Responsabilité et Garantie : Les Enjeux de la Sous-Traitance dans le Secteur de la Construction

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Responsabilité et Garantie : Les Enjeux de la Sous-Traitance dans le Secteur de la Construction
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Contexte de l’Affaire

Le 28 septembre 2005, la société Holding Trophy a signé une convention d’occupation temporaire avec le Port Autonome de Paris (PAP) pour l’entrepôt C46. Cette convention stipulait l’installation d’un système de chauffage dans la moitié nord de l’entrepôt.

Les Travaux et les Intervenants

Les travaux de chauffage ont été confiés à plusieurs entreprises, dont la société Terriat Ingénierie, M. [B] [F], la société Lacaze, la société Sabitherm, la société Péchon, et la société Asten. En octobre 2006, la chaufferie a été livrée, mais la société Holding Trophy a rapidement signalé des problèmes de température.

Expertise Judiciaire et Procédures

Face à l’insatisfaction de la société Holding Trophy concernant les températures, le PAP a demandé la désignation d’un expert judiciaire. Le tribunal administratif de Cergy a nommé M. [Y] comme expert le 22 mars 2010. Son rapport, déposé le 28 mars 2012, a conduit le PAP à saisir le tribunal administratif pour obtenir une indemnisation.

Jugement du Tribunal Administratif

Le 5 mai 2015, le tribunal administratif a condamné la société Terriat Ingénierie à verser des sommes au PAP, incluant des intérêts de retard et des frais d’expertise.

Actions en Garantie

Le 19 mai 2016, le PAP a assigné la SMABTP, assureur de Terriat Ingénierie, devant le tribunal de grande instance de Paris. La SMABTP a ensuite assigné la société Gan Assurances, assureur de M. [F], en appel de garantie.

Jugement du Tribunal de Grande Instance

Le 1er juin 2018, le tribunal a condamné la SMABTP à verser des sommes au PAP et a rejeté l’appel en garantie de la SMABTP contre Gan Assurances.

Appel et Décisions de la Cour d’Appel

La SMABTP a interjeté appel, et le 19 janvier 2022, la cour d’appel a infirmé le jugement en ce qui concerne l’appel en garantie, déclarant irrecevable l’appel de la SMABTP contre Gan Assurances.

Décision de la Cour de Cassation

Le 11 mai 2023, la Cour de cassation a cassé l’arrêt de la cour d’appel concernant l’irrecevabilité de l’appel en garantie, renvoyant l’affaire devant la cour d’appel de Paris.

Prétentions des Parties

La SMABTP a demandé l’infirmation du jugement de 2018 et la reconnaissance de sa subrogation dans les droits du PAP. Gan Assurances a contesté les prétentions de la SMABTP, arguant que M. [F] ne pouvait pas être tenu pour responsable des désordres.

Motivations de la Cour

La cour a examiné la recevabilité de l’appel en garantie et a conclu que la SMABTP était légitimement subrogée dans les droits du PAP. Elle a également statué sur la responsabilité de M. [F] et la garantie de Gan Assurances.

Conclusion de la Cour

La cour a infirmé le jugement précédent, a déclaré que les garanties de Gan Assurances étaient mobilisables, et a condamné cette dernière à garantir la SMABTP des condamnations antérieures, tout en précisant que Gan Assurances pouvait opposer la franchise prévue dans son contrat.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

23 octobre 2024
Cour d’appel de Paris
RG n°
23/09575
Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 5

ARRET DU 23 OCTOBRE 2024

(n° /2024, 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/09575 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHWMM

Décision déférée à la Cour : jugement du 1er juin 2018 – tribunal de grande instance de PARIS – RG n° 16/08676

Arrêt du 19 janvier 2022 – cour d’appel de Paris – RG N° 18/18606

Arrêt du 11 mai 2023 – Cour de cassation – Arrêt N°322 F-D

APPELANTE

Société SMABTP prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Sarra JOUGLA, avocat au barreau de PARIS, toque : C0431

Ayant pour avocat plaidant Me Carole FONTAINE, substituée à l’audience par Me Jean-Marie GRITTI, avocats au barreau de Paris

