Contexte de l’affaireLa société Enedis est responsable de la gestion du réseau public de distribution d’électricité, assurant l’acheminement de l’énergie jusqu’aux consommateurs. Elle effectue la relève des compteurs et transmet les estimations de consommation aux fournisseurs d’électricité, qui se chargent de la facturation et des réclamations. Depuis 2008, les clients doivent souscrire un contrat de fourniture d’électricité auprès du fournisseur de leur choix. Découverte de la fraudeMonsieur [H] [R], qui réside et exploite une miellerie à [Adresse 1], n’avait pas souscrit de contrat d’électricité entre le 28 juillet 2021 et le 28 juillet 2023. Cette situation a été révélée le 28 juillet 2023 par un agent d’Enedis, qui a dressé un constat de fraude. Un bordereau de consommation a été envoyé à Monsieur [R] le 31 juillet 2023, détaillant les consommations non facturées. Historique des contratsEnedis a fourni des preuves de l’absence de contrat entre 2020 et 2023, indiquant qu’un contrat avec TOTAL ENERGIE avait été résilié en 2020 et qu’un nouveau contrat avec EDF n’avait été souscrit qu’en 2023. Cela a confirmé que Monsieur [R] avait consommé de l’électricité sans contrat pendant cette période. Préjudice subi par EnedisEnedis a évalué son préjudice à 13.610,72 €, correspondant à 40.630 kWh consommés sans contrat. Malgré plusieurs courriers envoyés à Monsieur [R] pour réclamer le paiement, aucun règlement n’a été effectué. Enedis a donc décidé d’intenter une action en justice. Procédure judiciaireLe 11 juin 2024, Enedis a assigné Monsieur [H] [R] devant le Tribunal Judiciaire de Nîmes, demandant la reconnaissance de l’enrichissement injustifié et le paiement de la somme due. Monsieur [R] n’a pas constitué avocat, et l’instruction a été clôturée le 13 septembre 2024. L’affaire a été mise en délibéré pour le 25 octobre 2024. Décision du TribunalLe Tribunal a condamné Monsieur [H] [R] à verser à Enedis la somme de 13.610,72 €, avec intérêts à compter du 31 août 2023. Il a également été condamné à payer 1.000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile et aux dépens. La décision est exécutoire de droit à titre provisoire. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
❑ certifiée conforme
délivrée le
à
la SELARL AVOUEPERICCHI
TRIBUNAL JUDICIAIRE Par mise à disposition au greffe
DE NIMES
Le 25 Octobre 2024
Troisième Chambre Civile
————-
N° RG 24/03122 – N° Portalis DBX2-W-B7I-KQKQ
Minute n° JG24/205
JUGEMENT
Le Tribunal judiciaire de NIMES, Troisième Chambre Civile, a, dans l’affaire opposant :
S.A. ENEDIS, dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par la SELARL AVOUEPERICCHI, avocats au barreau de NIMES, avocats postulant, Me Martine RUBIN, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant
à :
Mme [H] [R], demeurant Le Rucher du Prieuré – [Adresse 1]
n’ayant pas constitué avocat
Rendu publiquement, le jugement réputé contradictoire suivant, en application de l’article 473 du code de procédure civile, statuant en premier ressort après que la cause a été fixée en circuit court à l’audience d’orientation du 13.09.2024, date à laquelle l’instruction a été clôturée conformément aux dispositions des articles 760 et 782 du Code de procédure civile, par Valérie DUCAM, Vice-Président, assistée de Nathalie FORINO, F.F. Greffier et qu’il en a été délibéré.
N° RG 24/03122 – N° Portalis DBX2-W-B7I-KQKQ
La société Enedis gère le réseau public de distribution et a pour mission d’acheminer l’énergie électrique jusqu’au point de livraison désigné par le fournisseur auquel il est contractuellement lié. En sa qualité de distributeur, elle procède à la relève des compteurs, estime, et évalue les quantités d’énergie consommées par les abonnés et utilisateurs, et adresse ensuite au fournisseur lesdites estimations, afin que ce dernier édite des factures correspondant aux quantités consommées. Les fournisseurs d’électricité comme la société EDF par exemple, sont en charge de la fourniture de l’électricité, de la facturation ainsi que de la gestion des réclamations. En l’état de l’ouverture du marché de l’électricité, plusieurs fournisseurs sont en concurrence sur le marché l’électricité.
