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COUR D’APPEL DE BORDEAUX
1ère CHAMBRE CIVILE
————————–
ARRÊT DU : 28 SEPTEMBRE 2023
N° RG 21/00723 – N° Portalis DBVJ-V-B7F-L5SC
[O] [V]
c/
[F] [C]
S.C.P. MATHIEU MASSIE, [F] [C], CLÉMENT BALLADE
S.A. MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
S.A. CAISSE D’EPARGNE AQUITAINE POITOU-CHARENTES
S.A. CNP ASSURANCES
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 06 janvier 2021 par le Tribunal Judiciaire de BORDEAUX (chambre : 6, RG : 18/10751) suivant déclaration d’appel du 05 février 2021
APPELANT :
[O] [V]
né le 01 Avril 1989 à [Localité 8]
de nationalité Française
demeurant [Adresse 5]
Représenté par Maître Alexandre JELEZNOV de la SELARL VERBATEAM BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉS :
[F] [C]
né le 21 Février 1975 à [Localité 7]
de nationalité Française
demeurant [Adresse 3]
S.C.P. MATHIEU MASSIE, [F] [C], CLÉMENT BALLADE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 3]
S.A. MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 2]
Représentés par Maître Xavier LAYDEKER de la SCP LAYDEKER – SAMMARCELLI – MOUSSEAU, avocat au barreau de BORDEAUX
S.A. CAISSE D’EPARGNE AQUITAINE POITOU-CHARENTES, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 1]
Représentée par Maître Benjamin HADJADJ de la SARL AHBL AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX
S.A. CNP ASSURANCES, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social sis [Adresse 4]
Représentée par Maître Daniel LASSERRE de la SELAS ELIGE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 juillet 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Bérengère VALLEE, Conseiller faisant fonction de Président légitimement empêché, qui a fait un rapport oral de l’affaire avant les plaidoiries,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Mme Bérengère VALLEE
Conseiller : M. Emmanuel BREARD
Conseiller : Mme Sylvie HERAS DE PEDRO
Greffier lors des débats : Mme Séléna BONNET
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
* * *
EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE
Selon contrat de réservation du 9 mars 2016, Mme [H] s’est engagée à acquérir auprès de la SCCV Clémenceau un appartement en VEFA au sein d’une résidence à édifier sise à [Localité 9] pour la somme de 235 000 euros.
En vue du financement de cette acquisition, Mme [H] s’est vue adresser le 9 août 2016 deux offres de prêt de la part de la SA Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes, offres qu’elle a acceptées le 22 août 2016.
Mme [H] a été victime le 14 janvier 2017 d’un accident qui a conduit à son hospitalisation au titre d’une fracture du fémur.
Deux complications ont conduit à son décès subit à l’hôpital le 23 février suivant.
Le fils de Mme [H], M. [O] [V], a entendu se prévaloir de la garantie décès auprès de la SA CNP Assurances afin que cette dernière prenne en charge le remboursement du prêt souscrit auprès de la société Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes.
La société CNP Assurances a néanmoins opposé un refus à M. [V] au motif de l’annulation des prêts faute de déblocage des fonds dans les 5 mois de l’acceptation des offres de prêt.
Par acte d’huissier des 21, 22 et 23 novembre 2018 M. [V] a assigné en responsabilité la société Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes, la société CNP Assurances ainsi que le notaire de Mme [H] en charge de l’acte authentique, Maître [F] [C], son étude la SCP Massie-[C]-Ballade et leur assureur de responsabilité, la SA MMA IARD.
Par jugement du 6 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Bordeaux a :
– rejeté l’ensemble des demandes formées par M. [V] tant à l’encontre de la société Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes et de la société CNP Assurances qu’à l’encontre de Maître [C], de la société SCP Massie-[C]-Ballade et des MMA,
– condamné M. [V] à payer au titre de l’article 700 du code de procédure civile :
* 1 500 euros à la société Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes,
* 1 500 euros à la société CNP Assurances,
* la somme globale de 1 500 euros à Maître [C], la société SCP Massie-[C]-Ballade et les MMA,
– condamné M. [V] aux dépens et dit que les avocats en la cause en ayant fait la demande pourront, chacun en ce qui le concerne, recouvrer sur la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l’avance sans avoir reçu provision en application de l’article 699 du code de procédure civile,
– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire de la décision,
– rejeté toutes demandes plus amples ou contraires.
