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COUR D’APPEL D’ORLÉANS
C H A M B R E C I V I L E
GROSSES + EXPÉDITIONS : le 25/05/2023
Me Nelly GALLIER
la SELARL RABILIER
ARRÊT du : 25 MAI 2023
N° : – N° RG : 20/01457 – N° Portalis DBVN-V-B7E-GFZH
DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de BLOIS en date du 05 Mars 2020
PARTIES EN CAUSE
APPELANT :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265256407741849
Monsieur [N] [G]
né le [Date naissance 1] 1937 à[Localité 7])
[Adresse 2]
[Localité 4]
ayant pour avocat postulant Me Nelly GALLIER du barreau de BLOIS et pour avocat plaidant Me Marie JANET de la SCP BLUMBERG & JANET ASSOCIES du barreau de PARIS,
D’UNE PART
INTIMÉ : – Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265254326654476
Maître [Y] [F]
[Adresse 3]
[Localité 6]
ayant pour avocat Me Charlotte RABILIER de la SELARL RABILIER, avocat au barreau de TOURS
D’AUTRE PART
DÉCLARATION D’APPEL en date du : 03 Août 2020.
ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 23 mars 2023
Dossier communiqué au Ministère Public le 06 février 2023
L’avis du Ministère public a été communiqué aux avocats des parties le 10 février 2023
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats :
En l’absence d’opposition des parties ou de leurs représentants :
Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre,
Madame Laure- Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles ont entendu les avocats des parties en leurs plaidoiries, avec leur accord, par application de l’article 786 et 907 du code de procédure civile.
Après délibéré au cours duquel Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre et Madame Laure- Aimée GRUA, Magistrat honoraire, ont rendu compte à la collégialité des débats à la Cour composée de:
Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre,
Madame Florence CHOUVIN-GALLIARD, Conseiller,
Madame Laure- Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
Greffier :
Madame Karine DUPONT, Greffier lors des débats.
Madame Fatima HAJBI, Greffier lors du prononcé.
DÉBATS :
A l’audience publique du 03 Avril 2023 , à laquelle ont été entendus Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de chambre, en son rapport et les avocats des parties en leurs plaidoiries.
Prononcé le 25 MAI 2023 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
FAITS ET PROCEDURE
Par acte du 23 août 2012 régularisé devant Maître [Y] [F], notaire, Messieurs [R], [P] et [J] [D], propriétaires d’une maison à usage d’habitation située à [Localité 5], ont signé avec M. [N] [G] un compromis de vente au prix de 300 000 euros.
Par acte d’huissier du 12 décembre 2012, les consorts [D] ont fait sommation à M. [G] de comparaître le 4 janvier 2013 en l’étude de Maître [F] pour la signature de l’acte authentique de vente.
M. [G] ne s’étant pas présenté, Maître [F] a dressé un procès-verbal de carence.
Les consorts [D] ont assigné M. [G] devant le tribunal de grande instance du Mans en paiment de l’indemnité d’immobilisation prévue par le compromis de vente.
Par jugement du 12 novembre 2014, le Tribunal de grande instance du Mans a condamné Monsieur [G] :
– à payer aux consorts [D], en application de la clause pénale :
° la somme de 15.000 euros au titre du préjudice né du défaut de finalisation de l’acte,
° la somme de 15.000 euros au titre du préjudice né de l’immobilisation du bien.
– au paiement des frais notariés générés par la vente et son défaut de réitération en la forme authentique, non compris dans les dépens,
– au paiement des frais d’huissier, non compris dans les dépens,
~ au paiement aux consorts [D] de la somme de 2.500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile,
– aux entiers dépens de la procédure.
Par arrêt du 10 mai 2017 devenu définitif, la cour d’appel d’Angers a :
– confirmé le jugement rendu par le Tribunal de grande instance du Mans en toutes ses dispositions,
– condamné Monsieur [G] à payer aux consorts [D] la somme globale de 3.500 euros au titre des frais non répétibles qu’ils ont exposés en cause d’appel,
– condamné Monsieur [G] aux dépens de l’instance d’appel.