Depuis le 1er janvier 2008, les clients ont l’obligation de souscrire un contrat de fourniture auprès du fournisseur de leur choix, comme stipulé en page 2 du « Référentiel des dispositions applicables en marché ouvert définies dans le cadre des travaux des instances de concertation GTE et GTG ».
Monsieur [H] [R] réside [Adresse 1], adresse où il exploite également une miellerie.
Le 28 juillet 2023, la société Enedis découvrait que Monsieur [H] [R] n’avait pas souscrit de contrat auprès d’un fournisseur d’électricité pour la période du 28 juillet 2021 au 28 juillet 2023, de sorte que pendant cette période, Monsieur [R] avait utilisé le réseau sans toutefois régler le coût des consommations effectuées. Le jour de la découverte de la fraude par un agent assermenté, ce dernier dressait une fiche PNT ELEC aux termes de laquelle ces circonstances étaient relatées.
Un bordereau de consommation, stipulant les modalités de calcul de ce redressement, et faisant état des consommations enregistrées mais non facturées par un fournisseur, était adressé le 31 juillet 2023 à Monsieur [R].
La société Enedis indique produire l’historique des contrats souscrits sur le point de livraison, plate-forme de gestion des échanges entre la société Enedis distributeur et ses fournisseurs quels qu’ils soient. Elle précise que dans le catalogue de ses prestations librement accessible sur Internet (https://www.enedis.fr/documents), la résiliation d’un contrat correspond à la prestation F 140, alors que la souscription d’un contrat correspond à la prestation F 120.
En l’espèce, elle expose que le code F 140 atteste d’une résiliation en 2020 du contrat souscrit auprès de TOTAL ENERGIE, alors que le code F 120 atteste d’une souscription d’un contrat de fourniture auprès de la société EDF en 2023, de sorte qu’elle conclut à l’absence de contrat souscrit auprès d’un fournisseur d’énergie entre l’année 2020 et l’année 2023.
La société Enedis estime subir un préjudice, au titre de l’énergie consommée en dehors de tout contrat de fourniture et valorisé à hauteur de la facture en date du 31 juillet 2023 à hauteur de 13.610,72 €, laquelle correspond à la consommation enregistrée pour ladite période s’établissant à 40.630 kWh.
Aucun règlement n’étant intervenu, la société Enedis émettait plusieurs courriers les 31 août 2023 et 13 octobre 2023, avant que son Conseil n’émette une lettre de mise en demeure le 7 février 2024, le pli étant revenu avisé mais non réclamé.
Ainsi, par acte de commissaire de justice en date du 11 juin 2024, la Société Enedis a attrait Monsieur [H] [R] devant le Tribunal Judiciaire de NIMES au visa des articles 1300 et suivants du code civil, afin de voir :
– Déclarer l’appauvrissement par manque à gagner de la société Enedis et l’enrichissement corrélatif par les dépenses évitées de la société M. [R] ;
– Déclarer que les conditions d’enrichissement injustifié sont remplies ;
– Condamner Monsieur [R] à lui payer une somme de 13.610,72 € au titre des consommations sans fournisseur, du 28 juillet 2021 au 28 juillet 2023, outre les intérêts au taux légal à compter du 31 juillet 2023 ;
– Condamner Monsieur [R] à lui payer une somme de 3.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile, outre les entiers dépens de l’instance ;
– Dire n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
La Société Enedis sollicite ainsi la condamnation de Monsieur [H] [R] à lui payer le montant de la facture impayée, sur le fondement de l’enrichissement sans cause.
Monsieur [H] [R], régulièrement assigné à étude, n’a pas constitué avocat.
L’instruction a été clôturée le 13 septembre 2024 par ordonnance du juge de la mise en état du même jour.
L’affaire, ayant fait l’objet d’un dépôt le 23 septembre 2024 dans le cadre de la procédure de circuit court, a été mise en délibéré au 25 octobre 2024.
Aux termes de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond.
Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
1 – Sur la demande principale de la Société ENEDIS
Aux termes de l’article 1300 du code civil, “Les quasi-contrats sont des faits purement volontaires dont il résulte un engagement de celui qui en profite sans y avoir droit, et parfois un engagement de leur auteur envers autrui.