M. [V] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 5 février 2021.
Par conclusions déposées le 27 avril 2023, M. [V] demande à la cour de :
– infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,
A titre principal :
– condamner in solidum les sociétés CNP Assurances et Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes, ou l’une à défaut de l’autre, à régler à M. [V] une somme de 224 824, 85 euros, ou à défaut, de 206 000 euros à titre de dommages et intérêts en vertu de son préjudice matériel,
– condamner les mêmes in solidum, ou l’une à défaut de l’autre, à régler à M. [V] une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance, outre 5 000 euros au titre de la procédure en appel, ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel,
A titre subsidiaire :
– condamner in solidum Maître [C], la SCP Massie-[C]-Ballade et les MMA IARD Assurances mutuelles, à régler à M. [V] une somme de 195 010, 40 euros, à titre de dommages et intérêts en vertu de sa perte de chance,
– condamner les mêmes in solidum, à régler à M. [V] une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance, outre 5 000 euros au titre de la procédure en appel, ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel.
Par conclusions déposées le 12 juillet 2021, la société Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes demande à la cour de :
– juger que la société Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes n’a commis aucune faute génératrice de responsabilité,
En conséquence,
– confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 6 janvier 2021 par le tribunal judiciaire de Bordeaux,
– débouter M. [V] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
Y ajoutant,
– le condamner au paiement d’une indemnité de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 ainsi qu’aux entiers dépens.
Par conclusions déposées le 8 juillet 2021, la société CNP Assurances demande à la cour de :
– confirmer le jugement rendu le 6 janvier 2021 par le tribunal judiciaire de Bordeaux,
– débouter M. [V] de l’intégralité de ses demandes à l’encontre de la société CNP Assurances et les déclarer mal fondées,
– le condamner au paiement d’une somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens tant de première instance que d’appel.
Par conclusions déposées le 8 juillet 2021, Maître [C], la SCP Massie-[C]-Ballade et la société MMA IARD Assurances Mutuelles demandent à la cour de :
– confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 6 janvier 2021,
Par conséquent :
– débouter M. [V] de l’ensemble de ses demandes formulées à l’encontre de Maître [C], de la société SCP Massie-[C]-Ballade et de la société MMA IARD Assurances Mutuelles,
Y ajoutant,
– condamner M. [V] à verser aux concluants une somme de 3 500 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [V] aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SCP Laydeker-Sammarcelli-Mousseau, avocat sur ses affirmations de droit.
L’affaire a été fixée à l’audience rapporteur du 6 juillet 2023.
L’instruction a été clôturée par ordonnance du 22 juin 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Au préalable, la cour constate que la qualité à agir de M. [V] n’est pas contestée, de sorte que sont sans objet les développements de l’appelant à cet étard, étant observé que contrairement à ce qu’il soutient, le tribunal ne l’a nullement déclaré irrecevable à agir.
Sur les demandes principales formées à l’encontre de la Caisse d’Epargne et de la CNP Assurances
A titre principal, M. [V] recherche la responsabilité de la banque et de l’assureur, faisant valoir que ni les offres de prêt ni le contrat d’assurance ne prévoyaient l’hypothèse où l’assuré/emprunteur décède avant la signature de l’acte authentique de VEFA, de sorte que le décès de Mme [H] n’autorisait pas le prêteur ou l’assureur à se soustraire à leurs obligations, pour l’un, de verser les fonds qu’il s’est engagé à prêter, pour l’autre, à garantir le sinistre.
Sur la responsabilité de la banque
M. [V] soutient que la clause de résolution du contrat de crédit en l’absence d’acte authentique dans le délai de cinq mois à compter de l’acceptation de l’offre ne peut s’appliquer à défaut pour la Caisse d’Epargne d’avoir prononcé la résolution du contrat, de sorte que le contrat de prêt était en vigueur au moment du décès et liait tant le prêteur que M. [V] venant aux droits de sa mère en application de l’article 724 du code civil, ce dont la banque était parfaitement informée. Il reproche à la Caisse d’Epargne de n’avoir entrepris aucune démarche pour lui permettre de poursuivre l’opération projetée par sa mère, de ne lui avoir pas proposé le transfert du contrat souscrit par cette dernière ni avisé de son droit à réclamer une indemnisation auprès de la CNP, ce qui caractérise un manquement à son obligation d’information et de conseil.