INTIMEE

S.A. GAN ASSURANCES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Sylvie KONG THONG de l’AARPI Dominique OLIVIER – Sylvie KONG THONG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0069

Ayant pour avocat plaidant Me Patrice PIN, substitué à l’audience par Me Irène GABRIELIAN, avocats au barreau de Paris

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 2 juillet 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Sylvie Delacourt, présidente de chambre chargée du rapport et Mme Viviane Szlamovicz, conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Sylvie DELACOURT, présidente

Mme Viviane SZLAMOVICZ, conseillère

Mme Rachel LE COTTY, conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Céline RICHARD

ARRET :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Sylvie Delacourt, présidente et par Manon Caron, greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Le 28 septembre 2005, la société Holding Trophy a conclu avec le Port Autonome de Paris (le PAP) une convention d’occupation temporaire de l’entrepôt C46 du Port de [Localité 5] lequel dépend du domaine public de l’Etat.

L’article 5 de la convention prévoyait une installation de chauffage de type radiant à ondes électromagnétiques dans la moitié nord de l’entrepôt.

Les travaux de chauffage ont été confiés aux entreprises suivantes :

– la société Terriat Ingénierie, assurée auprès de la SMABTP, intervenue selon un bon de commande du 16 novembre 2005 pour une étude ” chauffage gaz C46 en urgence “, puis selon un bon de commande du 19 septembre 2006 pour ” suivi de réalisation de l’installation de chauffage du C46 “,

– M. [B] [F] (M. [F]), assuré auprès de la société Gan, chargé d’établir le CCTP en qualité de sous-traitant de la société Terriat Ingénierie,

– la société Lacaze, chargée par le PAP de la fabrication et de la fourniture de la chaufferie gaz,

– la société Sabitherm, chargée par le PAP de la fourniture des panneaux radiants,

– la société Péchon, chargée par le PAP de la pose de l’installation selon bons de commande du 19 octobre 2006 et du 27 novembre 2006,

– la société Asten, chargée des travaux de bardage destinées à améliorer l’isolation thermique.

En octobre 2006, la chaufferie de la partie nord a été livrée.

La société Holding Trophy se plaignant de températures ne dépassant pas 7°C (au lieu des 14°C contractuels) et à défaut de solution amiable satisfaisante, le PAP a sollicité la désignation d’un expert judiciaire.

Le 22 mars 2010, le tribunal administratif de Cergy a désigné M. [Y] en qualité d’expert, au contradictoire de toutes les sociétés précitées.

Les opérations d’expertise ont ensuite été étendues au Gan Assurances et à la SMABTP.

Le 28 mars 2012, l’expert a déposé son rapport.

Le 4 mai 2012, le PAP a saisi le tribunal administratif de Cergy-Pontoise en indemnisation de ses préjudices.

Le 5 mai 2015, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a notamment condamné la société Terriat Ingenierie à verser au PAP la somme de 132 240,80 euros, augmentée des intérêts de retard au taux légal à compter du 4 mai 2012 avec capitalisation à compter du 21 mai 2014 ainsi que la somme de 32 933, 88 euros TTC au titre des frais de l’expertise judiciaire et celle de 7300 euros au titre des frais d’investigations.

Le 19 mai 2016, le PAP a fait assigner la SMABTP en qualité d’assureur de la société Terriat Ingénierie devant le tribunal de grande instance de Paris sur le fondement de l’action directe.

Le 18 novembre 2016, la SMABTP a fait assigner devant le même tribunal la société Gan Assurances en qualité d’assureur de M. [F], aux fins de garantie.

Les deux instances ont été jointes.

