Responsabilité et Garanties dans le Domaine de la Construction : Analyse des Obligations des Gérants

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Responsabilité et Garanties dans le Domaine de la Construction : Analyse des Obligations des Gérants

Madame [K] [W] et Monsieur [X] [W] ont confié à la société Qualipro des travaux d’extension de leur immeuble pour un montant de 66.704,73 euros TTC, selon un devis du 3 décembre 2014. La société a été radiée le 20 février 2019, et son gérant, Monsieur [J] [E], a été nommé liquidateur amiable. À partir de septembre 2019, les consorts [W] ont signalé des désordres et malfaçons sur la toiture de l’extension, constatés par un procès-verbal d’huissier le 11 janvier 2022. Ils ont demandé une expertise judiciaire, qui a été ordonnée le 17 mai 2022, et le rapport de l’expert a été déposé le 17 février 2023. Le 6 octobre 2023, les consorts [W] ont mis en demeure Monsieur [J] [E] de fournir son attestation de garantie décennale, sans réponse. Le 26 janvier 2024, ils l’ont assigné en réparation devant le tribunal judiciaire de Lille, demandant des indemnités pour les désordres, un préjudice immatériel, un préjudice moral, ainsi que des frais de justice. Monsieur [J] [E] n’ayant pas constitué avocat, le jugement sera réputé contradictoire. L’instruction a été clôturée le 27 mars 2024, et l’affaire est fixée à plaider le 4 juin 2024, avec une décision attendue le 17 septembre 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

17 septembre 2024
Tribunal judiciaire de Lille
RG
24/01089
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
-o-o-o-o-o-o-o-o-o-

Chambre 02
N° RG 24/01089 – N° Portalis DBZS-W-B7I-X4PA

JUGEMENT DU 17 SEPTEMBRE 2024

DEMANDEURS :

Mme [K] [W]
[Adresse 2]
[Localité 5]
représentée par Me Jonathan DA RE, avocat au barreau de VALENCIENNES

M. [X] [W]
[Adresse 2]
[Localité 5]
représenté par Me Jonathan DA RE, avocat au barreau de VALENCIENNES

DÉFENDEUR :

M. [J] [E] es qualité d’ancien gérant de l’EURL QUALIPRO
[Adresse 1]
[Localité 4]
défaillant

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président : Maureen DE LA MALENE, Juge, statuant en qualité de Juge Unique, en application de l’article R 212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire,

Greffier : Dominique BALAVOINE, Greffier

DÉBATS :

Vu l’ordonnance de clôture en date du 27 Mars 2024 ;

A l’audience publique du 04 Juin 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré, les parties ont été avisées que le jugement serait rendu le 17 Septembre 2024.

JUGEMENT : réputé contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 17 Septembre 2024, et signé par Maureen DE LA MALENE, Présidente, assistée de Dominique BALAVOINE, Greffier.

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant devis en date du 3 décembre 2014, Madame [K] [W] et Monsieur [X] [W] (ci-après les consorts [W]) ont confié à la société Qualipro, entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, des travaux d’extension de leur immeuble sis [Adresse 3] à [Localité 6] moyennant la somme de 66.704,73 euros TTC.

La société Qualipro a été radiée le 20 février 2019. Monsieur [J] [E], gérant de la société, a été désigné en qualité de liquidateur amiable.

A compter de septembre 2019, les maîtres de l’ouvrage se sont plaints de divers désordres et malfaçons entachant la toiture de l’extension qu’ils ont fait constater par procès-verbal d’huissier du 11 janvier 2022.

Par acte du 29 mars 2022, les consorts [W] ont sollicité du juge des référés du tribunal judiciaire de Lille une mesure d’expertise et par ordonnance du 17 mai 2022, Monsieur [V] [I] a été désigné en qualité d’expert.

L’expert a déposé son rapport le 17 février 2023.

Le 6 octobre 2023, les consorts [W] ont, par le biais de leur conseil, mis en demeure Monsieur [J] [E] de leur adresser son attestation de garantie décennale relative aux travaux litigieux, sans succès.

