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M. [F] [O] a acheté un véhicule FIAT DUCATO auprès de M. [W] [N] pour 3.500 € en octobre 2020. Un contrôle technique préalable avait révélé des défaillances majeures. Après avoir effectué des réparations, M. [F] [O] a demandé une contre-visite, où il a découvert une modification du kilométrage du véhicule. Une expertise a confirmé un kilométrage réel de 263.072 km, indiquant une manipulation du compteur. M. [W] [N] a proposé de rembourser le prix de vente, mais sans les frais annexes, se présentant comme intermédiaire. M. [F] [O] a alors engagé une procédure judiciaire, demandant des compensations pour non-conformité et préjudice. Le tribunal a ordonné une expertise judiciaire qui a corroboré les conclusions précédentes. Lors de l’audience, M. [W] [N] n’était pas présent ni représenté. Le tribunal a condamné M. [W] [N] à rembourser une partie du prix de vente, à indemniser M. [F] [O] pour son préjudice, et à payer des frais de justice.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TOTAL COPIES 3
COPIE REVÊTUE formule exécutoire avocat
1
COPIE CERTIFIÉE CONFORME AVOCAT
1
COPIE EXPERT
COPIE DOSSIER + AJ
1
N° RG 23/03779 – N° Portalis DBYB-W-B7H-ON3P
Pôle Civil section 2
Date : 26 Septembre 2024
LE TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MONTPELLIER
Pôle Civil section 2
a rendu le jugement dont la teneur suit :
DEMANDEUR
Monsieur [F] [O]
né le 16 Septembre 1983 à [Localité 4],
demeurant [Adresse 2]
représenté par Maître Sophie MIRALVES-BOUDET de la SELARL CHATEL BRUN MIRALVES CLAMENS, avocats au barreau de MONTPELLIER
DEFENDEUR
Monsieur [W] [N] exerçant sous la qualité d’entrepreneur individuel dans le commerce de voiture et de véhicules automobiles légers, sous le numéro SIRET 811 383 850, demeurant [Adresse 1]
non représenté
COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :
Président : Michèle MONTEIL
Juge unique
assisté de Françoise CHAZAL greffier faisant fonction, lors des débats et du prononcé.
DEBATS : en audience publique du 27 Juin 2024
MIS EN DELIBERE au 26 Septembre 2024
JUGEMENT : signé par le président et le greffier et mis à disposition le 26 Septembre 2024
Selon certificat d’immatriculation en date du 16 octobre 2020, M. [F] [O] a acquis auprès de M. [W] [N], entrepreneur individuel, un véhicule de marque FIAT, modèle DUCATO, immatriculé [Immatriculation 3], avec 195.300 kilomètres au compteur, pour un prix de 3.500 €.
Un procès-verbal de contrôle technique avait été établi le 9 octobre 2020 par le CENTRE DE CONTROLE TECHNIQUE SETOIS, présentant un résultat défavorable en raison de défaillances majeures, auxquelles l’acquéreur a décidé de remédier en réparant le véhicule par ses propres moyens.
Estimant ces défaillances corrigées, M. [F] [O] a sollicité une contre-visite pour un nouveau contrôle technique, au cours de laquelle il a été averti d’une modification ancienne du kilométrage réel du véhicule.
Alerté par ces révélations, M. [F] [O] a, par l’intermédiaire de son assureur, mandaté le cabinet FRETAY IDEA afin de réaliser une expertise amiable sur le véhicule. Cet expert a déposé son rapport le 19 février 2021, dans lequel il a conclu à l’existence, d’une part, d’un kilométrage réel de 263.072 kms, soit une modification volontaire à la baisse de 55.279 kms avant la vente, et, d’autre part, d’une reprogrammation du calculateur moteur, afin de ne pas faire apparaître la présence des défauts du moteur sur le tableau de bord.
M. [F] [O] est entré en contact avec M. [W] [N] par messages électroniques, lequel a accepté de rembourser le prix de vente du véhicule, toutefois à l’exclusion des frais annexes, arguant avoir été un intermédiaire de la vente et non le vendeur.
Saisi par assignation en date du 16 août 2021, le juge des référés près le tribunal de proximité de Sète a, par ordonnance en date du 20 mai 2022, ordonné une expertise judiciaire sur le véhicule, confiée à M. [D] [V].
Cet expert a déposé son rapport le 23 janvier 2023, après une réunion d’expertise à laquelle M. [W] [N] n’était pas présent ni représenté malgré sa convocation en ce sens. Le rapport a confirmé que le kilométrage réel du véhicule ne correspondait pas à la description du vendeur. L’expert judiciaire a estimé le coût de la remise en état à 6.625,20 € et la valeur résiduelle du véhicule à 1.000 €.
