Responsabilité du Notaire : 12 septembre 2023 Cour d’appel de Caen RG n° 22/01983

·

·

Responsabilité du Notaire : 12 septembre 2023 Cour d’appel de Caen RG n° 22/01983
Je soutiens LegalPlanet avec 5 ⭐

AFFAIRE : N° RG 22/01983 –

N° Portalis DBVC-V-B7G-HBGC

 

ARRÊT N°

JB.

ORIGINE : DÉCISION du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'[Localité 9] du 25 Mai 2022

RG n° 22/00009

COUR D’APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 12 SEPTEMBRE 2023

APPELANTE :

La S.A.R.L. HADEX

N° SIRET : 488 889 726

[Adresse 1]

[Localité 7]

prise en la personne de son représentant légal

représentée par Me Delphine TOUBIANAH, substituée par Me PLANCHENAULT, avocats au barreau de CAEN,

assistée de Me Sandrine MARTIN SOL, avocat au barreau de CHARTRES

INTIMÉS :

Madame [R] [C] [B]

née le 29 Août 1962 à [Localité 13]

[Adresse 5]

[Localité 6]

représentée et assistée de Me Didier LEFEVRE, avocat au barreau D’ALENCON

Monsieur [Z] [K]

né le 22 Mars 1949 à [Localité 10]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Madame [W] [O] épouse [K]

née le 21 Décembre 1950 à [Localité 11]

[Adresse 2]

[Localité 4]

non représentés, bien que régulièrement assignés

La Société GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE MAGDELEINE

N° SIRET : 907 613 806

[Adresse 5]

[Localité 6]

prise en la personne de son représentant légal

représentée et assistée de Me Didier LEFEVRE, avocat au barreau D’ALENCON

La SCP GERVAIS GAËLLE – DECAEN CATHERINE & POTIER ERIC

[Adresse 3]

[Localité 8]

prise en la personne de son représentant légal

représentée et assistée de Me Marie BOURREL, avocat au barreau de CAEN

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

M. GUIGUESSON, Président de chambre,

M. GARET, Président de chambre,

Mme VELMANS, Conseillère,

DÉBATS : A l’audience publique du 16 mai 2023

GREFFIER : Mme COLLET

ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile le 12 Septembre 2023 et signé par M. GUIGUESSON, président, et Mme COLLET, greffier

* * *

EXPOSE DU LITIGE

Suivant acte au rapport de la SCP Gervais-Decan-Potier, notaires en date du 17 décembre 2021, Monsieur [Z] [K] et Madame [W] [O] ont vendu au GFA de Magdeleine, une propriété située lieudit [Localité 12] à [Localité 14] (61), moyennant le prix de 330.000 €.

Madame [R] [C] [B], gérante du GFA de Magdeleine est venue visiter le bien après que sa mère ait signé pour son compte le 7 septembre 2021, une offre d’achat.

Lors du déménagement qui a eu lieu le 20 décembre 2021, il n’a pas été possible de décharger les meubles compte tenu de l’encombrement du grenier et des dépendances.

Ce même jour, Maître [U], huissier de justice a établi un procès-verbal constatant le mauvais état des locaux (vétusté, humidité et électricité dangereuse).

Une procédure judiciaire a été engagée par le GFA aux fins de voir prononcer la résolution de la vente sur le fondement de l’article 1641 du code civil.

Puis, les parties se sont rapprochées et par jugement du 5 avril 2022, le tribunal judiciaire d’Alençon a homologué la transaction stipulant la résolution de la vente.

Auparavant, Madame [C] [B] et le GFA avaient fait assigner, les époux [K] ainsi que le notaire devant le juge des référés du tribunal judiciaire d’Alençon aux fins d’obtenir l’organisation d’une expertise et le versement d’une provision.

Ils ont assigné ultérieurement dans le cadre de cette même procédure, la société HADEX qui avait réalisé le diagnostic technique.

