Responsabilité du Notaire : 23 mars 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 19/04897

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Responsabilité du Notaire : 23 mars 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 19/04897
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COUR D’APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

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ARRÊT DU : 23 MARS 2023

N° RG 19/04897 – N° Portalis DBVJ-V-B7D-LG6O

SCP [Y]-[Z] [M]

c/

Madame [K] [E]

Monsieur [P] [X] [S] [G]

Madame [N] [C] [B] [G] épouse [T]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 22 juillet 2019 (R.G. 11-18-717) par le Tribunal d’Instance de PERIGUEUX suivant déclaration d’appel du 10 septembre 2019

APPELANTE :

Société SCP [J]-[A]-[Z] [M]

La SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z]-

[M], Notaires associés, société immatriculée au RCS de PERIGUEUX

sous le numéro 320 168 008, domiciliée [Adresse 5]

[Adresse 4]

Représentée par Me HARDY substituant Me Xavier LAYDEKER de la SCP LAYDEKER – SAMMARCELLI – MOUSSEAU, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

[K] [E]

née le 22 Octobre 1968 à [Localité 8]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 3]

Représentée par Me Annie TAILLARD de la SCP ANNIE TAILLARD AVOCAT, avocat au barreau de BORDEAUX

et assistée de Me Jérôme ATHANAZE de la SELARL ATHANAZE JEROME, avocat au barreau de PERIGUEUX

[P] [X] [S] [G]

né le 06 Mars 1952 à [Localité 6]

de nationalité Française

Profession : Fonctionnaire,

demeurant [Adresse 1] / LUXEMBOURG

[N] [C] [B] [G] épouse [T]

née le 30 Avril 1954 à [Localité 7]

de nationalité Française

Retraitée,

demeurant [Adresse 2]

Représentés par Me Virginie LEMAIRE de la SELARL LEMAIRE VIRGINIE AVOCAT, avocat au barreau de PERIGUEUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 07 février 2023 en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Paule POIREL, Président,

Monsieur Rémi FIGEROU, Conseiller,

Madame Christine DEFOY, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Audrey COLLIN

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Suivant compromis de vente en date du 1er septembre 2015, confirmé par acte authentique du 9 décembre 2015 conclu par-devant Me [R] [V], notaire associé de la SCP [R] [V] et [F] [J], Mme [K] [E] a acheté à M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T] une maison d’habitation située [Adresse 3], l’acte mentionnant que le bien était raccordé au réseau d’assainissement.

Par courrier du 11 juin 2017, Mme [E] a procédé à une déclaration de sinistre auprès de son assureur, la société MAIF, concernant un dégât des eaux dans sa buanderie provenant, selon le plombier intervenu, d’un bouchon dans le tuyau reliant la maison à la fosse septique dont elle indiquait ignorer l’existence.

Par courrier du 14 juin 2017, la société MAIF a répondu à Mme [E] que les conséquences dommageables de l’inondation seraient prises en charge, sauf la franchise de 125 euros restant à sa charge.

Mme [E] a missionné la société CEC (cabinet d’expertise et conseil) qui a effectué une visite unilatérale et rédigé un constat expertal avec avis technique le 28 février 2018.

Le 19 janvier 2018, Mme [E] a fait procéder à un constat d’huissier par la SCP Gomez Boudot, huissiers de justice associés à Ribérac.

Par actes d’huissier en date des 6 et 13 août 2019, Mme [E] a fait assigner la SCP [F] [J], Mme [I] [A] et M. [D] [Z] [M] (anciennement SCP [R] [V] et [F] [J]) ainsi que M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T] devant le tribunal d’instance de Périgueux aux fins de les voir condamner à lui payer des dommages et intérêts sur le fondement de la garantie des vices cachés à titre principal, d’un défaut de délivrance conforme à titre subsidiaire, ou aux fins d’expertise judiciaire à titre infiniment subsidiaire.