* * *

Par acte signifié le 26 janvier 2024, Madame [K] [W] et Monsieur [X] [W] ont assigné en réparation Monsieur [J] [E] en sa qualité d’ancien gérant de la société Qualipro devant le tribunal judiciaire de Lille.

Ils demandent au tribunal, au visa des articles 1792 du code civil et L.241-1 du code des assurances, de :
– condamner Monsieur [J] [E] en sa qualité d’ancien gérant de la société Qualipro à leur payer la somme de 20.564,04 euros au titre de la reprise des désordres affectant leur bâtiment ;
– dire que cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter de l’acte introductif d’instance ;
– condamner Monsieur [J] [E] en sa qualité d’ancien gérant de la société Qualipro à leur payer la somme de 2.632,26 euros au titre de leur préjudice immatériel ;
– condamner Monsieur [J] [E] en sa qualité d’ancien gérant de la société Qualipro à leur payer la somme de 5.000 euros au titre de leur préjudice moral ;
– condamner Monsieur [J] [E] en sa qualité d’ancien gérant de la société Qualipro à leur payer la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– le condamner aux entiers frais et dépens de l’instance.

Pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des demandeurs, le tribunal se réfère expressément à leur assignation, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

Monsieur [J] [E], assigné en sa qualité d’ancien gérant de la société Qualipro, n’a pas constitué avocat. Par conséquent, il sera statué par jugement réputé contradictoire conformément aux dispositions de l’article 473 du code de procédure civile.

La clôture de l’instruction a été ordonnée le 27 mars 2024 et l’affaire a été fixée à plaider à l’audience du 4 juin 2024.

La décision a été mise en délibéré au 17 septembre 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

L’article 472 du code de procédure civile dispose que si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

SUR LES DEMANDES DE CONDAMNATION FORMEES PAR LES CONSORTS [W]

Les consorts [W] soutiennent que Monsieur [J] [E] engage sa responsabilité à leur égard en sa qualité d’ancien gérant de la société Qualipro aux motifs qu’il a commis une faute personnelle en ne souscrivant pas de garantie décennale obligatoire, les privant ainsi d’une telle garantie alors même que les désordres dénoncés relèvent de celle-ci.

I. Sur la nature des désordres dénoncés par les consorts [W] :

L’article 1792 du code civil dispose que tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n’a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d’une cause étrangère.

Cette garantie suppose l’existence d’une réception.

– Sur l’existence d’une réception tacite :

Les consorts [W] soutiennent que les travaux litigieux ont fait l’objet d’une réception tacite dans la mesure où ils ont réglé la totalité du marché de travaux et ont pris la pleine possession de leur immeuble dès la fin des travaux.

Le 1er alinéa de l’article 1792-6 du code civil dispose que la réception est l’acte par lequel le maître de l’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l’amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement.

La réception tacite résulte non pas d’un acte matérialisé, mais d’une volonté non formellement matérialisée mais suffisamment explicite pour qu’elle soit connue des différents intervenants à l’acte de construire. Elle se traduit ainsi par l’expression d’une volonté non équivoque du maître de l’ouvrage d’accepter ledit ouvrage.

En l’espèce, il résulte des pièces versées aux débats que l’intégralité des travaux litigieux a été exécutée par la société Qualipro courant 2015, date à laquelle les consorts [W] ont pris possession des lieux de l’extension, et ce sans trouble jusqu’en 2019, lorsque leur locataire a constaté les premiers désordres dénoncés.

Par ailleurs, ils justifient s’être acquittés de la majeure partie du marché de travaux.

Aussi, ce paiement du prix et cette prise de possession de l’ouvrage par les maîtres de l’ouvrage créent une présomption simple de réception des travaux, renforcée par l’achèvement des travaux et l’absence de contestations de ces derniers durant plusieurs années.

Aussi, il y a lieu de considérer que les travaux d’extension exécutés par la société Qualipro ont fait l’objet d’une réception tacite sans réserve courant 2015.

Sur l’existence de désordres :

Les consorts [W] font état de fuites en toiture qui rendent l’ouvrage impropre à sa destination et relèvent en conséquence de la garantie décennale de l’article 1792 du code civil.

En l’espèce, les consorts [W] ont dénoncé à compter de 2019 différentes infiltrations au droit de la toiture de l’extension exécutée courant 2014 et 2015 par la société Qualipro.