Par jugement du 1er juin 2018, le tribunal judiciaire de Paris a statué en ces termes :

Condamne la SMABTP en sa qualité d’assureur décennal de la société Terriat Ingénierie à payer à l’établissement public PAP les sommes suivantes :

– 136 240,80 euros HT avec les intérêts au taux légal à compter du 4 mai 2012 et capitalisation annuelle à compter 21 mai 2014,

– 20 000 euros avec intérêts au taux légal à compte de l’assignation, au titre des frais d’expertise supportés par le PAP,

– 2 500 euros avec intérêts au taux légale à compter de l’assignation,

Rejette l’appel en garantie formé par la SMABTP en sa qualité d’assureur de la société Terriat Ingénierie à l’encontre de la société Gan assurances en qualité d’assureur de M. [F] ;

Condamne la SMABTP en sa qualité d’assureur de la société Terriat Ingénierie à payer au PAP la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles de la présente instance ;

Condamne la SMABTP en sa qualité d’assureur de la société Terriat Ingénierie à payer à la société Gan assurances la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles de la présente instance ;

Condamne la SMABTP en sa qualité d’assureur de la société Terriat Ingénierie aux dépens ;

Admet les avocats qui peuvent y prétendre et qui en ont fait la demande au bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile

Ordonne l’exécution provisoire.

Par déclaration en date, la SMABTP a interjeté appel du jugement.

Par arrêt en date du 19 janvier 2022, la cour d’appel de Paris a statué en ces termes :

Infirme le jugement rendu le 1er juin 2018 par le tribunal de grande instance de Paris en ce qu’il a rejeté l’appel en garantie formé par la SMABTP en sa qualité d’assureur de la société Terriat Ingénierie à l’encontre de la société Gan Assurances en qualité d’assureur de M. [F],

Statuant à nouveau sur ce seul chef,

Déclare irrecevable l’appel en garantie formé par la SMABTP en sa qualité d’assureur de la société Terriat Ingénierie à l’encontre de la société Gan Assurances en qualité d’assureur de M. [F],

Confirme le jugement pour le surplus dans les limites de la saisine de la cour,

Y ajoutant,

Déboute la société Gan Assurances de sa demande formée en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SMABTP aux entiers dépens d’appel, avec faculté de recouvrement direct au profit de Me Kong Thong, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par arrêt en date du, 11 mai 2023 la 3ème chambre civile de la Cour de cassation a statué en ces termes :

Casse et annule, mais seulement en ce qu’il déclare irrecevable l’appel en garantie formé par la SMABTP en sa qualité d’assureur de la société Terriat Ingénierie à l’encontre de la société Gan assurances en qualité d’assureur de M. [F], l’arrêt rendu le 19 janvier 2022, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;

Remet, sur ce point, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Gan assurances aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Gan assurances et la condamne à payer à la SMABTP la somme de 3 000 euros

Par déclaration de saisine en date du 24 mai 2023, la SMABTP a saisi la cour d’appel de Paris sur renvoi après cassation, intimant devant la cour la société Gan assurances.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 20 juillet 2023, la SMABTP demande à la cour de :

Infirmer le jugement du 1er Juin 2018 prononcé par le tribunal de grande instance de Paris en ce qu’il a :

Rejeté l’appel en garantie formé par la SMABTP en sa qualité d’assureur de la société Terriat Ingénierie à l’encontre de la société Gan assurances en qualité d’assureur de M. [F],

Condamné la SMABTP en sa qualité d’assureur de la société Terriat Ingénierie à payer à la société Gan assurances la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles de la première instance.

Et statuant à nouveau :

Déclarer que la SMABTP a réglé les sommes mises à sa charge en vertu du jugement du 1er Juin 2018 rendu par le tribunal de grande instance de Paris,

Constater que l’arrêt de la Cour de Cassation rendu le 11 mai 2023 a cassé et annulé l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris le 19 janvier 2022 en ce qu’il a déclaré irrecevable l’action formée par la SMABTP à l’encontre de la société Gan assurances,

Et ainsi,

Déclarer que la SMABTP est subrogée dans les droits et actions de la société PAP conformément aux dispositions de l’article 1251 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, de l’article l121-12 et l’article l124-3 du code des assurances,

Et ainsi,

Déclarer l’action formée par la SMABTP à l’encontre de la société Gan assurances assureur de M. [F] est parfaitement recevable,

Au fond,

Constater que la société TERRIAT a sous-traité l’étude de chauffage litigieuse à M. [F], assuré auprès de la société Gan assurances, dont la responsabilité est retenue par l’Expert judiciaire,