La Caisse d’Epargne réplique qu’aucune demande de libération, totale ou partielle des fonds, ne lui a jamais été adressée. Elle se prévaut de la clause d’annulation du contrat en cas d’absence de signature de l’acte authentique dans le délai de cinq mois qui suit l’acceptation de l’offre par les emprunteurs.
Sur ce,
L’article intitulé « Annulation du contrat, révision du contrat » des conditions générales du contrat de crédit accepté par Mme [H] le 22 août 2016 prévoyait que :
« Le contrat sera résolu dans les circonstances suivantes :
(‘)
– lorsqu’un acte authentique doit être établi, si cet acte authentique n’est pas signé dans un délai de cinq mois qui suit l’acceptation de l’offre par les emprunteurs. »
Il est constant qu’en l’espèce, aucun acte authentique de vente n’a été signé dans les cinq mois de l’acceptation de l’offre de crédit par l’emprunteur.
La Caisse d’Epargne est donc fondée à se prévaloir de la résolution du contrat de crédit, étant observé que la clause précitée ne soumet l’effectivité de la résolution du contrat à aucune formalité particulière et que, dans son courrier adressé le 26 avril 2017 à la CNP Assurances, la banque indique que les contrats de crédits immobiliers litigieux ont été « annulés » suite au non déblocage des fonds.
M. [V] ne peut en outre valablement reprocher à la banque de ne pas lui avoir proposé le transfert du contrat à son profit dès lors, d’une part, que comme le souligne justement le tribunal, l’appelant ne produit aucun document tendant à établir qu’après le décès de sa mère, il a souhaité acquérir lui-même l’appartement réservé en bénéficiant du prêt souscrit auprès de la Caisse d’Epargne, d’autre part, que la clause de transfert de prêt prévue au contrat de crédit consenti à Mme [H] prévoit un agrément par la banque du nouvel emprunteur, étant au surplus observé que la banque n’était en tout état de cause pas tenue à une obligation d’information et de conseil à l’égard de M. [V].
Au regard de l’ensemble de ces éléments, M. [V] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe d’une faute de la banque de nature à engager sa responsabilité. Il sera débouté de ses demandes formées à son encontre et le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur la responsabilité de l’assureur
M. [V] soutient qu’aucune clause contractuelle ne soumettait la validité de la couverture d’assurance à la condition de déblocage des fonds par la banque, ni même à la conclusion effective de la vente. Il ajoute que la CNP Assurances a, dès le mois de novembre 2016, prélevé les échéances au titre du crédit octroyé par la Caisse d’Epargne ce qui démontre que la garantie était entrée en vigueur et devait recevoir application suite au décès de Mme [H]. Il souligne que ce n’est pas la mise à exécution du prêt qui conditionne la garantie de l’assureur, celle-ci étant due par le simple effet de la souscription du contrat de prêt lui-même et le risque réalisé. Il précise que si les échéances de prêt ne deviennent certes exigibles qu’une fois le prêt débloqué, l’exigibilité et l’existence d’une créance sont deux choses distinctes.
La CNP Assurances soutient de son côté que les prêts consentis par la Caisse d’Epargne ont été annulés à la suite du non-déblocage des fonds, de sorte que sa garantie ne pouvait intervenir puisque l’objet de celle-ci est de prendre en charge les échéances de prêt lesquelles ne sont pas dues puisqu’il n’y a pas eu de déblocage des fonds. Elle ajoute que l’article 4 de la notice d’information relative aux garanties d’assurance stipule que le prêteur est bénéficiaire dans la limite des sommes dues par l’assuré, ce qui démontre que l’assureur ne peut accorder sa garantie que si les sommes sont dues au prêteur. Enfin, elle précise que si des primes de 41,33 euros ont été prélevées au titre de l’un des deux prêts, cela ne signifie pas pour autant qu’elle doit sa garantie dès lors qu’à la date du décès, Mme [H] n’avait aucune dette vis-à-vis de la banque faute de déblocage des fonds. Elle ajoute qu’en tout état de cause, un remboursement de ces primes prélevées peut être effectué.