La présente procédure :
Par acte d’huissier en date du 20 février 2017, Monsieur [G] a assigné Maître [Y] [F], notaire, devant le Tribunal de grande instance de Blois, en responsabilité.
En cours de procédure, la SELARL BERTHELOT & LEMOINE a succédé à Maître [F].
Par acte d’huissier en date du 23 octobre 2018, Monsieur [G] a assigné la SELARL BERTHELOT & LEMOINE en intervention forcée devant le Tribunal de grande instance de Blois.
Par décision du 20 novembre 2018, le Juge de la mise en état a ordonné la jonction des deux instances.
Par jugement en date du 5 mars 2020, le tribunal judiciaire de Blois :
– met la SELARL BERTHELOT & LEMOINE hors de cause,
– dit que Maître [Y] [F] a manqué à son devoir de conseil en n’informant pas Monsieur [N] [G] sur la classification du terrain en zone agricole lors de la signature du compromis de vente,
– rejette le surplus des demandes formées par Monsieur [N] [G] au titre des manquements de Maître [Y] [F] à son devoir de conseil,
– condamne Maître [Y] [F] à verser à Monsieur [N] [G] la somme de 14.048,74 euros en réparation de son préjudice résultant de la perte de chance,
– déboute Monsieur [N] [G] de sa demande de dommages-intérêts au titre de son préjudice moral,
– rejette la demande formée par Maître [Y] [F] sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
– condamne Maître [Y] [F] à verser à Monsieur [N] era condamné à verse à Monsieur [N] [G] une somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.
– condamne Maître [Y] [F] aux dépens,
– autorise les avocats de la cause à recouvrer directement ceux des dépens
dont ils auraient fait l’avance sans avoir reçu provision.
Le 3 août 2020, M. [G] a interjeté appel de cette décision.
Par conclusions signifiées par voie électronique le 17 mars 2023, M. [G] demande à la cour de :
– Déclarer l’appel de Monsieur [G] recevable et bien fondé,
Y faisant droit,
– Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a retenu que Maître [F], ancien notaire à [Localité 6] (41), avait failli à son obligation de conseil et d’information ;
– Réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Blois en ce qu’il a fixé le préjudice de Monsieur [G] à une perte de chance de seulement 30 % ;
Et statuant à nouveau :
– Condamner Maître [F] ancien notaire à garantir Monsieur [G] des condamnations qui ont été prononcées à son encontre par la Cour d’Appel d’ANGERS dans le cadre du litige l’opposant aux consorts [D], vendeurs par un arrêt du 10 mai 2017, à savoir :
o 15.000 € au titre du préjudice né de la non-réitération de la vente
o 15.000 € au titre du préjudice lié à l’immobilisation dudit bien
o 2.500 € au titre des frais irrépétibles de première instance
o 529,12 € au titre des dépens de première instance
o 3.500 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel
Y ajoutant,
– Condamner Maître [F] ancien notaire à verser à Monsieur [G] les sommes suivantes :
– 10.300 € au titre des honoraires d’avocats exposés
– 50.000 € au titre du préjudice moral subi par Monsieur [G]
Débouter Maître [F] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;
En tout état de cause,
– Condamner Maître [F] ancien notaire à verser à Monsieur [G] la somme de 7.000 € au titre des frais irrépétibles de l’instance d’appel en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, outre aux entiers dépens, lesquels seront recouvrés par Me Nelly GALLIER, avocat, dans les conditions de l’article 699 du CPC.
Par conclusions signifiées par voie électronique le 21 mars 2023, M. [F] demande à la cour de :
– recevoir Maître [F] en ses conclusions, le déclarer bien fondé,
A titre principal,
– constater l’absence de responsabilité du Notaire,
Par conséquent,
– infirmer le jugement de première instance en ce qu’il a retenu la responsabilité du Notaire et l’a condamné à verser à Monsieur [G] la somme de 14.048,74 euros
– confirmer le surplus du Jugement,
A titre subsidiaire,
– confirmer le Jugement de première instance dans son intégralité,
En tout état de cause,
– débouter Monsieur [G] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– condamner Monsieur [G] à verser à Maître [F] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens d’instance.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 23 mars 2023.