Déclarer que la responsabilité de M. [F] est engagée,

Rejeter le moyen de non garantie soulevé par la société Gan assurances faute de justification de l’absence de déclaration du chantier, objet du litige,

En conséquence,

Déclarer que les garanties de la société Gan assurances sont mobilisables,

Et ainsi,

Condamner la société Gan assurances à relever et garantir intégralement la SMABTP des condamnations mises à sa charge en vertu du jugement du 1er juin 2018 rendu par le tribunal de grande instance de Paris, assortie des intérêts légaux à compter de la date du prononcé du jugement de 1ère instance,

Condamner Gan assurances à payer à la requérante la somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

La condamner aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Jougla, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 19 septembre 2023, la société Gan assurances demande à la cour de :

Rejeter l’ensemble des prétentions de la SMABTP à l’encontre de la société Gan assurances qui reposent sur des fondements juridiques erronés.

A titre subsidiaire,

Dire que le tribunal administratif n’a pas et ne pouvait pas statuer sur la responsabilité du sous-traitant M. [F].

En conséquence,

Dire que M. [F] ne saurait endosser l’entière responsabilité des désordres à la simple lecture du jugement du tribunal administratif,

Par suite,

Rejeter le moyen de la SMABTP selon lequel l’entière responsabilité du sous-traitant aurait été consacrée par le juge administratif et s’imposerait désormais à la cour d’appel.

Constater que la SMABTP ne verse pas aux débats la commande de la société Terriat Ingénierie faite à M. [F],

Par suite,

Dire qu’il n’est pas possible d’apprécier l’étendue des obligations qui pesaient sur le sous-traitant et qui n’auraient pas été respectées.

En conséquence,

Débouter la SMABTP de ses demandes de condamnation

A titre plus subsidiaire,

Constater que le BET [F] n’avait pas à se déplacer sur place.

Juger en conséquence que M. [F] ne saurait endosser l’entière responsabilité des désordres.

En toute hypothèse, sur la police de Gan assurances,

Débouter la SMABTP de ses demandes de condamnation envers Gan assurances.

A titre infiniment subsidiaire,

Et dans l’hypothèse où la cour condamnerait Gan assurances,

Rejeter l’argument de la SMABTP qui invoque dans le dispositif de ses conclusions de l’annexe ii art a243-1 du code des assurances sur les clauses-types applicables aux contrats d’assurance de dommages ouvrage

Rappeler que l’assurance du sous-traitant ne relève pas de l’assurance obligatoire

Juger que les garanties ne pourraient s’appliquer que sous déduction de la franchise prévue aux conditions particulières, opposable erga omnes conformément aux dispositions de l’article L 112-6 du code des assurances.

Juger que Gan assurances ne pourrait répondre qu’à hauteur de la stricte part de responsabilité imputée à son assuré

Débouter la SMABTP de ses demandes de paiement des intérêts légaux à compter du jugement. Juger que les intérêts ne peuvent être dus que du jour du paiement effectif.

En toute hypothèse,

Confirmer le jugement et débouter la SMABTP de l’ensemble de ses demandes articulées à l’encontre de Gan assurances

Condamner la SMABTP à payer à la société Gan assurances la somme de 7 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La condamner aux dépens de première instance et d’appel.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 4 juin 2024 et l’affaire a été appelée à l’audience du 2 juillet 2024, à l’issue de laquelle elle a été mise en délibéré.

MOTIVATION

Préalable

Les demandes de ” constater “, ” dire et juger “, ” juger”; voire ” supprimer ” ne saisissent la cour d’aucune demande en ce qu’il ne s’agit pas de prétentions mais de moyens (2e Civ., 9 janvier 2020, pourvoi n° 18-18.778).

Sur l’appel en garantie de la société SMABTP, assureur de la société Terrat Ingenierie à l’encontre de la société GaN Assurances en sa qualité d’assureur de M. [F]

Moyens des parties

La société Smabtp fait valoir qu’elle est recevable dans son appel en garantie à l’égard de la société Gan Assurances, pour avoir payé la condamnation due par son assuré, en application des articles 1251, 3° du code civil et L 121-12 du code des assurances.

