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délivrées le
à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre civile
ARRET DU 20 AVRIL 2023
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 22/04645 – N° Portalis DBVK-V-B7G-PRK4
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du 06 JUILLET 2022
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE RODEZ
N° RG 21/01235
APPELANTE :
Madame [W] [C] épouse [S]
née le [Date naissance 6] 1953 à [Localité 4]
de nationalité Française
[Adresse 7]
[Localité 3]
Représentée par Me Nicolas BEDEL DE BUZAREINGUES de la SCP BEDEL DE BUZAREINGUES, BOILLOT, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMES :
Maître [F] [N]
[Adresse 5]
[Localité 2]
Représenté par Me Gilles LASRY de la SCP SCP D’AVOCATS BRUGUES – LASRY, avocat au barreau de MONTPELLIER
S.C.P. [B] [X] [N] [G] prise en la personne de son représentant légal domicilié es
qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Gilles LASRY de la SCP SCP D’AVOCATS BRUGUES – LASRY, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 23 Février 2023
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 02 MARS 2023,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Eric SENNA, chargé du rapport, Président de chambre et Madame Nelly CARLIER, Conseiller,
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Eric SENNA, Président de chambre
Madame Myriam GREGORI, Conseiller
Madame Nelly CARLIER, Conseiller
Greffier lors des débats : M. Salvatore SAMBITO
Ministère public :
L’affaire a été communiquée au ministère public.
ARRET :
– contradictoire ;
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par Monsieur Eric SENNA, Président de chambre, et par M. Salvatore SAMBITO, Greffier.
EXPOSE DU LITIGE
Par acte en date du 12 octobre 2021, [W] [C] a assigné [F] [N] et la SCP [B], [X] et [N]-[G] devant le tribunal judiciaire de Rodez en responsabilité notariale.
[F] [N] et la SCP [B], [X] et [N]-[G] ont soulevé, un incident devant le juge de la mise en état, tenant à l’irrecevabilité de l’action pour prescription et pour autorité de chose jugée.
Par ordonnance en date du 6 juillet 2022, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Rodez a’:
déclaré [W] [C] irrecevable en son action pour autorité de la chose déjà jugée’;
condamné [W] [C] à verser respectivement à [F] [N] et à la SCP [B], [X] et [N]-[G] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;
rejeté toute autre demande dont la demande de dommages et intérêts formée par [F] [N] et la SCP [B], [X] et [N]-[G]’;
condamné [W] [C] aux entiers dépens de l’instance.
Par déclaration en date du 6 septembre 2022, [W] [C] a relevé appel de l’ordonnance.
Dans ses conclusions communiquées par voie électronique en date du 23 janvier 2023, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des prétentions et moyens au soutien, [W] [C] demande à voir infirmer la décision en ce qu’il a accueilli la fin de non-recevoir pour autorité de la chose jugée et en ce qu’il a déclaré l’action irrecevable.
Elle demande ainsi à voir rejeter la demande tirée de l’irrecevabilité de l’action, déclarer cette dernière recevable et infirmer la décision du juge en ce qu’il l’a condamnée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Elle demande par ailleurs à voir condamner solidairement Maître [N] et la SCP [B] [X] [N]-[G] à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d’appel.
Au soutien de ses prétentions, elle fait d’abord valoir que les conditions permettant d’opposer l’autorité de la chose jugée ne sont pas réunies. Elle affirme en ce sens qu’il n’existe ni identité de parties, ni identité de demandes.
Quant à l’absence d’identité des parties, elle relève que la première action a été diligentée par [W] [C] à l’encontre des seuls [Y] [C], son frère, et Me [N], de sorte que la SCP [B] [X] [N]-[G] n’était donc pas partie à la première action.
Quant à l’absence d’identité des demandes, elle relève que la première action visait la condamnation de Me [N] au titre des fonds qu’elle n’a pas perçu dans le cadre de l’exécution de la donation-partage tandis que par la présente action elle entend voir condamner solidairement Me [N] et la SCP [B] [X] [N]-[G] à titre de dommages et intérêts en réparation des fautes commises en qualité de notaire chargé à la succession, pour un montant par ailleurs distinct de celui sollicité dans le cadre de la première instance. Elle en conclut qu’il s’agit d’une demande nouvelle excluant l’existence d’un simple moyen nouveau.
Elle soutient ensuite que l’action n’est pas prescrite en ce sens que le point de départ du délai de prescription en responsabilité du notaire est constitué par la découverte, le 30 octobre 2017, des testaments datés au 21 février 1991 et 15 février 1994, ce pourquoi en date du 12 octobre 2021, date de l’introduction de l’instance, la prescription n’était pas acquise.
Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique en date du 14 octobre 2022, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des prétentions et moyens au soutien, [F] [N] et la SCP [B] [X] [N] [G] demandent à voir infirmer l’ordonnance en ce qu’elle a rejeté le moyen d’irrecevabilité tiré de la prescription et ainsi juger que l’action de Mme [C] est irrecevable du fait de la prescription.
Ils demandent par ailleurs à voir confirmer l’ordonnance du juge de la mise en état en ce qu’il a déclaré l’action de [W] [C] irrecevable au titre de l’autorité de chose déjà jugée et ainsi juger son action irrecevable à ce titre.