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Vu l’assignation délivrée le 23 août 2023 à la requête de M. [F] [O], à l’encontre de Monsieur [N] [W], aux fins de :
Juger que Monsieur [N] [W] a manqué au respect de l’obligation de délivrance conforme du véhicule FIAT, modèle DUCATO, immatriculé [Immatriculation 3] vendu.
Prononcer la diminution du prix de vente.
Condamner à ce titre Monsieur [N] [W] à payer la somme de 2.500 euros à Monsieur [O].
Condamner Monsieur [N] [W] à payer à Monsieur [O] la somme de 11.400 euros à titre de dommages et intérêts correspondant au préjudice de jouissance subi sur la base de l’estimation chiffrée par l’expert, somme à parfaire au jour de l’audience.
Dire n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
Condamner Monsieur [N] [W] à la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamner Monsieur [N] [W] aux entiers dépens de l’instance.
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L’ordonnance de clôture est en date du 11 juin 2024.
L’affaire a été retenue à l’audience du 27 juin 2024.
L’avocat de M. [F] [O] a déposé son dossier et s’en tient à ses demandes telles qu’elles figurent dans son assignation, que le tribunal a exposé conformément aux dispositions des articles 455 et 768 du code de procédure civile.
M. [W] [N] n’est pas comparant ni représenté à l’audience. Il n’a fait valoir de moyen de défense à aucun moment de la procédure.
1°/ Sur le fondement applicable au litige :
L’article 12 du code de procédure civile dispose que le juge tranche le litige selon les règles de droit qui lui sont applicables.
M. [F] [O] dénonce la falsification volontaire du kilométrage de la part du vendeur, comportement qui relève d’un dol au sens de l’article 1137 du code civil, cependant il ne sollicite pas la nullité du contrat pour vice du consentement et souhaite rester en possession du véhicule, moyennant une réduction du prix sur le fondement d’un manquement du vendeur à son obligation de délivrance conforme au sens des articles 1603 et 1604 du code civil.
Or en matière de manquement du vendeur à son obligation de délivrance conforme, le juge ne peut pas modifier le prix de vente déterminé par les parties, et le préjudice de l’acquéreur ne peut être réparé que par l’allocation de dommages et intérêts. Le conseil de M. [F] [O] vise d’ailleurs dans ses écritures l’arrêt de principe de la Cour de cassation qui énonce cette règle.
Aucune réduction du prix de vente sur le fondement du droit de la délivrance conforme ne sera donc ordonnée.
M. [F] [O] fonde également ses prétentions sur l’article L. 217-8 du code de la consommation, qui dispose qu’en cas de défaut de conformité, le consommateur a droit à la réduction du prix, toutefois cette disposition n’était pas en vigueur au jour de la vente litigieuse, le 16 octobre 2020, puisqu’elle procède de l’ordonnance n° 2021-1247 du 29 septembre 2021.
Il ne sera donc pas non plus fait application de ce fondement.
L’ancien article L. 217-10 du code de la consommation, dans sa version antérieure à cette ordonnance et applicable au présent litige, prévoit néanmoins, à certaines conditions, une réduction du prix de vente en cas de délivrance non conforme.
Or M. [W] [N] est un vendeur professionnel au sens du droit de la consommation, puisqu’il exerce, en tant qu’entrepreneur individuel, sous le nom commercial « MONSIEUR [N] [W] », une activité de commerce de voitures et de véhicules automobiles légers. M. [F] [O] est quant à lui un acquéreur profane.
Il convient donc de faire application de ces dispositions du code de la consommation.
2°/ Sur le manquement du vendeur à son obligation de délivrance conforme au sens du droit de la consommation :
D’après l’article L. 217-4 du code de la consommation, dans sa version applicable aux faits, le vendeur est tenu de livrer un bien conforme au contrat et répond des défauts de conformité existants lors de la délivrance.
Selon l’article L. 217-5 du même code, le bien est conforme au contrat s’il est propre à l’usage habituellement attendu d’un bien semblable, ou s’il présente les caractéristiques définies d’un commun accord par les parties ou est propre à tout usage spécial recherché par l’acheteur, porté à la connaissance du vendeur et que ce dernier a accepté.
Dans le cadre de la vente d’un véhicule, une différence de kilométrage entre celui affiché sur le compteur ou sur les documents de vente, par rapport au kilométrage réel, relève d’une délivrance non conforme.
En l’espèce, les rapports des experts amiable et judiciaire démontrent, par des constatations qui n’appellent ni critiques ni contestations, que le kilométrage du véhicule FIAT DUCATO [Immatriculation 3] a été volontairement abaissé avant la vente.