La société Gan Assurances ne discute plus la recevabilité de la société Smabtp.

Réponse de la cour

Aux termes de l’article 624 du même code, la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l’arrêt qui la prononce. Elle s’étend également à l’ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d’indivisibilité ou de dépendance nécessaire.

Selon l’article L121-12 du code des assurances, dans sa version en vigueur depuis le 21 juillet 1976, l’assureur qui a payé l’indemnité d’assurance est subrogé, jusqu’à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l’assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l’assureur.

L’assureur peut être déchargé, en tout ou en partie, de sa responsabilité envers l’assuré, quand la subrogation ne peut plus, par le fait de l’assuré, s’opérer en faveur de l’assureur.

Par dérogation aux dispositions précédentes, l’assureur n’a aucun recours contre les enfants, descendants, ascendants, alliés en ligne directe, préposés, employés, ouvriers ou domestiques, et généralement toute personne vivant habituellement au foyer de l’assuré, sauf le cas de malveillance commise par une de ces pers

Selon l’article L124-3 du code des assurances dans sa version en vigueur depuis le 19 décembre 2007, le tiers lésé dispose d’un droit d’action directe à l’encontre de l’assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable. L’assureur ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui, tant que ce tiers n’a pas été désintéressé, jusqu’à concurrence de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité de l’assuré.

Selon l’article 1251 3° du code civil dans sa version en vigueur du 01 janvier 2007 au 01 octobre 2016 : ” La subrogation a lieu de plein droit :[‘] 3° Au profit de celui qui, étant tenu avec d’autres ou pour d’autres au paiement de la dette, avait intérêt de l’acquitter ; [‘] “.

Au cas d’espèce, il est établi que la Smabtp a indemnisé le PAP et qu’étant légalement subrogée dans les droits de celui-ci, elle est recevable à agir à l’encontre de la société Gan Assurances, assureur de M. [F].

Le jugement sera infirmé en ce qu’il a rejeté l’appel en garantie formé par la Smabtp, en sa qualité d’assureur de la société Terrat Ingénierie, à l’encontre de la société Gan Assurances, en qualité d’assureur de M. [F].

Sur la demande de garantie formée par la Smabtp à l’encontre de la société Gan Assurances

Moyens des parties

La Smabtp fait valoir que la responsabilité de M. [F] est engagée et que la garantie de la société Gan Assurances à son égard est pleinement mobilisable.

La société Gan Assurances conteste sa garantie en ce que le BET [F] a agi en qualité de sous-traitant et n’est pas soumis à la garantie décennale, ce qui rend mal fondée la demande de la Smabtp sur l’article 1792 du code civil.

Sur les dispositions de l’article 1231-1 du code civil, également revendiquées par la Smabtp, elle fait valoir qu’en l’absence de subrogation dans les droits de son assuré, elle ne peut pas invoquer la mise en jeu de la responsabilité contractuelle.

Subsidiairement, elle fait valoir que le tribunal administratif n’a pas statué sur la responsabilité de M. [F] auquel il ne peut pas être imputé l’absence d’étude thermique par l’entreprise.

Elle conteste sa garantie au motif que le chantier n’était pas déclaré et que le contrat a été résilié le 8 avril 2007 pour non-paiement des primes.

Réponse de la Cour

Selon l’article 625 du même code, sur les points qu’elle atteint, la cassation replace les parties dans l’état où elles se trouvaient avant le jugement cassé.

Aux termes de l’article 638 de ce code, l’affaire est à nouveau jugée en fait et en droit par la juridiction de renvoi à l’exclusion des chefs non atteints par la cassation.

– La responsabilité de M. [F]

L’article L. 241-1 du code des assurances soumet à l’obligation d’assurance ceux qui sont réputés constructeurs et comme tels visés à l’article 1792-1 du code civil. Sont exclus les sous-traitants qui, bien que passant avec l’entrepreneur principal un contrat de louage d’ouvrage, ne sont pas directement liés au maître d’ouvrage.