L’expert judiciaire a ainsi constaté à l’occasion de ses opérations la présente de traces d’infiltrations sur le plafond de la cuisine, outre des taches d’humidité en dessous linteau au niveau du garage. Il a également relevé que certaines peintures du couloir, du séjour et de la façade sont détériorées en raison de l’humidité présente.

Il explique ces infiltrations par le fait que la pente de la toiture est insuffisante, en ce qu’elle est mesurée entre 2% et 3% et est négative au milieu, si bien que l’eau de pluie stagne en milieu bas de la toiture et engendre des infiltrations dans la cuisine et le long des solins.

L’expert a également constaté que la toiture est dépourvue d’aérateur, privant l’isolant de ventilation, si bien que la dilatation de la couverture en zinc, qui est parfois percée ou dessoudée, n’est pas réglementaire.

Or, dans la mesure où l’une des caractéristiques essentielles d’une toiture, constitutive d’un ouvrage au sens de l’article 1792 du code civil, est de garantir le clos et le couvert, et d’assurer ainsi l’étanchéité de l’extension à l’eau et à l’air, c’est à juste titre que l’expert judiciaire a relevé que ces fuites et infiltrations rendent l’ouvrage impropre à sa destination.

Par ailleurs, ces désordres sont apparus plusieurs années après la réception tacite de l’ouvrage, et n’étaient donc par conséquent pas visibles à ce moment-là. Ils ont en effet été dénoncés pour la première fois par courriel du locataire des consorts [W] le 29 septembre 2019.

Ces désordres relèvent en conséquence de la garantie décennale.

II. Sur la responsabilité de Monsieur [J] [E] en sa qualité d’ancien gérant de la société Qualipro :

Les consorts [W] soutiennent que Monsieur [J] [E] a commis une faute personnelle en ne souscrivant pas une assurance décennale alors même que celle-ci est obligatoire, si bien qu’il engage sa responsabilité à leur égard.

L’alinéa 1 de l’article L.223-22 du code de commerce applicable à l’EURL dispose que les gérants sont responsables, individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés à responsabilité limitée, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion.

Aux termes de l’alinéa 1 de l’article L.241-1 du code des assurances, toute personne physique ou morale, dont la responsabilité décennale peut être engagée sur le fondement de la présomption établie par les articles 1792 et suivants du code civil, doit être couverte par une assurance.

L’absence de souscription de l’assurance décennale est constitutive d’une infraction pénale, conformément aux dispositions de l’article L.243-3 de ce même code qui dispose que quiconque contrevient aux dispositions des article L.241-1 à L.242-1 dudit code sera puni d’un emprisonnement de six mois et d’une amende de 75 000 euros ou de l’une de ces deux peines seulement.

Aussi, il est constant que le gérant d’une société de construction qui ne souscrit pas d’assurance décennale commet une faute intentionnelle constitutive d’une infraction pénale et séparable de ses fonctions sociales et engage ainsi sa responsabilité personnelle à l’égard des maîtres de l’ouvrage.

En l’espèce, il ressort des écritures des demandeurs et des pièces versées aux débats que la société Qualipro ne leur a pas transmis, au moment de l’exécution des travaux litigieux courant 2015, une attestation d’assurance décennale.

Lors de la survenance des désordres entachant la toiture de l’extension, les consorts [W] ont donc, par le biais de leur conseil, mis en demeure Monsieur [J] [E] en sa qualité de gérant de la société Qualipro de leur adresser ladite attestation par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 6 octobre 2023.

Le plis a été distribué à Monsieur [J] [E] le 17 octobre 2023, qui n’a pas donné suite à leur demande.

Aussi, les maîtres de l’ouvrage n’ont pas eu la possibilité de mettre en œuvre cette garantie et d’assigner un éventuel assureur aux fins de prendre en charge les travaux de reprise.

Or, dans la mesure où d’une part la société Qualipro a fait l’objet d’une liquidation amiable si bien que sa solvabilité n’est plus garantie, et d’autre part que les désordres présentent un caractère décennal, Monsieur [J] [E] les a privés de toute possibilité d’être indemnisés par un assureur.