Par ordonnance du 25 mai 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire d’Alençon a :

– dit que le GFA de Magdeleine et Madame [C] [B] justifiaient d’un intérêt à agir,

– ordonné une expertise confiée à Monsieur [X] [L],

– commis le magistrat chargé du contrôle des expertises pour en suivre le déroulement,

– débouté le GFA de Magdeleine et Madame [C] [B] de leurs demandes formulées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné le GFA de Magdeleine et Madame [C] [B] aux dépens.

Par ordonnance rectificative d’une omission de statuer du 22 juin 2022, le juge des référés a constaté le désistement d’instance et d’action du GFA de Magdeleine et de Madame [C] [B] à l’endroit des époux [K].

Par déclaration du 2 août 2022, la société HADEX a formé appel de ces deux décisions en intimant l’ensemble des parties initialement à la cause.

Aux termes de ses écritures N°3, seules recevables, la société Hadex conclut au visa des articles 9 et 145 du code de procédure civile, 1229 et 1315 du code civil :

A titre principal,

– à l’irrecevabilité de la demande du GFA de Magdeleine et de Madame [C] [B] pour défaut de qualité à agir et par voie de conséquence à l’infirmation des ordonnances entreprises en ce qu’elles ont dit que le GFA de Magdeleine et Madame [C] [B] justifiaient d’un intérêt à agir, ont ordonné une expertise, ont constaté le désistement du GFA et de Madame [C] [B] et ont débouté la société Hadex de sa demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– au rejet des demandes, fins et conclusions de la SCP Gervais- Decaen & Potier,

– au rejet des demandes, fins et conclusions du GFA de Magdeleine et de Madame [C] [B],

A titre subsidiaire,

– à l’irrecevabilité de la demande du GFA de Magdeleine et de Madame [C] [B] pour défaut d’intérêt légitime et par voie de conséquence à l’infirmation des ordonnances entreprises en ce qu’elles ont dit que le GFA de Magdeleine et Madame [C] [B] justifiaient d’un intérêt à agir, ont ordonné une expertise, ont constaté le désistement du GFA et de Madame [C] [B] et ont débouté la société Hadex de sa demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– au rejet des demandes, fins et conclusions de la SCP Gervais- Decaen & Potier,

– au rejet des demandes, fins et conclusions du GFA de Magdeleine et de Madame [C] [B],

A titre infiniment subsidiaire,

– à l’infirmation des ordonnances entreprises en ce qu’elles ont dit que le GFA de Magdeleine et Madame [C] [B] justifiaient d’un intérêt à agir, ont ordonné une expertise, ont constaté le désistement du GFA et de Madame [C] [B] et ont débouté la société Hadex de sa demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

En conséquence,

– à ce qu’il soit jugé que le GFA de Magdeleine et Madame [C] [B] ne justifient ni d’un intérêt à agir, ni d’un motif légitime à la mesure d’expertise,

– au rejet des demandes, fins et conclusions de la SCP Gervais- Decaen & Potier,

– au rejet des demandes, fins et conclusions du GFA de Magdeleine et de Madame [C] [B],

– à la condamnation solidaire du GFA de Magdeleine et Madame [C] [B] au paiement d’une somme de 5.760,05 € TTC au titre des frais irrépétibles de première instance et de 9.942,90 €Ttc au titre des frais irrépétibles d’appel,

– à la condamnation solidaire du GFA de Magdeleine et Madame [C] [B] aux dépens de première instance et d’appel.

Aux termes de ses conclusions en date du 20 octobre 2022, la SCP Gervais-Decaen & Potier conclut à la confirmation de l’ordonnance de référé du 3 mai 2022.

Aux termes de leurs dernières écritures en date du 24 mars 2023, le GFA de Magdeleine et Madame [C] [B], concluent à la confirmation des décision entreprises, au rejet de la demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile formée par l’appelante et la condamnation de celle-ci au paiement d’une somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Pour l’exposé complet des prétentions et de l’argumentaire des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures susvisées conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 5 avril 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le défaut d’intérêt à agir

La société HADEX soutient que le GFA de Magdeleine et Madame [C] [B] étaient dépourvus d’intérêt à agir au motif que la résolution de la vente dont ils sont convenus avec les vendeurs, a eu pour conséquence l’anéantissement rétroactif du contrat.