MOTIFS
Sur la responsanbilité de M. [F]
M. [G] fait grief à M. [F] d’avoir manqué à son devoir d’information et de conseil.
Il lui reproche, en premier lieu, de ne pas s’être renseigné sur la nature du terrain sur lequel était construit la maison, qui s’est révélé, selon le certificat d’urbanisme obtenu postérieurement à la signature du compromis, classé en zone agricole. Il estime que le notaire aurait dû se renseigner sur cette information avant la signature de la promesse de vente, l’affectation en zone agricole rendant le bien impropre à l’usage d’habitation traditionnel tel qu’il l’envisageait et diminuant grandement la valeur du bien.
M. [F] estime qu’il n’a pas commis de faute. Il relève en premier lieu que le certificat d’urbanisme n’a pas à être produit dans le cadre du compromis de vente, mais uniquement en vue de la vente elle-même. Il soutient en second lieu que le classement de la parcelle en zone agricole n’interdit nullement l’affectation d’un bien à usage d’habitation, seule la construction de bâtiments nouveaux étant soumise à conditions, que la recopnstruction de l’existant est autorisée et les extensions y sont possibles dans certaines limites. Il souligne que M. [G] n’avait pas fait de la constructibilité du terrain une condition suspensive et n’avait pas fait mention d’un projet de construction, mais qu’en revanche, le compromis de vente comportait une condition suspensive dans l’attente de la note d’urbanisme, que M. [G] avait le loisir de lever plutôt que de disparaître au jour de la vente comme il l’a fait.
********
Il est constant que le notaire est tenu de conseiller les parties et d’assurer l’efficacité des actes qu’il reçoit (1ère Civ., 11 juillet 2006, n°03-18.528 Bull n°389). Il doit notamment, appeler leur attention, de manière complète et circonstanciée, sur la portée, les effets et les risques de l’acte auquel il prête son concours. A cette fin, il lui appartient de prendre en considération les mobiles des parties, extérieurs à l’acte, sous réserve qu’il en ait eu précisément connaissance.
Toutefois, la responsabilité professionnelle du notaire ne peut être engagée que s’il est établi qu’il s’est montré défaillant dans les investigations et contrôles que le devoir d’efficacité impose nécessairement.
Or il sera observé en premier lieu qu’aucune disposition légale n’impose au notaire de solliciter, avant la signature d’une promesse de vente, un certificat d’urbanisme.
Et il n’est pas justifié en l’espèce de circonstances particulières qui auraient dû inciter le notaire à solliciter ce document avant la signature du compromis et non après.
Il n’est pas davantage soutenu que M. [G] aurait fait mention, lors de la signature du compromis, d’un projet de construction ou d’extension sur la parcelle litigieuse qui aurait justifié qu’une condition suspensive relative à la constructibiltié du terrain soit insérée dans l’acte.
La promesse de vente comportait au titre des conditions suspensives de droit commun, le fait que les ‘pièces d’urbanisme ou autres obtenus ne révèlent pas de servitudes ou des charges, autres que celles éventuellement indiquées aux présentes, ni de vices non révélés au présentes, pouvant grever l’immeuble et en diminuer sensiblement la valeur ou le rendre impropre à la destination que l’acquéreur déclare être à usage d’habitation’ de sorte qu’une information révélée par le certificat d’urbanisme et répondant à ces conditions était de nature à justifier le refus de signature de l’acte authentique par l’acqéureur.
M. [F] n’a donc pas commis de faute en sollicitant, après la signature du compromis de vente et non avant, un certificat d’urbanisme.
En tout état de cause, M. [G] ne démontre ni que le classement de la parcelle en zone agricole rend le bien impropre à sa destination, ni que ce classement a la portée qu’il lui prête en terme de limites à sa constructibilité.
