Associés et Coreha et leurs assureurs respectifs à garantir le syndicat des copropriétaires de toute condamnation prononcée à son encontre ;
– condamner tout succombant à payer la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 17 janvier 2024.
L’affaire a été inscrite au rôle de l’audience du 27 mai 2024, où elle a été appelée.
Sur quoi elle a été mise en délibéré au 23 septembre 2024 afin qu’y soit rendue la présente décision.
I. Sur la recevabilité des demandes
Aux termes de l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond,
pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
Aux termes de l’article 14 du code de procédure civile, nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée.
En l’espèce, les demandes formulées par la société Axa France Iard en qualité d’assureur responsabilité civile du syndicat des copropriétaires tendant à « condamner les sociétés A2B Ingénierie, Agape Architectes Associés et Coreha et leurs assureurs respectifs à indemniser les préjudices subis par M. [G] » et à « condamner les sociétés A2B Ingénierie, Agape Architectes Associés et Coreha et leurs assureurs respectifs à garantir le syndicat des copropriétaires de toute condamnation prononcée à son encontre » sera déclarée irrecevable, faute d’intérêt à agir.
II. Sur le bien-fondé des demandes
Sur la responsabilité du syndicat des copropriétaires
Il est un principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage.
Aux termes de l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965, le syndicat est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers ayant leur origine dans les parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires.
En l’espèce, il résulte du rapport d’expertise que l’expert a constaté des traces d’infiltrations dans le salon de M. [G], sur le mur gauche, lequel était saturé d’humidité jusqu’à 1 mètre 50 de hauteur, ou encore dans le bureau jusqu’à 2 mètres 40 de hauteur et que le mur séparatif d’avec l’immeuble du [Adresse 5] est imbibé d’humidité. Il est également indiqué que les désordres perdurent depuis 2015, avec des décollements de plâtre, des cloquages d’enduit et de peinture, et avec la présence d’auréoles sur les murs concernés. Ces infiltrations rendent l’atmosphère de l’appartement humide.
Ces désordres trouvent leur origine dans l’absence d’étanchéité dans la jardinière du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], en ce que les eaux de pluie qui tombent dans la jardinière s’infiltrent et imbibent le mur de l’appartement de M. [G].
Compte tenu de la nature des désordres, il y a lieu de retenir que M. [G] subit un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage engageant la responsabilité du syndicat des copropriétaires – qui ne conteste pas que la jardinière de laquelle proviennent les troubles soit une partie commune.
Le syndicat des copropriétaires sera condamné à procéder aux travaux réparatoires prescrits par l’expert M. [B] dans son rapport du 23 mars 2022, sous astreinte dans les conditions prévues au dispositif.
Sur les préjudices subis par M. [G]
Il résulte du rapport d’expertise que le coût de reprise des désordres dans l’appartement de M. [G] s’élève à la somme de 12 914 euros TTC (devis Les Compagnons franciliens tel que diminué par l’expert) – étant relevé que les parties défenderesses n’ont pas proposé de devis alternatif à l’expert – à laquelle il faut ajouter les frais d’établissement du devis pour la somme de 250 euros TTC, soit la somme totale de 13 164 euros TTC.
La facture Reolian, établie au nom du syndicat des copropriétaires [Adresse 4], ne peut être retenue.
M. [G] produit enfin de nombreuses factures émises sur la période mars-août 2020 dont le lien avec les désordres n’est pas établi, de telle sorte qu’elles ne seront pas retenues non plus.
Sur le préjudice de jouissance, il sera rappelé qu’aucun texte n’oblige le tribunal à l’évaluer en fonction de la valeur locative du bien. Au cas d’espèce, il sera relevé que, pour autant qu’il est caractérisé dans son principe, le préjudice de jouissance allégué est disproportionné dans son quantum dès lors que les troubles sont localisés et cantonnés à un seul mur du salon et qu’il n’est pas démontré que cette pièce était rendue inutilisable. Il est regrettable qu’aucune photographie des désordres dans le salon n’ait été versée en procédure. Il convient néanmoins de prendre en compte la durée de ces troubles qui courent depuis 2018, l’inconfort incontestable de l’humidité d’une pièce à vivre et l’impossibilité de tout recueillement esthétique en raison des traces des infiltrations. En conséquence, le préjudice de jouissance sera fixé à la somme de 8 000 euros.