Par jugement rendu le 22 juillet 2019, le tribunal de grande instance de Périgueux a :

– débouté Mme [K] [E] de sa demande en garantie des vices cachés ;

– déclaré M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T] responsables d’un manquement à leur obligation de délivrance conforme ;

– déclaré la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z] [M] responsable d’un manquement à son devoir d’information et de conseil ;

– condamné in solidum la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z] [M], M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T] à payer à Mme [K] [E] une somme de 3 928,25 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel, avec intérêts à compter du prononcé de la présente décision;

– ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière à compter du prononcé de la présente décision, dans les conditions fixées par l’article 1343-2 du code civil ;

– débouté Mme [K] [E] de sa demande de dommages et intérêts au titre de son préjudice de jouissance ;

– rejeté la demande subsidiaire de Mme [K] [E] aux fins de voir ordonner une expertise judiciaire ;

– condamné in solidum la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z] [M], M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T] à payer à Mme [K] [E] la somme de 2 200 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– rejeté le surplus des demandes ;

– condamné in solidum la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z] [M], M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T], aux entiers dépens.

Par déclaration électronique en date du 10 septembre 2019, enregistrée sous le n° RG 19/04897, la SCP Fongarnand-Hangirou-Pistre Cerdan a relevé appel de cette décision limité aux dispositions ayant :

– déclaré la SCP [J], [I] [A] et [D] [Z] [M] responsable d’un manquement à son devoir d’information et de conseil,

– condamné in solidum la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z] [M], M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T] à payer à Mme [K] [E] une somme de 3 928,25 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel, avec intérêts à compter du prononcé de la présente décision;

– ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière à compter du prononcé de la présente décision, dans les conditions fixées par l’article 1343-2 du code civil ;

– condamné in solidum la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z] [M], M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T] à payer à Mme [K] [E] la somme de 2 200 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– rejeté le surplus des demandes ;

– condamné in solidum la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z] [M], M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T], aux entiers dépens.

La SCP Fongarnand-Hangirou-Pistre Cerdan, dans ses dernières conclusions d’appelante en date du 24 janvier 2023, demande à la cour, d’infirmer le jugement du tribunal d’instance de Périgueux du 22 juillet 2019 en ce qu’il a :

– déclaré la SCP [J], [I] [A] et [D] [Z] [M] responsable d’un manquement à son devoir d’information et de conseil,

– condamné in solidum la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z] [M], M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T] à payer à Mme [K] [E] une somme de 3 928,25 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel, avec intérêts à compter du prononcé de la présente décision ;

– ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière à compter du prononcé de la présente décision, dans les conditions fixées par l’article 1343-2 du code civil ;

– condamné in solidum la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z] [M] , M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T] à payer à Mme [K] [E] la somme de 2 200 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– rejeté le surplus des demandes ;

– condamné in solidum la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z] [M], M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T], aux entiers dépens.

Par conséquent,

– déclarer Mme [E] mal fondée en ses prétentions formées à l’encontre de la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] Pistre Cerdan ;

– débouter Mme [E] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

– déclarer irrecevable et subsidiairement mal fondé l’appel des consorts [G].

En tout état de cause,

– condamner toute partie succombante à payer à la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] Pistre Cerdan une indemnité de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner toute partie succombante aux entiers dépens.

Mme [E], dans ses dernières conclusions d’intimée en date du 16 janvier 2023, demande à la cour, au visa des articles 1240 du code civil, L1331-11-1 du code de la santé publique, L.271-4 du code de la construction et de l’habitat, et 232 du code de procédure civile, de :

– juger que la responsabilité de la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z] Cedan, notaires associés, est pleinement engagée vis-à-vis d’elle,

– juger que la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z] [M], notaires associés, a commis une faute lui ayant causé un préjudice certain et direct,

En conséquence,

– condamner in solidum la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z] [M], notaires associés et M. et Mme [G] à payer à Mme [E] les sommes suivantes :

– La somme de 4.905,17 euros au titre de son préjudice matériel

– La somme de 2.000 euros au titre de son préjudice de jouissance,

– juger que les intérêts à valoir sur les sommes prononcées pourront être capitalisés par application des dispositions de l’article 1154 du code civil,

En tout état de cause,

– débouter les parties adverses de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions contraires,

– condamner in solidum l’ensemble des défendeurs à lui payer la somme de 6.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles,

– condamner in solidum l’ensemble des défendeurs aux entiers dépens, en ce compris les frais éventuels d’exécution et distraction pour cause d’appel au profit de la SCP TAILLARD, avocat, en application de l’article 699 du code de procédure civile.

A titre infiniment subsidiaire

– voir désigner tel expert qu’il plaira, aux fins de :

– Convoquer les parties

– Se faire remettre tous documents utiles

– Se rendre sur les lieux sis [Adresse 3].

– examiner l’immeuble litigieux précité.