En effet, il résulte de la pièce n°15 versée aux débats que le classement en zone A (zone agricole) n’interdit pas toute construction, puisqu’y sont ‘autorisées sous condition’ :
– les constructions à usage d’habitation et leurs annexes (mêmes dissociées) à condition qu’elles soient liées et nécessaires aux exploitations agricoles et qu’elles soient implantées à moins de 100 mètres du siège d’exploitation ;
– l’extension des constructions à usage d’habitation existantes et leurs annexes (mêmes dissociées, à condition qu’elles soient liées et nécessaires aux exploitations agricoles) sous réserve que la surface hors oeuvre nette après extension ne dépasse pas 3 fois la SHON avant extension (surface hors oeuvre nette en m2) ;
– la reconstruction après sinistre des bâtiments existants à condition soit qu’il n’y ait pas changement de destination, soit que le changement corresponde à la vocation de cette zone agricole.
En l’espèce, la maison a fait l’objet d’un permis de construire pour un bâtiment à usage de logement délivré le 25 juillet 1974. Une demande de modification du permis de construction a été déposée le 30 juin 1975 et autorisée le 6 septembre 1975, portant sur l’indication des cloisonnements d’étage pour permettre l’aménagement futur de 3 chambres avec toilettes.
L’usage d’habitation de ce bâtiment a donc bien été autorisé.
M. [G] soutient donc vainement que le classement en zone agricole rend la maison impropre à son usage d’habitation alors que la construction d’une maison à usage d’habitation a été autorisé par les permis de construire délivrés en 1974 et 1975.
Contrairement à ce qu’il soutient, il résulte de la notice descriptive de la ‘zone agricole’ que les extensions sont possibles, sous réserve que la surface hors oeuvre nette après extension ne dépasse pas 3 fois la SHON avant extension, et la reconstruction des bâtiments existants est possible après sinistre.
Quant à la diminution de valeur de la maison en raison de son classement en zone agricole, l’unique document qu’il produit pour en justifier, à savoir un article de journal intitulé ‘Nouvelle menace pour les propriétaires de terrain constructible’, ne permet pas d’établir, de par sa généralité, que le classement en zone agricole du bien objet de la vente, sur lequel une maison d’habitation est déjà édifiée, lui a fait perdre sa valeur.
Il en résulte qu’aucun manquement ne peut être reproché au notaire à ce titre et que le jugement sera infirmé de ce chef.
********
M. [G] soutient en second lieu que le permis de construire délivré en 1974 ne correspond pas à la réalité de la construction, et qu’il pouvait donc être demandé à n’importe quel moment au propriétaire de détruire les constructions établies illégalement. Il reproche au notaire de ne pas avoir attiré son attention sur l’absence de concordance entre le permis de construire initial et la description du bien telle qu’elle a été rédigée dans l’acte.
S’agissant de l’absence de concordance entre le permis de construire initial et la description du bien figurant dans l’acte, il résulte de la lecture de la promesse de vente que le bien a été décrit comme suit :
– une maison à usage d’habitation sise (…) Comprenant :
– au rez-de-chaussée : une entrée, une salle de séjour-salon, une cuisine, WC, toilettes, une salle de bains, un bureau, une chambre ;
– au premier étage : un palier, quatre chambres dont trois avec cabinet de toilettes, lingerie, WC, petit grenier,
– au sous-sol : garage, salle de jeux, cuisine d’été, piscine intérieure, sanitaires, atelier, chaufferie et cave,
– terrasse autour de la maison,
– terrain.
Le permis de construire délivré le 25 juillet 1974 portait sur une maison de 4 pièces principales, d’une surface de 152,87 mètres carrés, comportant uniquement un rez-de-chaussée. Un permis modificatif a été accordé le 6 septembre 1975, autorisant le cloisonnement de l’étage pour permettre l’aménagement futur possible de trois chambres avec toilettes.
Il n’est pas justifié qu’un permis de construire a été ultérieurement sollicité et obtenu pour les travaux d’aménagement de l’étage, qui comporte outre un palier, quatre chambres dont trois avec cabinet de toilettes, lingerie , WC et grenier. Il n’est pas non plus justifié qu’un permis de construire a été obtenu pour la construction d’une cave.