Le syndicat des copropriétaires sera donc condamné à payer à M. [G] la somme de 13 164 euros TTC au titre du préjudice matériel et la somme de 8 000 euros au titre du préjudice de jouissance.
Sur la responsabilité décennale des constructeurs
Les responsabilités encourues par les intervenants à l’acte de construire au titre de ces désordres pouvant, selon leur nature, relever de garanties d’ordre public, exclusives du droit commun de la responsabilité civile, il importe également de les qualifier.
Ainsi, les désordres cachés au jour de la réception – qui incluent les désordres ayant fait l’objet d’une réserve à réception, mais qui ne se sont révélés que par la suite dans leur ampleur et leurs conséquences – peuvent relever :
de la garantie décennale prévue par les articles 1792 et 1792-2 du code civil, laquelle couvre, d’une part, les dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination, et, d’autre part, les dommages affectant la solidité des éléments d’équipement de l’ouvrage faisant indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d’ossature, de clos ou de couvert ;de la garantie biennale prévue par l’article 1792-3 du code civil, laquelle renvoie au mauvais fonctionnement, dans les deux années suivant la réception, des autres éléments d’équipement de l’ouvrage ;de la responsabilité civile de droit commun sinon.
Constitue un ouvrage tous travaux réalisés par les constructeurs dont le résultat dispose d’un ancrage au sol.
En l’espèce, le tribunal observe qu’alors que la notion d’ouvrage est contestée par l’assureur dommages-ouvrage, le syndicat des copropriétaires échoue à en démontrer la réalité. Les photographies produites mettent en évidence que ce qui est appelé « jardinière » est constitué d’une planche de terre, partiellement végétalisée, et bordurée de pavés posés au même niveau que le reste du sol, sans différence apparente de niveau d’élévation. Le rapport d’expertise, qui se contente d’affirmer qu’ « il n’existe aucune étanchéité sur la périmétrie [de la jardinière]. Auparavant, il existait à l’emplacement de celle-ci un local fermé et hors d’eau », est insuffisant, en l’absence de production du marché de travaux et alors qu’il est indiqué par l’expert que l’étanchéité de la jardinière litigieuse n’apparaît pas dans le CCTP (cf. p.18), à établir que les travaux réalisés, dont il n’est démontré ni l’ampleur, ni l’apport à existant, sont constitutifs d’un ouvrage.
Partant, la mobilisation de l’assurance dommages-ouvrage n’est pas permise.
Les demandes du syndicat des copropriétaires fondées sur la responsabilité décennale des constructeurs ou la garantie responsabilité décennale de leurs assureurs seront rejetées.
Sur la garantie de l’assureur responsabilité civile du syndicat des copropriétaires
Aux termes de l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
En l’espèce, il s’infère des écritures de la société Axa France Iard que celle-ci ne conteste pas le principe de sa garantie, qu’il convient donc de mobiliser.
Sur la garantie des constructeurs et de leurs assureurs
En vertu de l’article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.
Aux termes de l’article L.124-3 alinéa 1 du code des assurances, le tiers lésé dispose d’un droit d’action directe à l’encontre de l’assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.
En l’espèce, le syndicat des copropriétaires appelle en garantie les constructeurs et leurs assureurs.