– Décrire les travaux exécutés dans l’immeuble précité

– En cas d’urgence ou de péril en la demeure constatée par l’expert désigné,

– Autoriser à faire procéder, pour le compte de qui il appartiendra, les travaux jugés nécessaires par l’expert, et ce, par des entreprises spécialisées de leur choix et sous l’éventuel contrôle d’un maître d”uvre de leur choix.

– Donner les éléments permettant d’apprécier l’existence des désordres, de vices caché, de non façons, des malfaçons et non conformités dénoncées en la présente assignation et les pièces jointes, affectant l’immeuble précité, les décrire précisément et en indiquer l’incidence sur les ouvrages et leur destination,

– Dire si les vices cachés préexistaient au moment de la vente.

– Plus précisément, dire si les désordres ou vices cachés constatés sont susceptibles de rendre l’immeuble impropre à sa destination,

– Rechercher la cause des désordres et des vices,

– Déterminer les personnes responsables et l’étendue de leur responsabilité,

– Plus précisément, donner tous les éléments techniques et de fait permettant au juge de déterminer les responsabilités encourues par les différents intervenants et, le cas échéant, déterminer la part qui leur est imputable, en précisant les motifs techniques présidant à son appréciation.

– Décrire les travaux propres à remédier aux désordres, malfaçons, non façons et non conformités constatés, en évaluer le coût au besoin en sollicitant un assistant maître d’ouvrage ou un maître d”uvre pour ce faire, la durée d’exécution ainsi que ceux des travaux demeurant à parfaire,

– Donner les éléments permettant de déterminer l’ensemble des préjudices subis par Mme [E]

– Dire que l’expert, s’il l’estime nécessaire, pourra recourir à un sapiteur de son choix dans un domaine ne relevant pas de sa spécialité,

– Dire que l’expert pourra entendre les entreprises étant intervenues dans la réalisation des travaux en tant que sachant,

– Dire que l’expert déposera un pré-rapport communiqué aux parties, lesquelles se verront alors imparties un délai pour formuler des dires écrits,

– plus généralement, donner tous éléments indispensables à la solution du présent litige.

M. et Mme [G], dans leurs dernières conclusions d’intimés en date du 19 janvier 2021, demandent à la cour, au visa des 1604 et 1240 articles du code civil, d’infirmer le jugement rendu par le tribunal d’Instance de Périgueux le 22/07/2019, en ce qu’il a :

– déclaré M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T] responsables d’un manquement à leur obligation de délivrance conforme ;

– condamné in solidum la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z]-[M], M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T], 3.928,25 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel, avec intérêts à compter du prononcé de la présente décision ;

– ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière à compter du prononcé de la présente décision, dans les conditions fixées par l’article1343-2 du code civil

– condamné in solidum la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z]-[M], M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T], à payer à Mme [K] [E] une somme de 2.200 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné in solidum la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z]-[M], M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T] aux entiers dépens,

Et, Statuant à nouveau,

A titre principal, débouter Mme [E] de l’ensemble de ses demandes présentées à leur encontre.

A titre subsidiaire, si la Cour estimait qu’il y a une délivrance non conforme aux stipulations contractuelles, engageant la responsabilité de M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T], vis-à-vis de Mme [E],

– fixer le préjudice matériel subi par Mme [E] à la somme 3.928,25 euros, et débouter celle-ci du surplus de ses demandes au titre de ce préjudice.

Confirmer le jugement du tribunal d’instance en ce qu’il a débouté Mme [E] de son préjudice de jouissance,

– juger recevable la demande en garantie présentée par M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T] vis-à-vis de la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z]-[M].

En conséquence,

– juger que la responsabilité la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z]-[M], est engagée vis-à-vis de M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T],

– condamner la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z]-[M], à garantir ces derniers de toute condamnation prononcée à leur encontre vis-à-vis de Mme [E].

Confirmer le jugement du tribunal d’instance en ce qu’il a débouté Mme [E] de son action en garantie des vices cachés vis-à-vis de M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T],

Confirmer le jugement du tribunal d’instance en ce qu’il a débouté Mme [E] desa demande d’expertise, et débouter celle-ci de la nouvelle demand d’expertise qu’elleprésente.

– débouter Mme [E] surplus de ses demandes présentées à l’encontre de M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T]

A titre subsidiaire, si la Cour estimait faire droit à la demande d’article 700 du code de procédure civile présentée par Mme [E], la ramener à de plus juste proportion.