Sur ce,
C’est par de justes motifs que la cour adopte que le tribunal a retenu qu’à défaut de mise à exécution du contrat de prêt et d’échéances dues à la banque par l’emprunteur, la garantie décès souscrite par Mme [H], dont l’objet était de garantir le remboursement du prêt, ne pouvait pas recevoir application et que la perception indue par l’assureur de primes d’assurance, si elle est de nature à justifier une demande de remboursement au demeurant non réclamée par M. [V] ni en première instance ni en appel, ne suffit pas à démontrer que la garantie était due.
Le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu’il a débouté M. [V].
Sur la demande subsidiaire formée à l’encontre du notaire
M. [V], qui recherche à titre subsidiaire la responsabilité du notaire de sa mère, expose que Maître [C] était en possession, au plus tard le 16 décembre 2016, de l’ensemble des pièces nécessaires pour la signature de l’acte réitératif, qu’une relance du notaire avait été faite par le neveu de sa mère le 1er janvier 2017 et que les pièces produites par la partie adverse démontrent qu’il avait reçu l’entier dossier de son confrère [U] selon correspondances des 6 et 9 janvier 2017.
Il fait grief à Maître [C] :
– d’une part, de n’avoir proposé aucune date de signature avant l’accident de sa mère le 14 janvier 2017 ni après la conversation du 25 janvier avec M. [B], neveu de Mme [H], alors que ce dernier avait souligné l’urgence de « régulariser la vente assez rapidement car le financement de la Caisse d’Epargne devrait tomber courant février », ni après le courriel adressé au notaire le 16 février 2017 par M. [B] qui, compte tenu de l’état de santé de Mme [H], sollicitait une signature par procuration et soulignait l’urgence de procéder à l’acte authentique. Il conteste qu’un rendez-vous de signature était convenu le 1er mars 2017.
– d’autre part, de n’avoir pas fait signer à sa mère une procuration avant son décès alors que l’urgence de la signature lui avait été signalée,
– enfin, de ne pas avoir mis en garde Mme [H] sur la résolution possible du contrat de prêt par la banque en cas d’absence d’acte authentique dans les cinq mois de l’acceptation de l’offre et de ne pas avoir entrepris de démarches auprès de la banque pour obtenir une prorogation de délai ou indiquer à sa cliente qu’il convenait de s’en préoccuper.
Il explique que si l’acte de VEFA avait été signé à temps, le décès de sa mère, qui serait intervenu par la suite, aurait été garanti par la CNP Assurances.
Maître [C], la SCP Massie-[C]-Ballade et la MMA rétorquent que les derniers éléments nécessaires à la signature transmis par Maître [U] les 6 et 9 janvier 2017 n’ont été reçus que le 12 janvier 2017, que des démarches ont alors été immédiatement entreprises pour convenir avec les parties d’une date de signature mais qu’en raison de l’hospitalisation de Mme [H], aucune date n’a pu être convenue puisqu’elle ne répondait pas aux appels. Ils précisent qu’ils n’ont été informés de l’accident de Mme [H] survenu le 14 janvier 2017 que le 25 janvier 2017 par l’intermédiaire du neveu de cette dernière, M. [B]. Ils ajoutent que Maître [C] s’est entretenu téléphoniquement avec M. [B] le 26 janvier 2017 et qu’ils ont convenu ensemble d’attendre la sortie de l’hôpital de Mme [H] pour envisager la fixation d’un rendez-vous de signature. Le notaire souligne qu’il n’a reçu de contre-indication que le 16 février suivant, M. [B] sollicitant alors par courriel d’envisager la signature d’une procuration à la clinique [6]. Il soutient qu’il a alors rappelé M. [B] le jour-même et qu’il a été convenu d’un rendez-vous de signature le 1er mars mais que Mme [H] est décédée avant cette date, le 23 février 2017. Il considère que ce résumé des faits démontre qu’il a fait toutes diligences utiles pour gérer ce dossier. Enfin, s’agissant du délai de validité de cinq mois des offres de prêt, il fait valoir qu’il ne lui appartenait en aucun cas de prendre une quelconque initiative auprès de la banque, faute d’instruction expresse de Mme [H] en ce sens.