Il s’infère du rapport d’expertise que sur l’emplacement de la jardinière litigieuse existait auparavant un local qui a été démoli dans le cadre des travaux de rénovation, sans qu’ait été prévue dans les CCTP l’étanchéité de la jardinière. S’il est acquis que la société A2B Ingénierie s’était vu confier la rédaction des CCTP, le tribunal est dans l’impossibilité d’apprécier le périmètre de ses obligations contractuelles, faute pour le syndicat des copropriétaires de produire le contrat dans le cadre de la présente instance, de telle sorte que la responsabilité de la société A2B Ingénierie ne saurait, dans ces conditions, être engagée, et la garantie des MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles mobilisée.
En revanche, il résulte du rapport d’expertise que la société Coreha a manqué à son obligation de conseil en ne signalant pas au maître de l’ouvrage ou au maître d’œuvre d’exécution que les opérations de démolition auraient dû s’accompagner de travaux d’étanchéité au niveau de la jardinière. Dès lors que le la MAF communique l’attestation d’assurances de la société Coreha mentionnant la SMABTP comme assureur responsabilité civile, il sera retenu que la garantie de celle-ci est mobilisable.
Il sera retenu, s’agissant de la société la société Agape Architectes Associés, maître d’œuvre d’exécution, que celle-ci aurait dû identifier cette difficulté et la signaler afin de la rectifier. A cet égard, il convient d’observer que la MAF ne conteste pas le principe de sa garantie.
Il sera fait observer que les moyens développés par le syndicat des copropriétaires et tendant à engager la responsabilité de la société Atelier Monchecourt ne sont étayés par aucun élément objectif dans la mesure où l’expert n’identifie pas le maître d’œuvre de conception comme fautif et où il n’est pas établi que ce dernier ait commis une faute dans la conception de la jardinière – étant considéré que ne lui est pas imputable l’absence de mention relative à l’étanchéité dans le CCTP qu’il n’avait pas en charge de rédiger.
Il s’ensuit que les fautes de la société Coreha et de la société Agape Architectes Associés ont
occasionné une perte de chance au syndicat des copropriétaires de réaliser les travaux d’étanchéité nécessaires afin d’éviter toute infiltration. Cette perte de chance est évaluée à 95%.
Eu égard aux fautes respectives des deux sociétés, identiques, il y a lieu d’opérer un partage de responsabilité tel que suit :
– société Coreha : 50 % de la perte de chance ;
– société Agape Architectes Associés : 50 % de la perte de chance.
En conséquence, le tribunal entend :
– condamner in solidum la société Axa France Iard, la société Agape Architectes Associés et son assureur la MAF à garantir le syndicat des copropriétaires à hauteur de 95 % de toute condamnation prononcée à son encontre ;
– condamner la société Axa France Iard à garantir le syndicat des copropriétaires à hauteur des 5 % restants de toute condamnation prononcée à son encontre ;
– condamner la SMABTP à garantir la société Agape Architectes Associés et son assureur la MAF à hauteur de 50 % de toute condamnation prononcée à leur encontre ;
– condamner in solidum la société Agape Architectes Associés et son assureur la MAF à garantir la SMABTP à hauteur de 50 % de toute condamnation prononcée à son encontre.
III. Sur les mesures de fin de jugement
A. Sur les dépens
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à charge de l’autre partie.
L’article 699 du code de procédure civile prévoit que les avocats peuvent, dans les matières où leur ministère est obligatoire, demander que la condamnation aux dépens soit assortie à leur profit du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l’avance sans avoir reçu provision.
Parties perdantes, le syndicat des copropriétaires et son assureur la société Axa France Iard, la société Agape Architectes Associés et son assureur la MAF, et la SMABTP seront condamnés in solidum aux dépens, avec application de l’article 699 du code de procédure civile.
B. Sur les frais irrépétibles
En application de l’article 700 du code de procédure civile, le tribunal condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l’autre la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par principe, le tribunal alloue à ce titre une somme correspondant aux frais réellement engagés, à partir des justificatifs produits par les parties, ou, en l’absence de justificatif, à partir des données objectives du litige (nombre de parties, durée de la procédure, nombre d’écritures échangées, complexité de l’affaire, incidents de mise en état, mesure d’instruction, etc.). Par exception et de manière discrétionnaire, le tribunal peut, considération prise de l’équité ou de la situation économique des parties, allouer une somme moindre, voire dire qu’il n’y a lieu à condamnation.