– débouter la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z]-[M] de toute demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile présentée à l’encontre de M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T]

– condamner la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z]-[M] et Mme [E] à verser une somme de 3.000 euros M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z]-[M] et Mme [E] aux dépens d’instance.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 24 janvier 2022.

Pour une plus ample connaissance du litige et des prétentions et moyens des parties, il est fait expressément référence aux dernières conclusions et pièces régulièrement communiquées par les parties.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l’obligation de délivrance du bien vendu et la garantie des vices cachés

Le tribunal a jugé que le fait que l’immeuble vendu ne soit pas relié au réseau public d’assainissement ne le rendait pas impropre à l’usage auquel il était destiné alors que de nombreuses habitations fonctionnaient avec un réseau d’assainissement autonome mais qu’en présentant l’immeuble vendu comme étant raccordé au réseau public d’assainissement, ce qu’il n’était pas , le bien n’était pas conforme aux stipulations contractuelles et les vendeurs ont ainsi manqué à leur obligation de délivrance.

Les consorts [G] exposent qu’ils pensaient de bonne foi que l’immeuble litigieux était recordé au réseau public d’assainissement alors que notamment leur père avait acquitté une facture de la société Suez en raison de la collecte des eaux usées mais qu’en toute hypothèse, l’acheteuse avait renoncé à ce qu’un certificat de conformité de l’assainissement soit réalisé et a accepté de faire son affaire personnelle de travaux qui s’avéreraient nécessaires, et qu’enfin, il appartenait au notaire chargé de la vente de vérifier ce point ce qu’il n’a pas entrepris qu’en conséquence, il appartient à ce dernier de les relever indemnes de toute condamnation qui serait prononcée contre eux.

La SCP [J]-Hangirou-[Z] [M] soutient que les consorts [G] sont irrecevables à solliciter sa garantie devant la cour d’appel alors qu’ils ne l’avaient pas sollicitée devant le tribunal alors qu’en outre ils sont infondés en une telle prétention alors que s’ils n’étaient pas certains du raccordement au réseau d’assainissement public, ainsi qu’ils l’avaient déclaré, il leur appartenait de procéder à une vérification.

Mme [E] sollicite la confirmation du jugement déféré en ce qu’il a jugé que les vendeurs ont manqué à leur obligation de délivrance conforme de l’immeuble cédé. A titre subsidiaire elle demande que son action an garantie des vices cachés soit jugée recevable et fondée.

****

Aux termes de l’article 1604 du code civil : « La délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l’acheteur. »

Le seul fait pour l’acquéreur de recevoir un bien différent de celui qui lui a été présenté dans l’acte de vente suffit à juger que celui-ci n’était pas conforme aux stipulations contractuelles et qu’ainsi les vendeurs ont manqué à leur obligation de délivrance.

La bonne foi des vendeurs dans l’information erronée qu’ils ont donnée à l’acquéreur est sans conséquence sur le défaut de délivrance du bien.

En outre à partir du moment où il a été indiqué à Mme [E] que le bien était raccordé au réseau d’assainissement collectif alors qu’il ne l’était pas, le fait que celle-ci ait renoncé à faire réaliser un certificat de conformité et qu’elle se soit engagée à faire son affaire personnelle de la réalisation des « travaux qui pourraient s’avérer nécessaire aux fins d’obtention de la conformité » est sans effet sur l’obligation des vendeurs de délivrer un bien conforme à l’acte de vente, c’est-à-dire relié au réseau public d’assainissement.

En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a retenu la responsabilité des vendeurs au titre de leur obligation de délivrance.

Par ailleurs, aux termes de l’article 564 du code de procédure civile : « A peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait. »

La demande des consorts [G] aux fins de voir le notaire condamné à les garantir de toute condamnations prononcée à leur encontre n’a pas pour objet d’opposer une quelconque compensation, ni de faire écarter les prétentions adverses, ni davantage de faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

En outre, elle ne tend pas aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, au sens de l’article 565 du même code.

En conséquence cette demande de garantie est irrecevable.

Sur la responsabilité du notaire

La SCP [J] [A] [Z]-[M] soutient qu’elle n’a commis aucune faute alors qu’elle n’avait pas à vérifier les déclarations du vendeur qui avait déclaré à deux reprises en l’espèce que l’immeuble qu’il vendait était raccordé au tout à l’égout, alors qu’il ne l’était pas, alors qu’en outre il n’avait pas davantage à contrôler l’installation d’assainissement et d’annexer à son acte un certificat de conformité.