Monsieur [J] [E], en sa qualité d’ancien gérant de la société Qualipro, a donc bien commis une faute personnelle en ne souscrivant pas cette assurance décennale obligatoire, si bien qu’il engage sa responsabilité à l’égard des consorts [W] qui ont subi un préjudice certain du fait de cette faute.

III. Sur la réparation des préjudices :

– Sur la réparation du préjudice matériel :

Les consorts [W] sollicitent la condamnation de Monsieur [J] [E] au paiement de la somme de 20.564,04 euros aux motifs que leur préjudice est nécessairement équivalent à la perte résultant du défaut d’assurance, soit le montant des réparations qui aurait été pris en charge par une compagnie d’assurance.

En l’espèce, l’expert judiciaire préconise dans son rapport de relever le toiture côté rue tout en diminuant la hauteur du châssis de fenêtre situé sur le pignon afin de rendre l’ouvrage étanche, et a évalué ces travaux à la somme totale de 20.564,04 euros TTC comprenant à la fois les travaux urgents, les réparations de la toiture et la reprise des conséquences des infiltrations sur la peinture et la plâtrerie.

Aussi, il y a lieu de faire droit en intégralité à la demande formée par les maîtres de l’ouvrage dans la mesure où, en ne souscrivant pas l’assurance obligatoire, Monsieur [J] [E] les a privés de la sécurité procurée par une telle assurance, qui aurait couvert cette somme dans la mesure où la garantie décennale est applicable en l’espèce, et ce d’autant plus que la société Qualipro est désormais liquidée.

Ce préjudice est donc certain et est en lien direct avec cette absence de souscription d’assurance décennale obligatoire.

En conséquence, Monsieur [J] [E], en sa qualité de gérant de la société Qualipro, sera condamné à payer aux consorts [W] la somme de 20.564,04 euros en réparation de leur préjudice matériel avec intérêt au taux légal à compter du 26 janvier 2024, date de l’assignation, et ce jusqu’à parfait paiement.

– Sur les préjudices immatériels :

Par ailleurs, les maîtres de l’ouvrage sollicitent également la somme de 2.632,26 euros en réparation de leur préjudice résultant de l’absence d’augmentation de leur loyer du fait de l’existence des fuites et de leur préjudice de jouissance, outre la somme de 5.000 euros au titre de leur préjudice moral.

En l’espèce, la prise en charge des préjudices immatériels ne relève d’aucune assurance obligatoire, si bien que l’absence de souscription de l’assurance décennale obligatoire par Monsieur [J] [E] en sa qualité de gérant de la société Qualipro n’est pas en lien de causalité direct avec ces préjudices.

Dès lors, les consorts [W] seront déboutés de ces demandes de condamnation formées à l’encontre de Monsieur [J] [E] en sa qualité d’ancien gérant de la société Qualipro.

SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES

I. Sur les dépens :

L’article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

En l’espèce, Monsieur [J] [E], partie perdante, sera condamné aux dépens.

II. Sur l’article 700 du code de procédure civile :

En vertu de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a lieu à condamnation.

En l’espèce, Monsieur [J] [E], partie perdante, sera condamné à payer aux consorts [W] la somme de 2.000 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe de la juridiction, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,

CONDAMNE Monsieur [J] [E] en sa qualité d’ancien gérant de la société Qualipro à payer à Madame [K] [W] et à Monsieur [X] [W] la somme de 20.564,04 euros en réparation de leur préjudice matériel, et ce avec intérêt au taux légal à compter du 26 janvier 2024 jusqu’à parfait paiement ;

DÉBOUTE Madame [K] [W] et Monsieur [X] [W] de leurs demandes de condamnation formées à l’encontre de Monsieur [J] [E] en sa qualité d’ancien gérant de la société Qualipro au titre de leurs préjudices immatériel et moral ;

CONDAMNE Monsieur [J] [E] en sa qualité d’ancien gérant de la société Qualipro à payer à Madame [K] [W] et à Monsieur [X] [W] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [J] [E] en sa qualité d’ancien gérant de la société Qualipro aux dépens.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

Dominique BALAVOINE Maureen DE LA MALENE


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