En tout état de cause, ils demandent à voir débouter Mme [C] de ses prétentions et la condamner à leur payer la somme de 5.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Au soutien de leurs prétentions, ils relèvent, d’une part, que l’action est prescrite, en ce sens que [W] [C] sait depuis 1998 que les testaments du 21 février 1991 et du 10 février 1994 n’ont jamais été remis au notaire et que la proposition de règlement de la succession est conforme aux éléments en possession de Me [N]. L’instance a donc été introduite après expiration du délai de prescription.
Ils soutiennent, d’autre part, que les demandes de [W] [C] se heurtent à l’autorité de chose déjà jugée.
Ils précisent, à ce titre, que le but poursuivi par la présente instance est le même que l’action qui avait déjà été engagée et qui a donné lieu à un débouté définitif des demandes de [W] [C] par arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence : l’obtention d’une indemnisation au titre du préjudice prétendument subi du fait de la vente des actions de la société par son frère [Y] [C], mettant en cause la responsabilité du notaire pour ne pas avoir exécuté son obligation de conseil d’information et d’efficacité des actes.
Il appartenait ainsi à Mme [C] de soulever, dans le cadre de la première action intentée, tous les moyens utiles à l’obtention de l’indemnisation.
Quant à l’identité de parties, ils contredisent l’argumentaire adverse en affirmant que Me [N] est associé de la SCP [B] [X] [N] [G] et que le notaire dont la responsabilité est recherchée a toujours été présent aux débats que ce soit en son nom personnel ou par l’intermédiaire de la société.
MOTIFS DE LA DECISION
Les appels interjetés dans les formes et délai de la loi sont recevables.
Sur la fin de non de non recevoir tirée de l’autorité de chose jugée
Pour critiquer la décision déférée, l’appelante soutient qu’il n’y a ni identité de partie, ni identité de demandes avec celles figurant dans l’arrêt rendu par la cour d’appel d’Aix en Provence en date du 13 décembre 2011.
Aux termes de l’article 1355 du code civil, l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.
Force est de constater, que si Me [F] [N] ès-qualité avait bien été assigné par l’appelante dans l’instance ayant conduit à l’arrêt rendu le 13 décembre 2011 par la cour d’appel d’Aix en Provence tel n’était pas le cas de la SCP [B] [X] [N] [G] et la circonstance que Me [N] était associé de cette SCP est indifférente sur le point de savoir si cette personne morale était partie à la cause.
Celle-ci n’ayant pas été attraite à la précédente instance et n’y étant pas intervenue, alors que l’action engagée par [W] [C] ne visait pas à rechercher la responsabilité de l’office notarial, il ne peut être considéré qu’il y a autorité de chose jugée rendant la présente action irrecevable à l’égard de la SCP [B] [X] [N] [G], en sorte que le jugement sera réformé de ce chef.
Par contre, il apparaît que, c’est par des motifs exacts et pertinents, que l’ordonnance déférée a déclaré la demande irrecevable en ce qu’elle est dirigée à l’encontre de Me [N] et sera donc confirmée de ce chef.
Sur la fin de non de non recevoir tirée de la prescription
Aux termes de l’ancien article 2270-1 du code civil, les actions en responsabilité civile extracontractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation.
Il résulte des articles’26 II de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile et’2’du Code civil que les dispositions de la loi du 17 juin 2008 qui réduisent la durée de la prescription s’appliquent aux prescriptions à compter du jour de son entrée en vigueur, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure, soit dix ans au cas d’espèce.
En revanche, la loi du 17 juin 2008 n’a pas eu pour effet de modifier le point de départ du délai de cette prescription extinctive qui avait commencé à courir antérieurement à son entrée en vigueur.
L’appelante soutient que le point de départ de cette prescription est situé au jour de la découverte de deux testaments en octobre 2017 dont elle soutient qu’elle en ignorait l’existence au moment de la signature de la donation-partage du 30 avril 1998.
La prescription d’une action en responsabilité extracontractuelle qui avait commencé à courir avant le 19 juin 2008, a donc couru à compter de la réalisation du dommage et non selon les critères posés par l’article 2224 du Code civil.
Dans ces conditions, ainsi que le soutiennent justement les intimés, le point de départ de la prescription extinctive est situé au 30 avril 1998 et a produit son effet extinctif au 20 juin 2008 en sorte que l’assignation délivrée le 8 octobre 2021 n’a pas pu interrompre le délai de prescription déjà acquis.
En conséquence quoi, le jugement sera donc réformé en ce sens.
L’équité commande de faire application, en l’espèce, à l’égard de la seule SCP [B] BARRAU DUBRULLE FABRE des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur de 1200 €.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Reçoit l’appel de [W] [C].
Réforme le jugement déféré en ce qu’il a accueilli la fin de non recevoir tirée de l’autorité de chose jugée à l’égard de la SCP [B] BARRAU DUBRULLE FABRE.
Statuant à nouveau de ce chef,
Rejette la fin de non recevoir tirée de l’autorité de chose jugée soulevée par la SCP [B] BARRAU DUBRULLE FABRE.
Constate la prescription de l’action formée par [W] [C].
Confirme le jugement déféré en ce qu’il a déclaré ses demandes irrecevables.
Y ajoutant,
Condamne [W] [C] à payer à la SCP [B] BARRAU DUBRULLE FABRE la somme de 1200 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile.
Condamne [W] [C] aux dépens d’appel.
Le Greffier Le Président