M. [E] affirme que la responsabilité du notaire est engagée alors qu’il avait l’obligation d’annexer à son acte le document établi à l’issue du contrôle des installations d’assainissement non collectif, alors qu’en outre il devait assurer l’efficacité de son acte si bien qu’il se devait de vérifier les affirmations du vendeur, et qu’il était en outre assujetti à une obligation de conseil et d’information.

Les consorts [G] considèrent qu’ils ne connaissaient pas l’immeuble litigieux alors qu’ils en avaient hérité de leur père si bien que les déclarations erronées sur le raccordement de celui-ci au réseau public d’assainissement ne sont pas de leur fait, et qu’en revanche il appartenait au notaire de conseiller tant le vendeur que l’acheteur sur les informations portées dans son acte.

***

L’article 1382 du code civil applicable aux faits de l’espèce dispose : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer »

La jurisprudence impose au notaire de conseiller les parties à l’acte qu’il a reçu mission d’établir. Cela lui porte obligation de renseigner ses clients sur les conséquences des engagements qu’ils contractent et d’assurer la validité et l’efficacité des actes qu’il reçoit. Aussi, il ne peut se contenter de donner une forme authentiques à des conventions déjà convenues entre les parties, sur la foi de leurs déclarations, alors qu’il doit assurer la sécurité de son acte.

Ce devoir de sécurité oblige le notaire à rédiger des actes valables ce qui l’oblige à vérifier que les conditions d’une vente d’un immeuble telles qu’énoncées dans son acte sont conformes à la réalité.

Il ne doit qu’authentifier les propos des déclarants et non vérifier leur contenu s’il ne dispose d’aucun moyen pour y parvenir. En revanche il doit vérifier toute déclaration essentielle quand cela est possible.

En l’espèce, le notaire a porté dans son acte une information inexacte aux termes de laquelle l’immeuble vendu était relié au réseau publique d’assainissement alors que tel n’était pas le cas.

Le notaire, en ne vérifiant pas cette information en interrogeant l’organisme chargé du service de l’assainissement, ou encore en ne demandant pas aux vendeurs les factures de raccordement du réseau privé au réseau public ; a manqué à son obligation d’efficacité de son acte, alors qu’une telle information apparaissait d’autant plus incertaine qu’elle provenait des vendeurs qui n’habitaient pas l’immeuble alors qu’ils l’avaient reçu en héritage de leur père, et qu’ils étaient domiciliés en d’autres lieux.

En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en considérant qu’en agissant de la sorte le notaire avait engagé sa responsabilité en n’assurant pas l’efficacité de l’acte qu’il était chargé de rédiger.

Sur les préjudices de Mme [E]

Sur le préjudice matériel de Mme [E]

Le tribunal a condamné in solidum les vendeurs de l’immeuble et le notaire à payer à Mme [E] les seuls travaux permettant le raccordement de l’immeuble litigieux au réseau public d’assainissement, outre les intérêts légaux à compter de sa décision, avec capitalisation.

La SCP Fongarnaud [A] Pistre-Cerdan considère, dans l’hypothèse où sa responsabilité serait retenue qu’elle n’aurait pas à prendre en charge le coût de ces travaux car si le notaire avait découvert que contrairement aux déclarations des vendeurs l’immeuble n’était pas relié au réseau public, Mme [E] aurait obtenu des vendeurs une diminution du prix de vente du bien, ou les vendeurs auraient dû supporter le coût du raccordement, ce qui démontre que ce n’est pas au notaire de prendre en charge le coût de ces travaux.

Mme [E] critique le quantum du montant qui lui a été accordé considérant que le notaire et ses vendeurs doivent prendre en charge le coût des travaux de reprise pour la réalisation d’un raccordement au réseau public d’assainissement, outre les travaux nécessaires dans la buanderie mais également le coût du rachat d’un lave-linge suite à l’inondation subie en raison du défaut du raccordement des eaux usées au réseau publique.

Les vendeurs prétendent pour leur part qu’il ressort des devis produits par Mme [E] que le montant des travaux réparatoires s’élève à la somme totale de 3803,25 euros, et les devis ne peuvent pas être actualisés car il appartenait à Mme [E] de faire réaliser lesdits travaux.