L’assureur d’une entreprise de construction qui, à la suite de désordres et d’un retard de livraison, a indemnisé l’utilisateur des bâtiments, peut se prévaloir de la subrogation légale dans les droits de son assurée, laquelle dispose contre son sous-traitant d’une action contractuelle. Viole l’article L. 121-12 du Code des assurances la cour d’appel qui déboute l’assureur de sa demande formée contre le sous-traitant en remboursement de l’indemnité qu’il a versée au motif que l’assureur est subrogé dans les droits de l’utilisateur et que sa demande doit se fonder sur la responsabilité quasi délictuelle qui implique la preuve d’une faute (1ère Civ., 10 avril 1996, pourvoi n° 93-18.952, Bulletin 1996 I n° 173).

Le sous-traitant n’est pas soumis aux responsabilités prévues aux articles 1792 et suivants dès lors qu’il n’existe pas de contrat de louage d’ouvrage entre le sous-traitant et le maître de l’ouvrage.

Il est tenu contractuellement à l’égard de l’entrepreneur d’exécuter des travaux exempts de tout vice, conformes à leurs engagements contractuels, aux réglementations en vigueur et aux règles de l’art. (1ère Civ., 21 octobre 1997, pourvoi n° 95-16.717, Bull. 1997, I, n° 279 et 3ème Civ., 17 décembre 1997, pourvoi n° 95-19.504, Bull. 1997, III, n° 227).

Le sous-traitant ne peut être tenu pour responsable que des conséquences de l’inexécution des obligations qu’il pouvait prévoir au regard du contenu de son contrat de sous-traitance. (3ème Civ., 13 mai 1992 pourvoi n°90-17.103, publié).

En l’espèce, pour la mise en place de l’installation de chauffage de type radiant à ondes électromagnétiques dans la moitié Nord de l’entrepôt C46, l’établissement du CCTP a été sous-traité par la société Terriat Ingenierie au BET [F].

L’inexistence d’une étude thermique de l’entreprise ne fait pas échec à la responsabilité de M. [F] et cette étude aurait pu être également préconisée par ses soins.

M. [F] a retenu que son étude avait été réalisée sur les plans fournis par le PAP et qu’il n’avait pas visité l’entrepôt C46.

L’expert désigné par le tribunal administratif a relevé que la température de base était erronée alors que tout bureau d’étude se doit de respecter les températures en vigueur et que le volume de renouvellement d’air ayant été minimisé, la puissance de chauffage ne correspondait plus aux déperditions.

L’expert a ajouté qu’il y avait lieu de réaliser une nouvelle étude afin de connaître la puissance exacte à installer dans l’entrepôt et il a relevé que l’erreur de calcul faite par M. [F] était importante.

Le manquement contractuel de M. [F] à l’égard de l’entreprise Terriat Ingenierie est établi.

– La garantie de la société Gan Assurances

Moyens des parties

La société Gan Assurances demande sa mise hors de cause.

Elle fait valoir qu’elle a assuré M. [F] du 1er mars 2005 jusqu’au 8 avril 2007, le contrat ayant été résilié à compter de cette date pour non-paiement des primes.

M. [F] n’étant pas soumis à l’assurance obligatoire puisqu’il n’a pas la qualité de locateur d’ouvrage, c’est le mécanisme de droit commun des assurances qui doit s’appliquer.

Elle fait valoir que le chantier n’a jamais été déclaré dans les 18 mois suivant la date d’ouverture du chantier (étude) et à tout le moins dans les 18 mois du second bon de commande de la pose de l’installation du 27 novembre 2006. En conséquence, elle dénie sa garantie en application des dispositions de l’article 22§03 alinéa 3 des conditions générale B1100.

En présence d’une non-assurance, la réduction proportionnelle de l’article L.113-9 du code des assurances ne peut pas être invoquée.

A titre plus subsidiaire, elle oppose ses limites de garantie.

Réponse de la cour

La non-assurance

Selon l’article L113-9 du code des assurances dans sa version en vigueur depuis le 21 juillet 1976, l’omission ou la déclaration inexacte de la part de l’assuré dont la mauvaise foi n’est pas établie n’entraîne pas la nullité de l’assurance.