Le syndicat des copropriétaires sera condamné à payer à M. [G] la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Seront condamnés in solidum la société Axa France Iard en qualité d’assureur responsabilité civile du syndicat des copropriétaires, la SMABTP, la société Agape Architectes Associés et son assureur la MAF à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 7 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Les autres parties seront déboutées de leur demande de ce chef.
C. Sur l’exécution provisoire
Aux termes de l’article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.
Il sera rappelé l’exécution provisoire du jugement.
Le tribunal, publiquement, par jugement réputé contradictoire, en premier ressort et mis à disposition au greffe,
DECLARE irrecevable la demande formulée par la société Axa France Iard en qualité d’assureur responsabilité civile du syndicat des copropriétaires et tendant à « condamner les sociétés A2B Ingénierie, Agape Architectes Associés et Coreha et leurs assureurs respectifs à indemniser les préjudices subis par M. [G] » ;
DECLARE irrecevable la demande formulée par la société Axa France Iard en qualité d’assureur responsabilité civile du syndicat des copropriétaires et tendant à « condamner les sociétés A2B Ingénierie, Agape Architectes Associés et Coreha et leurs assureurs respectifs à garantir le syndicat des copropriétaires de toute condamnation prononcée à son encontre » ;
CONDAMNE le syndicat des copropriétaires à procéder, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de quatre mois commençant à courir à compter de la signification du jugement, aux travaux d’étanchéité de la jardinière tels que préconisés par l’expert judiciaire M. [B] dans son rapport du 23 mars 2022 ;
CONDAMNE le syndicat des copropriétaires à payer à M. [G] la somme de 13 164 euros TTC au titre du préjudice matériel ;
CONDAMNE le syndicat des copropriétaires à payer à M. [G] la somme de 8 000 euros au titre du préjudice de jouissance ;
DEBOUTE le syndicat des copropriétaires de sa demande en paiement de la somme de 10 479,81 euros ;
CONDAMNE in solidum la société Axa France Iard, la société Agape Architectes Associés et son assureur la MAF à garantir le syndicat des copropriétaires à hauteur de 95 % de toute condamnation prononcée à son encontre ;
CONDAMNE la société Axa France Iard à garantir le syndicat des copropriétaires à hauteur des 5 % restants de toute condamnation prononcée à son encontre ;
CONDAMNE la SMABTP à garantir la société Agape Architectes Associés et son assureur la MAF à hauteur de 50 % de toute condamnation prononcée à leur encontre ;
CONDAMNE in solidum la société Agape Architectes Associés et son assureur la MAF à garantir la SMABTP à hauteur de 50 % de toute condamnation prononcée à son encontre ;
DIT que la condamnation de la MAF s’effectuera dans les limites contractuelles de franchise et de plafond ;
DIT que la condamnation de la SMABTP s’effectuera dans les limites contractuelles de franchise et de plafond ;
DEBOUTE les parties de leurs autres appels en garantie et autres demandes ;
CONDAMNE in solidum le syndicat des copropriétaires et son assureur la société Axa France Iard, la société Agape Architectes Associés et son assureur la MAF, et la SMABTP aux dépens, avec application de l’article 699 du code de procédure civile ;
CONDAMNE le syndicat des copropriétaires à payer à M. [G] la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE in solidum la société Axa France Iard en qualité d’assureur responsabilité civile du syndicat des copropriétaires, la SMABTP, la société Agape Architectes Associés et son assureur la MAF à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 8 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
DEBOUTE les autres parties de leur demande en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE l’exécution provisoire du jugement.
La minute est signée par Monsieur François DEROUAULT, juge, assisté de Madame Maud THOBOR, greffier.
LE GREFFIER LE PRESIDENT