Il est donc constant que la description de la maison ne correspond pas aux permis de construire qui ont été délivrés en 1974 et 1975, puisque ni la construction d’un niveau en sous-sol, ni l’aménagement de l’étage n’ont été autorisés.
L’attestation du maire de la commune en date du 9 juillet 2012 dont il est fait état pour justifier que ces constructions ne peuvent plus être remises en cause n’est pas produite.
La cour d’appel d’Angers, dans son arrêt du 10 mai 2017, précise que le maire a attesté que la construction pour laquelle M. [D] avait obtenu un permis de construire ne pouvait pas être remise en cause. Ces termes ne permettent pas de considérer que tel est également le cas pour les parties de la maison réalisées sans permis de constuire.
Or le notaire est tenu, en exécution de son devoir d’information et de conseil, d’informer l’acquéreur des incidences de la non-conformité du bien au permis de construire, ainsi que l’a d’ailleurs jugé la Cour de cassation (voir par exemple 1ère Civ., 12 novembre 2020, pourvoi n° 19-14.752). M. [F] ne justifie pas en l’espèce avoir attiré l’attention de M. [G] sur l’absence de concordance entre le permis de construire annexé à l’acte et la description du bien figurant dans la promesse de vente et sur les incidences de cette situation. Cette information revêtait en l’espèce une importance d’autant plus grande que le bien s’est révélé situé en zone agricole où la constructibilité est limitée, et où les possibilités de reconstruction après sinistre et d’extension dépendent de l’existant, de sorte que l’absence de permis de construire pour une partie de la maison est susceptible d’avoir une incidence sur les possibilités de reconstruction en cas de sinistre, et d’extension, qui sont proportionnelles à la SHON.
En conséquence, M. [F] a, à ce titre, manqué à son obligation d’information et de conseil.
2 – Sur les autres anomalies constatées après la signature du compromis
M. [G] reproche également au notaire de lui avoir communiqué tardivement, le 23 octobre 2012 :
– la copie de l’état des installations électriques ;
– le procès-verbal de contrôle de l’exécution des travaux d’assainissement autonome.
Il estime que cette communication tardive lui a porté préjudice puisqu’il n’a pas eu le temps d’examiner ces documents, d’autant qu’ils révélaient d’autres vices importants :
– l’état des installations électriques de 2012 permet de constater une aggravation du risque en 2012 par rapport à 2009, de sorte que le notaire aurait dû attirer son attention sur cette aggravation ; il en déduit que le notaire a manqué à son obligation de conseil ;
– aucune facture des travaux d’assainissement ne lui a été communiquée de sorte qu’il n’a pas pu apprécier la réalité des travaux réalisés.
Il estime en premier lieu que le notaire a violé son devoir de conseil en envoyant le diagnostic électrique à peine une semaine avant la date prévue pour la signature de l’acte de vente et en ne transmettant aucun commentaire ni aucune information sur les conséquences des conclusions contenues dans ce diagnostic.
M. [G] fait encore valoir qu’alors que le compromis prévoyait que le vendeur s’était engagé à communiquer la facture des travaux d’assainissement, aucune facture des travaux d’assainissement n’a été comuniquée, et que le notaire n’a pas réclamé cet élément au vendeur afin de faire exécuter les termes du compromis de vente. Il ajoute que c’est un autre document qui lui a été remis, le procès-verbal de contrôle de l’exécution des travaux d’assainissement, qui comportait des erreurs grossières concernant la contenance de l’habitation, ce que le notaire n’a pas relevé, manquant ainsi à son devoir de conseil.
Toutefois, il convient de relever d’une part que M. [F] a annexé au compromis de vente du 23 août 2012 un diagnostic de performance énergétique établi par le cabinet Servicimmo le 17 juin 2009 et qu’il n’est nullement établi que le rapport de 2012 mettait en évidence une aggravation du risque sur laquelle le notaire aurait dû attirer son attention alors que les conclusions du rapport réalisé le 30 août 2012 sont sensiblement identiques à celles du 17 juin 2009, rappelées dans le compromis de vente et qui mentionnaient de nombreuses anomalies, seule une nouvelle anomalie relative à ‘l’appareil général de commande et de protection et son accessibiltié’ étant ajoutée, laquelle, compte tenu des anomalies mentionnées dans le premier rapport qui impliquaient la réalisation de travaux d’électricité, ne constituait pas une aggravation notable du risque sur laquelle le notaire aurait dû attirer son attention.