Les quasi-contrats régis par le présent sous-titre sont la gestion d’affaire, le paiement de l’indu et l’enrichissement injustifié.”
L’article 1303 de ce code ajoute qu’ “En dehors des cas de gestion d’affaires et de paiement de l’indu, celui qui bénéficie d’un enrichissement injustifié au détriment d’autrui doit, à celui qui s’en trouve appauvri, une indemnité égale à la moindre des deux valeurs de l’enrichissement et de l’appauvrissement”.
Il est constant qu’en matière d’électricité, tout utilisateur du réseau est condamné au paiement des factures d’électricité établies au titre des pertes non techniques, par la société Enedis.
En l’espèce, il résulte des pièces versées aux débats, et notamment de la facture du 31 juillet 2023, de la lettre comminatoire du 31 juillet 2023, de la fiche PNT ELEC constatant la fraude, des lettres de mise en demeure en date des 31 août 2023, 13 octobre 2023 et 7 février 2024, de l’historique des contrats souscrits, de la note ERDF PRO CEF 05 E, et du référentiel des dispositions applicables en marché ouvert définies dans le cadre des travaux des instances de concertation GTE et GTG, que Monsieur [H] [R] n’a pas souscrit de contrat auprès d’un fournisseur d’électricité pour la période du 28 juillet 2021 au 28 juillet 2023, tout en consommant sur cette période à hauteur de 40.630 kWh.
La société Enedis produit une facture à hauteur de 13.610,72 € ainsi composée :
– « Énergie » : Reflète le coût d’approvisionnement de l’énergie fixé par décret.
La quantité d’énergie consommée qui n’a pas été payée s’établie à 40.630 kWh x 0,19 697 cts € (somme correspondant au coût de production pour la période) = 8002,89 € ;
– « Acheminement » : Reflète les coûts de transport et de distribution de l’énergie jusqu’au site et s’établie à 40.630 kWh x 0,05 259 = 2136,73 € ;
– « Peines et soins »: Reflète les coûts opérationnels supportés par Enedis notamment au titre de la gestion des consommateurs concernés et de la facturation de sa consommation = 40.630 kWh x 0,0296 cts € (somme correspondant au coût de production pour la période) = 1 202,65 €
TOTAL HT : 11.342,27 €
TVA : 2 268,45 €
Soit une somme totale de 13.610,72 € TTC.
Dans ces conditions, Monsieur [H] [R] sera condamné à verser à la Société Enedis la somme de 13.610,72 €, avec intérêts au taux légal à compter du 31 août 2023, date de la première mise en demeure.
2 – Sur d’éventuels de délais de paiement
Aux termes de l’article 1343-5 du code civil, “Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s’imputeront d’abord sur le capital.
Il peut subordonner ces mesures à l’accomplissement par le débiteur d’actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.
La décision du juge suspend les procédures d’exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d’intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.
Toute stipulation contraire est réputée non écrite.
Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux dettes d’aliment.”
En l’espèce, Monsieur [H] [R] n’a pas constitué avocat de sorte que le Tribunal n’est destinataire d’aucune information sur sa situation personnelle et financière.
Dans ces conditions, il n’est ni possible, ni opportun, d’octroyer des délais de paiement sur deux années.
3 – Sur les autres demandes
Sur les dépens
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie.
En l’espèce, Monsieur [H] [R], partie perdante, sera condamné aux dépens.
Sur l’article 700 du code de procédure civile
Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a lieu à condamnation.
En l’espèce, Monsieur [H] [R], condamné aux dépens, devra verser à la Société Enedis la somme de 1.000 €, au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Enfin, en application de l’article 514 du code de procédure civile, l’exécution provisoire sera ordonnée.
Le Tribunal, statuant publiquement par jugement réputé contradictoire rendu par mise à disposition au greffe et en premier ressort ;
CONDAMNE Monsieur [H] [R] à verser à la Société ENEDIS la somme de 13.610,72 €, avec intérêts au taux légal à compter du 31 août 2023, date de la première mise en demeure,
CONDAMNE Monsieur [H] [R] à verser à la Société ENEDIS la somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Monsieur [H] [R] aux dépens ;
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire.
Le Greffier, Le Président,