Si elle est constatée avant tout sinistre, l’assureur a le droit soit de maintenir le contrat, moyennant une augmentation de prime acceptée par l’assuré, soit de résilier le contrat dix jours après notification adressée à l’assuré par lettre recommandée, en restituant la portion de la prime payée pour le temps où l’assurance ne court plus.

Dans le cas où la constatation n’a lieu qu’après un sinistre, l’indemnité est réduite en proportion du taux des primes payées par rapport au taux des primes qui auraient été dues, si les risques avaient été complètement et exactement déclarés.

La Cour de cassation a admis la validité des clauses expresses sanctionnant l’omission de déclaration de chantier par l’absence d’assurance (1ère Civ., 13 mai 1998, n 96-13.341).

Dans le silence du contrat ou si le contrat d’assurance prévoit comme sanction la réduction proportionnelle, celle-ci doit être appliquée (3ème Civ., 17 avril 2008, n 07-13.053).

Le contrat prévoit la règle proportionnelle en cas de défaut de déclaration des données visées aux §01 et §02 de l’article 18 des conditions générales qui ne visent pas les données variables.

En l’espèce, M. [F] est garanti au titre de la RDC et risques annexes des maîtres d”uvre et Ingénieurs-Conseils spécialisés intervenant dans le domaine de la construction. Les conditions particulières de cette assurance de la responsabilité décennale dans le domaine du ” bâtiment ” des maîtres d”uvre (ingénieurs et techniciens), BET, et ingénieurs-conseils spécialisés, à effet du 1er mars 2005.

Le chapitre 6 des conditions particulières mentionnent que les garanties du contrat ne sont appelées à s’appliquer que pour les chantiers déclarés sur la déclaration annuelle des éléments variables dans les 18 mois suivant la date d’ouverture du chantier : ” Les dispositions de l’article 2 des conditions générales B1100 sont complétées par les dispositions suivantes : les garanties du présent contrat ne sont appelées à s’appliquer que pour les chantiers déclarés sur la déclaration annuelle des éléments variables dans les 18 mois suivant la date d’ouverture de chantier [‘] Les dispositions de l’article 22§03 alinéa 3 des conditions générales B1100 sont remplacées par les dispositions suivantes : les chantiers non déclarés dans les 18 mois suivant la date d’ouverture de chantier ne sont pas garantis. Dans le cas où la déclaration annuelle des éléments variables sur laquelle est basée la prime définitive d’un exercice donné, comporte, pour un chantier déterminé déclaré ou une prestation livrée déclarée, une déclaration inexacte du montant des honoraires (ou de tout autre élément pris en compte pour le calcul de la prime définitive) ou sur la nature des prestations réalisées, il sera fait application en cas de versement par la compagnie d’une indemnité, d’une règle proportionnelle entre la prime perçue et celle qui aurait dû être perçue pour ledit chantier ou ladite prestation. ”

L’article 22 §03 alinéa 1 stipule: ” Faute par le souscripteur de fournir dans les délais fixés les déclarations requises aux paragraphes 01 et 02 ci-dessus, la compagnie pourra par lettre recommandée, mettre celui-ci en demeure de satisfaire cette obligation dans les dix jours. Si, passé ce délai, la déclaration n’a pas été formulée, la compagnie pourra mettre en recouvrement à titre d’acompte et sous réserve de régularisation ultérieure après vérification de la déclaration qui pourra être faite par la suite, une prime calculée sur la base de la dernière déclaration majorée de 50%. ”

L’article 22 §03 alinéa 2 stipule: ” En cas de non-paiement, la compagnie pourra suspendre la garantie et résilier le contrat dans les conditions prévues à l’article 21. ”

Le Gan Assurances ne produit ni les déclarations annuelles permettant de vérifier que le chantier en cause n’est pas mentionné, ni la mise en demeure de son assuré telle que prévue à l’article 22 §3, justifiant que l’assuré n’a pas effectué de déclaration.