Sur ce,
En application de l’article 1240 du code civil, la responsabilité du notaire suppose que soit démontrée la réalité d’une faute ainsi que l’existence d’un lien de causalité entre cette faute et le préjudice allégué.
En l’espèce, il est acquis à la lecture des pièces versées aux débats que les dernières pièces nécessaires à la signature de l’acte authentique de vente n’ont été adressées par le notaire de la SCCV Clémenceau à Maître [C] que les 6 et 9 janvier 2017.
Il résulte en outre de la pièce n°4 produite par le Maître [C] que sa collaboratrice a ensuite tenté de joindre en vain Mme [H] afin de fixer un rendez-vous de signature mais que celle-ci ne l’a pas recontactée, ce qui apparaît cohérent puisque l’accident de Mme [H] est survenu le 14 janvier 2017.
Il est tout aussi établi au vu de cette même pièce que Maître [C] n’a été informé de l’hospitalisation de Mme [H] que le 25 janvier 2017, ce qui n’est pas contesté, et qu’à cette date, le neveu de cette dernière, M. [B], qui s’occupait des affaires de cette dernière, « souhaitait voir comment régulariser la vente assez rapidement car le financement de la Caisse d’Epargne devait tomber courant février. » , ce qui démontre, comme le soulignent justement les premiers juges que Mme [H] était informée du risque de résolution du contrat de crédit en l’absence de signature de l’acte authentique de vente dans les cinq mois de l’acceptation de l’offre de crédit. Sur ce point, et ainsi que le relève à juste titre le notaire, il n’appartenait pas à ce dernier de s’adresser de son propre chef à l’établissement bancaire afin d’obtenir, au nom de Mme [H] et pour le compte de celle-ci, une prorogation de délai, étant précisé qu’il n’est pas soutenu que Maître [C] soit intervenu au stade de la négociation du financement ou de l’émission et de l’acceptation des offres de prêt.
Les termes du courriel adressé le 16 février 2017 par le neveu de Mme [H] à Maître [C], par lequel il indique « je vous confirme que vous pouvez prévoir une signature de procuration de Mme [H] [W] au profit de ma mère Mme [H] [P] » , établissent en outre que le notaire avait bien envisagé une procuration au bénéfice de la soeur de Mme [H].
Enfin, il est exact que dans ce même courrier, le neveu de Mme [H] fait part du « caractère d’urgence de la chose » et demande au notaire de le contacter « dès que vous aurez fixé une date afin que nous organisions la rencontre ». Cependant, Mme [H] étant décédée le 23 février 2017, le fait pour le notaire de ne pas avoir proposé de rendez-vous avant le décès de celle-ci, soit dans les 7 jours suivant le courriel du 16 février 2017, ne saurait suffire à caractériser sa faute.
Pour l’ensemble des raisons qui précèdent, la responsabilité du notaire n’est pas engagée et il convient de débouter M. [V] des demandes formulées à l’encontre de ce dernier.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Il y a lieu de confirmer la décision entreprise en ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de l’article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. M. [V] supportera donc la charge des dépens d’appel, dont distraction au profit de la SCP Laydeker-Sammarcelli-Mousseau en application de l’article 699 du code de procédure civile.
En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Sur ce fondement, M. [V] sera condamné à payer les sommes de :
1.500 euros à la Caisse d’Epargne,
1.500 euros à la CNP Assurances
1.500 euros à Maître [C], la SCP Massie-[C]-Ballade et les MMA, ensemble.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant,
Condamne M. [V] aux dépens d’appel, dont distraction au profit de la SCP Laydeker-Sammarcelli-Mousseau en application de l’article 699 du code de procédure civile,
Condamne M. [V] au paiement des sommes suivantes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile :
1.500 euros à la Caisse d’Epargne,
1.500 euros à la CNP Assurances
1.500 euros à Maître [C], la SCP Massie-[C]-Ballade et les MMA, ensemble.
Le présent arrêt a été signé par Madame Bérengère VALLEE, Conseiller faisant fonction de Président légitimement empêché, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,