Il est constant que selon l’article 31 du code de procédure civile, l’intérêt à agir s’apprécie au jour de l’introduction de la demande en justice, ce qui est le cas en l’espèce, puisqu’au jour de la délivrance des assignations aux fins d’expertise, soit les 21 décembre 2021 et 11 mars 2022, la résolution de la vente n’avait pas été prononcée, puisqu’elle ne le sera que par jugement du 5 avril 2022.

L’anéantissement rétroactif du contrat de vente n’a d’effets que dans les rapports entre les parties.

Il est sans incidence sur la procédure en cours au regard du texte précité, qui avait pour objectif d’obtenir l’organisation d’une expertise judiciaire destinée notamment à déterminer la conformité des diagnostics et plus particulièrement des diagnostics électriques réalisés par la société Hadex, une éventuelle non-conformité étant en effet indépendante de la résolution de la vente quant à la possible responsabilité de cette dernière.

Il en va de même quant à l’éventuelle responsabilité du notaire, au regard des désordres invoqués.

L’ordonnance sera confirmée en ce qu’elle a dit que le GFA de Magdeleine et Madame [C] [B] justifiaient d’un intérêt à agir.

Sur l’existence d’un motif légitime

L’article 145 du code de procédure civile dispose :

‘ S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les meures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou référé.’

Seul ce texte est applicable au stade du référé, à l’exclusion de l’article 146 du même code.

Les intimés n’avaient donc pas à rapporter à ce stade, la preuve d’un manquement de la société Hadex à sa mission de diagnostiqueur.

La seule démonstration de l’existence de désordres affectant l’immeuble consistant en la présence de traces d’humidité et d’installations non-conformes, résultant de constats d’huissier, d’attestations et de devis, constitue bien un motif légitime pour solliciter une expertise judiciaire.

Comme il a été dit ci-dessus, si du fait de la résolution de la vente, le GFA et Madame [C] [B] ne pourront agir au fond contre leurs vendeurs, ils auront la possibilité si les conclusions de l’expert judiciaire le leur permettent, d’agir en responsabilité à l’encontre du notaire et de la société Hadex.

La cour n’étant pas saisie au fond, n’a pas à statuer sur ce point, pas plus que sur le défaut de diligences susceptible d’être reproché à Madame [C] [B].

En présence d’un motif légitime, c’est à juste titre que le juge des référés a fait droit à la demande d’expertise.

L’ordonnance sera confirmée de ce chef.

Sur le désistement d’instance et d’action des intimés à l’encontre des époux [K]

La société Hadex a formé appel de l’ordonnance rectificative d’une omission de statuer du 22 juin 2022 constatant le désistement d’instance et d’action du GFA de Magdeleine et de Madame [C] [B] à l’encontre des époux [K], sans toutefois développer de moyen quant à sa demande d’infirmation, qui n’a en tout état de cause pas lieu d’être puisque ce désistement d’instance et d’action ne la concerne pas.

L’ordonnance rectificative du 22 juin 2022 sera donc confirmée.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

L’équité commande de confirmer l’ordonnance de référé du 25 mai 2022 en ce qu’elle a débouté la société Hadex de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile, de la débouter de sa demande à ce titre formée devant la cour et de la condamner à payer au GFA de Magdeleine et à Madame [R] [C] [B] unis d’intérêts, la somme de 2.000 € sur ce fondement.

Succombant, la société Hadex sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, mis à disposition au greffe,

CONFIRME en toutes ses dispositions l’ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire d’Alençon du 25 mai 2022 et l’ordonnance rectificative d’une omission de statuer du juge des référés de ce même tribunal du 22 juin 2022,

Y ajoutant,

DÉBOUTE la SARL Hadex de sa demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SARL Hadex à payer à payer au GFA de Magdeleine et à Madame [R] [C] [B] unis d’intérêts, la somme de 2.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SARL Hadex aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

M. COLLET G. GUIGUESSON

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x