Ainsi, la société Gan qui supporte la charge de la preuve de l’exclusion de garantie qu’il invoque, n’apporte aucun commencement de preuve permettant de retenir que le défaut de déclaration du chantier de l’entrepôt C46.

En conséquence, le moyen tenant au défaut de garantie pour non déclaration du chantier ne peut pas prospérer.

Les garanties de la société Gan assurances sont donc mobilisables et la société Gan Assurances sera condamnée à relever et garantir intégralement la Smabtp des condamnations mises à sa charge en vertu du jugement du 1er juin 2018 rendu par le tribunal de grande instance de Paris, assortie des intérêts légaux à compter de la date du prononcé du jugement de 1ère instance en application de l’article 1231-7 du code de procédure civile.

Les limites de garanties

Selon l’article L112-6 du code des assurances, l’assureur peut opposer au porteur de la police ou au tiers qui en invoque le bénéfice les exceptions opposables au souscripteur originaire.

L’article 11 de la loi du 13 juillet 1930, devenu l’article L 1126 du code des assurances, permettant à l’assureur d’opposer au tiers qui invoque le bénéfice de la police les exceptions opposables au souscripteur d’origine (1ère Civ., 4 juillet 1978, pourvoi n° 77-10.681, Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre civile 1 N 250 p 197).

En l’espèce, la société Gan Assurances en qualité d’assureur de monsieur [B] [F] peut opposer à la société mutuelle d’assurances à cotisations variables Smabtp en sa qualité d’assureur de la société Terrat Ingenierie, la franchise prévue aux conditions particulières de son contrat la liant à son assuré.

Sur les frais du procès

Selon l’article 639 du code de procédure civile, la juridiction de renvoi statue sur la charge de tous les dépens exposés devant les juridictions du fond y compris sur ceux afférents à la décision cassée.

Le sens de l’arrêt conduit à condamner la société Gan Assurances à supporter les dépens de première instance et d’appel.

Le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile sera accordé aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre.

Le sens de l’arrêt conduit également à infirmer le jugement qui a condamné la Smabtp à payer à la société Gan Assurances la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Au titre des frais exposés en première instance et en cause d’appel et non compris dans les dépens, la société Gan Assurances, partie succombante sera condamnée à payer à la Smabtp la somme de 6 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement en ses dispositions en ce qu’il a :

rejeté l’appel en garantie formé par la société mutuelle d’assurances à cotisations variables Smabtp, en sa qualité d’assureur de la société Terrat Ingenierie à l’encontre de la société Gan Assurances en qualité d’assureur de monsieur [B] [F],

condamné la Smabtp en sa qualité d’assureur de la société Terrat Ingenierie à payer à la société Gan Assurances la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles,

condamné la société mutuelle d’assurances à cotisations variables Smabtp en sa qualité d’assureur de la société Terrat Ingenierie aux dépens.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que les garanties de la société Gan assurances en qualité d’assureur de monsieur [B] [F] sont mobilisables,

Condamne la société Gan Assurances en qualité d’assureur de monsieur [B] [F] à relever et garantir intégralement la Smabtp, en sa qualité d’assureur de la société Terrat Ingenierie des condamnations mises à sa charge en vertu du jugement du 1er juin 2018 rendu par le tribunal de grande instance de Paris, avec les intérêts légaux à compter de la date du prononcé du jugement de 1ère instance,

Dit que la société Gan Assurances en qualité d’assureur de monsieur [B] [F], peut opposer à la Smabtp en sa qualité d’assureur de la société Terrat Ingenierie, la franchise prévue aux conditions particulières du contrat,

Condamne la société Gan Assurances en qualité d’assureur de monsieur [B] [F] à supporter les dépens de première instance et d’appel,

Admet les avocats qui en ont fait la demande et peuvent y prétendre au bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

Condamne la société Gan Assurances en qualité d’assureur de monsieur [B] [F] à payer à la Smabtp en sa qualité d’assureur de la société Terrat Ingenierie, la somme de 6 000 euros au titre des frais exposés en première instance et en cause d’appel et non compris dans les dépens.

La greffière, La présidente,


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