L’expert judiciaire a en outre constaté la présence sur le tableau de bord de voyants d’alerte pour défauts du moteur au démarrage du véhicule, et a déclaré : « pour remettre ce véhicule en état standard de fonctionnement (supprimer tous les voyants d’alerte), il faut remettre en état la totalité du système d’injection ».
Le défaut de conformité du véhicule au sens des dispositions précitées est donc caractérisé.
3°/ Sur les conséquences qui en découlent :
L’article L. 217-9 du code de la consommation, dans sa version applicable aux faits, dispose qu’en cas de défaut de conformité, l’acheteur choisit entre la réparation et le remplacement du bien.
L’article L. 217-10 énonce que si la réparation et le remplacement du bien sont impossibles, l’acheteur peut notamment garder le bien et se faire rendre une partie du prix.
La même faculté lui est ouverte :
1° Si la solution demandée, proposée ou convenue en application de l’article L. 217-9 ne peut être mise en œuvre dans le délai d’un mois suivant la réclamation de l’acheteur ;
2° Ou si cette solution ne peut l’être sans inconvénient majeur pour celui-ci compte tenu de la nature du bien et de l’usage qu’il recherche.
En l’espèce, le remplacement du bien est impossible, s’agissant d’un véhicule d’occasion, et donc spécialement acquis pour des caractéristiques qui lui sont propres et inimitables.
Si la réparation a quant à elle été estimée possible, elle a été chiffrée par l’expert à 6.625,20 €, soit pour un coût plus de six fois supérieur à sa valeur de 1.000 €.
Ce coût de réparation excessif constitue un inconvénient majeur pour l’acquéreur.
M. [F] [O] est donc bien fondé à demander la restitution d’une partie du prix de vente.
Compte tenu de la nature et de l’ampleur du défaut de conformité relevé par l’expert judiciaire, cette réduction est évaluée à 2.500 € telle que sollicitée.
M. [W] [N] est par conséquent condamné à payer à M. [F] [O] la somme de 2.500 € en restitution d’une partie du prix de vente du véhicule FIAT DUCATO immatriculé [Immatriculation 3].
4°/ Sur le préjudice de jouissance :
En raison de sa mise en possession d’un véhicule non conforme, M. [F] [O] a bien subi un préjudice de jouissance indemnisable.
L’expert judiciaire a évalué ce préjudice à 200 € par mois, soit 6,67 € par jour, en raison de la gamme du véhicule, de son année, de son modèle et de son kilométrage.
Cependant ce préjudice doit être largement relativisé compte tenu du fait que M. [F] [O] a sciemment acquis un véhicule dont il savait que le dernier contrôle technique le rendait défavorable à la circulation en raison de défaillances majeures.
Il ne peut donc pas valablement arguer que la perte de jouissance préjudiciable a commencé dès le moment de la vente.
Compte tenu de ces éléments, le préjudice de jouissance de l’acquéreur est fixé à la somme de 1.500 €.
M. [W] [N] est par conséquent condamné à payer à M. [F] [O] la somme de 1.500 € en indemnisation de son préjudice de jouissance.
5°/ Sur les demandes au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens :
M. [F] [O] demande au tribunal de lui allouer la somme de 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Il serait inéquitable en effet de laisser à la charge du demandeur les frais exposés par lui pour la défense de ses intérêts et non compris dans les dépens.
En conséquence, il y a lieu d’accueillir sa demande, toutefois partiellement, en condamnant M. [W] [N] à lui payer la somme de 1.000 € à ce titre.
M. [W] [N] qui succombe supportera la charge des dépens.
L’exécution provisoire est de droit et aucune circonstance ne justifie de l’écarter en l’espèce.
Le tribunal, statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire, en premier ressort et par mise à disposition au greffe :
Condamne M. [W] [N], en sa qualité d’entrepreneur individuel exerçant sous le nom commercial de MONSIEUR [N] [W], à payer à M. [F] [O] la somme de 2.500 € en restitution d’une partie du prix de la vente du 16 octobre 2020 portant sur le véhicule FIAT DUCATO immatriculé [Immatriculation 3].
Condamne M. [W] [N], en sa qualité d’entrepreneur individuel exerçant sous le nom commercial de MONSIEUR [N] [W], à payer à M. [F] [O] la somme de 1.500 € en indemnisation de son préjudice de jouissance.
Condamne M. [W] [N], en sa qualité d’entrepreneur individuel exerçant sous le nom commercial de MONSIEUR [N] [W], à payer à M. [F] [O] la somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamne M. [W] [N], en sa qualité d’entrepreneur individuel exerçant sous le nom commercial de MONSIEUR [N] [W], aux entiers dépens de la présente instance.
Rappelle que l’exécution provisoire est de droit.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,
Françoise CHAZAL Michèle MONTEIL