***

La faute contractuelle des vendeurs et celle délictuelle du notaire ont concouru indivisiblement à la réalisation de l’entier dommage lequel est constitué principalement par le coût de la mise en état du bien vendu tel qu’il était déclaré dans l’acte de vente, et accessoirement par le préjudice découlant de l’absence actuelle du tout à l’égout, et des nuisances occasionnées par les travaux à prévoir pour le raccordement au réseau public.

En effet, si le notaire avait rempli ses obligations Mme [E] n’aurait pas subi ces désagréments en sorte que faute a bien concouru indivisiblement à la réalisation de son préjudice.

En conséquence, le notaire doit répondre de sa faute, sans pouvoir opposer le fait que s’il avait été correctement informé par les vendeurs, il n’aurait pas eu à supporter la baisse du prix de l’immeuble ou le coût des travaux nécessaire au raccordement de celui-ci au réseau public.

Le quantum du préjudice matériel de Mme [E] s’élève au montant des travaux réparatoires soit la somme de 3400, 67 euros, conformément au devis des sociétés Suez et Perigord assainissement.

Elle fait valoir les travaux de reprise rendues nécessaires dans sa buanderie qui ont été indemnisés par son assureur mais qui ont laissé à sa charge une franchise de 125 euros qui doit également être prise en compte, ainsi que le coût du contrôle de conformité du branchement à hauteur de 130 euros.

En revanche, il n’y a pas lieu d’ajouter le coût de remplacement de sa machine à laver alors qu’elle ne démontre pas que ce remplacement serait dû au défaut de raccordement de l’immeuble au réseau d’assainissement public.

De la même manière, dans la mesure où elle ne produit pas les éléments complets de la prise en charge de son assureur au titre par l’inondation qu’elle a connue, il n’est pas possible de savoir si la MAIF a pris en charge

En conséquence, le jugement sera réformé sur le quantum du préjudice matériel et celui-ci sera fixé à la somme de 3655,67 euros, sans qu’il soit nécessaire de recourir à une expertise judiciaire la cour considérant que les pièces versées au débat par les parties, et notamment l’expertise amiable du 28 février 2018, l’attestation de M. [O], le procès-verbal de constat du 19 janvier 2018, ainsi que les devis de travaux sont suffisantes pour apprécier ledit préjudice matériel.

Sur le préjudice de jouissance

Mme [E] demande la réformation du jugement en ce qu’il a rejeté sa demande de condamnation de la SCP [J]-Hangirou-[Z] [M] à lui verser une somme de 2 000 euros au titre du préjudice de jouissance

La SCP de notaires et les consorts [G] considèrent que cette demande n’est pas justifiée.

***

Il est incontestable que Mme [E] a connu un préjudice de jouissance alors qu’elle a subi une inondation qu’elle n’aurait pas connu si son réseau privé des eaux usées avait été raccordé au réseau public.

En conséquence, il convient de réformer le jugement déféré sur ce point et fixer le préjudice de jouissance de Mme [E] à la somme de 750 euros.

Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

La SCP Fongarnand-Hangirou-Pistre Cerdan succombant en son appel et les consorts [G] en leur appel seront condamnés aux dépens de Mme [E] et à lui verser la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en ce compris les frais de constat des désordres.

La SCP [J] Hangirou Pistre-Cerdan et les consorts [G] conserveront à leur charge leurs dépens et frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qui concerne les préjudices de Mme [E] ;

Statuant à nouveau de ces chefs :

Condamne in solidum la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z]-[M] d’une part et M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T], d’autre part à payer à Mme [K] [E] la somme de 3655,67 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel, et celle de 750 euros au titre de son préjudice de jouissance, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, et capitalisation des intérêts dus pour une année entière à compter du prononcé de la présente décision dans les conditions fixées par l’article 1343-2 du code civil, y ajoutant :

Déboute les parties de leurs autres demandes ;

Confirme le jugement entrepris pour le surplus et y ajoutant :

Condamne in solidum la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z]-[M] d’une part et M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T], d’autre part, à payer à Mme [K] [E] la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre ses entiers dépens.

Dit que la SCP [F] [J], [I] [A] et [D] [Z]-[M] d’une part et M. [P] [G] et Mme [N] [G] épouse [T], d’autre part, conserveront à leur charge leurs dépens et leurs frais non compris dans les dépens.

La présente décision a été signée par madame Paule POIREL, présidente, et madame Audrey COLLIN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

 


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