D’autre part, le compromis de vente prévoyait, s’agissant de l’assainissement, que : ‘Un document de contrôle de l’installation d’assainissement devra être produit. Si ce document laisse apparaître un devis de travaux obligatoires, le coût de ces travaux sera pris en charge par le vendeur. Dans cette hypothèse, les parties sont informées que les présentes entreront alors dans le champ d’application de la vente d’immeuble à rénocer et qu’elles devront être reprises sous l’empire de cette législation. Observation est ici faite que le système d’assainissement est une station d’épuration en cours d’installation. Le facture après paiement sera transmise à l’acquéreur par le vendeur’.
En effet, lorsque le compromis de vente a été signé, les travaux d’assainissement, consistant en la création d’une station d’épuration, n’étaient pas achevés. Etait donc prévue la transmission par le vendeur à l’acquéreurd’un document de contrôle de l’installation d’assainissement ainsi que la facture après paiement.
M. [F] a communiqué à M. [G] le 23 octobre 2012 le procès-verbal de contrôle de l’exécution des travaux d’assainissement autonome daté du 3 septembre 2012, lequel ne fait pas apparaître de travaux obligatoires puisque la société VEOLIA EAU, mandaté par la communauté de communes, donne un avis favorable et conclut que la filière d’assainissement est conforme aux caractéristiques de l’habitation et à l’ensemble des contraintes environnementales du terrain étudié.
La facture après paiement, que M. [G] indique ne pas avoir reçue, devait être communiquée par le vendeur à l’acquéreur de sorte qu’aucune faute ne saurait être imputée à M. [F] de ce chef, alors que M. [G] ne justifie pas avoir réclamé ce document aux vendeurs. Il ne s’est d’ailleurs pas plaint du défaut de communication de ce document dans le courrier qu’il a adressé le 31 octobre 2012 à M. [F]. Le procès-verbal de contrôle mentionne au demeurant que le prétraitement et le traitement des eaux usées sont assurés par une microstation d’épuration Graf Kiaro 8EH avec agrément 2011-005, puis rejetées dans le réseau EP du propréitaire, ce qui démontre que les travaux prévus ont été réalisés.
M. [G] ne justifie donc d’aucune faute commise par M. [F] dans l’exécution de ses devoirs d’information et de conseil s’agissant de la transmission de ces documents.
II – Sur la réparation du préjudice
M. [G] estime que le tribunal a à tort considéré que le préjudice résultant du manquement du notaire était constitué par une perte de chance de ne pas avoir été judiciairement condamné, son préjudice étant total puisque s’il avait eu ces informations avant la signature du compromis, il ne l’aurait pas signé, et n’aurait donc jamais subi cette procédure judiciaire qui a conduit à sa condamnation. Il en déduit que M. [F] doit être condamné à lui verser une somme de 36 529,12 euros correspondant à l’intégralité de son préjudice.
Le manquement au devoir d’information et de conseil est à l’origine, pour celui qui en est victime, de la perte de la possibilité, s’il avait été en possession de toutes les informations et de tous les conseils dont il aurait dû disposer, d’avoir pris une décision différente de celle qu’il a prise. Constitue une perte de chance réparable la disparition actuelle et certaine d’une éventualité favorable.
La réparation d’une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l’avantage qu’aurait procuré cette chance si elle s’était réalisée.
En l’espèce, M. [G] a été condamné par la cour d’appel d’Angers en raison de son refus de régularisation de l’acte de vente définitif.
Le préjudice dont il demande réparation résulte donc de l’obligation dans laquelle il s’est trouvé de s’acquitter des condamnations mises à sa charge par cet arrêt, consécutives à la signature du compromis.
Il prétend qu’il est certain que si le notaire avait rempli ses obligations lors de la signature du compromis, il ne l’aurait pas signé.
Toutefois, il ne justifie nullement que si le notaire avait attiré son attention lors de la signature du compromis sur la différence entre la description du bien et les permis de construire obtenus et sur les incidences de cette situation, il est certain qu’il n’aurait pas signé le compromis, alors qu’il n’a à aucun moment fait état de cet élément dans les courriers qu’il a adressés au notaire après la signature du compromis, et notamment dans le courrier qu’il lui a adressé le 31 octobre 2012 dans lequel il explique par d’autres raisons son refus de se présenter pour la signature de l’acte de vente définitif. Il ne démontre donc pas que cet élément était déterminant de son consentement, et que l’eût-il connu, il n’aurait pas, de façon certaine, signé le compromis.
Compte tenu des nombreuses autres raisons qu’il a invoquées pour refuser de régulariser la vente définitive, et qui n’étaient pas imputables à faute à M. [F] contrairement à ce qu’il soutient, il convient de considérer que le manquement de M. [F] à son obligation d’information et de mise en garde concernant le défaut de concordance entre la description du bien et le permis de construire a fait perdre à M. [G] une chance de ne pas signer le compromis de vente ou de s’en rétracter dans le délai légal, et donc de ne pas être condamné par la cour d’appel d’Angers, dans une proportion qu’il convient d’évaluer à 30%.
M. [G] a été condamné, par arrêt de la cour d’appel d’Angers en date du 10 mai 2017, devenu définitif, à payer aux consorts [D] les sommes de :
– 15 000 euros au titre du préjudice né du défaut de finalisation de l’acte ;
– 15 000 euros au titre du préjudice né de l’immobilisation du bien ;
– 529,12 euros au titre des dépens de la procédure de première instance
– 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en première instance ;
– 3500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
M. [G] justifie par ailleurs avoir exposé, dans le cadre de la procédure l’opposant aux consorts [D] qui s’est achevée par l’arrêt du 10 mai 2017, des frais d’avocat à hauteur de 10 300 euros (pièce n°16).
Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné M. [F] à payer à M. [G] 30% de l’ensemble de ces sommes, soit une somme de 14 048,74 euros.
* Sur le préjudice moral
M. [G] sollicite également l’indemnisation de son préjudice moral, à hauteur de 50 000 euros. Il fait valoir qu’il est âgé de plus de 86 ans, et qu’il a dû consacrer du temps et de l’énergie à cette affaire, et que le stress généré par cette affaire a eu raison de sa santé puisqu’il a été victime d’un AVC en mars 2021 pour lequel il est encore suivi.
Il n’est toutefois nullement justifié que l’accident vasculaire cérébral qu’il invoque est en lien avec les procédures judiciaires qu’il a menées, alors qu’en mars 2021, la procédure diligentée devant la cour d’appel d’Angers était achevée depuis près de quatre ans, que le jugement dans la présente instance, qui au demeurant lui avait donné partiellement raison, avait été rendu un an auparavant et qu’il est lui-même à l’origine de la procédure d’appel. .
Il convient en conséquence de le débouter de sa demande à ce titre.
Sur les demandes accessoires
M. [G] sera tenu aux dépens de la procédure d’appel.
Les circonstances de la cause ne justifient pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris en ce qu’il dit que Maître [Y] [F] a manqué à son devoir de conseil en n’informant pas M. [N] [G] sur la classification du terrain en zone agricole lors de la signature du compromis de vente ;
Le CONFIRME pour le surplus ;
Statuant à nouveau et y ajoutant :
DIT que M. [Y] [F] a manqué à son devoir de conseil en n’attirant pas l’attention de M. [G] sur le défaut de conformité du bien vendu au permis de construire et sur les incidences de cette non-conformité ;
REJETTE les demandes fondées sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [N] [G] aux dépens de la procédure d’appel.
Arrêt signé par Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de Chambre et Mme Fatima HAJBI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT